Numéro 3 - Mars 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 3 - Mars 2019

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL

2e Civ., 14 mars 2019, n° 17-27.954, (P)

Rejet

Accidents successifs – Invalidité – Indemnisation – Droit d'option – Cumul des taux d'incapacité – Conditions – Détermination

Selon les articles L. 434-2, alinéa 4, et R. 434-4 du code de la sécurité sociale, lorsque, par suite d'accidents successifs, la somme des taux d'incapacité permanente est égale ou supérieure à 10 %, l'indemnisation se fait, sur demande de la victime, soit par l'attribution d'une rente qui tient compte de la ou des indemnités en capital précédemment versées, soit par l'attribution d'une indemnité en capital.

Si l'option souscrite par la victime revêt un caractère définitif, c'est à la condition que la fixation du taux d'incapacité permanente afférente à chacun des accidents successifs soit elle-même définitive.

Dès lors, lorsqu'à la suite de la saisine d'un tribunal du contentieux de l'incapacité par le salarié victime de deux maladies professionnelles pour lesquelles des taux inférieurs à 10 % lui avaient été notifiés, celui-ci se voit reconnaître par cette juridiction pour l'une de ses deux maladies un taux d'incapacité supérieur à 10 %, c'est à juste titre que la caisse primaire d'assurance maladie régularise sa situation, le droit d'option qui lui avait été initialement ouvert entre le versement d'un capital et d'une rente ne l'ayant été que sous réserve de la fixation définitive des taux d'incapacité.

Invalidité – Taux – Accidents successifs – Fixation séparée pour chaque accident – Indemnisation – Droit d'option – Exercice – Caractère définitif – Conditions – Détermination – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 20 septembre 2017), que la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (la caisse) ayant décidé de prendre en charge au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles les affections déclarées successivement, les 6 mars et 3 novembre 2011, par M. K..., et lui ayant notifié, les 30 juin et 10 septembre 2012, des taux d'incapacité permanente partielle de 5 et 8 % pour chacune de celles-ci, M. K... a contesté ces derniers devant une juridiction du contentieux technique de la sécurité sociale ; que le taux afférent à la première maladie ayant été porté par celle-ci de 5 à 8 %, M. K... a opté pour le versement d'une rente calculée sur la base d'un taux cumulé de 16 % ; que le taux afférent à la seconde maladie ayant été porté de même de 8 à 11 %, la caisse a informé M. K... qu'il ne pouvait plus bénéficier d'une rente unique, mais d'une indemnité en capital pour la première maladie et d'une rente au taux de 11 % pour la seconde ; que M. K... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que M. K... fait grief à l'arrêt de la débouter de son recours, alors, selon le moyen, qu'aux termes des articles L. 434-1 et R. 434-1 du code de la sécurité sociale, une indemnité en capital est attribuée à la victime d'un accident du travail atteinte d'une incapacité permanente inférieure à 10 % ; que les articles L. 434-2 et R. 434-4 du même- code ajoutent qu'en cas d'accidents successifs, lorsqu'à la date de consolidation d'un nouvel accident susceptible de donner lieu à une indemnité en capital, la somme des taux d'incapacité permanente visés à l'article R. 434-1 atteint le taux de 10 %, l'indemnisation se fait, sur demande de la victime, soit par l'attribution d'une rente qui tient compte de la ou des indemnités en capital précédemment versées, autrement dit, aux taux cumulés des accidents successifs, soit par l'attribution d'une indemnité en capital pour l'indemnisation de cet accident ; que l'option de la victime est souscrite à titre définitif, de sorte que la révision ultérieure du premier de ces taux ne peut avoir pour effet de la remettre en cause ; qu'en disant qu'en raison de la nouvelle fixation de 8 % à 11 %, soit à plus de 10 %, du taux d'incapacité permanente au titre de la première pathologie de M. K..., la CPAM de la Haute-Garonne serait en droit de remettre en cause l'option exercée par ce dernier pour une rente aux taux cumulés de ses deux accidents successifs et de ne plus lui verser qu'une rente pour la première maladie et un capital pour la seconde, la cour d'appel a violé par fausse application les textes susvisés ;

Mais attendu que, selon les articles L. 434-2, alinéa 4, et R. 434-4 du code de la sécurité sociale, lorsque, par suite d'accidents successifs, la somme des taux d'incapacité permanente est égale ou supérieure à 10 %, l'indemnisation se fait, sur demande de la victime, soit par l'attribution d'une rente qui tient compte de la ou des indemnités en capital précédemment versées, soit par l'attribution d'une indemnité en capital ; que si l'option souscrite par la victime revêt un caractère définitif, c'est à la condition que la fixation du taux d'incapacité permanente afférente à chacun des accidents successifs soit elle-même définitive ;

Et attendu que l'arrêt relève que c'est sur recours de M. K... que le taux d'incapacité dont il reste atteint au titre de la pathologie qui affecte son épaule droite a été définitivement fixé à 11 %, et que c'est à juste titre que la caisse, qui ne lui avait ouvert le droit d'option entre le versement d'un capital et d'une rente que sous réserve de la fixation définitive des taux d'incapacité, a régularisé sa situation ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche, annexé :

Attendu que sous le couvert d'un grief non fondé de dénaturation, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, l'appréciation souveraine, par les juges du fond, du sens et de la portée des documents dont la dénaturation est alléguée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Coutou - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Articles L. 434-2, alinéa 4, et R. 434-4 du code de la sécurité sociale.

Rapprochement(s) :

En matière d'accidents de travail successifs, conditions d'exercice du droit d'option du salarié quant aux modalités de l'indemnisation, à rapprocher : 2e Civ., 22 novembre 2007, pourvoi n° 06-18.984, Bull. 2007, II, n° 260 (rejet), et l'arrêt cité.

2e Civ., 14 mars 2019, n° 18-12.620, (P)

Cassation

Faute inexcusable de l'employeur – Procédure – Tentative d'accord amiable – Défaut – Effet

Selon l'article L. 452-4, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, à défaut d'accord amiable entre la caisse et la victime ou ses ayants droit d'une part, et l'employeur d'autre part, sur l'existence de la faute inexcusable reprochée à ce dernier, ainsi que sur le montant de la majoration et des indemnités mentionnées à l'article L. 452-3, il appartient à la juridiction de la sécurité sociale compétente, saisie par la victime ou ses ayants droit ou par la caisse primaire d'assurance maladie, d'en décider.

Il résulte de ces dispositions qu'en cas de refus de la caisse de mettre en oeuvre la procédure de conciliation, la victime n'est pas tenue, préalablement à l'instance contentieuse, de saisir la commission de recours amiable de cet organisme dans les conditions prévues par l'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale.

Donne acte à M. J... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé à l'encontre du ministre chargé de la sécurité sociale ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 452-4, alinéa 1, et R. 142-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon le premier de ces textes, qu'à défaut d'accord amiable entre la caisse et la victime ou ses ayants droit d'une part, et l'employeur d'autre part, sur l'existence de la faute inexcusable reprochée à ce dernier, ainsi que sur le montant de la majoration et des indemnités mentionnées à l'article L. 452-3, il appartient à la juridiction de la sécurité sociale compétente, saisie par la victime ou ses ayants droit ou par la caisse primaire d'assurance maladie, d'en décider ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en cas de refus de la caisse de mettre en oeuvre la procédure de conciliation, la victime n'est pas tenue, préalablement à l'instance contentieuse, de saisir la commission de recours amiable de cet organisme dans les conditions prévues par le second ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que salarié de la société Atelier de Seine-et-Marne, M. J... a déclaré, le 27 avril 2004, un syndrome dépressif que la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne (la caisse) a pris en charge, le 13 juillet 2010, sur recours de l'intéressé, après avis favorable d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; que la victime a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;

Attendu que pour déclarer cette demande irrecevable, l'arrêt retient qu'il résulte des dispositions des articles R. 142-18 et R. 142-1 du code de la sécurité sociale que le tribunal des affaires de sécurité sociale ne peut être saisi d'une réclamation contre un organisme de sécurité sociale qu'après que celle-ci a été soumise à une commission de recours amiable ; qu'en l'espèce, M. J... a accusé réception, le 18 juillet 2013, d'une décision de refus de conciliation opposée par la caisse, le 16 juillet 2013 ; que cette décision rappelait l'obligation, en cas de contestation, de saisir la commission de recours amiable dans le délai de deux mois à compter de la notification ; qu'à défaut d'avoir contesté cette décision devant la commission de recours amiable, la décision de refus de conciliation de la caisse est devenue définitive ; que l'action est donc forclose ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Le Fischer - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Zribi et Texier ; SCP Rocheteau et Uzan-Sarano -

Textes visés :

Articles L. 452-4, alinéa 1, et R. 142-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige.

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