Numéro 2 - Février 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 2 - Février 2023

POUVOIRS DES JUGES

Soc., 1 février 2023, n° 20-19.661, (B), FS

Rejet

Applications diverses – Contrat de travail – Licenciement – Licenciement pour motif économique – Difficultés économiques – Caractérisation – Indicateurs économiques – Evolution significative – Appréciation – Appréciation souveraine – Limites – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 25 mai 2020), Mme [C] a été engagée par contrats saisonniers le 10 juillet 1995 par la société Cassin et fils hôtel Paradis (la société), en qualité d'assistante de direction. Elle a été engagée par contrat à durée indéterminée du 2 janvier 2013 en qualité de directrice, puis affectée au poste de directrice d'hébergement à compter du 1er janvier 2014.

2. Le 16 décembre 2016, elle a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement économique.

Le contrat de travail a été rompu à l'issue du délai de réflexion dont elle disposait après son adhésion, le 9 janvier 2017, au contrat de sécurisation professionnelle.

3. Par jugement du 18 février 2020, la société a été mise en redressement judiciaire et les sociétés MJA, prise en la personne de Mme [O], et FHB, prise en la personne de Mme [F], désignées respectivement en qualité de mandataire judiciaire et d'administrateur.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches, et le second moyen, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

5. La salariée fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement est intervenu pour motif économique et de la débouter de ses demandes subséquentes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, alors « que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés ; qu'en retenant que le licenciement était justifié par la baisse du seul excédent brut d'exploitation, quand elle a constaté que le chiffre d'affaire de l'entreprise avait augmenté au cours de la même période de sorte que l'évolution n'était pas significative, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article L. 1233-3 du code du travail dans sa rédaction alors applicable. »

Réponse de la Cour

6. Aux termes de l'article L. 1233-3, 1°, du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

7. La cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a d'abord constaté que la société justifiait qu'elle avait été confrontée à des difficultés économiques caractérisées par une dégradation de l'excédent brut d'exploitation (EBE) négatif de - 726 000 euros en 2014, puis de - 874 000 euros en 2015. Elle a ensuite relevé que si, en 2016, l'EBE dégagé avait été positif à + 32 000 euros, ce chiffre était le résultat d'opérations financières qu'elle avait réalisées et notamment la renégociation d'un crédit-bail immobilier, une baisse significative des frais de holding, ainsi qu'un apport en compte courant associé. Elle a enfin constaté qu'en 2017, l'EBE estimé à -106 000 euros par la société dans sa note d'information des motifs économiques, était négatif de -124 013 euros dans les comptes de l'exercice 2017.

8. Elle a pu en déduire, au regard du caractère sérieux et durable de la dégradation de l'excédent brut d'exploitation, que cet indicateur avait subi une évolution significative.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Sommer - Rapporteur : Mme Prieur - Avocat général : Mme Grivel - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia -

Textes visés :

Article L. 1233-3, 1°, du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016.

Rapprochement(s) :

Sur la caractérisation des difficultés économiques au sens de la rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, à rapprocher : Soc., 1er juin 2022, pourvoi n° 20-19.957, Bull., (cassation).

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