Numéro 3 - Mars 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 3 - Mars 2019

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

Soc., 20 mars 2019, n° 18-40.048, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Contrat de travail – Code du travail – Article L. 1226-6 – Interprétation jurisprudentielle constante – Principe d'égalité devant la loi – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Attendu que la question transmise est ainsi rédigée :

« L'article L. 1226-6 du code du travail tel qu'interprété par la Cour de cassation engendre une inégalité de traitement entre les salariés dont le contrat de travail est transféré par l'effet de la loi (transfert légal) et ceux dont le contrat est transféré par l'effet de l'accord collectif (transfert conventionnel) porte atteinte aux droits et libertés garantis par les articles 1 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 pour violation du principe d'égalité des hommes en droit. »

Attendu que cette disposition législative telle qu'interprétée par la jurisprudence constante de la Cour de cassation, qui sert de fondement à la décision contestée, est applicable au litige ;

Qu'elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu, d'une part, que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu, d'autre part, que la question posée ne présente pas un caractère sérieux en ce que le principe de l'égalité de traitement ne s'oppose pas à ce que l'interprétation jurisprudentielle d'une disposition législative règle de façon différente des situations différentes ; qu'en cas de transfert légal, c'est le même contrat de travail qui se poursuit auprès du nouvel employeur par le transfert d'une entité économique autonome qui subsiste à laquelle est attachée la protection reconnue aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle alors que l'accord collectif qui, pour le cas de la perte d'un marché de services, prévoit et organise le transfert de tout ou partie des contrats de travail des salariés affectés à l'exécution du marché, lesquels peuvent s'y opposer, ne peut à lui seul et sauf clause contraire le prévoyant, faire échec aux dispositions de l'article L. 1226-6 du code du travail ; qu'il en résulte que les salariés dont le contrat de travail est transféré dans le cadre d'un accord collectif ne sont pas placés dans une situation identique à celle des salariés dont le contrat de travail est transféré dans le cadre des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU A RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Duvallet - Avocat général : M. Weissmann -

1re Civ., 14 mars 2019, n° 18-21.567, (P)

QPC - Irrecevabilité

Obligations et contrats civils – Code civil – Article 1907 – Code de la consommation – Article L. 313-2 – Code monétaire et financier – Article L. 31364 – Droit de propriété – Liberté contractuelle – Question portant sur une règle jurisprudentielle – Irrecevabilité

Attendu qu'à l'occasion du pourvoi qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 7 juin 2018 par la cour d'appel de Versailles, annulant la clause stipulant l'intérêt conventionnel du prêt consenti le 7 novembre 2011 au Centre de lutte contre le cancer T... G... et ordonnant la substitution du taux de l'intérêt légal à celui de l'intérêt conventionnel, la société Dexia crédit local a présenté, par un mémoire distinct et motivé, une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« Les dispositions des articles 1907 du code civil, L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 et L. 313-4 du code monétaire et financier, telles qu'interprétées par une jurisprudence constante, qui sanctionnent, de manière automatique, le défaut de mention du taux effectif global, dans tout écrit constatant un contrat de prêt, par l'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts et le remplacement du taux contractuel prévu par le taux légal, privant l'établissement de crédit prêteur des intérêts contractuellement dus et l'obligeant dans les termes d'un contrat qu'il n'a pas conclu, méconnaissent-elles les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, pour porter une atteinte excessive au droit de propriété et à la liberté contractuelle ? » ;

Attendu que, si tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité de la portée effective qu'une interprétation jurisprudentielle constante confère à une disposition législative, sous la réserve que cette jurisprudence ait été soumise à la juridiction suprême compétente, il résulte tant des dispositions de l'article 61-1 de la Constitution et de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée que des décisions du Conseil constitutionnel, que la contestation doit concerner la portée que donne à une disposition législative précise l'interprétation qu'en fait la juridiction suprême de l'un ou l'autre ordre ; que la question posée, sous le couvert de critiquer l'article 1907 du code civil, l'article L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, et l'article L. 313-4 du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, porte exclusivement sur la règle jurisprudentielle, énoncée au visa de ces textes, selon laquelle le défaut de mention du taux effectif global ou l'inexactitude de celui-ci, équivalant à un défaut de mention, dans tout écrit constatant un contrat de prêt, est sanctionné par l'annulation de la clause stipulant l'intérêt conventionnel et la substitution consécutive à celui-ci de l'intérêt légal ; qu'il s'ensuit que la question n'est pas recevable ;

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARE IRRECEVABLE la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : M. Vitse - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

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