Numéro 3 - Mars 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 3 - Mars 2019

SECURITE SOCIALE, ASSURANCES SOCIALES

2e Civ., 14 mars 2019, n° 18-10.943, (P)

Cassation partielle

Prestations (dispositions générales) – Prestations indues – Prestations indues résultant d'anomalies dans la facturation et la tarification d'actes de soins – Notification – Service du contrôle médical – Saisine – Avis du service du contrôle médical – Etendue – Détermination – Portée

L'avis donné par le service du contrôle médical à l'organisme d'assurance maladie à la suite d'un contrôle opéré par ce dernier, ne revêt pas le caractère d'une analyse, sur le plan médical, de l'activité des professionnels de santé au sens de l'article L. 315-1, IV, du code de la sécurité sociale.

Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable :

Vu les articles L. 133-4 et L. 315-1, IV, du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige ;

Attendu que l'avis donné par le service du contrôle médical à l'organisme d'assurance maladie à la suite d'un contrôle opéré par ce dernier, ne revêt pas le caractère d'une analyse, sur le plan médical, de l'activité des professionnels de santé au sens du second de ces textes ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un contrôle portant sur des soins qu'elle avait pris en charge, la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin (la caisse) a notifié à M. D..., infirmier libéral, un indu résultant d'anomalies dans la facturation et la tarification des actes ; que l'intéressé ayant formulé des observations, la caisse a réduit le montant de l'indu après avoir pris l'avis du service national du contrôle médical ; qu'après mise en demeure, M. D... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour accueillir ce dernier, l'arrêt retient essentiellement que si la caisse fonde sa décision sur un avis défavorable d'ordre médical émis par son médecin-conseil, la difficulté qui survient est d'ordre médical et suppose le respect de la procédure applicable en pareil cas ; que dès lors que les actes contestés ont été transmis pour analyse au service médical de la caisse, il appartenait à ce service d'informer M. D... de ses conclusions conformément aux dispositions de l'article R. 315-1-2 du code de la sécurité sociale, mettant en oeuvre le principe posé par l'article L. 315-1, IV, du même code, selon lequel « la procédure d'analyse de l'activité se déroule dans le respect des droits de la défense » ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que l'indu litigieux procédait d'un contrôle diligenté par les services de la caisse en application des dispositions des articles L. 133-4 et R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale, ce dont il résultait que les dispositions propres à l'analyse sur le plan médical de l'activité du professionnel par le service national du contrôle médical n'étaient pas applicables, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare l'appel recevable, l'arrêt rendu le 23 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Vieillard - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger ; SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Articles L. 133-4 et L. 315-1, IV, du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige.

2e Civ., 14 mars 2019, n° 17-31.761, (P)

Rejet

Prestations (dispositions générales) – Prise en charge – Conditions – Inscription sur une liste – Nécessité

L'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale subordonne la prise en charge de tout acte ou prestation par l'assurance maladie réalisé par un professionnel de santé, à son inscription sur une liste.

Par suite, c'est à bon droit qu'ayant constaté que les actes de biologie dite délocalisée n'étaient pas inscrits sur la nomenclature des actes de biologie médicale, la cour d'appel en déduit que ces actes ne peuvent être pris en charge par l'assurance maladie.

Prestations (dispositions générales) – Prestations sanitaires – Analyses et examens de laboratoire – Remboursement – Conditions – Inscription à la nomenclature – Inscription à la nomenclature des actes de biologie médicale – Exclusion – Cas – Actes de biologie délocalisée

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 2 novembre 2017), qu'à la suite d'un contrôle de son activité, la SELAS Cedibio Unilabs (la société) a reçu notification par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (la caisse), de six indus au titre de la facturation irrégulière d'actes de biologie au cours de la période du 29 novembre 2009 au 28 février 2013 ; que la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à rembourser à la caisse les sommes indûment perçues, alors, selon le moyen :

1°/ que l'annexe n° 1 de la Charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé par l'assurance maladie autorise expressément, pour l'activité objet d'un contrôle, qui n'est ni frauduleuse ni abusive, une « interprétation (...) extensive » de la nomenclature concernée, autrement dit, par définition, une interprétation s'affranchissant des termes exprès de la liste ; qu'en l'espèce, les actes de biologie délocalisée visés par les contrôles litigieux et accomplis dans des établissements de santé étaient, ainsi que l'a admis l'arrêt attaqué, nécessaires et urgents et le principe de leur réalisation dans des établissements de santé, pour des motifs d'urgence, d'ores et déjà reconnu par le législateur ; que, pour déclarer cependant pareilles prestations non facturables à l'assurance maladie, l'arrêt attaqué s'est interdit toute interprétation extensive de la nomenclature des actes de biologie médicale au prétexte que lesdites prestations n'y étaient pas inscrites ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale et, par refus d'application, l'annexe n° 1 de la Charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé par l'assurance maladie ;

2°/ que l'article L. 6211-18 du code de la santé publique issu de l'ordonnance n° 2010-49 du 13 janvier 2010 habilite sans restriction, en cas d'urgence, « un établissement de santé », et nécessairement son propre personnel, à réaliser des actes de biologie délocalisée, tout en prévoyant par ailleurs de manière distincte un texte d'application concernant les autres lieux de réalisation de ces actes ainsi que les catégories de professionnels de santé habilités à intervenir dans ce cadre ; qu'en affirmant que les actes urgents de biologie délocalisée visés par les contrôles litigieux concernant la période de novembre 2009 à février 2013, pratiqués dans des établissements de santé, étaient postérieurs à la mise en oeuvre effective des dispositions distinctes précitées subordonnées à l'intervention d'un texte d'application, en l'occurrence publié en 2014, la cour d'appel a violé l'article L. 6211-18 du code de la santé publique ;

3°/ que, en cause d'appel, l'exposante faisait valoir que « l'article L. 6211-18 du code de la santé publique prévoyait déjà que les établissements de santé étaient habilités à réaliser des actes de biologie délocalisée », qu'il aurait été « aberrant » que ceux-ci fussent « habilités à pratiquer cette procédure mais » pas "(leur) personnel » et d'« attendre plus de quatre ans » pour que l'arrêté d'application du 13 août 2014 confirmât ce que le texte précité « prévoyait déjà, soit que les établissements de santé et leur personnel (étaient) parfaitement autorisés à effectuer des actes de biologie médicale décentralisée » ; qu'elle soulignait ainsi explicitement qu'avant l'arrêté publié en 2014, l'article L. 6211-18 du code de la santé publique était applicable s'agissant des établissements de santé et de leur personnel ; qu'en affirmant cependant que l'exposante reconnaissait que ce texte n'était pas applicable à défaut de publication de l'arrêté, la cour d'appel a dénaturé le contenu clair et précis de ses écritures en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant rappelé que l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale subordonne la prise en charge de tout acte ou prestation par l'assurance maladie réalisé par un professionnel de santé, à son inscription sur une liste, l'arrêt constate que les actes de biologie délocalisée n'étaient pas inscrits sur la nomenclature des actes de biologie médicale ;

Qu'en l'état de ces seules énonciations et constatations, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, et abstraction faite des autres motifs surabondants critiqués par les deuxième et troisième branches du moyen, que les actes de biologie litigieux ne pouvaient être pris en charge par l'assurance maladie, de sorte que l'action en remboursement de la caisse était fondée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Vigneras - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale.

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