Numéro 3 - Mars 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 3 - Mars 2020

TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL

Soc., 4 mars 2020, n° 18-12.052, (P)

Cassation partielle

Code du travail de Nouvelle-Calédonie – Travail à temps partiel – Formalités légales – Contrat écrit – Mentions obligatoires – Défaut – Effets – Présomption de travail à temps complet – Preuve contraire – Preuve de la durée convenue de travail – Etablissement par l'employeur – Nécessité – Portée

Code du travail de Nouvelle-Calédonie – Travail à temps partiel – Requalification en travail à temps complet – Présomption – Preuve contraire – Détermination – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. C... a été engagé en qualité de pilote hélicoptère par la société Helisud, selon contrat de travail à temps partiel du 1er avril 2009 ; que, licencié pour faute grave le 26 novembre 2012, le salarié a saisi un tribunal du travail de demandes au titre de la rupture et de l'exécution du contrat de travail ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article Lp. 223-10 du code du travail de Nouvelle-Calédonie ;

Attendu que, selon ce texte, le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle du travail et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou, le cas échéant, les semaines du mois ; qu'il en résulte que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel de salaire au titre d'un contrat de travail à temps complet, l'arrêt retient, d'abord que si l'absence d'écrit conforme fait présumer que l'emploi est à temps complet, cette présomption est une présomption simple qui est renversée par la preuve, rapportée par l'employeur, que le salarié n'est pas tenu en permanence à sa disposition, de la durée convenue des horaires de travail et de la possibilité pour le salarié de prévoir son rythme de travail à l'avance, ensuite que le planning de répartition des vols entre les pilotes était effectué en accord avec eux et qu'en cas de demande de vol adressée par un client de manière inopinée, le pilote présent sur la base en raison des vols qui lui étaient attribués ce jour-là était consulté en priorité et à défaut de disponibilité de ce pilote, les pilotes non présents étaient sollicités sans aucune obligation de leur part d'accepter le vol, certaines demandes de vols étant reportées en raison de la non disponibilité d'un pilote, que M. C... avait non seulement le choix de sa disponibilité mais également celui de son mode de rémunération puisqu'il était salarié de la société pour les heures de vol et leurs accessoires, à savoir le temps de préparation du vol, le temps d'attente sur site et le « debriefing » du vol, et qu'il était patenté prestataire de la société pour les missions accomplies au sol, que l'employeur rapporte la preuve de la rémunération de toutes les heures travaillées incluant le temps réglementaire consacré à la préparation et au « debriefing » des vols, enfin que le salarié ne peut valablement solliciter la requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein puisqu'il avait une parfaite maîtrise de la détermination des heures de travail caractérisée par le fait qu'il n'était pas tenu en permanence à la disposition de l'employeur, que la durée des horaires de travail était convenue et qu'il avait la possibilité de prévoir son rythme de travail à l'avance ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser que l'employeur faisait la preuve de la durée de travail exacte, mensuelle ou hebdomadaire, convenue, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le contrat de travail de M. C... était un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel et en ce qu'il déboute M. C... de ses demandes tendant au paiement de rappels de salaire consécutifs à la requalification de son contrat de travail en contrat à temps partiel, l'arrêt rendu le 14 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa autrement composée.

- Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. David - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Article Lp. 223-10 du code du travail de Nouvelle-Calédonie.

Soc., 18 mars 2020, n° 18-10.919, (P)

Cassation partielle

Heures supplémentaires – Accomplissement – Preuve – Charge – Portée

Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, alinéa 1, L. 3171-3, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 22 novembre 2017), M. E..., engagé le 9 mars 1998 par la société Galtier expertises techniques immobilières en qualité de technicien en dessin informatique, a exercé les fonctions de responsable de bureau d'études et techniciens, statut cadre, à compter du 30 avril 2012.

2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes, notamment à titre d'heures supplémentaires, puis a été licencié par lettre du 1er septembre 2014.

Examen d'office de la recevabilité des interventions volontaires des associations Mouvement des entreprises de France (Medef) et Avosial après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile

3. Selon les articles 327 et 330 du code de procédure civile, les interventions volontaires ne sont admises devant la Cour de cassation que si elles sont formées à titre accessoire, à l'appui des prétentions d'une partie et ne sont recevables que si leur auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie.

4. Le Medef et Avosial ne justifiant pas d'un tel intérêt dans le présent litige, leurs interventions volontaires ne sont pas recevables.

Examen des moyens

Sur les deuxième et troisième moyens

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, alors « que dès lors que le salarié établit qu'à la date de son licenciement, il n'a pas été en mesure de prendre l'intégralité de ses congés payés, il appartient à l'employeur de démontrer avoir pris des mesures suffisantes pour lui permettre d'exercer effectivement son droit à congé ; qu'en affirmant que la réalité de l'impossibilité de prendre les congés payés alléguée par M. E... n'était pas établie, sans rechercher si l'employeur avait pris des mesures suffisantes pour lui permettre d'exercer effectivement son droit à congé, la cour n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 3141-12, L. 3141-14 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. Le moyen, inopérant en ce qu'il ne critique pas le chef de dispositif de l'arrêt rejetant la demande de dommages-intérêts pour impossibilité de prendre des congés, ne peut être accueilli.

Mais sur le premier moyen pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

8. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, alors :

« 1°/ que d'une part, s'il appartient au salarié de fournir des éléments de nature à étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires, le décompte qu'il produit n'est pas nécessairement établi au moment de la relation contractuelle et peut l'être a posteriori ; qu'en écartant les documents produits par les salarié devant la cour au motif qu'ils n'ont pas été établis au moment de la relation contractuelle dans la mesure où ils sont différents de ceux produits devant le conseil des prud'hommes à l'appui de la demande initiale, la cour a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

2°/ que d'autre part, en vertu de l'article L. 3171-4 du code du travail, le salarié doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; que dès lors que le décompte des heures supplémentaires effectuées produit devant la cour d'appel, même différent de celui produit en première instance, est suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre, la cour ne peut écarter les tableaux produits devant elle par le salarié au seul motif que le décompte produit devant la cour comporterait des contradictions manifestes avec les documents produits devant le conseil des prud'hommes ; qu'en considérant que M. E... ne produisait pas devant la cour d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour étayer sa demande aux motifs que le décompte correspondant au travail réalisé pour le conseil général de l'Essonne ainsi que pour les autres dossiers présentait des incohérences avec les pièces versées aux débats devant le conseil des prud'hommes, sans même examiner les documents produits devant elle, la cour a violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

9. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié.

La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

10. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

11. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

12. Pour débouter le salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, l'arrêt retient que les documents produits devant la cour n'ont pas été établis au moment de la relation contractuelle dans la mesure où ils sont différents de ceux produits devant le conseil des prud'hommes à l'appui de la demande initiale, qu'en effet l'employeur produit le décompte des heures supplémentaires présenté par le salarié aux premiers juges duquel il ressort de notables différences avec les tableaux produits dans l'instance devant la cour d'appel, ainsi par exemple le travail réalisé pour le conseil général de l'Essonne, que les mêmes différences et incohérences se retrouvent pour d'autres dossiers Renault Truck, Feu Vert, Polyclinique du pays de Rance notamment, qui présentent des anomalies similaires à celles relevées s'agissant du travail que le salarié prétend avoir effectué pour le conseil général de l'Essonne entre les deux tableaux présentés d'une part devant le conseil des prud'hommes et d'autre part devant la cour d'appel, qu'ainsi il ressort desdits tableaux des contradictions manifestes, le salarié ayant opéré devant la cour d'appel des modifications pour tenter de corriger ses précédentes invraisemblances relevées alors à juste titre par l'employeur devant le conseil des prud'hommes, que pas plus les notes de frais que les « exemples de billets de train » ou l'attestation de l'épouse du salarié émanant d'un proche et, comme telle, dépourvue de valeur probante, ne sont de nature à étayer la demande du salarié, que dès lors les éléments présentés par le salarié ne sont pas suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour étayer sa demande et permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

13. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen pris en sa troisième branche, la Cour :

DECLARE irrecevables les interventions volontaires des associations Mouvement des entreprises de France (Medef) et Avosial ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. E... de ses demandes à titre d'heures supplémentaires et de congés payés afférents, l'arrêt rendu, le 22 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Sommé - Avocat général : M. Desplan - Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix ; SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Article L. 3171-4 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la charge de la preuve s'agissant du décompte du nombre d'heures accomplies, à rapprocher : Soc., 25 février 2004, pourvoi n° 01-45.441, Bull. 2004, V, n° 62 (rejet) ; Soc., 24 novembre 2010, pourvoi n° 09-40.928, Bull. 2010, V, n° 266 (cassation partielle). Sur l'office du juge s'agissant de l'existence et de l'évaluation du nombre d'heures accomplies, à rapprocher : Soc., 4 décembre 2013, pourvoi n° 12-17.525, Bull. 2013, V, n° 297 (rejet) ; Soc., 4 décembre 2013, pourvoi n° 12-22.344, Bull. 2013, V, n° 299 (rejet).

Soc., 4 mars 2020, n° 18-11.585, n° 18-11.587, n° 18-11.597, n° 18-11.599, n° 18-11.600, (P)

Cassation partielle

Repos et congés – Repos quotidien – Temps de pause – Rémunération – Conditions – Convention ou accord collectif prévoyant une rémunération des temps de pause – Application de la disposition conventionnelle – Cas – Contractualisation de la disposition – Détermination – Portée

Vu la connexité, joint les pourvois n° 18-11.585, 18-11.587, 18-11.597, 18-11.599 et 18-11.600 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. C... et quatre autres salariés de la société Escolog (la société), venant aux droits de la société UPS SCS France, travaillant en équipes successives, ont saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant notamment à la rémunération des temps de pause journalière de trente minutes ;

Sur les premier et second moyens réunis du pourvoi incident des salariés, ci-après annexés :

Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de manque de base légale, le moyen, abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par la première branche du premier moyen, ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine de la valeur et la portée des éléments de fait et de preuve soumis par l'employeur à la cour d'appel qui, procédant à la recherche prétendument omise sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a constaté, sans inverser la charge de la preuve, que les salariés pouvaient prendre effectivement leur pause de trente minutes et que durant ce temps de pause il n'était pas établi qu'ils restaient à la disposition de l'employeur sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur :

Vu l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu que pour condamner l'employeur à payer aux salariés des sommes à titre de rappel de pause conventionnelle du 1er février 2012 au 30 avril 2017, outre les congés payés afférents, les arrêts retiennent qu'un accord collectif a été conclu le 27 février 2012 au sein de la société afin d'organiser l'application de la convention collective nationale des transports routiers, dans le but d'une bonne transition à la suite de la cessation de l'application volontaire de la convention collective de la métallurgie, suivant dénonciation opérée par la société UPS SCS à échéance du 31 janvier 2012, que le contrat de travail des salariés stipule qu'il est soumis aux dispositions de la convention collective nationale des industries métallurgiques, qu'il en ressort que l'application de cette convention collective a été contractualisée et ne résulte pas d'un engagement unilatéral de la société UPS SCS, de sorte que la dénonciation de cet engagement est inopposable aux salariés, que la contractualisation de l'application volontaire de la convention collective de la métallurgie plutôt que de celle des transports routiers doit s'entendre de l'application tant des accords nationaux applicables aux salariés, toutes catégories confondues, que des accords territoriaux qui les complètent, que les salariés sont en conséquence en droit d'obtenir le paiement de la pause qui est d'ailleurs prévue tant par la convention collective de la région havraise que par celle de la région parisienne que la société UPS SCS appliquait volontairement ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'application volontaire de la convention collective nationale de la métallurgie n'emporte pas contractualisation de la convention collective des industries métallurgiques de la région du Havre, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé une volonté claire et non équivoque d'appliquer cette convention collective, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils condamnent la société Escolog à payer à MM. C..., M..., O..., E... et Q... des sommes à titre de rappel de pause conventionnelle du 1er février 2012 au 30 avril 2017, outre les congés payés afférents, les arrêts rendus le 5 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Caen.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Prieur - Avocat général : M. Liffran - Avocat(s) : SCP Bénabent ; SCP Zribi et Texier -

Textes visés :

Article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

Soc., 4 mars 2020, n° 18-22.778, (P)

Cassation partielle

Travail à temps partiel – Formalités légales – Contrat écrit – Mentions obligatoires – Domaine d'application – Exclusion – Cas – Contrat de travail exécuté dans le cadre du dispositif chèque-emploi associatif – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. I... a été engagé, dans le cadre du dispositif chèque-emploi associatif, en qualité de professeur de trompette par l'association Musique municipale de Wittelsheim (l'association) suivant contrat de travail à temps partiel du 21 avril 2008 ; que contestant la légitimité de son licenciement, il a, le 29 décembre 2015, saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir la requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps complet et paiement d'un rappel de salaire et d'indemnités de rupture ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1272-4 du code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 et l'article L. 3123-14 du même code dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2008-67 du 21 janvier 2008, ensemble l'article 1er de l'accord du 15 avril 2013 relatif au chèque-emploi associatif, conclu en application de la convention collective nationale de l'animation du 28 juin 1988, et les articles 4.2 et 5.9.1 de ladite convention ;

Attendu que pour condamner l'association à payer certaines sommes à titre de rappel de salaire, de congés payés afférents, d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le salarié est bien fondé à soutenir que, fût-ce avant ou après l'entrée en vigueur de l'article L. 1272-4 du code du travail, le recours aux chèques-emploi associatif ne dispensait pas l'employeur d'établir un contrat de travail prévoyant expressément en cas de temps partiel la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue ainsi que la répartition de cette durée entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, avec en cas de modification de la répartition un délai de prévenance de sept jours, que ce formalisme imposé à l'employeur pour la rédaction du contrat de travail - et qui s'avère plus favorable au salarié que la disposition dérogatoire de l'article L. 1272-4 en sorte que celui-ci doit en bénéficier - a été maintenu dans le texte de base de la convention collective de l'animation et dans tous ses avenants, qu'en l'espèce le contrat de travail est vide de toute mention sur la durée de travail convenue, comme sur la répartition de celle-ci, qu'il s'évince du tout une présomption de travail à temps complet que l'association ne combat pas utilement faute de prouver suffisamment la durée de travail convenue et le fait que le salarié avait connaissance des rythmes de travail imposés ce qui ne le maintenait pas à disposition permanente de l'employeur ;

Attendu, cependant, qu'il résulte de l'article L. 1272-4 du code du travail que les associations utilisant le chèque-emploi associatif sont réputées satisfaire à l'ensemble des formalités liées à l'embauche et à l'emploi de leurs salariés, notamment à celles relatives à l'établissement d'un contrat de travail écrit et à l'inscription des mentions obligatoires, prévues à l'article L. 3123-14 du même code, pour les contrats de travail à temps partiel ; que ni la convention collective nationale de l'animation du 28 juin 1988, ni l'accord du 15 avril 2013 relatif au chèque-emploi associatif qui prévoit que l'employeur est tenu de fournir un contrat de travail écrit au personnel rémunéré par chèque-emploi associatif conformément à l'article 4.2 de la convention collective de l'animation, ne font obstacle à ce dispositif ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que les chèques-emploi associatif utilisés ne répondaient pas aux exigences de l'article L. 1272-4 du code du travail, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement en ses dispositions portant sur les dépens et les frais irrépétibles et condamne l'association Musique municipale de Wittelsheim à payer à M. I... la somme de 200 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure irrégulière, l'arrêt rendu le 17 avril 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet, sur les autres points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Monge - Avocat général : M. Liffran - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Didier et Pinet -

Textes visés :

Articles L. 1272-4 du code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 et L. 3123-14 du code du travail dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2008-67 du 21 janvier 2008 ; article 1er de l'accord du 15 avril 2013 relatif au chèque-emploi associatif, conclu en application de la convention collective nationale de l'animation du 28 juin 1988 ; articles 4.2 et 5.9.1 de la convention collective nationale de l'animation du 28 juin 1988.

Rapprochement(s) :

Sur le formalisme applicable à un contrat de travail exécuté dans le cadre du dispositif chèque-emploi associatif, à rapprocher : Soc., 20 mai 2015, pourvoi n° 14-13.127, Bull. 2015, V, n° 102 (cassation).

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