Numéro 3 - Mars 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 3 - Mars 2020

EMPLOI

Soc., 18 mars 2020, n° 18-24.982, (P)

Rejet

Travailleurs étrangers – Emploi illicite – Licenciement du salarié – Effets – Indemnisation – Indemnité forfaitaire – Cumul avec d'autres indemnités – Possibilité (non) – Cas – Indemnité forfaitaire pour travail dissimulé

Travailleurs étrangers – Emploi illicite – Licenciement du salarié – Effets – Indemnisation – Indemnité forfaitaire – Indemnité forfaitaire du travailleur étranger employé sans titre dans le cadre d'un travail dissimulé – Principe de faveur – Application – Office du juge – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 juin 2017), M. V..., ressortissant étranger sans titre de travail, a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir constater l'existence d'un contrat de travail le liant à M. R..., ainsi que de demandes relatives à l'exécution et à la rupture de ce contrat.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé, alors « que les indemnités prévues par l'article L. 8252-2 du code du travail au titre de la période d'emploi illicite en cas de rupture du contrat et celles prévues par l'article L. 8223-1 du même code au titre du travail dissimulé, ne se cumulent pas, mais que le salarié doit bénéficier de la disposition la plus favorable ; que l'article L. 8223-1 prévoit une indemnité forfaitaire équivalente à six mois de salaire ; qu'en l'espèce la cour d'appel a accordé une indemnité forfaitaire équivalente à trois mois de salaire prévue par l'article L. 8252-2 quand l'indemnité au titre du travail dissimulé était plus favorable au salarié ; qu'elle a ainsi violé l'article L. 8252-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige. »

Réponse de la Cour

4. Après avoir exactement retenu que lorsque l'étranger employé sans titre de travail l'a été dans le cadre d'un travail dissimulé, il bénéficie soit des dispositions de l'article L. 8223-1 du code du travail, soit des dispositions des articles L. 8252-1 à L. 8252-4 du même code si celles-ci lui sont plus favorables, la cour d'appel a estimé que le cumul des sommes allouées par elle à titre de rappel de salaire et d'indemnité forfaitaire de rupture en application de l'article L. 8252-2 du code du travail était plus favorable au travailleur étranger que l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé prévue à l'article L. 8223-1 du même code.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Aubert-Monpeyssen - Avocat(s) : SCP Colin-Stoclet ; Me Occhipinti -

Textes visés :

Article L. 8223-1 du code du travail ; article L. 8252-2 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016.

Rapprochement(s) :

Sur la combinaison des dispositions des articles L. 8223-1 et L. 8252-2 du code du travail, à rapprocher : Soc., 14 février 2018, pourvoi n° 16-22.335, Bull. 2018, V, n° 28 (cassation partielle).

2e Civ., 12 mars 2020, n° 18-20.729, (P)

Rejet

Travailleurs privés d'emploi – Garantie de ressources – Allocation d'assurance – Financement – Cotisation – Assiette – Rémunérations brutes – Définition

Selon l'article L. 5422-9, alinéa 1, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018, l'allocation d'assurance est financée par des contributions des employeurs et des salariés assises sur les rémunérations brutes dans la limite d'un plafond, lesquelles doivent s'entendre de l'ensemble des gains et rémunérations au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort (tribunal des affaires de sécurité sociale de Nanterre, 15 mai 2018), la société Axiome (la société) a fait l'objet d'un contrôle portant sur l'assiette des cotisations de sécurité sociale, des contributions d'assurance chômage et des cotisations à l'assurance de garantie des salaires (AGS) s'agissant des années 2012 et 2013 par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'Ile-de-France (l'URSSAF), sur plusieurs de ses établissements. S'agissant de l'établissement sis à Montigny-le-Bretonneux, ce contrôle a donné lieu à une lettre d'observations du 27 novembre 2014. Après avoir répondu aux observations de la société, l'URSSAF lui a délivré le 13 mars 2015 une mise en demeure.

2. La société a saisi la commission de recours amiable pour contester la réintégration dans l'assiette des contributions d'assurance chômage et des cotisations à l'AGS d'une indemnité de rupture conventionnelle versée à des salariés correspondant aux chefs de redressement n° 1 et n° 2 de la lettre d'observations. Son recours ayant été rejeté, elle a saisi une juridiction de sécurité sociale.

Enoncé du moyen

3. La société fait grief au jugement attaqué de rejeter sa demande d'annulation du redressement, alors :

« 1°/ que selon l'article L. 5422-20 du code du travail, les mesures d'application relatives à l'assurance chômage font l'objet d'accords conclus entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés ; que ces conventions d'assurance chômage ne peuvent cependant déroger à la loi ; qu'en vertu de l'article L. 5422-9 du même code les contributions d'assurance chômage sont « assises sur les rémunérations brutes dans la limite d'un plafond » ; que la loi limite donc l'assiette des contributions d'assurance chômage aux seules « rémunérations », sans étendre cette assiette aux sommes de nature indemnitaire, et notamment aux indemnités de rupture conventionnelle du contrat de travail ; que l'article 43 du règlement annexé à la Convention d'assurance chômage agréée du 6 mai 2011 viole donc la loi, et ne peut en cela être opposé aux cotisants, en ce qu'il prévoit que « les contributions des employeurs et des salariés sont assises (...) sur l'ensemble des rémunérations entrant dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale prévues aux articles L. 242-1 et suivants du code de la sécurité sociale », intégrant à ce titre certaines indemnités de rupture du contrat de travail dans l'assiette des contributions d'assurance chômage ; qu'en retenant le contraire pour valider le redressement de la société, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé les articles L. 5422-9, L. 5422-11 et L. 5422-20 du code du travail en leur rédaction applicable au litige ;

2°/ qu'il résulte des dispositions du premier alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale que les sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail autres que les indemnités mentionnées au dixième alinéa sont comprises dans l'assiette de cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, à moins que l'employeur ne rapporte la preuve qu'elles concourent, pour tout ou partie de leur montant, à l'indemnisation d'un préjudice ; que dès lors en retenant en toute hypothèse, pour valider le redressement, que l'indemnité de rupture conventionnelle peut être assujettie à contributions d'allocation chômage lorsqu'elle « compense également un préjudice financier et une perte de salaire et revêt alors une nature salariale », sans précisément vérifier si l'indemnité de rupture conventionnelle versée au salarié concerné ne visait pas exclusivement à indemniser un préjudice sans présenter de nature salariale, le tribunal des affaires de sécurité sociale a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 5422-9 et L. 5422-20 du code du travail et L. 242-1 du code de la sécurité sociale en leur rédaction applicable au litige, ensemble l'article 3 de la Convention d'assurance chômage du 6 mai 2011 et l'article 43 du règlement annexé à cette convention. »

Réponse de la Cour

4. Mais selon l'article L. 5422-9, alinéa 1, du code du travail, dans sa rédaction applicable à la date d'exigibilité des sommes litigieuses, l'allocation d'assurance est financée par des contributions des employeurs et des salariés assises sur les rémunérations brutes dans la limite d'un plafond, lesquelles doivent s'entendre de l'ensemble des gains et rémunérations au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

5. Par ce seul motif de pur droit, substitué d'office à ceux critiqués, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, la décision, abstraction faite des motifs critiqués par la seconde branche du moyen, qui sous couvert d'un grief de manque de base légale, ne tend qu'à remettre en cause devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine par les juges du fond des éléments de faits débattus devant eux, se trouve légalement justifiée.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Brinet - Avocat général : Mme Ceccaldi - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Article L. 5422-9, alinéa 1, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018.

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