Numéro 3 - Mars 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 3 - Mars 2023

ACQUIESCEMENT

2e Civ., 23 mars 2023, n° 21-20.289, (B), FRH

Cassation

Conditions – Intention non équivoque d'acquiescer – Définition – Exécution volontaire des condamnations mêmes non exécutoires – Exclusion

Il résulte des articles 409 et 410 du code de procédure civile que si l'acquiescement peut être exprès ou implicite, il doit toujours être certain. Il doit résulter d'actes ou de faits démontrant sans équivoque l'intention de la partie à laquelle on l'oppose.

La seule exécution d'une décision d'un premier juge ne pouvant, en elle-même, valoir acquiescement, doit, en conséquence, être censuré l'arrêt d'une cour d'appel ayant retenu, pour constater la volonté d'acquiescer manifestée par la société et déclarer l'appel irrecevable, que la société a, non seulement, payé les condamnations exécutoires prononcées à son encontre par le jugement, mais aussi celles, non susceptibles d'exécution provisoire, correspondant aux dépens et à l'indemnité de procédure.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 8 juin 2021), M. [M] est propriétaire des lots numéros 10 et 20 d'un immeuble situé à [Localité 4], édifié sur la parcelle cadastrée [Cadastre 3] d'une superficie de 264 m².

2. Le maire de [Localité 4] a pris un arrêté de péril imminent le 11 mars 2010 et ordonné l'évacuation immédiate de cet immeuble.

3. Par arrêté du 15 novembre 2013, le préfet des [Localité 6] a déclaré d'utilité publique l'opération d'aménagement de la Zone d'aménagement concerté « [Localité 5] » au profit de la société SEM 92, aux droits de laquelle est venue la société Citallios (la société), par arrêté du 28 septembre 2016 et déclaré cessibles les parcelles de terrain nécessaires à la réalisation de ce projet, suivant arrêté du 9 février 2018.

4. Un tribunal de grande instance a rendu une ordonnance d'expropriation emportant transfert de propriété, le 12 novembre 2018, au profit de la société.

5. Cette dernière a saisi, à fin de fixation de l'indemnité de dépossession, le juge de l'expropriation, qui, par un jugement du 13 janvier 2020, a fixé l'indemnité due par la société à M. [M] à une certaine somme.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. La société fait grief à l'arrêt de déclarer son appel irrecevable, alors « que l'acquiescement implicite doit, pour être certain, résulter d'actes incompatibles avec la volonté d'exercer un recours et démontrant avec évidence la volonté de celui auquel on l'oppose d'accepter la décision intervenue ; qu'en se fondant, pour en déduire que la société Citallios avait acquiescé au jugement, sur la circonstance qu'elle avait réglé les condamnations principale et accessoires prononcées par le jugement qu'elle avait frappé d'appel, quand l'appel du jugement fixant les indemnités d'expropriation est dépourvu d'effet suspensif, en sorte que la seule exécution de la décision du premier juge ne valait pas acquiescement, la cour d'appel a violé les articles 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 409, 410 du code de procédure civile et R. 311-25 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 409 et 410 du code de procédure civile :

7. Il résulte de ces textes que si l'acquiescement peut être exprès ou implicite, il doit toujours être certain. Il doit résulter d'actes ou de faits démontrant avec évidence et sans équivoque l'intention de la partie à laquelle on l'oppose.

8. Pour constater la volonté d'acquiescer manifestée par la société et déclarer l'appel irrecevable, l'arrêt retient que la société a non seulement payé les condamnations exécutoires prononcées à son encontre par le jugement, mais aussi celles, non susceptibles d'exécution provisoire, correspondant aux dépens et à l'indemnité de procédure.

9. En statuant ainsi, alors que la seule exécution de cette décision du premier juge ne pouvait valoir acquiescement, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Bonnet - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret -

Textes visés :

Articles 409 et 410 du code de procédure civile.

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