Numéro 3 - Mars 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 3 - Mars 2023

REFERE

Com., 22 mars 2023, n° 21-10.808, (B), FS

Cassation partielle sans renvoi

Applications diverses – Contrats de la commande publique – Référé précontractuel – Conclusion du contrat – Portée – Pouvoirs du juge

Si la conclusion du contrat entre l'adjudicateur et l'entreprise sélectionnée met fin aux pouvoirs du juge saisi en matière précontractuelle sur le fondement des articles 2 à 5 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009, elle ne prive, néanmoins, pas d'objet le pourvoi contestant la décision prise par ce juge avant que cette conclusion n'intervienne.

Applications diverses – Contrats de la commande publique – Référé précontractuel – Conclusion du contrat – Portée – Pourvoi en cassation

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée (Lille, 5 janvier 2021), rendue en référé le 24 juin 2020, la société SIA Habitat, qui est une société de gestion d'habitations à loyer modéré, a publié au Journal Officiel de l'Union européenne un avis d'appel public à la concurrence relatif au renouvellement du marché de « vérification préventive et maintenance corrective des équipements de prévention et de sécurité incendie », pour le renouveler à partir du 1er janvier 2021.

2. Quatre offres ont été déposées, parmi lesquelles celle de la société Sopro, précédente attributaire du marché.

3. Le 4 novembre 2020, la société SIA Habitat a informé la société Sopro, que la commission d'appel d'offres, tenue le même jour, n'avait pas retenu son offre et que le marché avait été attribué à la société Sorehal.

4. Soutenant que la société Sorehal avait mis en oeuvre à son égard des actes de concurrence déloyale en se prévalant de personnels qui ne figuraient pas parmi ses employés et par le débauchage de certains de ses salariés, la société Sopro a assigné la société SIA Habitat selon les formes prévues à l'article 1441-1 du code de procédure civile et sur le fondement des articles 2 et 5 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009, afin qu'il lui soit fait défense de poursuivre la signature du contrat avec la société Sorehal et que l'annulation de l'attribution du marché soit prononcée.

Non-lieu à statuer soutenu par la défense

5. La société SIA soutient que la signature du marché étant intervenue à la suite de l'ordonnance, le pourvoi est sans objet et qu'il convient de prononcer un non-lieu à statuer.

6. Cependant, si cette circonstance met fin aux pouvoirs du juge saisi en matière précontractuelle, elle ne prive pas d'objet le pourvoi contestant la décision prise par celui-ci avant que cette signature n'intervienne.

7. Il y a donc lieu de statuer sur le pourvoi.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. La société Sopro fait grief à l'ordonnance de rejeter ses demandes contre la société SIA Habitat en raison de l'attribution d'un marché à la société Sorehal, alors « que le juge des référés précontractuels doit s'assurer du respect du principe d'égalité de traitement entre les candidats ; que la prise en compte par le pouvoir adjudicateur de renseignements erronés relatifs aux capacités professionnelles, techniques et financières d'un candidat est susceptible de fausser l'appréciation portée sur les mérites de cette candidature au détriment des autres candidatures et ainsi de porter atteinte au principe d'égalité de traitement entre les candidats ; qu'en l'espèce, la société Sopro faisait valoir que la société Sorehal, qui avait obtenu le marché, avait présenté une situation fausse et avait cherché à tromper la société SIA Habitat, pouvoir adjudicateur, quant à ses ressources humaines réelles ; qu'à l'appui de ce moyen, elle produisait aux débats le registre d'entrées et sorties du personnel de la société Sorehal et le rapport d'analyse des offres, dont la comparaison faisait ressortir que la société Sorehal avait mentionné dans son offre de nombreux salariés qui n'étaient en réalité pas inscrits à son registre du personnel, à savoir Mme [S] et MM. [O], [B], [C], [F], [U], [N], [W], [H], [K], [E], [Z], [J], [M], [A], [Y], [P], [T] et [L] ; qu'en se bornant à retenir qu'il n'était pas démontré que la société SIA Habitat ait été informé des prétendues pratiques de concurrence déloyale de la société Sorehal, ni même qu'elle n'aurait pas procédé aux vérifications suffisantes, quand il appartenait au juge du référé précontractuel de vérifier lui-même, au vu des preuves produites devant lui, que le pouvoir adjudicateur n'avait pas pris en compte des renseignements erronés relatifs aux ressources humaines, et donc aux capacités professionnelles, du candidat retenu, susceptible de caractériser une atteinte au principe d'égalité de traitement entre les candidats, le juge des référés précontractuels a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 et de l'article 1441-1 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 2 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 :

9. Ce texte dispose :

« En cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par des pouvoirs adjudicateurs des contrats de droit privé ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation, les personnes ayant intérêt à conclure l'un de ces contrats et susceptibles d'être lésées par ce manquement peuvent saisir le juge avant la conclusion du contrat.

La demande est portée devant la juridiction judiciaire. »

10. Il résulte de ce texte qu'il appartient au juge précontractuel de rechercher si l'entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente.

La prise en compte, par un acheteur public, de renseignements erronés relatifs aux ressources humaines et donc aux capacités professionnelles du candidat retenu, qui conditionnent la recevabilité de son offre, est de nature à caractériser une atteinte au principe d'égalité de traitement entre les candidats.

11. Pour rejeter les demandes de la société Sopro, l'ordonnance retient qu'elle ne démontrait pas que la société SIA Habitat ait été informée des prétendues pratiques de « concurrence déloyale », ni même qu'elle n'aurait pas procédé aux vérifications suffisantes auxquelles elle pouvait être tenue lors de la passation du marché et manqué aux obligations de mise en concurrence lui incombant.

12. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il y était invité, si le pouvoir adjudicateur n'avait pas pris en compte des renseignements erronés relatifs aux ressources humaines et donc aux capacités professionnelles du candidat retenu, lesquelles, conditionnant la recevabilité de son offre, étaient de nature à caractériser une atteinte au principe d'égalité de traitement entre les candidats, le juge n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

13. La société Sopro fait le même grief à l'ordonnance, alors « que peut saisir le juge des référés précontractuels l'entreprise qui se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une autre entreprise ; que le choix de l'offre d'un candidat irrégulièrement retenu est susceptible d'avoir lésé le candidat qui invoque ce manquement ; qu'en l'espèce, il était constant que la société Sopro avait candidaté, dans le délai de remise des offres, au marché litigieux ; qu'en affirmant néanmoins que la société Sopro ne justifiait pas que le manquement, résultant selon elle du comportement déloyal de la société Sorehal, avait pu entraîner une lésion, le juge des référés précontractuels a violé l'article 2 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 et de l'article 1441-1 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 2 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 :

14. Pour rejeter les demandes de la société Sopro, l'ordonnance retient que celle-ci n'établissait pas que le manquement résultant, selon elle, du comportement déloyal de la société Sorehal, à le supposer établi, ait pu entraîner une lésion pour elle.

15. En statuant ainsi, par voie d'affirmation, alors qu'il aurait dû rechercher si le choix de l'offre d'un candidat retenu au regard d'informations éventuellement trompeuses sur ses capacités à réaliser le marché était de nature à léser le candidat concurrent qui invoquait ce manquement, le juge a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

16. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

17. Le contrat ayant été conclu, il n'y a plus lieu à référé précontractuel et la cassation n'implique donc pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle rejette l'exception de nullité de l'assignation, l'ordonnance rendue le 5 janvier 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Lille ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : Mme Michel-Amsellem - Avocat général : M. Debacq - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre -

Textes visés :

Articles 2 à 5 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009.

Rapprochement(s) :

Sur la portée de la signature d'un contrat de commande publique sur la procédure de référé précontractuel, à rapprocher : Com., 10 juillet 2009, pourvoi n° 09-13.871, Bull. 2009, IV, n° 107 (cassation sans renvoi).

1re Civ., 1 mars 2023, n° 22-15.445, (B), FS

Cassation partielle

Compétence – Applications diverses – Existence d'une clause d'arbitrage – Conditions – Urgence – Moment – Détermination

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 3 février 2022), par un contrat stipulant une clause compromissoire, la société tchèque Doosan Infracore Europe s.r.o. (la société Doosan) a confié à la société française Acierinox matériel (la société Acierinox) la distribution exclusive de ses produits dans la région Normandie jusqu'au 31 décembre 2022.

2. Invoquant des manquements de la société Doosan à ses obligations ainsi qu'une résiliation fautive du contrat, la société Acierinox a assigné sa cocontractante devant le président d'un tribunal de commerce afin qu'il lui fasse défense de collaborer avec une société tierce, qu'il lui ordonne la production de pièces et qu'il la condamne au paiement d'une provision à valoir sur la réparation de son préjudice.

3. La société Doosan a soulevé une exception d'incompétence.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses trois premières branches

Enoncé du moyen

4. La société Doosan fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception d'incompétence matérielle, alors :

« 1°/ que seule une mesure destinée à maintenir une situation de fait ou de droit afin de sauvegarder les droits dont la reconnaissance est par ailleurs demandée au juge du fond, en conservant des preuves menacées de disparition, peut être qualifiée de mesure provisoire ou conservatoire au sens de l'article 35 du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale ; que, pour retenir la compétence des juridictions françaises, la cour d'appel a énoncé que la demande de communication de documents doit « s'analyser comme étant une mesure d'instruction fondée sur les dispositions de l'article 145 du code de procédure civile [...] et elle est admissible dès que le demandeur justifie d'un intérêt légitime avant tout procès sans que la condition tenant à l'urgence soit exigée » ; qu'en statuant ainsi, par la voie d'une affirmation générale, sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette mesure, qui visait à obtenir la communication de documents en possession des parties adverses, avait pour objet de prémunir la société Acierinox contre un risque de dépérissement d'éléments de preuve dont la conservation pouvait commander la solution du litige, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 35 du règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 et 145 du code de procédure civile ;

2°/ que seule une mesure destinée à maintenir une situation de fait ou de droit afin de sauvegarder les droits dont la reconnaissance est par ailleurs demandée au juge du fond, en conservant des preuves menacées de disparition, peut être qualifiée de mesure provisoire ou conservatoire au sens de l'article 35 du Règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale ; que, pour retenir la compétence des juridictions françaises, la cour d'appel a énoncé que la demande d'interdiction de collaboration entre la société Doosan et la société Sofemat tant que le contrat litigieux sera en cours de validité et jusqu'au 31 décembre 2021 « constitue une mesure de remise en état qui a toujours été assimilée à une mesure conservatoire » ; qu'en statuant ainsi, par la voie d'une affirmation générale, sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette mesure était destinée à maintenir une situation de fait ou de droit afin de sauvegarder les droits de la société Acierinox dont la reconnaissance est par ailleurs demandée au juge du fond, alors même que le contrat avait pris fin le 31 décembre 2021, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 35 du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 ;

3°/ que seule une mesure destinée à maintenir une situation de fait ou de droit afin de sauvegarder les droits dont la reconnaissance est par ailleurs demandée au juge du fond, en conservant des preuves menacées de disparition, peut être qualifiée de mesure provisoire ou conservatoire au sens de l'article 35 du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale ; qu'en application de ce texte, le paiement à titre de provision d'une contre-prestation contractuelle ne constitue pas une mesure provisoire, à moins que, d'une part, le remboursement au défendeur de la somme allouée soit garanti dans l'hypothèse où le demandeur n'obtiendrait pas gain de cause au fond de l'affaire et, d'autre part, la mesure sollicitée ne porte que sur des avoirs déterminés du défendeur se situant, ou devant se situer, dans la sphère de la compétence territoriale du juge saisi ; que, pour retenir la compétence des juridictions françaises, la cour d'appel a énoncé que la demande de provision « a toujours constitué une mesure provisoire qu'il appartient au juge saisi d'assortir éventuellement de garanties permettant la restitution de sommes accordées en cas d'infirmation » ; qu'en statuant ainsi, par la voie d'une affirmation générale, sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette mesure pouvait être exécutée en France, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 35 du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012. »

Réponse de la Cour

5. La société Doosan ayant soutenu, dans ses conclusions d'appel, que le juge des référés n'était pas compétent, dès lors que les demandes formées par la société Acierinox ne constituaient pas des mesures provisoires ou conservatoires au sens de l'article 1449 du code de procédure civile, sans invoquer l'article 35 du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, la cour d'appel n'avait pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche, en tant qu'il est dirigé contre le rejet de l'exception d'incompétence à l'égard de la demande de production de pièces

Enoncé du moyen

7. La société Doosan fait le même grief à l'arrêt, alors « que tant en première instance qu'en appel, le juge des référés doit se placer, pour apprécier l'urgence attributive de sa compétence, à la date à laquelle il rend sa décision ; que, pour caractériser l'urgence, la cour d'appel a énoncé que « cette urgence doit s'apprécier au moment où le premier juge a statué » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1449 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 978 du code de procédure civile :

8. A peine d'être déclaré d'office irrecevable, un moyen ou un élément de moyen doit préciser : le cas d'ouverture invoqué, la partie critiquée de la décision, ce en quoi celle-ci encourt le reproche allégué.

9. Le grief, qui porte sur les modalités d'appréciation de l'urgence, n'est pas dirigé contre le chef du dispositif de l'arrêt qui rejette l'exception d'incompétence à l'égard de la demande de production de pièce fondée sur l'article 145 du code de procédure civile, dont la mise en oeuvre n'est pas subordonnée à une telle condition par l'article 1449 du même code auquel renvoie l'article 1506, 1, en matière d'arbitrage international.

10. Ne satisfaisant pas aux exigences du texte susvisé, le grief est irrecevable.

Mais sur le moyen, pris en sa quatrième branche, en tant qu'il est dirigé contre le rejet de l'exception d'incompétence à l'égard de la demande de provision et de la demande d'interdiction de collaboration avec une société tierce

Enoncé du moyen

11. La société Doosan fait le même grief à l'arrêt, alors « que tant en première instance qu'en appel, le juge des référés doit se placer, pour apprécier l'urgence attributive de sa compétence, à la date à laquelle il rend sa décision ; que, pour caractériser l'urgence, la cour d'appel a énoncé que « cette urgence doit s'apprécier au moment où le premier juge a statué » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1449 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1449 et 1506 du code de procédure civile :

12. Selon le premier de ces textes auquel renvoie le second, applicable en matière d'arbitrage international, l'existence d'une convention d'arbitrage ne fait pas obstacle, tant que le tribunal arbitral n'est pas constitué, à ce qu'une partie saisisse une juridiction de l'Etat aux fins d'obtenir une mesure d'instruction ou une mesure provisoire ou conservatoire. Sous réserve des dispositions régissant les saisies conservatoires et les sûretés judiciaires, la demande est portée devant le président du tribunal judiciaire ou de commerce, qui statue sur les mesures d'instruction dans les conditions prévues à l'article 145 et, en cas d'urgence, sur les mesures provisoires ou conservatoires sollicitées par les parties à la convention d'arbitrage.

13. Il résulte de ces textes qu'en appel comme en première instance, le juge doit, pour apprécier l'urgence attributive de sa compétence, se placer à la date à laquelle il statue.

14. Pour dire que le président du tribunal de commerce était matériellement compétent pour connaître des demandes tendant au prononcé de mesures provisoires ou conservatoires, l'arrêt énonce qu'en application de l'article 1449 du code de procédure civile, il appartient à la société Acierinox de démontrer l'existence de l'urgence s'agissant des mesures d'interdiction et de provision et que cette urgence doit s'apprécier au moment où le premier juge a statué.

15. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare le président du tribunal de commerce matériellement compétent pour connaître des demandes formées par la société Acierinox matériel tendant à la communication d'une liste certifiée des matériels vendus en Basse-Normandie par la société Sofemat et la société Doosan Infracore Europe SRO pour la période du 1er janvier au 1er juin 2021, l'arrêt rendu le 3 février 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Robin-Raschel - Avocat général : Mme Cazaux-Charles - Avocat(s) : SCP Bénabent ; SARL Ortscheidt -

Textes visés :

Articles 1449 et 1506 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 21 octobre 1997, pourvoi n° 95-18.561, Bull. 1997, I, n° 286 (cassation).

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