Numéro 3 - Mars 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 3 - Mars 2022

ARCHITECTE ENTREPRENEUR

3e Civ., 2 mars 2022, n° 20-16.787, (B), FS

Cassation partielle

Réception de l'ouvrage – Réception expresse – Effets – Réception tacite antérieure – Recherche nécessaire (non)

Sauf s'il y a fraude de la part du maître de l'ouvrage, en présence d'une réception expresse, il ne peut être demandé au juge de rechercher l'existence d'une réception tacite antérieure.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 12 décembre 2019), la société Sirius Vendôme, aux droits de laquelle vient la société International Design And Licensing (la société IDEAL), a, selon un marché du 16 juillet 2012, confié l'exécution des travaux d'aménagements de deux boutiques à la société Les ateliers du marais.

2. La société Banque populaire atlantique, devenue la société Banque populaire du Grand Ouest (la banque), a cautionné la société Les ateliers du marais au titre de la retenue de garantie applicable à ce marché.

3. La société Les ateliers du marais a été mise en liquidation judiciaire le 19 mars 2014.

4. La société Sirius Vendôme a assigné la banque en paiement des sommes dues par l'entrepreneur.

La banque a soulevé l'irrecevabilité de cette demande, au motif qu'elle avait été formée plus d'un an après la réception de l'ouvrage.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

5. La chambre commerciale de la Cour de cassation a délibéré sur ce grief, sur l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats à l'audience publique du 7 septembre 2021 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Barbot, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre.

Enoncé du moyen

6. La société IDEAL fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes formées contre la banque, alors « que les actes accomplis au mépris de la règle du dessaisissement qui frappe le débiteur dont la liquidation judiciaire a été prononcée ne sont pas nuls, mais inopposables à la procédure collective, et que l'inopposabilité qui sanctionne cette règle édictée dans l'intérêt des créanciers ne peut être invoquée que par le liquidateur ; qu'en retenant néanmoins que le procès-verbal de réception établi le 19 septembre 2014, le jour même du jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société Ateliers du Marais, devait « être écarté », aux motifs que ce jugement avait « dessaisi la société Ateliers du Marais au profit du mandataire liquidateur » et que « son directeur général n'était plus habilité à signer quelque document que ce soit en son nom », quand le dessaisissement n'affectait pas la validité de la réception intervenue entre les parties le 19 septembre 2014 et que l'inopposabilité de cet acte ne pouvait être invoquée par la BPGO, la cour d'appel a violé l'article L. 641-9 du code de commerce. » 

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 641-9 du code de commerce :

7. La règle du dessaisissement étant édictée dans l'intérêt des créanciers, seul le liquidateur peut se prévaloir de l'inopposabilité d'un acte juridique accompli par le débiteur au mépris de cette règle, à condition que l'acte concerne les droits et actions inhérents à l'administration et à la disposition des biens dont le débiteur est dessaisi par l'effet du jugement de liquidation judiciaire, les actes conservatoires échappant à ce dessaisissement.

8. Pour écarter le procès-verbal de réception du 19 mars 2014 invoqué par la société IDEAL comme constituant la date de la réception des travaux déterminant le point de départ du délai d'un an stipulé dans le cautionnement, et déclarer, en conséquence, irrecevable sa demande formée contre la banque, l'arrêt retient que ce procès-verbal a été établi le jour même du jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société Les ateliers du marais et que, ce jugement ayant dessaisi cette dernière au profit du liquidateur, son directeur général n'était plus habilité à signer quelque document que ce soit en son nom.

9. En statuant ainsi, alors que, le procès-verbal de réception de travaux ne constituant pas, en raison des conséquences qui s'y attachent, un simple acte conservatoire, seul le liquidateur de la société Les ateliers du marais était recevable à se prévaloir de l'inopposabilité du procès-verbal signé par cette société, dessaisie par l'effet de sa mise en liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquence de la cassation

10. La cassation prononcée sur la deuxième branche du moyen dispense de statuer sur les quatre dernières branches, dès lors que, sauf s'il y a fraude de la part du maître de l'ouvrage, en présence d'une réception expresse, il ne peut être demandé au juge de rechercher l'existence d'une réception tacite antérieure.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes formées par la société International Design And Licensing (IDEAL) contre la société Banque populaire du Grand Ouest, l'arrêt rendu le 12 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : Mme Teiller - Rapporteur : M. Maunand - Avocat général : M. Burgaud - Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Article L. 641-9 du code de commerce.

3e Civ., 16 mars 2022, n° 20-16.829, (B), FS

Cassation partielle

Réception de l'ouvrage – Réception partielle – Exclusion – Cas

La réception de travaux qui ne constituent pas des tranches indépendantes ou ne forment pas un ensemble cohérent ne vaut pas réception au sens de l'article 1792-6 du code civil.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société Grosset Janin et frères (la société Grosset Janin) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société MAAF assurances.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 18 février 2020), M. et Mme [Z] ont confié à M. [K] la maîtrise d'oeuvre de l'agrandissement d'un hôtel, donné à bail commercial à la société Santé Nat.

3. Ils ont mis fin à la mission de cet architecte après l'obtention d'un permis de construire.

4. Ils ont confié à la société Grosset Janin l'exécution des travaux « hors d'eau hors d'air », ainsi que l'aménagement intérieur, et à la société Trappier Georges les travaux de terrassement et d'enrochement.

5. Les travaux ont été arrêtés en raison d'un problème d'implantation.

6. La société Grosset Janin a chargé M. [G], architecte, d'élaborer un dossier de demande de permis de construire modificatif. Un permis a été obtenu, mais les travaux n'ont pas repris.

7. Se plaignant de désordres et de l'inachèvement des travaux, M. et Mme [Z] et la société Santé Nat ont assigné les constructeurs, ainsi que les sociétés Covea Risks et Gan eurocourtage IARD, recherchées comme assureurs de la société Grosset Janin.

8. Les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles (les sociétés MMA) viennent aux droits de la société Covea Risks.

La société Allianz IARD (la société Allianz) vient aux droits de la société Gan eurocourtage IARD.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal, sur le deuxième moyen, pris en ses deux premières branches, du pourvoi principal, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de condamner la société Grosset Janin au titre de la rampe d'accès et de la perte de valeur de l'immeuble, sur le troisième moyen du pourvoi principal et sur les deux moyens du pourvoi incident, ci-après annexés

9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

10. La société Grosset Janin fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec M. [K] et la société Trappier Georges, à verser à M. et Mme [Z] la somme de 118 149,86 euros en réparation des préjudices résultant des désordres constitués par l'absence de faisabilité de certaines des places de stationnement prévu, l'absence de praticabilité de la rampe d'accès au sous-sol du bâtiment et le caractère enterré de certaines de ses façades, de la condamner à verser à M. et Mme [Z] la somme de 161 424,12 euros en réparation des préjudices résultant des défauts dans l'isolation acoustique du bâtiment, de la condamner à verser à M. et Mme [Z] la somme de 18 100 euros à titre d'indemnisation pour la nécessité de mettre en conformité le permis de construire avec le bâtiment réalisé, de la condamner à verser à M. et Mme [Z] et à la société Santé Nat indivisément la somme de 160 631 euros à titre d'indemnisation pour la perte de nuitées et la perte de clientèle subies, de rejeter sa demande aux fins d'être relevée et garantie des conséquences de ces condamnations par la société Allianz, de dire que les sociétés MMA ne sont pas tenues à garantie et de la condamner à verser à ces deux sociétés la somme de 398 479,54 euros, alors « que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter tout ou partie de l'ouvrage avec ou sans réserves ; qu'elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit, à défaut, judiciairement ; qu'en retenant que la réception partielle intervenue suivant procès-verbal du 15 juillet 2004 n'aurait pu valoir réception au sens de l'article 1792-6 du code civil dès lors qu'elle n'avait pas été effectuée par lots, mais concernait les travaux du rez-de-chaussée et du 1er étage, sans autre précision, quand la réception partielle n'est pas limitée à une réception par lots mais peut concerner tout ensemble cohérent, ce que constituaient précisément les tranches du travaux du rez-de-chaussée et du 1er étage, la cour d'appel a violé l'article 1792-6 du code civil par refus d'application. »

Réponse de la Cour

11. La cour d'appel a relevé que les différents lots confiés à la société Grosset Janin concernaient le gros oeuvre et l'aménagement d'un bâtiment comportant un sous-sol, un rez-de-chaussée et deux étages et que la réception partielle intervenue suivant procès-verbal du 15 juillet 2004, alors que les travaux étaient inachevés, ne portait pas sur une réception par lots mais sur les travaux du rez-de-chaussée et du premier étage, sans plus de précision.

12. La cour d'appel, devant laquelle il n'était pas soutenu que les travaux du rez-de-chaussée et du premier étage constituaient des tranches de travaux indépendantes ou formaient un ensemble cohérent, a pu en déduire que la réception partielle invoquée ne valait pas réception au sens de l'article 1792-6 du code civil.

13. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le quatrième moyen du pourvoi principal, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de condamner la société Grosset Janin au titre des pertes de nuitées

Enoncé du moyen

14. La société Grosset Janin fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à M. et Mme [Z] et à la société Santé Nat indivisément la somme de 95 413 euros à titre d'indemnisation pour la perte de nuitées subie, alors :

« 1°/ que les juges sont tenus de répondre aux moyens qui les saisissent ; qu'en l'espèce, la société Grosset Janin faisait valoir que le décalage du délai de réalisation de l'immeuble, à l'origine de la perte de nuitées était dû, au moins en partie, à la procédure engagée par le voisin à l'encontre des époux [Z] s'agissant de la limite de leur terrain ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire de la société Grosset Janin, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en violation l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que seule peut être indemnisée une perte de chance lorsque lorsqu'est constatée la disparition d'une éventualité favorable ; qu'en évaluant le préjudice tiré de la perte des nuitées et de clientèle comme un préjudice entièrement consommé, quand il ne pouvait consister qu'en une perte de chance de réaliser les gains projetés, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause. »

Réponse de la Cour

15. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile.

16. Il ne résulte pas des conclusions de la société Grosset Janin que celle-ci ait soutenu que le préjudice de perte de nuitées devait s'analyser une perte de chance.

17. Le grief est nouveau, mélangé de fait et de droit.

18. Répondant aux conclusions prétendument délaissées, la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que le préjudice de perte de nuitées résultait uniquement de la mauvaise exécution par la société Grosset Janin du marché n° 2 concernant les aménagements intérieurs, notamment des retards dans la livraison des chambres supplémentaires et des désordres phoniques les affectant et que l'arrêt total des travaux par la société Grosset Janin relevait d'une inexécution fautive du contrat.

19. La cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu en déduire que les fautes de la société Grosset Janin étaient la cause exclusive des dommages.

20. Le moyen, en partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus.

Sur le cinquième moyen du pourvoi principal, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de rejeter les demandes de garantie formées contre la société Allianz au titre des préjudices matériels

Enoncé du moyen

21. La société Grosset Janin fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à être relevée et garantie des conséquences des condamnations au titre des préjudices matériels par la société Allianz, alors :

« 1°/ que le versement des primes qui se situe entre la prise d'effet du contrat d'assurance et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période, et la stipulation de la police selon laquelle le dommage n'est garanti que si la réclamation de la victime a été formulée au cours de la période de validité du contrat est génératrice d'une obligation sans cause et doit être réputée non écrite ; qu'en faisant application, pour dire n'y avoir lieu à la garantie de la Compagnie Allianz, de la clause de la police d'assurance souscrite par la société Grosset Janin selon laquelle seuls étaient garantis les dommages déclarés par l'assuré à l'assureur avant la date de résiliation du contrat, cependant que cette clause devait être réputée non écrite, la cour d'appel a violé les articles 1131 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, L. 124-1 et L. 124-3 du code des assurances ;

2°/ en toute hypothèse, que le juge doit trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'il lui appartient, le cas échéant, de restituer aux faits leur exacte qualification sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; que pour mettre en jeu la garantie de la Compagnie Allianz, la société Grosset Janin exposait que la garantie déclenchée par le fait dommageable (ou fait générateur du dommage) couvrait l'assuré contre les conséquences pécuniaires du sinistre, à partir du moment où le fait dommageable était survenu entre la prise d'effet de la police et sa résiliation, depuis la loi de sécurité financière du 1er août 2003 ; qu'en se bornant à retenir, pour déclarer que la garantie de la compagnie Allianz n'était pas due à la société Grosset Janin, que l'article L. 124-5 du code des assurances, ne s'appliquait qu'aux garanties prenant effet postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 1er août 2003, le 3 novembre 2003, du fait de la souscription d'un nouveau contrat ou de la reconduction de garantie d'un contrat en cours, cependant qu'il appartenait au juge, tenu de statuer sur la validité de la clause selon laquelle seuls étaient garantis les dommages déclarés par l'assuré à l'assureur avant la date de résiliation du contrat, de rechercher si, en application du régime antérieur à l'entrée en vigueur de cette loi, dont il avait constaté qu'il était seul applicable au contrat, cette clause était valable, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile, ensemble les articles 1131 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, L. 124-1 et L. 124-3du code des assurances. »

Réponse de la Cour

22. La cour d'appel a relevé que les conditions générales afférentes à la responsabilité civile exploitation ne prévoyaient aucune garantie du coût des travaux nécessaires pour remédier aux désordres pouvant affecter les biens du fait de malfaçons, que la garantie pour l'erreur d'implantation était subordonnée à l'intervention d'un géomètre expert lors du coulage des fondations et à la signature d'un procès-verbal d'implantation, ce qui n'avait pas été le cas en l'espèce, et excluait expressément le coût de reconstruction ou de mise en conformité de l'ouvrage réalisé par l'assuré.

23. Elle en a déduit, à bon droit, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par le moyen, que la garantie de la société Allianz n'était pas due pour les condamnations correspondant à la remise en état de l'ouvrage.

24. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

25. La société Grosset Janin fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec M. [K] et la société Trappier Georges, à verser à M. et Mme [Z] la somme de 118 149,86 euros en réparation des préjudices résultant des désordres constitués par l'absence de faisabilité de certaines des places de stationnement prévues, l'absence de praticabilité de la rampe d'accès au sous-sol du bâtiment et le caractère enterré de certaines de ses façades, alors « qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le préjudice résultant de la réalisation des soutènements périphériques en enrochement et celui de l'impossibilité de réaliser les 9 places de stationnement extérieures en partie Nord Est de la propriété prévues au permis de construire n'étaient pas sans lien avec les manquements reprochés à la société Grosset Janin, dans la mesure où les travaux prévus étaient concrètement impossibles à réaliser et ces coûts, par là même, inévitables, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable aux faits de la cause. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

26. Selon ce texte, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

27. Pour condamner la société Grosset Janin à indemniser M. et Mme [Z] du préjudice lié à l'impossibilité de réaliser les places de stationnement prévues et au coût des travaux d'enrochement supplémentaires, l'arrêt retient que la société Grosset Janin était chargée de la réalisation de l'intégralité de la maçonnerie de la structure et de la couverture du bâtiment, qu'elle a établi les plans d'exécution et avait l'obligation de vérifier la conformité de la construction au permis de construire et à la réglementation de l'urbanisme, qu'elle aurait dû identifier les problèmes d'implantation en planimétrie et en altimétrie et établir un plan « d'implantation ».

28. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les dommages liés à l'impossibilité de réaliser les places de stationnement et au coût des travaux d'enrochement supplémentaires auraient pu être évités si la société Grosset Janin n'avait pas manqué à ses obligations contractuelles, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi principal, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de condamner la société Grosset Janin au titre de la perte de clientèle

Enoncé du moyen

29. La société Grosset Janin fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à M. et Mme [Z] et à la société Santé Nat indivisément la somme de 65 218 euros à titre d'indemnisation pour la perte de clientèle subie, alors « que seule peut être indemnisée une perte de chance lorsque lorsqu'est constatée la disparition d'une éventualité favorable ; qu'en évaluant le préjudice tiré de la perte des nuitées et de clientèle comme un préjudice entièrement consommé, quand il ne pouvait consister qu'en une perte de chance de réaliser les gains projetés, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1147 et 1149 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

30. Selon le premier de ces textes, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

31. Selon le second, les dommages et intérêts dus au créancier sont, sauf exceptions, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé.

32. Pour évaluer le préjudice subi par le maître d'ouvrage et l'exploitant du fait de la perte de clientèle liée au retard de livraison et aux désordres, l'arrêt retient que l'appréciation de ce poste de préjudice qui a été faite par l'expert est fondée sur le taux de marge sur charges variables et que les taux pris en compte par ce technicien correspondent à ceux donnés par la société Grosset Janin dans son dire.

33. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le préjudice subi par le maître d'ouvrage et l'exploitant ne devait pas s'analyser en une perte de chance, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le cinquième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de rejeter les demandes de garantie formées contre la société Allianz au titre des préjudices immatériels

Enoncé du moyen

34. La société Grosset Janin fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à être relevée et garantie des conséquences des condamnations au titre des préjudices immatériels par la société Allianz, alors « que le versement des primes qui se situe entre la prise d'effet du contrat d'assurance et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période, et la stipulation de la police selon laquelle le dommage n'est garanti que si la réclamation de la victime a été formulée au cours de la période de validité du contrat est génératrice d'une obligation sans cause et doit être réputée non écrite ; qu'en faisant application, pour dire n'y avoir lieu à la garantie de la Compagnie Allianz, de la clause de la police d'assurance souscrite par la société Grosset Janin selon laquelle seuls étaient garantis les dommages déclarés par l'assuré à l'assureur avant la date de résiliation du contrat, cependant que cette clause devait être réputée non écrite, la cour d'appel a violé les articles 1131 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, L. 124-1 et L. 124-3 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

35. La société Allianz conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu'il est nouveau, mélangé de fait et de droit et contraire à la position de la société Grosset Janin en appel.

36. Cependant, le moyen est de pur droit, dès lors qu'il ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond.

37. Il n'est pas contraire, par ailleurs, à la position de la société Grosset Janin, qui n'a pas soutenu, même implicitement, que la clause litigieuse du contrat d'assurance devait recevoir application.

38. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 1131 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, et les articles L. 124-1 et L. 124-3 du code des assurances :

39. Il résulte de la combinaison de ces textes que le versement de primes pour la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat d'assurance de responsabilité et son expiration, a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période et que toute clause qui tend à réduire la durée de la garantie de l'assureur à un temps inférieur à la durée de la responsabilité de l'assuré est génératrice d'une obligation sans cause, comme telle illicite et réputée non écrite.

40. Pour rejeter les demandes formées contre la société Allianz, l'arrêt retient que l'article 20 des conditions générales de la police prévoit qu'en cas de résiliation du contrat, sauf pour non-paiement des cotisations, les garanties en cours sont maintenues pour les faits générateurs ou dommages déclarés par l'assuré à l'assureur avant la date de résiliation, et donnant lieu à réclamation présentée à l'assureur dans un délai maximum de deux ans suivant la date d'effet de la résiliation.

41. Il relève que le contrat a été résilié le 31 mars 2003 et que la réclamation, formée en octobre 2008, est postérieure à ce délai de deux ans.

42. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté qu'à la date de l'ouverture du chantier, la société Grosset Janin était assurée auprès de la société CGU courtage, aux droits de laquelle venait la société Allianz, de sorte que le fait dommageable, constitué par l'exécution des travaux défectueux, s'était produit pendant la période de validité du contrat d'assurance, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

43. La cassation prononcée sur la troisième branche du deuxième moyen du pourvoi principal est limitée aux condamnations prononcées du chef des emplacements de stationnement et des travaux d'enrochement, pour un montant de 55 908,80 euros.

44. Elle ne s'étend pas aux condamnations prononcées contre M. [K], qui ne s'est pas associé au moyen, et contre la société Trappier Georges du chef de ces mêmes préjudices.

45. Elle s'étend, en revanche, aux dispositions répartissant la dette entre les co-débiteurs.

Mise hors de cause

46. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause M. [G] et les sociétés MMA, dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Grosset Janin à payer à M. et Mme [Z] la somme de 55 908,80 euros au titre de l'absence de faisabilité de certaines places de stationnement et des travaux d'enrochement, en ce qu'il fixe la contribution des codébiteurs pour cette somme et condamne en tant que de besoin chacun d'entre eux à rembourser aux autres les sommes qu'ils auraient pu verser et qui excéderaient leur part, en ce qu'il condamne la société Grosset Janin et frères à payer à M. et Mme [Z] et la société Santé Nat indivisément la somme de 65 218 euros au titre de la perte de clientèle et en ce qu'il rejette les demandes de garantie formées par la société Grosset Janin et frères contre la société Allianz IARD au titre des condamnations à payer la somme de 16 680 euros pour les sommes dues à la commune au titre des places de stationnement manquantes, la somme de 50 000 euros pour la moins-value de dépréciation, la somme de 160 631 euros pour pertes de nuitées et de clientèle, la somme de 28 916,56 euros pour le différé du début de remboursement d'emprunt, la somme de 4 568,28 euros pour le surcoût de la construction de la cuisine et la somme de 13 570 euros pour les frais de relogement, l'arrêt rendu le 18 février 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Met hors de cause M. [G] et les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : Mme Teiller - Rapporteur : M. Zedda - Avocat(s) : SCP Zribi et Texier ; SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés ; SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre ; SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Article 1792-6 du code civil.

Rapprochement(s) :

3e Civ., 2 février 2017, pourvoi n° 14-19.279, Bull. 2017, III, n° 16 (rejet).

3e Civ., 2 mars 2022, n° 21-10.753, (B), FS

Cassation partielle

Responsabilité – Responsabilité à l'égard du maître de l'ouvrage – Garantie décennale – Action en garantie – Défaut de conformité – Défaut non apparent à la réception de l'ouvrage – Preuve – Charge

Conformément à l'article 1315, alinéa 1, devenu 1353, alinéa 1, du code civil, il incombe au maître ou à l'acquéreur de l'ouvrage qui agit sur le fondement de l'article 1792 du code civil de rapporter la preuve que les conditions d'application de ce texte sont réunies.

Inverse, dès lors, la charge de la preuve, la cour d'appel qui, pour condamner un constructeur, retient que celui-ci ne rapporte pas la preuve du caractère apparent de la non-conformité, au jour de la réception, pour un maître d'ouvrage profane.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société [B] [G] et [U] (la société [B]) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. [D].

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 24 novembre 2020), M. [O] [B] a confié à la société [B] la construction d'un bâtiment à usage professionnel.

3. Le prix des travaux comprenait la souscription d'une assurance dommages-ouvrage pour le compte du maître d'ouvrage.

4. La propriété de l'immeuble a été transférée à la société civile immobilière 2M (la SCI 2M) et les locaux ont ensuite été donnés à bail à la société O spa des sens.

5. M. [B], la SCI 2M et la société O Spa des sens ont assigné la société [B] aux fins d'indemnisation de préjudices résultant de l'absence d'assurance dommages-ouvrage et décennale ainsi que de différentes malfaçons et non-conformités.

Examen des moyens

Sur les deuxième et cinquième moyens du pourvoi principal, ci-après annexés

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

7. La société [B] fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à M. [B] une certaine somme, dont celle de 15 000 euros au titre de l'absence des assurances obligatoires, alors :

« 1°/ que la réfaction du prix a un objet distinct de celui des dommages-intérêts réparant les conséquences dommageables d'un manquement à l'obligation de délivrance ; qu'en allouant à M. [O] [B] la somme de 15 000 euros au motif que, « le prix convenu comprenant la souscription d'une assurance dommages-ouvrage, M. [O] [B] est fondé, en sa qualité de maître de l'ouvrage, à demander en compensation du préjudice subi réfaction du prix à hauteur du coût d'une telle assurance », la cour d'appel a fondé sa décision à la fois sur la réfaction du prix et sur la compensation d'un préjudice lié à un manquement à l'obligation de délivrance et qu'en statuant ainsi, elle a violé les articles 1134 et 1147 anciens du code civil, dans leur rédaction applicable en l'espèce ;

2°/ que le juge ne peut, dans l'état du droit antérieur à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, modifier le prix convenu par les parties ; qu'en fondant la condamnation prononcée à l'encontre de la société [G] et [U] [B] sur la réfaction du prix convenu dans un contrat conclu le 21 avril 2011, la cour d'appel a violé l'article 1134 ancien du code civil, dans sa rédaction applicable en l'espèce ;

3°/ qu'en déclarant, pour allouer à M. [O] [B] la somme de 15 000 euros au titre de l'absence de souscription par la société [G] et [U] [B] d'une assurance dommages-ouvrages, compenser un préjudice subi par M. [O] [B] du fait de cette non-conformité, sans caractériser le préjudice subi par ce dernier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 ancien du code civil, dans sa rédaction applicable en l'espèce. »

Réponse de la Cour

8. Par motifs propres et adoptés, la cour d'appel a relevé que la police d'assurance dommages-ouvrage, dont le coût était compris dans le prix du marché de travaux, n'avait pas été souscrite par le constructeur pour le compte du maître d'ouvrage.

9. Elle a évalué à la somme de 15 000 euros le coût de la souscription d'une telle assurance et alloué cette somme au maître d'ouvrage en réparation de son préjudice.

10. En dépit d'une impropriété de termes, la cour d'appel n'a pas réduit le prix convenu mais a octroyé au maître d'ouvrage des dommages-intérêts pour compenser un préjudice dont elle a souverainement fixé le montant.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le moyen du pourvoi incident éventuel

Enoncé du moyen

12. M. [B] et la SCI 2M font grief à l'arrêt de rejeter leur demande en paiement d'une indemnité à raison du défaut de souscription par la société [B] d'une assurance de responsabilité décennale, alors « que l'absence de souscription d'une assurance obligatoire de responsabilité décennale par un entrepreneur prive le maître de l'ouvrage et les propriétaires successifs du bien de la sécurité procurée par l'assurance en prévision de sinistres et constitue un préjudice certain ; qu'en retenant, pour écarter la demande indemnitaire formée par M. [O] [B], maître de l'ouvrage et la SCI 2M, actuel propriétaire du bien, à raison du défaut de souscription d'une assurance de responsabilité décennale, qu'en l'absence de désordre de gravité décennale survenu à ce jour, le préjudice invoqué n'était qu'éventuel, les juges du fond ont violé l'article L. 241-1 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

13. Dans leurs conclusions d'appel, M. [B] et la SCI 2M réclamaient l'indemnisation d'un préjudice constitué, d'une part, de la dépréciation du bâtiment en cas de vente de l'immeuble dans les dix ans, d'autre part, de l'absence de toutes assurances tant de dommages que de responsabilité, en cas de désordres survenant pendant les dix années suivant la réception.

14. Ils ne réclamaient pas l'indemnisation d'un préjudice moral lié à l'insécurité engendrée par l'absence d'assurance décennale.

15. La cour d'appel, a pu en déduire, en l'absence de vente de l'immeuble et de dommages de nature décennale, que le préjudice invoqué n'était qu'éventuel.

16. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le quatrième moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

17. La société [B] fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à la SCI 2M une certaine somme, dont celle de 608 euros au titre du dysfonctionnement des commandes électriques des volets roulants, alors « que la réception des travaux couvre tout vice ou défaut de conformité apparent qui n'a pas fait l'objet de réserves ; qu'en l'état d'une réception intervenue sans réserve, il appartient donc au maître d'ouvrage de rapporter la preuve de ce que le défaut de conformité qu'il allègue n'était pas apparent le jour de la réception intervenue sans réserve ; qu'en affirmant qu'il incombait à la société [B] [G] et [U] de rapporter la preuve de ce que le vice allégué par le maître d'ouvrage, relatif au fonctionnement des volets roulants, était apparent le jour de la réception intervenue sans réserve, la cour d'appel qui a inversé la charge de la preuve a violé l'article 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

18. Par motifs propres et adoptés, la cour d'appel a retenu que le dysfonctionnement des commandes électriques de volets roulants provenait, à dire d'expert, de l'inadaptation de cet équipement, extrêmement sensible à l'humidité, à un local spa.

19. Les désordres étant apparus à l'usage, elle a pu en déduire, abstraction faite du motif surabondant critiqué par le moyen, que le constructeur en devait réparation.

20. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

21. La société [B] fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à la SCI 2M une certaine somme, dont celle de 6 335 euros au titre de la non-conformité des bois des terrasses extérieures, alors « que la réception des travaux couvre tout vice ou défaut de conformité apparent qui n'a pas fait l'objet de réserves ; qu'en l'état d'une réception intervenue sans réserve, il appartient donc au maître d'ouvrage de rapporter la preuve de ce que le défaut de conformité qu'il allègue n'était pas apparent le jour de la réception intervenue sans réserve ; qu'en affirmant qu'il incombait à la société [B] [G] et [U] de rapporter la preuve de ce que le défaut de conformité relatif au bois des terrasses extérieures était apparent le jour de la réception intervenue sans réserve, la cour d'appel qui a inversé la charge de la preuve a violé l'article 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1315, alinéa 1er, devenu 1353, alinéa 1er, du code civil :

22. Selon ce texte, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

23. Il s'ensuit qu'il incombe au maître ou à l'acquéreur de l'ouvrage qui agit sur le fondement de l'article 1792 du code civil de rapporter la preuve que les conditions d'application de ce texte sont réunies (3e Civ., 7 juillet 2004, pourvoi n° 03-14.166, Bull., 2004, III, n° 142).

24. Pour condamner la société [B] à payer une certaine somme au titre de la non-conformité du bois de la terrasse, l'arrêt retient que l'entrepreneur ne rapporte pas la preuve du caractère apparent de cette non-conformité pour un maître d'ouvrage profane au jour de la réception.

25. En statuant ainsi, alors qu'il incombait à la SCI 2M, qui réclamait l'indemnisation d'une non-conformité n'ayant pas fait l'objet d'une réserve lors de la réception, de prouver qu'elle n'était pas apparente à cette date pour le maître d'ouvrage, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

26. La cassation prononcée sur le troisième moyen du pourvoi principal est limitée à la condamnation de la société [B] à payer à la SCI 2M la somme de 6 335 euros au titre de la non-conformité des bois des terrasses extérieures et ne s'étend pas aux autres sommes comprises dans la condamnation globale.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que qu'il condamne la société [B] [G] et [U] à payer à la société civile immobilière 2M la somme de 6 335 euros au titre de la non-conformité des bois des terrasses extérieures comprise dans la condamnation globale au paiement de la somme de 52 062,37 euros, l'arrêt rendu le 24 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Pau autrement composée.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : Mme Teiller - Rapporteur : M. Maunand - Avocat général : M. Burgaud - Avocat(s) : Me Balat ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article 1315, alinéa 1, devenu 1353, alinéa 1, du code civil.

Rapprochement(s) :

3e Civ., 7 juillet 2004, pourvoi n° 03-14.166, Bull., 2004, III, n° 142 (rejet).

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