Numéro 4 - Avril 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 4 - Avril 2019

PROCEDURE CIVILE

2e Civ., 11 avril 2019, n° 17-31.785, (P)

Cassation sans renvoi

Demande – Objet – Détermination – Prétentions respectives des parties – Moyens fondant les prétentions – Enonciation – Obligations des parties – Etendue

Demande – Objet – Détermination – Prétentions respectives des parties – Moyens fondant les prétentions – Enonciation – Moment – Portée

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1351, devenu 1355, du code civil ;

Attendu qu'il incombe au demandeur, avant qu'il ne soit statué sur sa demande, d'exposer l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci ; qu'il s'ensuit que, dans une même instance, une prétention rejetée ne peut être présentée à nouveau sur un autre fondement ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que A... P... et son épouse, S... D..., ont consenti les 15 et 21 juin 2007 à M. I..., petit-fils de S... D..., une promesse synallagmatique de vente portant sur un immeuble ; que, dans l'attente de la régularisation de l'acte authentique, les vendeurs ont donné l'immeuble à bail à M. et Mme I... ; que A... P... étant décédé le [...], la régularisation de l'acte n'est pas intervenue ; que S... D... a fait signifier le 5 octobre 2009 à M. et Mme I... un congé pour vente à effet du 31 août 2010 ; qu'elle est décédée le [...] ; que les locataires ont alors fait assigner les deux enfants de A... P..., H... et G... P..., pour obtenir la nullité du congé pour insanité d'esprit ; que, par un jugement du 12 décembre 2011, le tribunal d'instance de Beauvais a déclaré cette demande irrecevable, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Beauvais pour apprécier la validité de la promesse et a sursis à statuer sur la validité du congé ; que, par un jugement du 4 mars 2013, confirmé par un arrêt du 11 septembre 2014, le tribunal de grande instance de Beauvais a déclaré la promesse de vente nulle pour insanité d'esprit ; que, par jugement du 7 décembre 2015, le tribunal d'instance de Beauvais a déclaré M. et Mme I... irrecevables à contester la validité du congé, a dit ce congé régulier et a ordonné l'expulsion des locataires en fixant une indemnité d'occupation ; que M. et Mme I... ont relevé appel de ce jugement ;

Attendu que, pour déclarer recevable l'action en nullité du congé délivré par la bailleresse à M. et Mme I... et dire nul et de nul effet le congé avec offre de vente délivré le 5 octobre 2009 par S... D... à M. et Mme I..., l'arrêt énonce qu'il résulte du jugement du 12 décembre 2011 que la demande de nullité du congé était fondée sur l'insanité d'esprit de son auteur et donc sur l'article 414-1 du code civil, que l'irrecevabilité n'a été prononcée qu'en application de l'article 414-2 selon lequel après la mort de l'auteur de l'acte, seuls ses héritiers disposent de l'action en nullité, alors que la présente demande ayant pour objet la nullité du congé pour vente est fondée sur une irrégularité de l'acte en lui-même liée à sa nature, qu'il ne s'agit plus de trancher la question du trouble mental ayant affecté l'auteur de l'acte mais de s'interroger sur les personnes dont le consentement était nécessaire à la validité de l'acte et en déduit qu'il s'agit bien d'une autre cause d'irrecevabilité non tranchée précédemment et non d'un simple moyen nouveau, de sorte que l'autorité de la chose jugée ne saurait être opposée à M. et Mme I... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le tribunal d'instance de Beauvais avait, dans le dispositif de son jugement du 12 décembre 2011, déclaré M. et Mme I... irrecevables en leur demande tendant à voir déclarer nul et de nul effet le congé donné par S... D..., ce dont il résultait qu'ils n'étaient pas recevables à faire juger à nouveau cette prétention par la présentation d'un nouveau moyen, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DECLARE IRRECEVABLE la demande de M. et Mme I... en nullité du congé du 5 octobre 2009.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. Sommer - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Marlange et de La Burgade ; SCP Sevaux et Mathonnet -

Textes visés :

Article 1351, devenu 1355, du code civil.

Rapprochement(s) :

Ass. plén., 7 juillet 2006, pourvoi n° 04-10.672, Bull. 2006, Ass. plén., n° 8 (rejet).

1re Civ., 10 avril 2019, n° 17-13.307, (P)

Cassation

Droits de la défense – Principe de la contradiction – Application – Procédure européenne de règlement des petits litiges – Nouvelles prétentions, nouveaux moyens ou nouvelles pièces – Transmission à la partie adverse – Nécessité

Attendu, selon le jugement attaqué, que M. M... a réservé en ligne un véhicule de location auprès de la société Goldcar Spain SLU, dite Goldcar Rental (la société), la prise en main étant prévue le 13 avril 2016, à l'aéroport de Tenerife (Espagne) ; qu'au comptoir de la société, M. M... a conclu une assurance complémentaire pour prendre possession du véhicule ; que, soutenant qu'il avait été contraint de souscrire inutilement cette assurance, il a, en application de la procédure européenne de règlement des petits litiges, saisi un tribunal d'instance aux fins de voir condamner la société à lui rembourser le montant de l'assurance complémentaire et à lui payer une certaine somme au titre des frais de procédure ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 16 du code de procédure civile, ensemble l'article 19 du règlement (CE) n° 861/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges ;

Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que, lorsqu'il applique la procédure européenne de règlement des petits litiges, le juge est tenu de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il s'ensuit que, si, répondant à une demande reconventionnelle sur le fondement de l'article 5.6 du règlement précité, l'auteur de la saisine formule de nouvelles prétentions, développe de nouveaux moyens ou produit de nouvelles pièces, il appartient au juge qui envisage de prendre en considération de tels éléments d'en assurer la transmission préalable à la partie adverse ;

Attendu que le jugement accueille les demandes de M. M..., après avoir relevé que, dans ses écritures en réponse à celles de la société, celui-ci avait formulé une demande nouvelle, développé des moyens nouveaux et produit des pièces complémentaires ;

Qu'en statuant ainsi, sans avoir préalablement transmis ces éléments à la société, le tribunal a violé les textes susvisés ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article L. 120-1, devenu L. 121-1 du code de la consommation, tel qu'interprété à la lumière de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur ;

Attendu que, pour retenir l'existence d'une pratique commerciale déloyale, le jugement relève les imprécisions du bon de réservation et du contrat de location sur la nécessité de verser un dépôt de garantie, sur le caractère obligatoire de l'assurance complémentaire en cas de renonciation à ce dépôt et sur la possibilité de choix offerte au client entre le versement d'un dépôt de garantie et la souscription d'une assurance complémentaire ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans expliquer, comme il le lui incombait, en quoi ces documents n'étaient pas de nature à éclairer un consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 1382, devenu 1240 du code civil, ensemble l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que le jugement condamne la société à payer une certaine somme à M. M... à titre de dommages-intérêts, en retenant qu'une telle somme lui est allouée en réparation du préjudice lié aux tracas et frais occasionnés par la procédure qu'il a dû engager pour faire valoir ses droits ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les frais non compris dans les dépens ne constituent pas un préjudice réparable et ne peuvent être remboursés que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, le tribunal a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 19 octobre 2016, entre les parties, par le tribunal d'instance du Havre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Rouen.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : M. Vitse - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Bénabent ; SCP Bouzidi et Bouhanna -

Textes visés :

Article 16 du code de procédure civile ; article 19 du règlement n° 861/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 ; directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 ; article L. 120-1, devenu L. 121-1, du code de la consommation ; article 1382, devenu 1240, du code civil ; article 700 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 8 juillet 2004, pourvoi n° 03-15.155, Bull. 2004, II, n° 365 (cassation).

Com., 3 avril 2019, n° 17-27.529, (P)

Cassation partielle

Instance – Interruption – Redressement et liquidation judiciaires – Jugement d'ouverture postérieur aux débats – Effet

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société LR Consulting a été mise en liquidation judiciaire le 23 septembre 2013, Mme P... étant nommée liquidateur ; que la société Angel Enterprise (la société Angel) et M. F..., qui détient des participations dans cette dernière, ont déposé une requête en revendication portant sur deux véhicules de marque Ferrari, type GT2 ; que cette requête a été rejetée par une ordonnance du juge-commissaire rendue le 20 février 2015 ; que la société Angel a déposé une requête en revendication portant sur un troisième véhicule de marque Ferrari, type Telaio, requête qui a été rejetée par une ordonnance du juge-commissaire rendue le 25 mars 2015 ; que M. F... et la société Angel ont formé un recours contre ces deux ordonnances, en soutenant notamment qu'un jugement rendu par le juge de l'exécution le 8 octobre 2013 avait reconnu la propriété de la société Angel sur le véhicule Ferrari, type Telaio ; que la société Springbox Concept, représentée par son liquidateur, la société O..., est intervenue volontairement à l'instance, en tant que détentrice des deux véhicules de type GT2 en vertu d'une saisie judiciairement autorisée ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 371 du code de procédure civile ;

Attendu qu'il résulte de ce texte qu'une instance en cours n'est pas interrompue par l'effet du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire du débiteur, dès lors que ce jugement est prononcé postérieurement à l'ouverture des débats devant le juge du fond saisi de cette instance ;

Attendu que, pour rejeter la requête en revendication déposée par la société Angel concernant le véhicule de marque Ferrari, type Telaio, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que la décision du juge de l'exécution de Schiltigheim du 8 octobre 2013 est intervenue postérieurement au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire de la société LR Consulting du 23 septembre 2013, et que, le liquidateur de cette dernière n'ayant pas confirmé ce jugement, celui-ci doit être considéré comme non avenu, en application des articles 369 et 372 du code de procédure civile ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si le jugement de liquidation judiciaire du 23 septembre 2013 avait été rendu après l'ouverture des débats devant le juge de l'exécution, dès lors que, si tel avait été le cas, ce jugement n'aurait pas eu d'effet interruptif de l'instance introduite devant ce juge et la décision de celui-ci, du 8 octobre 2013, à laquelle la société LR Consulting était partie et qui avait reconnu le droit de propriété de la société Angel sur le véhicule de marque Ferrari, type Telaio, aurait été opposable au liquidateur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation à intervenir entraîne la cassation par voie de conséquence des dispositions condamnant la société Angel au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce, confirmant le jugement entrepris, il rejette l'opposition formée par la société Angel Enterprise contre l'ordonnance rendue par le juge-commissaire le 25 mars 2015 ayant rejeté sa requête en revendication du véhicule de marque Ferrari, type Telaio, et en ce qu'il condamne la société Angel Enterprise aux dépens et au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 13 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Barbot - Avocat général : Mme Guinamant - Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau -

Textes visés :

Article 371 du code de procédure civile.

2e Civ., 11 avril 2019, n° 18-14.223, (P)

Cassation

Instance – Péremption – Interruption – Acte interruptif – Diligence accomplie par une partie – Exclusion – Cas – Diligences accomplies à l'occasion des opérations d'expertise ordonnées en référé

L'instance en référé prenant fin avec la désignation de l'expert et l'instance au fond n'étant pas la continuation de l'instance en référé, les diligences accomplies à l'occasion des opérations d'expertise, dès lors qu'elles ne font pas partie de l'instance au fond, ne sont pas susceptibles d'interrompre le délai de péremption.

Instance – Instance en référé – Distinction avec l'instance au fond – Portée

Sur le moyen relevé d'office après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu l'article 386 du code de procédure civile ;

Attendu que l'instance en référé prenant fin avec la désignation de l'expert et l'instance au fond n'étant pas la continuation de l'instance en référé, les diligences accomplies à l'occasion des opérations d'expertise, dès lors qu'elles ne font pas partie de l'instance au fond, ne sont pas susceptibles d'interrompre le délai de péremption ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que se plaignant de désordres affectant des biens immobiliers acquis en l'état futur d'achèvement, M. et Mme S... ont, en 2010, assigné la société Inter services réalisations, promoteur-vendeur (la société ISR), devant le juge des référés à fin de désignation d'un expert, puis, devant le tribunal de grande instance, en réparation du préjudice susceptible de résulter de ces désordres, les instances ayant été jointes sous le n° RG 10/15376 ; que dans les deux instances, la société ISR a appelé en garantie l'architecte, la société Archimed, son assureur, la Mutuelle des architectes français, et l'entreprise générale, la société Dumez Méditerranée aux droits de laquelle se trouve la société Travaux du Midi Provence (la société Dumez) ; qu'après rejet de la demande par le juge des référés, l'expertise a été ordonnée par la cour d'appel ; que l'expert ayant déposé son rapport et M. et Mme S... ayant conclu au fond, les sociétés Dumez et ISR ont soulevé la péremption de l'instance principale et de l'instance en garantie ;

Attendu que, pour constater la péremption de l'instance enregistrée sous le n° RG 10/15376 au tribunal de grande instance de Marseille à l'égard de toutes les parties, l'arrêt retient qu'il existe un lien de dépendance direct et nécessaire entre l'instance en référé et l'instance au fond puisque le rapport de l'expert sur les désordres invoqués est une pièce technique incontournable qui a pour but de permettre au juge du fond de statuer sur les demandes des parties, mais que l'assistance, par M. et Mme S..., aux opérations d'expertise, ainsi que la lettre adressée le 28 novembre 2011 par leur conseil à l'expert, ne constituent pas des diligences interruptives du délai de péremption qui a couru du 7 octobre 2011 jusqu'au 7 octobre 2013 ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Kermina - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Lévis ; SCP Boulloche ; SARL Cabinet Briard ; SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois -

2e Civ., 11 avril 2019, n° 17-23.272, (P)

Rejet

Notification – Signification – Signification par un clerc assermenté – Mentions – Nom du clerc significateur – Nécessité (non)

Aucune disposition légale ou réglementaire n'impose que le nom du clerc d'huissier de justice assermenté ayant procédé à la signification d'un acte figure sur celui-ci ; dans le cas d'une telle signification par un clerc assermenté, les dispositions de l'article 7 de la loi du 27 décembre 1923 relative à la suppléance des huissiers blessés et à la création des clercs assermentés, selon lesquelles l'acte à signifier est préalablement signé par l'huissier de justice qui, après la signification, vise les mentions faites par le clerc assermenté, le tout à peine de nullité, permettent d'établir que la diligence a été accomplie par ce dernier.

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 février 2017), que par acte du 24 juillet 2015, M. U... T... a formé opposition à un arrêt de la cour d'appel de Paris, rendu par défaut, à son encontre, au profit de la SCI Aramis ;

Attendu que M. U... T... fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état en ce qu'elle a déclaré irrecevable, motif pris de la tardiveté, l'opposition qu'il a formée, le 24 juillet 2015, à l'encontre de l'arrêt rendu par défaut le 9 avril 2015, alors, selon le moyen :

1°/ que pour assurer la régularité du procès équitable, tous les actes judiciaires et extrajudiciaires doivent, à peine de nullité, être signifiés par huissier de justice ou clerc assermenté et tout acte d'huissier de justice doit se suffire à lui-même et établir sa régularité en indiquant les nom et prénoms de l'huissier de justice et celui du clerc assermenté, et la signature, pour permettre au destinataire et aux juges, en cas de litige, de vérifier qu'il a effectivement qualité pour instrumenter ; qu'en affirmant en l'espèce que le procès-verbal, en date du 19 juin 2015, de signification de l'arrêt du 9 avril 2017 comportait les nom, prénom, demeure et signature de l'huissier de justice, peu important qu'il ne mentionne pas l'identité du clerc significateur, quand seule celle-ci permettait de s'assurer qu'il avait bien reçu régulièrement habilitation de remplacer l'officier ministériel et public dans l'exercice de son monopole légal de signification des actes judiciaires et ainsi leur donner la solennité et la force d'un acte de procédure authentique, la cour d'appel a violé les articles 6 et 7 de la loi du 27 décembre 1923, ensemble l'article 648, alinéa 3, du code de procédure civile et l'article 1 de l'ordonnance 45-2592 du 2 novembre 1945 et l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°/ qu'en cet état, la cour d'appel qui n'a, ni vérifié ni constaté, que la signification de l'arrêt du 9 avril 2017 était intervenue par l'intermédiaire d'une personne légalement autorisée à remplacer l'huissier de justice compétent, tel qu'un clerc assermenté dont la mention du nom était une exigence minimale pour permettre, d'une part au destinataire de s'assurer de la régularité de l'acte et, d'autre part, aux juges, en cas de litige, de garantir celle-ci par un contrôle effectif et in concreto, la cour d'appel, qui s'est abstenue de procéder à cette recherche qui lui était expressément demandée, a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 6 et 7 de la loi du 27 décembre 1923, ensemble l'article 648, alinéa 3, du code de procédure civile et l'article 1er de l'ordonnance 45-2592 du 2 novembre 1945 et l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'impose que le nom du clerc d'huissier de justice assermenté ayant procédé à la signification d'un acte figure sur celui-ci ; qu'en cas de signification par un clerc assermenté, les dispositions de l'article 7 de la loi du 23 septembre 1923 relative à la suppléance des huissiers blessés et à la création des clercs assermentés, selon lesquelles l'acte à signifier est préalablement signé par l'huissier de justice qui, après la signification, vise les mentions faites par le clerc assermenté, le tout à peine de nullité, permettent d'établir que la diligence a été accomplie par ce dernier ;

Et attendu qu'ayant relevé que la SCI Aramis justifiait avoir fait signifier à M. U... T... l'arrêt rendu entre les parties le 9 avril 2015 par un acte de M. N..., huissier de justice [...], délivré le 19 juin 2015 par procès-verbal de signification à domicile, à l'adresse dont il n'est pas contesté qu'elle constituait bien le domicile du destinataire et que le procès-verbal de signification comportait, conformément aux dispositions de l'article 648 du code de procédure civile, les nom, prénom, demeure et signature de l'huissier de justice, et exactement retenu qu'il importait peu que ce procès-verbal ne mentionne pas l'identité du clerc significateur, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. de Leiris - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire ; SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret -

Textes visés :

Article 7 de la loi du 27 décembre 1923 relative à la suppléance des huissiers blessés et à la création des clercs assermentés.

Rapprochement(s) :

Com., 11 juin 2014, pourvoi n° 13-18.064, Bull. 2014, IV, n° 99 (cassation partielle).

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