Numéro 2 - Février 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 2 - Février 2020

TRANSPORTS AERIENS

1re Civ., 5 février 2020, n° 19-12.294, (P)

Rejet

Transport de personnes – Responsabilité des transporteurs de personnes – Exonération – Causes d'exonération – Existence de circonstances extraordinaires – Détermination – Exclusion – Cas – Maladie du pilote ou indisponibilité soudaine pour des raisons médicales

La maladie du pilote ou son indisponibilité soudaine pour des raisons médicales n'est pas un événement inhabituel et ne saurait être qualifiée de circonstance extraordinaire au sens de l'article 5, § 3, du règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d'indemnisation et d'assistance des passagers en cas de refus d'embarquement et d'annulation ou de retard important d'un vol.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris 17e, 14 décembre 2018), M. D... a acheté un billet d'avion de la société Air India (le transporteur aérien) pour un vol Paris-Delhi, puis Delhi-Bangkok, le premier vol devant décoller le 12 août 2017 à 22 heures pour atterrir le lendemain à 9 heures 35.

2. Cependant, ce vol a été annulé en raison de la maladie soudaine du pilote, nécessitant son hospitalisation d'urgence.

Le vol a finalement été effectué le 13 août à 16 heures 30, avec une arrivée à Delhi le 14 août à 14 heures 10.

3. M. D... a attrait le transporteur aérien en indemnisation sur le fondement du règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004 établissant des règles communes en matière d'indemnisation et d'assistance des passagers en cas de refus d'embarquement et d'annulation ou de retard important d'un vol, et abrogeant le règlement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le transporteur aérien fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à M. D... une indemnité forfaitaire de 600 euros, alors :

« 1°/ que le transporteur aérien est exonéré de son obligation d'indemnisation des passagers au titre de l'article 7 du règlement n° 261/2004 s'il est en mesure de prouver que l'annulation ou le retard est dû à des circonstances extraordinaires qui n'auraient pas pu être évitées même si toutes les autres mesures raisonnables avaient été prises ; que peuvent être qualifiées de « circonstances extraordinaires » les événements qui, par leur nature ou leur origine, ne sont pas inhérents à l'exercice normal de l'activité du transporteur aérien concerné et échappent à la maîtrise effective de celui-ci ; qu'en se déterminant sur la base de la seule considération abstraite et générale que « la maladie d'un être humain ou son indisponibilité soudaine pour des raisons médicales n'est pas un événement inhabituel et ne saurait être qualifiée de circonstance extraordinaire », sans rechercher si l'affection dont M. L... était atteint l'empêchant d'assumer ses fonctions de pilote et nécessitant des soins immédiats n'était pas, par sa nature ou son origine, inhérente à l'exercice normal de l'activité de transporteur et échappait à sa maîtrise effective, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article 5, § 3, du règlement CE n° 261/2004 du 11 février 2004 ;

2°/ que le transporteur aérien est exonéré de son obligation d'indemnisation des passagers au titre de l'article 7 du règlement n° 261/2004 s'il est en mesure de prouver que l'annulation ou le retard est dû à des circonstances extraordinaires qui n'auraient pas pu être évitées même si toutes les autres mesures raisonnables avaient été prises, c'est-à-dire par celles qui, au moment où ces circonstances extraordinaires surviennent, répondent notamment à des conditions techniquement et économiquement supportables pour le transporteur aérien ; qu'en se déterminant au moyen d'une appréciation générale sur les obligations du transporteur aérien, en cas de maladie d'un membre d'équipage, lui imposant de prévoir à l'avance une solution de remplacement, au lieu de se placer au moment où la circonstance exceptionnelle survenait et sans apprécier les moyens mis en oeuvre par le transporteur aérien pour pallier l'indisponibilité du pilote ayant pour conséquence d'interdire le décollage de l'appareil pour des raisons de sécurité avec un seul pilote, ainsi que le rappelait le transporteur aérien, le tribunal d'instance a derechef privé son jugement de base légale au regard de l'article 5, § 3, du règlement CE n° 261/2004 du 11 février 2004. »

Réponse de la Cour

5. Après avoir constaté que le pilote avait fait l'objet de soins, le 12 août 2018, à l'aéroport de Paris, le jugement énonce, à bon droit, que la maladie ou une indisponibilité soudaine pour des raisons médicales n'est pas un événement inhabituel et ne saurait être qualifiée de circonstance extraordinaire au sens de l'article 5, § 3, du règlement n° 261/2004 du 11 février 2004.

6. Le tribunal d'instance qui, par voie de conséquence, n'était pas tenu d'apprécier les moyens mis en oeuvre par le transporteur aérien pour pallier l'indisponibilité du pilote, a légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Le Gall - Avocat général : M. Chaumont - Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux ; SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret -

Textes visés :

Article 5, § 3, du règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004.

Rapprochement(s) :

Dans le même sens que : 1re Civ., 12 septembre 2018, pourvoi n° 17-11.361, Bull. 2018, I, (rejet), et l'arrêt cité.

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