Numéro 2 - Février 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 2 - Février 2022

BANQUE

Com., 9 février 2022, n° 20-16.471, (B), FS

Rejet

Responsabilité – Faute – Manquement au devoir d'information du client – Applications diverses – Contrat d'ouverture d'un plan d'épargne en actions (PEA) – Obligation de n'ouvrir qu'un plan d'épargne en actions (PEA) par contribuable – Preuve – Charge – Détermination

L'article 1 du décret n° 92-797 du 17 août 1992 dispose que l'ouverture d'un plan d'épargne en actions (PEA) fait l'objet d'un contrat écrit et que ce contrat informe le souscripteur qu'il ne peut être ouvert qu'un plan par contribuable ou par chacun des époux soumis à une imposition commune. Il en résulte que la seule obligation qui pèse sur la banque à cet égard est de proposer au souscripteur un contrat comportant la mention précitée et que c'est au souscripteur, s'il s'en prévaut, qu'il appartient de prouver que la mention n'y figure pas.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 février 2020), le 15 décembre 2011, l'administration fiscale a notifié à M. [O] une proposition de rectification lui contestant le bénéfice de l'exonération de l'imposition sur les plus-values réalisées sur la cession, le 30 mai 2008, de titres figurant sur un plan d'épargne en actions (PEA) ouvert le 14 décembre 2001 auprès de la Société générale, au motif qu'il était titulaire d'un second PEA, ouvert le 1er mars 2002 auprès de la société BNP Paribas (la banque).

2. Reprochant à cette dernière de ne pas l'avoir informé de l'interdiction d'être titulaire de deux PEA, M. [O] l'a assignée en indemnisation.

Examen du moyen

Sur le moyen, ci-après annexé, pris en ses première, deuxième et cinquième branches, et sur ce moyen, pris en ses troisième, quatrième, sixième, septième et huitième branches, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de rejeter les demandes de M. [O] tendant à ce qu'il soit jugé que la banque a manqué à son obligation de conservation des documents bancaires et à ce qu'elle soit condamnée à lui payer la somme de 8 000 euros à titre de dommages-intérêts

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Et sur le moyen, pris en ses troisième, quatrième, sixième, septième et huitième branches, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de rejeter les demandes de M. [O] d'indemnisation de préjudices financiers et d'un préjudice moral fondées sur un manquement de la banque à son obligation de l'informer de l'interdiction d'être titulaire de deux PEA

Enoncé du moyen

4. M. [O] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes d'indemnisation de préjudices financiers et d'un préjudice moral fondées sur un manquement de la banque à son obligation de l'informer de l'interdiction d'être titulaire de deux PEA, alors :

« 3°/ que la cour d'appel a constaté que l'article 1er du décret du 17 août 1992 imposait à la banque une obligation d'information, l'ouverture d'un PEA devant faire l'objet d'un contrat écrit devant « informe[r] le souscripteur qu'il ne peut être ouvert qu'un plan par contribuable ou par chacun des époux soumis à une imposition commune.... » ; qu'en retenant, pour débouter M. [O] de ses demandes, que l'interdiction de posséder plus d'un PEA par contribuable résulte de la loi et que nul n'est censé ignorer la loi, de sorte que la banque n'était pas tenue de l'informer de cette interdiction, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 du même code, ensemble l'article 1er du décret n° 92-797 du 17 août 1992 ;

4°/ qu'il incombe au débiteur d'une obligation d'information de prouver qu'il l'a exécutée ; que pour débouter M. [O] de ses demandes, la cour d'appel a considéré que M. [O] soutenant que la banque avait omis de porter à sa connaissance l'interdiction pour un contribuable de posséder deux plans d'épargne en actions, information que l'article 1er du décret du 17 août 1992 impose aux banques de transmettre au souscripteur dans le contrat d'ouverture du plan, il lui appartenait de démontrer le manquement de la banque à cette obligation ; qu'en statuant de la sorte, quand il incombait à BNP Paribas de démontrer qu'elle avait délivré cette information dans le contrat d'ouverture du PEA qu'aurait souscrit M. [O], ce dont elle s'est abstenue, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, devenu 1231 du même code, ensemble l'article 1315, devenu 1353, du même code ;

6°/ qu'en retenant, pour débouter M. [O] de ses demandes, qu'à supposer même que BNP Paribas ait manqué à son obligation d'information, M. [O] ne pouvait prétendre avoir ignoré l'interdiction d'ouvrir deux PEA au regard de sa connaissance nécessaire de dispositions légales d'ordre public, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et a violé l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 du même code, ensemble l'article 1er du décret n° 92-797 du 17 août 1992 ;

7°/ qu'en retenant, pour débouter M. [O] de ses demandes, qu'à supposer même que BNP Paribas ait manqué à son obligation d'information, M. [O] ne pouvait prétendre avoir ignoré l'interdiction d'ouvrir deux PEA au regard des circonstances factuelles du dossier relevées par l'administration fiscale, la proposition de rectification précisant « La mise en ?uvre du manquement délibéré est justifiée par le fait que vous ne pouviez ignorer les règles de fonctionnement du PEA....dans un courrier envoyé le 25/07/2008 au CDI de [Localité 3]-Nord ICE, en réponse à une procédure de rectification engagé(e) par ce service, vous rappeliez les avantages conférés par le Plan d'épargne en actions notamment les titres qui peuvent y être logés et la franchise d'impôt réalisé(e) lors de la cession de ces dits titres. Eu égard, également à l'importance de la plus-value, c'est donc de manière délibérée et en pleine connaissance de cause que vous avez minoré les bases de votre imposition de l'année 2008 », quand il ne résultait pas des termes de cette proposition de rectification la connaissance par M. [O] de la règle de l'interdiction de souscription de deux PEA pour un même contribuable ni que cette information avait été portée à sa connaissance par BNP Paribas en 2002, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et a violé l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 du même code, ensemble l'article 1er du décret n° 92-797 du 17 août 1992 ;

8°/ que les juges doivent motiver leurs décisions ; qu'un motif hypothétique équivaut à une absence de motifs ; qu'en retenant, pour débouter M. [O] de ses demandes, qu'à supposer même que BNP Paribas ait manqué à son obligation d'information, M. [O] ne pouvait prétendre avoir ignoré l'interdiction d'ouvrir deux PEA en raison de l'information que la Société générale n'a pu manquer de lui délivrer lors de l'ouverture du PEA du 14 décembre 2001, la cour d'appel s'est prononcée par un motif hypothétique et a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. L'article 1er du décret n° 92-797 du 17 août 1992 dispose que l'ouverture d'un PEA fait l'objet d'un contrat écrit et que ce contrat informe le souscripteur qu'il ne peut être ouvert qu'un plan par contribuable ou par chacun des époux soumis à une imposition commune. Il en résulte que la seule obligation qui pèse sur la banque à cet égard est de proposer aux souscripteurs un contrat comportant la mention précitée.

6. Après avoir énoncé que le seul grief susceptible d'être invoqué par M. [O] ne pourrait résulter que d'une violation par la banque de l'obligation que lui impose l'article 1er du décret du 17 août 1992 et qu'il appartient à M. [O], qui prétend que la banque a omis de procéder au rappel de la législation en vigueur dans le contrat d'ouverture de son PEA, de démontrer la défaillance de la banque, l'arrêt relève que celui-ci s'abstient de produire l'exemplaire du contrat qu'il détient, cependant que, de son côté, celle-ci justifie, par la production d'un contrat signé en 2001 avec un autre client, que le formulaire qu'elle utilisait alors pour l'ouverture d'un PEA comportait la mention litigieuse. Il en déduit que la preuve du manquement allégué n'est pas rapportée.

7. En l'état de ces seuls motifs, abstraction faite de ceux, surabondants, critiqués par les troisième, sixième, septième et huitième branches, c'est à bon droit que la cour d'appel a rejeté la demande d'indemnisation formée par M. [O].

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : M. Blanc - Avocat général : M. Lecaroz - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; SCP Rocheteau et Uzan-Sarano -

Textes visés :

Article 1 du décret n° 92-797 du 17 août 1992.

Rapprochement(s) :

Sur l'obligation d'information du banquier en matière de PEA, à rapprocher : Com., 4 mars 2008, pourvoi n° 04-16.280, Bull. 2008, IV, n° 49 (Cassation).

Com., 9 février 2022, n° 20-17.551, (B), FRH

Cassation

Responsabilité – Prêt – Prêt inadapté aux facultés de remboursement de l'emprunteur – Prescription – Point de départ – Détermination – Date de l'assignation délivrée par le vendeur du bien et l'agent immobilier

Il résulte de l'article 2224 du code civil que l'acquéreur d'un bien immobilier, condamné à des réparations envers le vendeur et l'agent immobilier pour avoir refusé de réitérer la vente et qui entend obtenir réparation des condamnations ainsi mises à sa charge en engageant la responsabilité du banquier qui lui avait accordé un prêt auquel il avait renoncé en l'estimant inadapté à ses facultés de remboursement, doit agir dans un délai de cinq ans à compter du jour où le dommage s'est manifesté, c'est-à-dire à compter du jour où sa propre responsabilité a été recherchée par l'assignation qui lui a été délivrée par le vendeur du bien et l'agent immobilier.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 12 février 2020) et les productions, M. [Z] a conclu une promesse d'achat portant sur un bien immobilier, sous la condition suspensive d'obtention d'un prêt, lequel lui a été consenti par la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel d'Aquitaine (la banque) en novembre 2009 par l'intermédiaire de M. [F], courtier en opérations de crédit.

2. Le 19 janvier 2010, M. [Z] a refusé de signer l'acte notarié de vente, estimant que le prêt obtenu était excessif au regard de ses capacités financières et qu'il ne pourrait pas le rembourser.

Les vendeurs, puis l'agence immobilière par l'intermédiaire de laquelle la promesse d'achat avait été conclue, l'ont assigné en réparation de leur préjudice respectif.

3. Condamné à payer des dommages-intérêts, tant aux vendeurs à raison de la rupture fautive du contrat de vente par un arrêt du 26 janvier 2012 qu'à l'agence immobilière au titre de sa perte de chance de percevoir sa commission par un arrêt du 16 janvier 2013, M. [Z] a assigné M. [F], le 19 décembre 2014, et la banque, le 22 décembre 2014, en réparation des préjudices subis du fait de ces deux procédures, sur le fondement de l'article 1382, devenu 1240, du code civil.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. [Z] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable comme étant prescrite l'action en responsabilité fondée sur l'article 1382 du code civil qu'il a engagée à l'encontre de la banque et M. [F], alors « que la prescription d'une action en responsabilité délictuelle ne court qu'à compter de la réalisation du dommage et non du jour où apparaît la simple éventualité de cette réalisation ; que M. [Z] faisait valoir que la banque lui avait octroyé à tort un prêt qui constituait la condition suspensive de l'achat d'un bien immobilier alors même que sa situation financière était obérée, de sorte qu'il avait dû refuser de régulariser l'acte de vente ; que les vendeurs et l'agent immobilier avaient alors agi contre M. [Z] et obtenu sa condamnation à raison du défaut de régularisation de la vente malgré l'octroi du prêt ; que M. [Z] a ensuite recherché la responsabilité de la banque et de M. [F] à raison de l'octroi fautif du prêt, qui avait conduit in fine à sa condamnation envers les vendeurs et l'agent immobilier ; qu'en jugeant que l'action en responsabilité aurait été prescrite, aux motifs que le dommage causé par les manquements imputés à la banque et à M. [F] dans l'octroi du prêt « ne résulte pas des décisions de justice ayant condamné M. [Z] envers les vendeurs et l'agent immobilier (...) mais de l'octroi d'un financement et ses conséquences juridiques et financières », cependant que le dommage subi par M. [Z] ne s'était réalisé qu'à compter des décisions passées en force de chose jugée de la cour d'appel d'Agen des 26 janvier 2012 et 16 janvier 2013 l'ayant condamné à payer des dommages-intérêts aux vendeurs et à l'agent immobilier en raison de son refus de régulariser la vente malgré l'octroi du prêt, de sorte que la prescription n'avait pu commencer à courir qu'à partir de ces condamnations, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 2224 du code civil ;

5. Selon ce texte, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître, les faits lui permettant de l'exercer ;

6. Pour déclarer prescrite l'action en responsabilité délictuelle engagée contre la banque, l'arrêt retient que le dommage ne résulte pas des décisions de justice ayant condamné M. [Z] à payer des dommages-intérêts aux vendeurs et à l'agence immobilière à la suite de sa décision de refuser d'acquérir l'immeuble ayant fait l'objet d'un « compromis de vente » auquel il avait consenti, mais de l'octroi du crédit et de ses conséquences juridiques et financières, dont il avait eu connaissance dès le mois de novembre 2009, de sorte qu'à cette date, il était informé du dommage auquel il était exposé.

7. En statuant ainsi, alors que le dommage dont M. [Z] demandait réparation ne s'était pas manifesté aussi longtemps que les vendeurs et l'agent immobilier n'avaient pas, en l'assignant, recherché sa propre responsabilité, soit au plus tôt le 3 septembre 2010, de sorte que, à la date des assignations qu'il a lui-même fait signifier à la banque et au courtier, les 19 et 22 septembre 2014, la prescription n'était pas acquise, la cour d'appel a violé le teste susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu, le 12 février 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Guérin (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Fevre - Avocat(s) : SCP Marlange et de La Burgade ; Me Soltner -

Textes visés :

Article 2224 du code civil.

Com., 9 février 2022, n° 17-19.441, (B), FS

Cassation

Responsabilité – Virement – Prélèvements non autorisés – Responsabilité du prestataire de services de paiement – Action engagée par l'utilisateur – Régime de responsabilité autre que celui prévu par la directive 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 – Application (non)

Responsabilité – Virement – Prélèvements non autorisés – Responsabilité du prestataire de services de paiement – Action engagée par la caution de l'utilisateur – Responsabilité contractuelle de droit commun – Application

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 avril 2017), par un acte du 22 décembre 2009, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Alpes-Provence (la banque) a consenti à la société Groupe centrale automobiles (la société GCA), dont Mme [P] était la gérante, une ouverture de crédit en compte courant, garantie par le cautionnement solidaire de M. [M]. Après avoir dénoncé cette ouverture de crédit, la banque a assigné en paiement la caution, qui a soutenu que la banque avait commis une faute en procédant à des virements, sans autorisation, vers des sociétés tierces, et que leur montant devait venir en déduction de la créance.

2. Par l'arrêt attaqué, la cour d'appel a déclaré M. [M] irrecevable en ses contestations pour forclusion, en retenant que la société GCA disposait d'un délai de treize mois pour contester ces opérations en application de l'article L. 133-24 du code monétaire et financier.

3. Par un arrêt du 16 juillet 2020, la Cour de cassation a saisi la Cour de justice de l'Union européenne (la CJUE) d'une question préjudicielle portant sur l'interprétation de l'article 58 de la directive 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, modifiant les directives 97/7/CE, 2002/65/CE, 2005/60/CE ainsi que 2006/48/CE et abrogeant la directive 97/5/CE.

4. Par un arrêt du 2 septembre 2021 (C-337/20), la CJUE a répondu à la question posée.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. M. [M] fait grief à l'arrêt de le juger irrecevable en ses contestations des sommes, objet des virements litigieux, et de le condamner, en conséquence, à paiement, en qualité de caution, alors « que l'article L. 133-18 du code monétaire et financier, offrant le bénéfice d'un remboursement immédiat des opérations de paiement non autorisées signalées par l'utilisateur à la banque, ne fait pas obstacle à ce que la responsabilité contractuelle de la banque soit retenue, par ailleurs, en cas de manquement à son devoir de vérification s'il est apporté la preuve d'un préjudice en résultant ; qu'en jugeant, pour déclarer M. [M] irrecevable en ses contestations des sommes objets de virements du compte ouvert au nom de la société GCA à diverses sociétés pour cause de forclusion, que « M. [M] excipe de l'application des dispositions du code civil alors que le fonctionnement de ces compte est régi par les dispositions du code monétaire et financier », quand, nonobstant l'article L. 133-18 du code monétaire et financier relatif aux opérations de paiement non autorisées, M. [M] pouvait se prévaloir de la responsabilité contractuelle de la banque, la cour d'appel a violé les articles 1147 du code civil, applicable à la cause, devenu 1231-1 du même code civil et 1937 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :

7. Il résulte de ce texte que toute inexécution d'une obligation contractuelle ayant causé un dommage au créancier de l'obligation oblige le débiteur de celle-ci à en répondre.

8. Par son arrêt précité du 2 septembre 2021, la CJUE a dit pour droit que :

1) L'article 58 et l'article 60, paragraphe 1, de la directive 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 novembre 2007, concernant les services de paiement dans le marché intérieur, modifiant les directives 97/7/CE, 2002/65/CE, 2005/00/CE ainsi que 2006/48/CE abrogeant la directive 97/5/CE, doivent être interprétées en ce sens qu'ils s'opposent à ce qu'un utilisateur de services de paiement puisse engager la responsabilité du prestataire de ces services sur le fondement d'un régime de responsabilité autre que celui prévu par ces dispositions lorsque cet utilisateur a manqué à son obligation de notification prévue audit article 58.

2) L'article 58 et l'article 60, paragraphe 1, de la directive 2007/64 doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à ce que la caution d'un utilisateur de services de paiement invoque, en raison d'un manquement du prestataire de services de paiement à ses obligations liées à une opération non autorisée, la responsabilité civile d'un tel prestataire, bénéficiaire du cautionnement, pour contester le montant de la dette garantie, conformément à un régime de responsabilité contractuelle de droit commun.

9. Pour déclarer M. [M] irrecevable en ses contestations des sommes, objet de virements du compte ouvert au nom de la société GCA, à des sociétés tierces, l'arrêt retient qu'en application de l'article L. 133-24 du code monétaire et financier, la société disposait d'un délai de forclusion de treize mois pour contester ces opérations, que si ce délai a pu être interrompu par les courriels échangés le 3 mars 2001 par lesquels la gérante de la société demandait des renseignements sur ces opérations, un nouveau délai de treize mois a couru à compter de cette date, mais que la contestation des virements litigieux n'a été opérée que par les conclusions du 15 mai 2013, et la forclusion est, par conséquent, encourue.

10. En statuant ainsi, alors que les articles L. 133-18 et L. 133-24 du code monétaire et financier, pris pour la transposition de la directive 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 novembre 2007, concernant les services de paiement dans le marché intérieur, prévoyant le remboursement immédiat des opérations de paiement non autorisées signalées par l'utilisateur à la banque, dans le délai de treize mois, pris pour la transposition de la directive 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 novembre 2007, concernant les services de paiement dans le marché intérieur, ne font pas obstacle à la mise en oeuvre, par la caution de cet utilisateur, de la responsabilité contractuelle de droit commun de la banque, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 avril 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme Graff-Daudret - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SCP Leduc et Vigand ; SCP Capron -

Textes visés :

Article 58 et l'article 60, § 1, de la directive 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 novembre 2007, concernant les services de paiement dans le marché intérieur ; articles L. 133-18 et L. 133-24 du code monétaire et financier.

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