Numéro 2 - Février 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 2 - Février 2023

CASSATION

2e Civ., 16 février 2023, n° 20-23.241, (B), FRH

Cassation partielle

Pourvoi – Pourvoi incident – Pourvoi incident contre un codéfendeur au pourvoi principal à l'égard duquel le demandeur s'est préalablement désisté – Recevabilité (non)

Il résulte de la combinaison des articles 550, 612 et 614 du code de procédure civile qu'est irrecevable le pourvoi incident qui critique un chef de l'arrêt attaqué n'intéressant qu'un codéfendeur au pourvoi principal, dès lors qu'il a été formé, après expiration du délai pour agir à titre principal, postérieurement au désistement partiel du demandeur au pourvoi principal, en ce qu'il était dirigé à l'encontre de ce codéfendeur.

Pourvoi – Désistement – Effets – Pourvoi incident – Recevabilité (non)

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la Caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé à l'encontre de Mme [K] [T], veuve [M], M. [H] [W] [M], M. [P] [V] [M], Mme [E] [S] [M] et de M. [I] [H] [D] [M].

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Papeete, 10 septembre 2020), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 9 février 2017, pourvoi n° 16-10.317), [X] [M] (l'assuré), salarié de la société [7], devenue [5] (l'employeur), a été victime, le 22 septembre 2003, d'un accident que la Caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française (la caisse) a refusé de prendre en charge au titre de la législation professionnelle.

L'intéressé a été indemnisé selon le régime de la longue maladie jusqu'au 1er octobre 2006, date à laquelle il a fait valoir ses droits à la retraite.

L'ayant informé, le 26 mars 2007, de l'avis favorable du médecin-conseil à la reconnaissance du caractère professionnel de son accident, la caisse a attribué à l'assuré une rente indemnisant une incapacité permanente partielle de 80 % à effet au 1er février 2004.

La caisse a délivré à l'employeur une mise en demeure suivie d'une contrainte, signifiée le 9 mai 2011, en vue du remboursement des indemnités journalières qui lui ont été versées, du 1er mars 2004 au 20 septembre 2006, pour le compte de l'assuré en raison de la perception, par celui-ci, d'une rente du régime des accidents du travail sur la même période.

3. L'employeur a formé opposition à cette contrainte devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale. À la suite du décès de l'assuré, ses ayants droit ont repris l'instance.

Recevabilité du pourvoi incident, examinée d'office

Vu les articles 550, 612 et 614 du code de procédure civile :

4. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des textes susvisés.

5. Il résulte de la combinaison des textes susvisés qu'est irrecevable le pourvoi incident qui critique un chef de l'arrêt attaqué n'intéressant qu'un codéfendeur au pourvoi principal, dès lors qu'il a été formé, après expiration du délai pour agir à titre principal, postérieurement au désistement partiel du demandeur au pourvoi principal, en ce qu'il était dirigé à l'encontre de ce codéfendeur.

6. Le pourvoi incident formé par l'employeur le 20 juillet 2021, postérieurement au désistement de la caisse le 17 mai 2021 du pourvoi principal en ce qu'il était dirigé contre les ayants droit de l'assuré, critique un chef de l'arrêt attaqué ayant déclaré irrecevable sa demande en condamnation de ces derniers au remboursement des indemnités journalières indûment reversées à l'assuré. Ce chef de la décision ne concerne que les ayants droit de l'assuré.

7. Le pourvoi incident est, dès lors, irrecevable.

Examen du moyen du pourvoi principal

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. La caisse fait grief à l'arrêt de valider la contrainte dans la limite d'un certain montant, alors « que l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations indûment payées se prescrit par deux ans à compter du paiement des prestations sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration ; que lorsque le salaire est maintenu en totalité, l'employeur est subrogé de plein droit à l'assuré dans les droits de celui-ci aux indemnités journalières qui lui sont dues, de sorte que le délai de deux ans court à compter de chaque paiement effectué par la caisse entre les mains de l'employeur subrogé ; que devant la cour d'appel de renvoi, la caisse a soutenu, à titre subsidiaire, que la prescription biennale ne pouvait atteindre les indemnités journalières versées entre les mains de l'employeur subrogé dans les droits de son salarié à compter du 9 avril 2006, soit un montant total de 5.174.689 F CFP au vu des mandats de paiement produits ; qu'en limitant à la somme de 2.874.827 F CFP le recours de la caisse, la cour d'appel, qui s'est référée aux périodes d'indemnisation de l'assuré mentionnées dans la contrainte, et non à la date effective de leur paiement par la caisse à l'employeur subrogé, a violé l'article 1er de la délibération n° 2003-69 APF du 15 mai 2003. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

9. L'employeur conteste la recevabilité du moyen, pris en sa première branche, comme étant nouveau.

10. Cependant, il résulte des conclusions de la caisse que celle-ci demandait, à titre subsidiaire, le cantonnement de sa créance à une somme correspondant aux paiements intervenus à compter du 9 avril 2006, au vu des mandats de paiement émis au titre des avances auprès de l'employeur.

11. Le moyen, qui était dans le débat, n'est donc pas nouveau et est recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 1er de la délibération n° 2003-69 APF du 15 mai 2003 relative au recouvrement des prestations versées indûment par la Caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française :

12. Aux termes de ce texte, sauf dispositions spéciales, l'action en recouvrement des prestations indûment payées par la Caisse de prévoyance sociale dans le cadre de la gestion des régimes de protection sociale qui lui est confiée, se prescrit par deux ans à compter du paiement entre les mains du bénéficiaire, excepté en cas de fraude ou de fausse déclaration.

13. Pour cantonner à un certain montant la créance non prescrite de la caisse, l'arrêt relève que la mise en demeure adressée par la caisse à l'employeur, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception reçue le 9 avril 2008, a pour objet une créance de prestations indues correspondant à la part due par la caisse à l'assuré au titre des indemnités journalières dans le salaire maintenu par l'employeur au cours de la période d'arrêt de travail pour longue maladie. Il en déduit que seuls échappent à la prescription les versements réalisés par la caisse au titre des périodes d'arrêt de travail de l'assuré postérieures au 9 avril 2006.

14. En statuant ainsi, alors que le point de départ du délai de prescription biennal prévu par le texte susvisé doit être fixé à la date du paiement entre les mains de l'employeur, subrogé dans les droits de l'assuré, bénéficiaire des indemnités journalières indûment versées, la cour d'appel a violé ce texte.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi principal, la Cour :

DÉCLARE le pourvoi incident irrecevable ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il valide la contrainte n° 02-201 décernée par la Caisse de prévoyance sociale le 28 mars 2011 à l'encontre de la société [5] pour un montant de 2 874 827 FCP, l'arrêt rendu le 10 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Labaune - Avocat(s) : SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre ; SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Articles 550, 612 et 614 du code de procédure civile.

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