Numéro 3 - Mars 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 3 - Mars 2019

TRAVAIL REGLEMENTATION, SANTE ET SECURITE

Soc., 20 mars 2019, n° 17-23.027, (P)

Cassation partielle

Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail – Recours à un expert – Contestation – Contestation des modalités ou de l'étendue de l'expertise – Délai – Point de départ – Détermination – Délibérations distinctes du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail – Portée

Aux termes de l'article L. 4614-13 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur qui entend contester la nécessité ou l'étendue de l'expertise saisit le juge judiciaire dans un délai de quinze jours à compter de la délibération du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Si ce texte ne s'oppose pas à ce que le recours à l'expertise et la fixation de son périmètre ainsi que la désignation de l'expert fassent l'objet de délibérations distinctes du CHSCT, le délai de quinze jours pour contester les modalités de l'expertise ou son étendue ne court qu'à compter du jour de la délibération les ayant fixées.

Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail – Recours à un expert – Coût prévisionnel de l'expertise – Contestation – Action en contestation du périmètre de l'expertise – Etendue – Détermination – Portée

La contestation par l'employeur du périmètre de l'expertise dans le délai imparti par l'article L. 4614-13 du code du travail alors applicable induit nécessairement le droit de contester le coût prévisionnel de celle-ci.

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue en la forme des référés et en dernier ressort, que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société Parashop diffusion (le CHSCT), après une première délibération du 14 septembre 2016, a, le 18 octobre 2016, désigné le cabinet 3E Conseil en qualité d'expert ; que la société Parashop diffusion (la société) a, le 31 octobre 2016, fait assigner la représentante du CHSCT devant le président du tribunal de grande instance, en annulation de la délibération du 18 octobre 2016 ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 4614-13 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, l'employeur qui entend contester la nécessité ou l'étendue de l'expertise saisit le juge judiciaire dans un délai de quinze jours à compter de la délibération du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; que si ce texte ne s'oppose pas à ce que le recours à l'expertise et la fixation de son périmètre ainsi que la désignation de l'expert fassent l'objet de délibérations distinctes du CHSCT, le délai de quinze jours pour contester les modalités de l'expertise ou son étendue ne court qu'à compter du jour de la délibération les ayant fixées ;

Attendu que, pour débouter la société de sa demande d'annulation de la délibération adoptée le 18 octobre 2016 par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail désignant le Cabinet 3E Conseil en qualité d'expert, l'ordonnance retient qu'il ressort clairement des procès-verbaux des réunions des 13 et 14 septembre et 18 octobre 2016 que, le 14 septembre, il a été procédé à un vote sur le recours à une expertise en raison d'un risque grave et que tous les membres élus du CHSCT se sont prononcés en faveur de cette décision, que c'est lors de cette réunion qu'ont été évoqués les faits conduisant le CHSCT à recourir à l'expertise et que, le 18 octobre 2016, les élus n'ont voté que sur le périmètre de l'expertise, le choix de l'expert et la désignation d'un élu pour représenter le CHSCT, que, dès lors, les contestations portant sur la nécessité de l'expertise ne pouvaient être utilement invoquées que pour obtenir l'annulation de la délibération du 14 septembre 2016, annulation non sollicitée par la société et qu'elle ne pourrait, en tout état de cause, plus solliciter faute pour elle d'avoir agi dans le délai de quinze jours de l'article L. 4614-13 du code du travail, que le fait que le procès-verbal de la réunion des 13 et 14 septembre 2016 n'ait été signé par la secrétaire du CHSCT que le 19 octobre 2016 n'empêchait nullement la société de respecter ce délai ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur contestait l'expertise au regard de ses modalités de mise en oeuvre qui ne figuraient pas dans la première délibération du CHSCT, le président du tribunal de grande instance a méconnu les exigences du texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 4614-13 du code du travail alors applicable ;

Attendu que la contestation par l'employeur du périmètre de l'expertise dans le délai imparti par le texte susvisé induit nécessairement le droit de contester le coût prévisionnel de celle-ci ;

Attendu que, pour déclarer la société irrecevable en sa demande tendant à voir réduire le coût prévisionnel de l'expertise, l'ordonnance retient qu'il résulte de l'article L. 4614-13 du code du travail que l'employeur qui entend contester le coût prévisionnel de l'expertise doit saisir le juge judiciaire dans un délai de quinze jours à compter de la délibération du CHSCT, qu'en l'espèce, la société 3 E Conseil a été désignée le 18 octobre 2016 et a établi sa lettre de mission le 20 octobre 2016 mais la société a contesté le coût prévisionnel de l'expertise pour la première fois dans les conclusions qu'elle a soutenues à l'audience du 21 mars 2017, que le fait qu'elle ait sollicité l'annulation de la délibération du 18 octobre 2016 dans le délai de l'article L. 4614-13 du code du travail ne rend pas recevable sa demande de réduction du coût prévisionnel de l'expertise formée hors délai dès lors qu'il s'agit de demandes ayant un objet différent, que, dès lors, faute d'avoir régulièrement contesté le coût prévisionnel de l'expertise dans le délai de l'article L. 4614-13 du code du travail, la société doit être déclarée irrecevable en sa demande tendant à voir réduire ce coût ;

Qu'en statuant ainsi, le président du tribunal de grande instance a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elle déboute la société Parashop diffusion de sa demande d'annulation de la délibération adoptée le 18 octobre 2016 par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail désignant le Cabinet 3E Conseil en qualité d'expert et déclare irrecevable sa demande tendant à voir réduire le coût prévisionnel de l'expertise, l'ordonnance rendue le 7 juillet 2017, en la forme des référés, entre les parties, par le président du tribunal de grande instance de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le président du tribunal de grande instance de Nanterre statuant en la forme des référés.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Rinuy - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer ; SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer -

Textes visés :

Article L. 4614-13 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016.

Soc., 27 mars 2019, n° 17-23.988, (P)

Cassation partielle

Maternité – Congé de maternité – Durée – Augmentation – Etat pathologique – Conditions – Portée

Selon l'article L. 1225-21 du code du travail, lorsqu'un état pathologique est attesté par un certificat médical comme résultant de la grossesse ou de l'accouchement, le congé de maternité est augmenté de la durée de cet état pathologique dans la limite de deux semaines avant la date présumée de l'accouchement et de quatre semaines après la date de celui-ci.

Il s'ensuit que le congé supplémentaire rémunéré prévu par l'article 51.1 de la convention collective nationale de la banque du 10 janvier 2000, étendue, peut être pris par la salariée à la fin de son congé maternité augmenté, le cas échéant, de la durée de l'état pathologique, dans les conditions prévues par l'article L. 1225-21 du code du travail.

Sur le moyen unique :

Vu l'article 51.1 de la convention collective nationale de la banque du 10 janvier 2000, étendue, ensemble l'article L. 1225-21 du code du travail ;

Attendu, selon le premier de ces textes, qu'à l'issue de son congé maternité légal, la salariée a la faculté de prendre un congé supplémentaire rémunéré de quarante-cinq jours calendaires à plein salaire ou de quatre-vingt-dix jours calendaires à demi-salaire à la seule et unique condition que le congé maternité ait été indemnisé par l'employeur en application de l'article 51.2 ; que, selon le second, lorsqu'un état pathologique est attesté par un certificat médical comme résultant de la grossesse ou de l'accouchement, le congé de maternité est augmenté de la durée de cet état pathologique dans la limite de deux semaines avant la date présumée de l'accouchement et de quatre semaines après la date de celui-ci ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que Mme V..., engagée le 18 juillet 2005 par la société BNP Paribas Réunion (la société) en qualité de chargée d'affaires, a été en congé maternité jusqu'au 2 février 2013 puis en congé pathologique jusqu'au 3 mars 2013 ; que la société lui ayant refusé le bénéfice du congé supplémentaire rémunéré prévu à l'article 51.1 de la convention collective nationale de la banque du 10 janvier 2000, étendue, la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de rappel de salaire au titre de ce congé supplémentaire, l'arrêt retient que, sauf dans les hypothèses des exceptions légales (comme les naissances multiples ou l'hospitalisation de l'enfant sous certaines conditions), l'allongement du congé postnatal, fût-il pathologique, n'emporte aucun allongement du congé maternité, que, dès lors, la salariée ne pouvait demander le report du congé supplémentaire de l'article 51.1, lequel doit être pris à l'issue du congé maternité légal ;

Qu'en statuant ainsi alors que le congé maternité de la salariée avait été augmenté de la durée de l'état pathologique, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu que la cassation du chef de dispositif déboutant la salariée de sa demande de rappel de salaire au titre du congé maternité supplémentaire entraîne, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif la déboutant de ses demandes au titre du congé d'allaitement et d'une discrimination ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il ordonne la remise de bulletins de paie, l'arrêt rendu le 30 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Duval - Avocat général : Mme Rémery - Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Lévis -

Textes visés :

Article L. 1225-21 du code du travail ; article 51.1 de la convention collective nationale de la banque du 10 janvier 2000, étendue.

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