Numéro 2 - Février 2024

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 2 - Février 2024

Partie I - Arrêts des chambres et ordonnances du Premier Président

ACCIDENT DE LA CIRCULATION

2e Civ., 15 février 2024, n° 21-22.319, (B), FS

Cassation partielle

Loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 – Domaine d'application – Action volontaire – Exclusion – Cas fortuit (non)

Ne constitue pas un accident au sens de l'article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, celui qui, volontairement provoqué par le conducteur ou un tiers, ne présente pas, de ce fait, un caractère fortuit.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 8 juillet 2021), Mme [X], passagère d'un véhicule assuré par la société Generali Pacifique NC (l'assureur), conduit par Mme [P], a été blessée lors de la sortie de route de ce véhicule, le 13 avril 2019.

2. Elle a assigné devant le juge des référés du tribunal de première instance de Nouméa l'assureur, en présence de la caisse de compensation des prestations familiales des accidents du travail de la Nouvelle-Calédonie, aux fins d'obtenir la désignation d'un expert ainsi que le versement d'une provision à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L'assureur fait grief à l'arrêt d'ordonner une expertise médicale et de le condamner à verser à Mme [X] une provision de 5 000 000 CFP à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel, alors « que ne subit pas un accident de la circulation au sens de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 le passager dont le dommage est la conséquence directe de l'action volontaire du conducteur ; que par suite, l'assureur de responsabilité civile du conducteur d'un véhicule terrestre à moteur ne couvre pas les dommages résultant de la décision de ce dernier de précipiter son véhicule en dehors de la chaussée ; qu'en retenant en l'espèce, après avoir pourtant constaté que Mme [P], conductrice du véhicule, était volontairement sortie de la route, que l'assureur avait néanmoins l'obligation non sérieusement contestable de prendre en charge le dommage corporel de Mme [X], passagère du véhicule, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, applicable en Nouvelle-Calédonie :

4. Selon ce texte, les dispositions du premier chapitre de cette loi s'appliquent, même lorsqu'elles sont transportées en vertu d'un contrat, aux victimes d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur, ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres.

5. Ne constitue pas un accident au sens de ce texte, celui qui, volontairement provoqué par le conducteur ou un tiers, ne présente pas, de ce fait, un caractère fortuit.

6. Pour accueillir la demande de provision formée par la victime, l'arrêt énonce que la conductrice du véhicule est volontairement sortie de la route mais qu'aucun élément du dossier ne laisse penser qu'elle ait entendu attenter à la vie de sa passagère. Il en déduit qu'à l'égard de celle-ci, le sinistre est un accident de la circulation dans lequel a été impliqué un véhicule terrestre à moteur.

7. En statuant ainsi, la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas soutenu que l'obligation de l'assureur pourrait résulter d'un autre fondement que celui pris de l'engagement de la responsabilité de son assuré au titre de la loi du 5 juillet 1985, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

8. Aucun moyen ne développant de griefs, notamment sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, à l'encontre du chef de dispositif confirmant la décision d'ordonner une expertise, la cassation ne peut s'étendre à celui-ci.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Generali Pacifique NC à payer à Mme [X] une provision à valoir sur son préjudice, l'arrêt rendu le 8 juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa autrement composée.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : Mme Martinel - Rapporteur : Mme Chauve - Avocat général : Mme Nicolétis - Avocat(s) : SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet -

Textes visés :

Article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 12 décembre 2002, pourvoi n° 00-17.433, Bull. 2002, II, n° 282 (cassation) ; 2e Civ., 23 janvier 2003, pourvoi n° 00-21.676, Bull. 2003, II, n° 8 (cassation sans renvoi) ; 2e Civ., 22 janvier 2004, pourvoi n° 01-11.665, Bull. 2004, II, n° 14 (annulation).

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