Numéro 2 - Février 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 2 - Février 2022

ASSURANCE DE PERSONNES

1re Civ., 9 février 2022, n° 20-18.544, (B), FRH

Rejet

Assurance vie – Décès – Décès du souscripteur – Sommes dispensées de rapport à la succession – Limite – Primes manifestement exagérées – Primes versées sur un contrat d'assurance sur la vie racheté par son souscripteur – Application (non)

Reprise d'instance

1. Il est donné acte à Mmes [T] et [U] [N] de leur reprise d'instance en qualité d'héritières de [H] [I], décédée le 19 mai 2021.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 26 mai 2020), [G] [X] est décédé le 15 décembre 2012, en laissant pour lui succéder son épouse, [C] [I], et sa fille issue d'une précédente union, Mme [K] [X]. [C] [I] est décédée le 25 novembre 2013, en laissant pour lui succéder ses deux soeurs, [H] et [L].

3. Des difficultés se sont élevées à l'occasion du partage de la succession de [G] [X].

Examen des moyens

Sur le premier moyen et le second moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen, pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

5. Mme [X] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande au titre des assurances sur la vie, tendant à voir ordonner que la somme de 376 508,10 euros et les sommes versées par la Caisse nationale de prévoyance soient réintégrées dans la succession de [G] [X], et de sa demande au titre du recel successoral, alors :

« 1°/ que les règles du rapport à succession et celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers ne s'appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés ; que les primes manifestement exagérées eu égard aux facultés du souscripteur sont sujets à rapport et à réduction pour atteinte à la réserve, quand bien-même le contrat d'assurance vie aurait été racheté par le souscripteur, dès lors que le produit de ce rachat a été réinvesti dans un autre contrat d'assurance vie ; qu'en l'espèce, Mme [B] invoquait le caractère exagéré de 11 versements exceptionnels de primes sur des contrats d'assurance vie soit 5 784,05 euros le 10 décembre 1985, 2 884,40 euros le 28 août 1987, 23 181,94 euros le 10 mars 1989, 15 244,90 euros le 20 décembre 1992, 3 048,48 euros le 30 juin 1993, 30 508,10 euros le 27 septembre 1994, 5 335,72 euros le 23 mai 1995, 19 056,13 euros le 6 novembre 1996, 15 244,90 euros le 17 décembre 1997, 160 000 euros le 14 février 2006 et 30 000 euros le 15 mai 2008 ; qu'en énonçant que le contrat Projectis et partant les primes versées sur ce contrat entre 1985 et 2006 n'auraient pas à entrer en ligne de compte puisque ce contrat a été racheté par M. [X] le 8 février 2006, tout en constatant que les sommes rachetées avaient été réinvesties dans un nouveau contrat d'assurance vie dont Mme [I]-[X] était bénéficiaire, ce dont il résulte que les primes versées sur le contrat Projectis depuis 1985 étaient bien sujets à rapport et à réduction dès lors qu'ils étaient exagérés eu égard aux facultés de M. [X], ce qu'il lui appartenait de vérifier, la cour d'appel a violé l'article L. 132-13 du code des assurances ;

2°/ que les règles du rapport à succession et celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers ne s'appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés ; qu'un tel caractère s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniale et familiale du souscripteur ; qu'en se bornant à énoncer que le versement de 160 000 euros sur le contrat Top croissance en 2006 correspond à hauteur de la moitié à une modification de support, que les versements n'ont pas retiré aux contrats d'assurance vie leur aléa, que l'utilité des placements ne pourrait être contestée, que M. [X] n'avait pas de charge particulière et n'avait pas de frais pour se loger, que les relevés bancaires postérieurs aux versements montrent qu'il n'avait pas de problème financier, qu'il a laissé 84 689,10 euros à son décès, et par adoption des motifs du jugement que rapporté au nombre d'années de mariage la moyenne mensuelle des versement ne serait pas exagérée, sans avoir égard à la situation notamment patrimoniale de M. [X] au moment de chacun des versements litigieux réalisés entre 1985 et 2006, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 132-13 du code des assurances.»

Réponse de la Cour

6. L'article L. 132-13 du code des assurances dispose :

« Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant. Ces règles ne s'appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés. »

7. Ce texte ne s'applique pas aux primes versées sur un contrat d'assurance sur la vie racheté par son souscripteur.

8. Ayant souverainement estimé que le versement de la somme de 160 000 euros le 14 février 2006 sur le contrat d'assurance sur la vie Top croissance ne présentait pas un caractère manifestement exagéré eu égard à l'âge du souscripteur, à sa situation patrimoniale et familiale et à l'utilité que revêtait pour lui l'opération, la cour d'appel, qui a exactement retenu qu'elle n'avait pas à vérifier si les primes versées sur le contrat Projectis, racheté le 8 février précédent, présentaient un caractère manifestement exagéré, a légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : M. Vigneau - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SARL Delvolvé et Trichet -

Textes visés :

Article L. 132-13 du code des assurances.

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