Numéro 2 - Février 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 2 - Février 2020

PROTECTION DES CONSOMMATEURS

1re Civ., 5 février 2020, n° 18-26.769, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Crédit immobilier – Offre préalable – Modification du prêt – Conditions du prêt – Conditions de forme – Détermination

En application de l'article L. 312-14-1, devenu L. 313-39, du code de la consommation, en cas de renégociation d'un crédit immobilier, les modifications du contrat initial sont apportées sous la seule forme d'un avenant comprenant diverses informations, sans que soit exigée la communication du taux et de la durée de la période.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 31 octobre 2018), le 20 août 2011, M. H... et Mme S... (les emprunteurs) ont accepté une offre de crédit immobilier consentie par la société Banque populaire occitane (la banque), portant sur un prêt au taux nominal de 3,7 % et au taux effectif global de 4,66 %.

2. Par avenant du 30 septembre 2014, ratifié le 11 octobre 2014, le taux nominal a été fixé à 3,25 % et le taux effectif global à 3,29 %.

3. Les emprunteurs ont assigné la banque en nullité de la stipulation d'intérêts du prêt initial et de l'avenant.

Examen des moyens

Sur le moyen unique du pourvoi principal, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen relevé d'office

5. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du code de procédure civile.

Vu l'article L. 312-14-1, devenu L. 313-39 du code de la consommation :

6. Aux termes de ce texte, en cas de renégociation de prêt, les modifications au contrat de prêt initial sont apportées sous la seule forme d'un avenant. Cet avenant comprend, d'une part, un échéancier des amortissements détaillant pour chaque échéance le capital restant dû en cas de remboursement anticipé, d'autre part, le taux effectif global ainsi que le coût du crédit calculés sur la base des seuls échéances et frais à venir.

7. Pour prononcer la nullité de la stipulation d'intérêt figurant à l'avenant au contrat de crédit immobilier, l'arrêt retient qu'il ne satisfait pas, à la différence de l'offre de crédit, à l'obligation de communication du taux et de la durée de la période.

8. En statuant ainsi, alors qu'en cas de renégociation du prêt, les modifications du contrat initial sont apportées sous la seule forme d'un avenant comprenant diverses informations sans que soit exigée la communication du taux et de la durée de la période, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

11. La demande en annulation de la stipulation d'intérêts fixée dans l'avenant du 30 septembre 2014 sera rejetée.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi incident, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable la demande en annulation de la stipulation d'intérêts conventionnels figurant à l'offre de prêt acceptée le 20 août 2011 et à l'avenant du 30 septembre 2014, et en ce qu'il rejette la demande en annulation de la stipulation d'intérêts conventionnel relative à l'offre de prêt acceptée le 20 août 2011, l'arrêt rendu le 31 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Rejette la demande en annulation de la stipulation d'intérêts fixée dans l'avenant du 30 septembre 2014.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Kloda - Avocat général : M. Chaumont - Avocat(s) : Me Haas ; SCP Thouin-Palat et Boucard -

Textes visés :

Article L. 312-14-1, devenu L. 313-39, du code de la consommation.

1re Civ., 5 février 2020, n° 19-11.939, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Intérêts – Taux – Taux effectif global – Communication du taux et de la durée de la période – Défaut – Sanction – Détermination – Portée

L'offre de prêt immobilier doit mentionner le taux effectif global, qui est un taux annuel, proportionnel au taux de période, lequel, ainsi que la durée de la période, doivent être expressément communiqués à l'emprunteur.

Le défaut de communication du taux et de la durée de la période est sanctionné par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts conventionnels.

Une telle sanction ne saurait cependant être appliquée lorsque l'écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est inférieur à la décimale prescrite par les textes réglementaires relatifs au taux effectif global.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 novembre 2018), le 16 décembre 2010, M. D... et Mme N... (les emprunteurs) ont accepté l'offre de crédit immobilier émise le 20 novembre 2010 par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Alpes Provence (la banque), au taux effectif global de 3,363 % par an.

2. Invoquant le caractère erroné de ce taux et l'absence de mention du taux de période, les emprunteurs ont assigné la banque en déchéance des intérêts conventionnels et, subsidiairement, en annulation de la stipulation d'intérêts.

Examen des moyens

Sur le moyen unique, pris en sa première branche, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen relevé d'office

4. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du code de procédure civile.

Vu l'article L. 312-8, 3°, du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, l'article L. 313-1 du même code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, l'article L. 312-33 de ce code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000, et son article R. 313-1, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002 :

5. En application de ces textes, l'offre de prêt immobilier doit mentionner le taux effectif global, qui est un taux annuel, proportionnel au taux de période, lequel, ainsi que la durée de la période, doivent être expressément communiqués à l'emprunteur.

Le défaut de communication du taux et de la durée de la période est sanctionné par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts conventionnels.

Une telle sanction ne saurait cependant être appliquée lorsque l'écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est inférieur à la décimale prescrite par l'article R. 313-1 susvisé.

6. Pour prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts de l'offre de crédit immobilier du 29 novembre 2010, acceptée le 16 décembre suivant, l'arrêt retient le défaut de communication du taux de période, élément déterminant du taux effectif global.

7. En statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que le taux effectif global était mentionné dans l'offre acceptée et que l'écart entre celui-ci et le taux réel était inférieur à une décimale, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

10. Les demandes de déchéance de l'intérêt conventionnel et d'annulation de la stipulation d'intérêts de l'offre de crédit immobilier du 29 novembre 2010, acceptée le 16 décembre suivant, seront rejetées.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit n'y avoir lieu d'écarter des débats le rapport rédigé par M. P..., l'arrêt rendu le 15 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Rejette les demandes de déchéance de l'intérêt conventionnel et d'annulation de la stipulation d'intérêts de l'offre de crédit immobilier du 29 novembre 2010, acceptée le 16 décembre 2010.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Kloda - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Capron ; SCP Rocheteau et Uzan-Sarano -

Textes visés :

Article L. 312-8, 3°, du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 ; article L. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 ; article L. 312-33 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000, et son article R. 313-1, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002.

2e Civ., 27 février 2020, n° 18-25.160, (P)

Cassation partielle

Surendettement – Déchéance – Causes – article L. 761-1 du code de la consommation – Enumération limitative – Portée

Selon l'article L. 761-1 du code de la consommation, est déchue du bénéfice des dispositions du livre VII dudit code :

1° Toute personne qui a sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts ;

2° Toute personne qui a détourné ou dissimulé ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens ;

3° Toute personne qui, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, a aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou aura procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel ou pendant l'exécution du plan ou des mesures prévues à l'article L. 733-1 ou à l'article L. 733-4.

Il résulte de ces dispositions que les causes de déchéance sont limitativement énumérées par la loi.

Encourt par conséquent la cassation l'arrêt qui, pour confirmer un jugement ayant déchu les débiteurs du bénéfice de la procédure de surendettement, se fonde sur la négligence des débiteurs à informer la commission de leur changement d'adresse, puis de leur divorce, et sur leur désintérêt, ces éléments ne caractérisant pas l'une des causes de déchéance limitativement énumérées par l'article L. 761-1 du code de la consommation.

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 761-1 du code de la consommation ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que les causes de déchéance sont limitativement énumérées par la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite du dépôt par M. et Mme S... d'une demande tendant au traitement de leur situation financière, le juge d'un tribunal d'instance a ouvert, par jugement du 23 février 2015, une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire ; que par un jugement du 19 octobre 2016, les débiteurs ont été déchus du bénéfice de la procédure de surendettement ;

Attendu que pour confirmer ce jugement, l'arrêt relève, d'une part, que M. et Mme S... ont quitté Montpellier en décembre 2015 et sont partis vivre en Haute-Savoie sans en informer les organes de la procédure de sorte que le mandataire judiciaire n'a pas été en mesure d'élaborer un bilan économique et social et que, de plus, ils n'ont pas informé la commission de l'introduction d'une procédure de divorce en juillet 2016, qui a donné lieu à une ordonnance de non-conciliation du 22 décembre 2016 entraînant une modification notable de leur situation respective et retient, d'autre part, qu'une telle négligence, à laquelle s'ajoute le désintérêt manifeste dont ont fait preuve les débiteurs, s'apparente à une erreur grossière équivalente à la mauvaise foi dès lors qu'elle a retardé, pendant deux ans, la mise en œuvre de la procédure et le règlement, fût-il partiel, des créanciers ;

Qu'en statuant ainsi, en fondant cette déchéance sur la négligence de M. et Mme S... à informer la commission de leur changement d'adresse, puis de leur divorce, et sur leur désintérêt, ces éléments ne caractérisant pas l'une des causes de déchéance limitativement énumérées à l'article L. 761-1 du code de la consommation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement rendu le 19 octobre 2016 par le juge du tribunal d'instance de Montpellier et condamné M. et Mme S... aux éventuels dépens d'appel, l'arrêt rendu le 15 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvant avant ledit arrêt et, pour être fait droit les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Cardini - Avocat général : M. Girard - Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier -

Textes visés :

Article L. 761-1 du code de la consommation.

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