Numéro 3 - Mars 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 3 - Mars 2022

ACTE DE COMMERCE

1re Civ., 9 mars 2022, n° 20-20.390, (B), FRH

Rejet

Définition – Acte accompli par un non-commerçant – Conditions – Actes de commerce par accessoire – Cas – Vente d'énergie produite par une installation exclusivement destinée à la revente totale de l'électricité produite

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 10 juin 2020), le 29 novembre 2012, à la suite d'un démarchage à domicile, Mme [F] et son époux, [W] [R] [Z] (les acquéreurs), ont acquis de la société Universel énergie (le vendeur) une installation photovoltaïque, financée par un crédit souscrit auprès de la société Sofemo, aux droits de laquelle se trouve la société Cofidis (la banque).

Le vendeur a été placé en liquidation judiciaire, M. [B], aux droits duquel se trouve la société Martin, étant désigné liquidateur.

2. Les 26, 27 et 28 juillet 2017, les acquéreurs, invoquant l'existence d'irrégularités affectant le bon de commande, de manoeuvres dolosives ayant vicié leur consentement et de divers désordres, ont assigné le liquidateur, ès-qualités, et la banque en annulation des contrats principal et de crédit affecté.

La banque a soulevé une exception d'incompétence au profit du tribunal de commerce.

3. [W] [R] [Z] est décédé le 21 décembre 2019, en laissant pour lui succéder son épouse.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Mme [F] fait grief à l'arrêt de se déclarer incompétent au profit du tribunal de commerce de Foix, alors :

« 1°/ que les parties des parties sont libres de soumettre volontairement aux régimes de protection définis par le code de la consommation, l'achat d'une installation photovoltaïque et son financement par la conclusion d'un prêt affecté, peu important que l'opération d'installation n'obéisse qu'à des motifs exclusivement mercantiles de revente de l'énergie électrique à des tiers, à l'exclusion de toute consommation personnelle par ses acquéreurs ; qu'en tenant pour inopérante, la volonté des parties de se soumettre aux dispositions du code de la consommation, dès lors que l'installation de la centrale photovoltaïque répondait exclusivement à des mobiles mercantiles de revente aux tiers de l'énergie électrique, la cour d'appel a déduit un motif inopérant, en violation de l'article 1134 du code civil par refus d'application ;

2°/ que la soumission volontaire des parties aux dispositions protectrices du code de la consommation peut être implicite ; qu'elle n'est pas subordonnée à la condition qu'elle ait été prévue par une stipulation expresse ; qu'en décidant que les parties n'avaient pas entendu se soumettre volontairement au code de la consommation, en se référant à certaines de ses dispositions, en l'absence d'une clause stipulant expressément qu'elles aient entendu s'y assujettir, la cour d'appel a déduit un motif inopérant, en violation de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en l'espèce ;

3°/ qu'en s'abstenant de répondre au moyen par lequel il était soutenu que l'article 8 du contrat de crédit prévoit expressément la compétence du tribunal d'instance pour le traitement des litiges, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. Si les parties sont libres, sauf disposition contraire de la loi, de soumettre volontairement aux régimes de protection définis par le code de la consommation des contrats qui n'en relèvent pas en vertu des dispositions de ce code, leur manifestation de volonté, dont la réalité est soumise à l'appréciation souveraine des juges du fond, doit être dépourvue d'équivoque.

6. Après avoir énoncé que les contrats de vente et de crédit sont des actes de commerce lorsqu'ils ont pour finalité la revente totale de l'électricité produite par l'installation photovoltaïque à EDF au tarif maximum, la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que la référence aux articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation dans le contrat de vente était insuffisante pour considérer que les parties avaient entendu se soumettre volontairement au code de la consommation et que si, dans le contrat de prêt, il était renvoyé à diverses dispositions de ce code, il était spécifié à l'article 7.2, que le crédit pouvait ne pas entrer dans le champ d'application de celles-ci et qu'aucune clause ne prévoyait expressément que les parties avaient entendu se soumettre à ces dispositions.

7. Ayant ainsi souverainement déduit des stipulations contractuelles et de la volonté des parties que les parties n'avaient pas entendu soumettre les contrats litigieux aux dispositions du code de la consommation, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a décidé à bon droit que, s'agissant d'un litige relatif à des actes de commerce par accessoire, le tribunal de commerce était compétent pour en connaître.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : M. Serrier - Avocat(s) : SCP Boullez ; SCP Boutet et Hourdeaux -

Textes visés :

Article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 1er juin 1999, pourvoi n° 97-13.779, Bull. 1999, I, n° 188 (rejet).

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