Numéro 2 - Février 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 2 - Février 2022

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL

2e Civ., 17 février 2022, n° 20-18.850, (B), FRH

Rejet

Cotisations – Taux – Fixation – Catégorie de risques – Classement d'un risque – Arrêté du 17 octobre 1995 – Nomenclature – Défaut de rubrique – Assimilation

Selon l'article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2010-753 du 5 juillet 2010, le classement d'un établissement dans une catégorie de risque est effectué en fonction de l'activité exercée selon la nomenclature des risques figurant en annexe de l'arrêté du 17 octobre 1995 modifié relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 26 décembre 2018.

Lorsque l'activité exercée ne correspond à aucun code risque, le classement de l'établissement est effectué par assimilation.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 12 juin 2020), la Société [2] (la société), exploitant un établissement à Ruffec, a contesté le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, notifié par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Centre Ouest (la CARSAT), pour l'année 2019, sur la base du code 63.1EE de la nomenclature des risques.

2. La société a saisi d'un recours la juridiction de la tarification.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La CARSAT fait grief à l'arrêt de dire non fondée sa décision confirmant le classement de l'établissement sous le code risque 63.1EE et de retenir le code risque 51.6LC, alors :

« 1°/ que le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé annuellement pour chaque catégorie de risques en fonction de l'activité principale de l'établissement concerné ; qu'en l'espèce, la CARSAT Centre Ouest avait appliqué le code risque 63.1EE « Entreposage et stockage non frigorifique non reliés à une voie d'eau. Entreposage de liquides en vrac » à l'établissement de [Localité 4] de la société, qui avait une activité principale de préparation de commandes de produits alimentaires ; que l'employeur contestait ce code risque et proposait le code risque 51.3TC « Commerce de gros (commerce interentreprises) alimentaire non spécialisé » ; que la cour d'appel a soulevé d'office l'inapplicabilité de ces deux codes risque et a proposé aux parties l'application du code risque 51.6LC « Intermédiaires du commerce avec manutention. Commerce de gros de produits chimiques et autres » ou 74.1GB « Groupement d'employeurs. Coopératives d'activité et d'emploi. Services divers rendus principalement aux entreprises non désignés par ailleurs » ; qu'en jugeant que le code risque 51.6LC devait être appliqué à l'établissement de Ruffec, quand ce dernier n'était applicable qu'aux commerces non alimentaires, la cour d'appel a violé les articles L. 242-5 et D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale, ainsi que l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles ;

2°/ que le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé annuellement pour chaque catégorie de risques en fonction de l'activité principale de l'établissement concerné ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé d'office l'inapplicabilité des codes risque revendiqués par les parties et a proposé l'application du codes risque 51.6LC ou 74.1GB ; qu'après avoir considéré que le code risque 74.1GB n'avait « finalement aucun rapport avec l'activité de l'établissement exploité par la société » ; qu'en jugeant que le code risque 51.6LC devait être appliqué à l'établissement de Ruffec, sans caractériser la correspondance entre l'activité de préparation de commandes de produits essentiellement alimentaires reconnue à l'établissement et celle de manutention de produits chimiques relative au code risque appliqué, la cour d'appel a violé les articles L. 242-5 et D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale, ainsi que l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2010-753 du 5 juillet 2010, le classement d'un établissement dans une catégorie de risque est effectué en fonction de l'activité exercée selon la nomenclature des risques figurant en annexe de l'arrêté du 17 octobre 1995 modifié relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 26 décembre 2018.

5. Lorsque l'activité exercée ne correspond à aucun code risque, le classement de l'établissement est effectué par assimilation.

6. Pour retenir l'application du code 51.6LC de la nomenclature des risques, l'arrêt constate que la majorité des salariés de l'établissement exerce l'activité de préparation de commandes de produits essentiellement alimentaires, activité d'intermédiaire du commerce consistant à effectuer la livraison à des magasins de détail de commandes reçues de fournisseurs et qui, comportant des activités de déchargement dans les zones de stockage et de chargement sur des palettes destinées aux magasins, s'effectue avec manutention. Il relève que le code 51.3TC revendiqué initialement par la société et le code 63.1EE appliqué par la CARSAT, ainsi que le code 74.1GB envisagé au cours des débats, n'ont aucun rapport avec l'activité de l'établissement et qu'il s'ensuit que le code correspondant le plus à l'activité de celui-ci est le code 51.6LC qui doit s'appliquer par assimilation.

7. De ces constatations et énonciations, procédant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, la cour d'appel a pu déduire que le code 51.6LC de la nomenclature des risques était applicable par assimilation.

8. Le moyen n'est, dés lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Lapasset - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Célice, Texidor, Périer -

Textes visés :

Article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2010-753 du 5 juillet 2010.

2e Civ., 10 février 2022, n° 20-13.779, (B), FRH

Cassation partielle

Faute inexcusable de l'employeur – Indemnisations complémentaires – Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) – Action subrogatoire – Recevabilité

Faute inexcusable de l'employeur – Effets – Majoration de la rente – Montant – Fixation – Capacité à agir – Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA)

Désistement partiel

1. Il est donné acte au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (le FIVA) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre, d'une part, l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 22 février 2019, d'autre part, le ministre chargé de la sécurité sociale.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 janvier 2020), après avoir indemnisé les ayants droit de [F] [R], ancien salarié de la société SNECMA, actuellement dénommée Safran Aircraft Engines, en raison d'une affection reconnue au titre du tableau n° 30 bis des maladies professionnelles à l'origine de son décès, le FIVA, d'une part, a saisi une juridiction de sécurité sociale aux fins de voir reconnaître la faute inexcusable de l'employeur et d'obtenir, notamment, la fixation des sommes correspondant à la majoration de la rente et à l'indemnité forfaitaire, d'autre part, est intervenu à l'instance en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur qui avait été engagée par Mme [R], veuve de [F] [R]. Ces deux instances ont été jointes.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Le FIVA fait grief à l'arrêt de dire irrecevables ses demandes tendant au versement de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale et à la majoration de rente d'ayant droit, alors :

« 1°/ qu'aux termes de l'article 53 VI de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000, la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, à l'occasion de l'action à laquelle le FIVA est partie, ouvre droit à la majoration des indemnités versées à la victime ou à ses ayants droit en application de la législation de sécurité sociale, l'indemnisation à la charge du FIVA étant alors révisée en conséquence de sorte que le Fonds, recevable à exercer l'action en reconnaissance de la faute inexcusable, est recevable, par là même, à demander le versement de la majoration de rente d'ayant droit, peu important qu'il n'ait pas préalablement présenté d'offre d'indemnisation complémentaire de ce chef à la victime ou à ses ayants droit ; qu'en énonçant, pour déclarer le FIVA irrecevable à solliciter la majoration de la rente d'ayant droit attribuée par la CPAM de Seine et Marne à Mme [R], que le FIVA, subrogé dans les droits des ayants droit de M. [F] [R], ne présentait aucun mandat de Mme [R] et ne pouvait dès lors formuler de majoration de rente en son nom ou pour son compte, la cour d'appel a violé l'article 53 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 et les articles L. 452-1 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale ;

2°/ qu'aux termes de l'article 53 VI de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000, la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, à l'occasion de l'action à laquelle le FIVA est partie, ouvre droit à la majoration des indemnités versées à la victime ou à ses ayants droit en application de la législation de sécurité sociale, incluant l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale en cas d'incapacité permanente de la victime de 100 %, l'indemnisation à la charge du FIVA étant alors révisée en conséquence de sorte que le Fonds, recevable à exercer l'action en reconnaissance de la faute inexcusable, est recevable, par là même, à demander l'allocation de l'indemnité forfaitaire, peu important qu'il n'ait pas préalablement présenté d'offre d'indemnisation complémentaire de ce chef à la victime ou à ses ayants droit ; qu'en énonçant, pour déclarer le FIVA irrecevable à solliciter le versement de l'indemnité forfaitaire, qu'il n'apparaissait pas de quelconque référence à cette indemnité dans les indemnisations acceptées par les ayants droit, qu'en application de l'article 53 VI de la loi du 23 décembre 2000, le FIVA était subrogé, à concurrence des sommes versées, dans les droits que les personnes qu'il a indemnisées possèdent contre le responsable du dommage, et qu'il s'en déduisait que la subrogation transmettait au FIVA la créance et ses accessoires uniquement pour les chefs de préjudices qu'il avait indemnisés, la cour d'appel a violé l'article 53 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 et les articles L. 452-1 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 452-1, L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale et l'article 53 VI de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 :

4. Il résulte des dispositions combinées des trois premiers de ces textes que, lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, d'une part, la victime ou ses ayants droit reçoivent une majoration des indemnités qui leur sont dues, d'autre part, si la victime est atteinte d'un taux d'incapacité permanente de 100 %, il lui est alloué, en outre, une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation.

5. Selon le quatrième de ces textes, la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, à l'occasion de l'action à laquelle le fonds est partie, ouvre droit à la majoration des indemnités versées à la victime ou à ses ayants droit en application de la législation de sécurité sociale.

L'indemnisation à la charge du fonds est alors révisée en conséquence.

6. Pour dire irrecevables les demandes du FIVA tendant au versement de l'indemnité forfaitaire et à la majoration de rente d'ayant droit perçue par Mme [R], l'arrêt, après avoir constaté qu'il n'apparaît pas dans les indemnisations acceptées par les ayants droit une quelconque référence à cette indemnité, rappelle que le FIVA est subrogé, à concurrence des sommes versées dans les droits que les personnes qu'il a indemnisées possèdent contre le responsable, et en déduit que la subrogation ne joue au profit du FIVA que pour les chefs de préjudices qu'il a indemnisés.

7. Il ajoute, s'agissant de la demande de majoration de la rente versée à Mme [R], que le FIVA ne justifie d'aucun mandat que celle-ci lui aurait confié, de sorte qu'il ne peut formuler une telle demande en son nom et pour son compte.

8. En statuant ainsi, alors que la majoration de rente constitue une prestation de sécurité sociale due par l'organisme social dans tous les cas où la maladie professionnelle consécutive à une faute inexcusable entraîne le versement d'une rente, de même que l'indemnité forfaitaire due lorsque la victime est atteinte d'incapacité permanente de 100 %, de sorte que le FIVA, recevable à exercer l'action en reconnaissance de faute inexcusable, l'est, par là même, à demander la fixation de la majoration de la rente et l'allocation de l'indemnité forfaitaire, peu important qu'il n'ait ni justifié d'un mandat de Mme [R], ni préalablement indemnisé les ayants droit de la victime au titre de l'indemnité forfaitaire ou leur ait présenté une offre complémentaire à ce titre, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement en ce qu'il a fixé à son maximum la majoration de la rente due à [F] [R], dit que la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne versera cette majoration au FIVA à charge pour lui de faire une proposition d'indemnisation complémentaire aux ayants droit de [F] [R], alloué au FIVA l'indemnité forfaitaire de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale à charge pour lui de faire une proposition d'indemnisation complémentaire aux ayants droit de [F] [R] et, statuant à nouveau des chefs infirmés, déclaré irrecevables les demandes du FIVA relatives à l'indemnité forfaitaire et à la majoration de la rente, l'arrêt rendu le 10 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Martin - Avocat général : M. Grignon Dumoulin - Avocat(s) : Me Le Prado ; SCP Célice, Texidor, Périer -

Textes visés :

Articles L. 452-1, L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ; article 53, VI, de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000.

2e Civ., 17 février 2022, n° 20-15.251, (B), FRH

Rejet

Procédure – Procédure préliminaire – Appréciation du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie – Décision de la caisse – Caractère implicite – Portée – Maladie hors tableau

Il résulte des articles R. 441-10 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, que la caisse dispose d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration de la maladie professionnelle et le certificat médical initial pour statuer sur le caractère professionnel de la maladie. La victime qui n'a pas été informée avant l'expiration de ce délai de la nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, peut invoquer une décision de prise en charge implicite. Depuis l'abrogation de l'article R. 461-9 du code de la sécurité sociale par le décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, une maladie hors tableau peut faire l'objet d'une reconnaissance implicite.

Procédure – Procédure préliminaire – Appréciation du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie – Décision de la caisse – Reconnaissance implicite – Maladie hors tableau – Possibilité

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 18 février 2020), par décision du 23 avril 2015, la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne (la caisse) a refusé de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, la maladie déclarée le 21 novembre 2014 par M. [T] (la victime), salarié de la société [5], aux droits de laquelle vient la société [4], aux motifs que la maladie n'était pas inscrite dans l'un des tableaux des maladies professionnelles et que la victime ne présentait pas un taux d'incapacité permanente au moins égal à 25 %.

2. A la suite de la décision de la commission de recours amiable du 2 juillet 2015, la victime a saisi, le 21 octobre 2015, une juridiction de sécurité sociale.

3. Par décision du 4 octobre 2017, après avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, la caisse a pris une seconde décision de refus de prise en charge de la maladie déclarée par la victime.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. La caisse fait grief à l'arrêt de déclarer recevable le recours de la victime à l'encontre de la décision de la caisse notifiée le 4 octobre 2017, alors :

« 1°/ qu'en l'absence de contestation dans les conditions posées par les articles R. 142-1 et R. 142-18 du code de la sécurité sociale, la décision par laquelle une caisse primaire d'assurance maladie refuse la prise en charge d'une affection au titre de la législation professionnelle s'impose à l'assuré et rend irrecevable la demande, formée devant le juge, et visant à la prise en charge de la même affection au titre de la législation professionnelle ; qu'en retenant au cas d'espèce, pour déclarer la demande de l'assuré recevable, que la reconnaissance implicite de l'affection déclarée rendait sans objet la décision explicite de refus, la cour d'appel a violé les articles R. 142-1 et R. 142-18 du code de la sécurité sociale, ensemble les règles gouvernant l'autorité de la chose décidée ;

2°/ que le tribunal des affaires de sécurité sociale ne peut être saisi d'une réclamation contre une décision d'un organisme de sécurité sociale qu'après que celle-ci a été soumise à la commission de recours amiable de cet organisme ; que l'assuré qui sollicite devant le juge la reconnaissance implicite d'une affection au titre de la législation professionnelle doit, au préalable, contester la décision explicite de refus qui lui a été opposée devant la commission de recours amiable ; qu'en retenant au cas d'espèce, pour déclarer la demande recevable, que la reconnaissance implicite de l'affection déclarée rendait sans objet la décision explicite de refus, la cour d'appel a violé les articles R. 142-1 et R. 142-18 du code de la sécurité sociale ;

3°/ que le juge ne peut se prononcer sur le bien-fondé d'une demande qu'après avoir établi, au préalable, sa recevabilité ; qu'au cas d'espèce, les juges du fond ont considéré que la demande de prise en charge de l'affection était fondée, puis en ont déduit qu'elle était recevable ; que dès lors, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile, ensemble les articles R. 142-1 et R. 142-18 du code de la sécurité sociale ;

4°/ que le juge ne peut déclarer une demande recevable en se basant sur des considérations liées à son bien-fondé ; qu'au cas d'espèce, les juges du fond ont considéré que la demande de prise en charge de l'affection était fondée, puis en ont déduit qu'elle était recevable ; que dès lors, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile, ensemble les articles R. 142-1 et R. 142-18 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte des articles R. 142-1, alinéas 1 et 2, et R. 142-18, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige, que le juge du contentieux de la sécurité sociale ne peut être saisi d'un recours qu'après que le litige a fait l'objet d'une réclamation soumise à la commission de recours amiable de l'organisme de sécurité sociale compétent.

6. Lorsque le recours exercé à l'encontre d'une décision de rejet de la demande de prise en charge d'une maladie au titre de la législation professionnelle est recevable, la juridiction, régulièrement saisie d'une demande de reconnaissance du caractère professionnel de cette maladie, doit statuer sur la demande, et la victime n'est pas tenue de former un nouveau recours à l'encontre d'une seconde décision de rejet notifiée par l'organisme de sécurité sociale en cours de procédure judiciaire.

7. Pour déclarer recevable le recours de la victime dirigé contre la décision de rejet du 23 avril 2015, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que la caisse ne justifie pas que la décision de la commission de recours amiable du 2 juillet 2015 avait été notifiée à la victime, de sorte que celle-ci devait être considérée comme n'ayant pas été informée des délais de recours, et en déduit que le délai de forclusion n'avait pas commencé à courir.

8. Il s'ensuit que régulièrement saisie d'une contestation contre la décision de rejet du 23 avril 2015, il appartenait à la cour d'appel de se prononcer sur le caractère professionnel de la maladie, de sorte que la victime n'était pas tenue de former un nouveau recours à l'encontre de la seconde décision de rejet du 4 octobre 2017, notifiée en cours de procédure.

9. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1, et 1015 du code de procédure civile, la décision attaquée se trouve légalement justifiée.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

10. La caisse fait grief à l'arrêt de dire que la pathologie déclarée par la victime devait être prise en charge au titre de la législation professionnelle, alors « que la prise en charge, par la caisse, d'une maladie hors tableau, ne peut faire l'objet d'une reconnaissance implicite ; qu'en retenant au cas d'espèce que l'assuré pouvait se prévaloir d'une décision implicite de prise en charge quand elle constatait que l'affection déclarée n'était pas inscrite dans un tableau des maladies professionnelles, la cour d'appel a violé les articles L. 461-1, R. 441-10, R. 441-14, dans leur rédaction applicable au litige, et R. 461-9, alors applicable, du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

11. La victime soulève l'irrecevabilité du moyen, comme étant nouveau, mélangé de fait et de droit.

12. Cependant, le moyen, qui est de pur droit en tant qu'il ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond, est recevable.

Bien-fondé du moyen

13. Il résulte des articles R. 441-10 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable à la date de déclaration de la maladie professionnelle, que la caisse dispose d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration de la maladie professionnelle et le certificat médical initial pour statuer sur le caractère professionnel de la maladie.

La victime, qui n'a pas été informée avant l'expiration de ce délai de la nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, peut invoquer une décision de prise en charge implicite.

14. Ayant souverainement apprécié que la caisse n'apporte pas la preuve que le courrier du 19 février 2015, par lequel la caisse informait la victime du recours à un délai complémentaire, avait été envoyé à celle-ci, de sorte que le délai d'instruction de la demande avait été dépassé, la caisse ayant statué par décision du 23 avril 2015, l'arrêt en a exactement déduit la reconnaissance implicite du caractère professionnel de la maladie non inscrite dans un tableau des maladies professionnelles.

15. Le moyen, qui se fonde sur un texte abrogé au jour de la déclaration de la maladie par la victime, n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Dudit - Avocat général : M. Halem - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger ; Me Balat -

Textes visés :

Articles R. 142-1, alinéas 1 et 2, et R. 142-18, alinéa 1, du code de la sécurité sociale ; articles R. 441-10, R. 441-14 et R. 461-9 du code de la sécurité sociale.

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