Numéro 12 - Décembre 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 12 - Décembre 2023

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005)

Com., 13 décembre 2023, n° 22-19.749, (B) (R), FS

Cassation

Liquidation judiciaire – Jugement – Effets – Arrêt des poursuites individuelles – Domaine d'application – Exclusion – Cas – Inopposabilité de la déclaration d'insaisissabilité

Il résulte de l'article L. 526-1 du code de commerce que le créancier auquel l'insaisissabilité de plein droit de la résidence principale est inopposable peut, même après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, et sans que l'article L. 643-11 du même code y fasse obstacle, exercer son droit de poursuite sur l'immeuble qui n'était pas entré dans le gage commun des créanciers de la liquidation judiciaire.

Liquidation judiciaire – Règlement des créanciers – Créanciers bénéficiant d'une sûreté – Déclaration d'insaisissabilité publiée avant l'ouverture de la liquidation – Inopposabilité – Portée

Liquidation judiciaire – Clôture – Clôture pour insuffisance d'actif – Droit de poursuite individuelle – Inopposabilité de la déclaration d'insaisissabilité

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 8 juin 2022), les 27 mai et 22 juillet 2016, M. [T] a été mis en redressement puis liquidation judiciaires, la procédure ayant été étendue à Mme [T] le 16 septembre suivant.

La liquidation a été clôturée pour insuffisance d'actif par un jugement du 3 avril 2018.

2. La société Caisse de crédit mutuel de [Localité 6] (la banque), qui avait précédemment déclaré une créance représentant le solde d'un prêt consenti en 2001 à M. et Mme [T] pour l'acquisition de leur résidence principale, a signifié le 7 janvier 2021 un commandement de payer valant saisie immobilière du bien, puis, le 21 avril suivant, les a assignés à l'audience d'orientation du juge de l'exécution. Ces derniers ont soulevé l'irrecevabilité de la demande.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

3. La banque fait grief à l'arrêt de déclarer son action irrecevable et de prononcer la nullité des actes de la procédure de saisie immobilière, alors « qu'un créancier auquel l'insaisissabilité d'un immeuble est inopposable peut exercer son droit de poursuite sur celui-ci indépendamment de ses droits dans la procédure collective du propriétaire de cet immeuble ; qu'en retenant que l'article L. 643-11 du code de commerce était applicable à la Caisse de crédit mutuel, créancier personnel des époux [T] exerçant son droit de poursuite sur leur résidence principale dont l'insaisissabilité lui était inopposable, la cour d'appel a violé les articles L. 526-1 et L. 643-11 du code de commerce. »

Réponse de la cour

Vu les articles L. 526-1 et L. 643-11 du code de commerce :

4. Il résulte du premier de ces textes que le créancier auquel l'insaisissabilité de plein droit de la résidence principale est inopposable peut, même après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, et sans que le second texte y fasse obstacle, exercer son droit de poursuite sur l'immeuble, qui n'était pas entré dans le gage commun des créanciers de la liquidation judiciaire.

5. Pour déclarer irrecevable l'action de la banque tendant à saisir l'immeuble de M. et Mme [T], l'arrêt, après avoir retenu que l'action de la banque n'entrait dans aucune des exceptions prévues à l'article L. 643-11 du code de commerce, au principe de non-recouvrement par les créanciers de l'exercice individuel de leurs actions après la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de leur débiteur, en déduit que la banque n'était plus en droit de saisir l'immeuble.

6. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier par refus d'application, le second par fausse application.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Articles L. 526-1 et L. 643-11 du code de commerce.

Rapprochement(s) :

Sur la portée de l'inopposabilité de la déclaration notariée d'insaisissabilité, à rapprocher : Com., 13 septembre 2017, pourvoi n° 16-10.206, Bull. 2017, IV, n° 110 (cassation).

Com., 13 décembre 2023, n° 22-16.752, (B) (R), FS

Rejet

Liquidation judiciaire – Règlement des créanciers – Créanciers bénéficiant d'une sûreté – Hypothèque – Inopposabilité de l'insaisissabilité légale d'un immeuble – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 24 mars 2022), les 17 novembre 2015 et 17 mai 2016, Mme [R], épouse [K] (Mme [R]), infirmière, a été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la procédure ayant été clôturée le 27 juin 2017 pour insuffisance d'actif.

2. La Caisse autonome de retraite et de prévoyance des infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et orthoptistes (la CARPIMKO), titulaire de contraintes émises entre 2004 et 2012, avait, le 10 juillet 2015, fait inscrire une hypothèque sur l'immeuble dépendant de la communauté de biens des époux [K].

3. Après avoir vainement demandé à la CARPIMKO la mainlevée de l'inscription de l'hypothèque en raison de la clôture de la liquidation, Mme [R] l'a assignée, le 25 février 2020, en radiation de celle-ci.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Mme [R] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de radiation de l'hypothèque, alors « que la radiation doit être ordonnée par les tribunaux, lorsque l'inscription a été faite sans être fondée ni sur la loi, ni sur un titre, ou lorsqu'elle l'a été en vertu d'un titre soit irrégulier, soit éteint ou soldé, ou lorsque les droits d'hypothèque sont effacés par les voies légales ; que le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, interdisant aux créanciers l'exercice de leurs actions contre le débiteur, rend sans objet l'hypothèque prise sur le bien du débiteur, qui doit dès lors faire l'objet d'une mainlevée faute de pouvoir donner lieu à une saisie ; qu'il n'est fait exception à ce principe que dans les cas limitativement énumérés à l'article L. 643-11 du code de commerce, à savoir la faillite personnelle ou la banqueroute du débiteur, l'existence d'une liquidation judiciaire antérieure clôturée pour insuffisance d'actif ayant visé le débiteur ou une personne morale dont il a été le dirigeant moins de cinq ans avant l'ouverture de la procédure à laquelle le débiteur est soumis, l'ouverture d'une procédure territoriale ou, sur autorisation du tribunal, la fraude du débiteur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que, par jugement du 27 juin 2017, le tribunal de grande instance d'Avesnes-sur-Helpe a prononcé la clôture pour insuffisance d'actif de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'égard de Mme [R], épouse [K] ; qu'elle a également relevé que la CARPIMKO ne se prévalant d'aucun des cas autorisant la reprise des poursuites, elle n'avait pas recouvré l'exercice individuel de son droit d'action contre Mme [K] ; qu'en affirmant néanmoins, pour rejeter la demande de mainlevée de l'hypothèque prise par la CARPIMKO sur l'immeuble situé [Adresse 3], propriété de Mme [R] [K], que la clôture pour insuffisance d'actif ne justifie pas la radiation de l'hypothèque inscrite antérieurement à l'ouverture de la procédure collective du débiteur, la cour d'appel a violé les articles L. 643-11 du code de commerce et 2438 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. L'article L. 526-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, qui prévoit l'insaisissabilité des droits de la personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante sur l'immeuble où est fixée sa résidence principale par les créanciers dont les droits naissent à l'occasion de l'activité professionnelle de cette personne, ne s'applique pas aux créanciers professionnels dont la créance est née antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi.

6. Selon l'article 2443, devenu 2438, du code civil la radiation de l'hypothèque doit être ordonnée par les tribunaux, lorsque l'inscription a été faite sans être fondée ni sur la loi, ni sur un titre, ou lorsque elle a été faite en vertu d'un titre soit irrégulier, soit éteint ou soldé ou lorsque les droits d'hypothèque sont effacés par les voies légales.

7. L'insaisissabilité légale de l'immeuble, objet de l'inscription de l'hypothèque étant inopposable à la CARPIMKO, dont les créances sont nées antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 6 août 2015, et sans que leur prescription soit invoquée, la CARPIMKO peut exercer ses droits sur l'immeuble, peu important la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de Mme [R], laquelle ne peut justifier la radiation de l'inscription soumise aux conditions de l'article 2438 du code civil.

8. Par ces motifs de pur droit, substitués d'office à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1, et 1015 du code de procédure civile, la décision attaquée se trouve légalement justifiée.

9. Le moyen ne peut être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Article 2438 du code civil.

Rapprochement(s) :

Sur la portée d'une déclaration d'insaisissabilité inopposable, à rapprocher : Com., 7 octobre 2020, pourvoi n° 19-13.560, Bull., (cassation partielle).

Com., 13 décembre 2023, n° 22-18.460, (B), FRH

Rejet

Redressement judiciaire – Plan de redressement – Exécution du plan – Action contre la caution – Exécution forcée – Conditions – Exigibilité de la créance

Le créancier d'un débiteur placé en procédure collective, muni d'un titre exécutoire, ne peut en poursuivre l'exécution forcée contre les biens de la caution qu'à la condition que la créance constatée par le titre soit exigible à l'égard de cette caution et dans la mesure de cette exigibilité.

Le titre exécutoire n'a pas à préciser que son exécution ne sera possible sur les biens de la caution que lors de l'exigibilité des créances.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 13 avril 2022), M. [B], gérant de la société CHB miroiterie (la société CHB), s'est rendu caution solidaire de cette société au profit de la Banque populaire occitane (la banque) le 18 avril 2012, en garantie d'un prêt de 150 000 euros, consenti le même jour et remboursable en 120 mensualités, puis le 3 avril 2014, dans la limite de 146 000 euros, en garantie de toutes les sommes que pourrait devoir la société.

2. Le 24 février 2016, la société CHB a cédé une créance professionnelle à la banque, qui l'a notifiée au débiteur cédé.

3. Le 8 juin 2016, la société CHB a été mise en redressement judiciaire.

4. La banque a déclaré au passif de la société CHB une créance au titre du prêt, du solde débiteur du compte courant et de la créance professionnelle cédée.

5. Après avoir vainement mis en demeure M. [B] de rembourser le prêt, la banque a obtenu, le 15 décembre 2016, d'un juge de l'exécution l'autorisation d'inscrire une hypothèque provisoire sur l'un de ses immeubles.

6. Le 12 janvier 2017, la banque a assigné M. [B] afin d'obtenir un titre exécutoire contre lui et sa condamnation au paiement de la totalité des sommes dues au titre du prêt, du solde débiteur du compte courant et de la créance professionnelle cédée.

7. L'instance a été suspendue en raison de la procédure de redressement judiciaire en cours.

8. Le 17 mai 2017, le plan de redressement de la société CHB a été arrêté, prévoyant le paiement sur une durée de dix ans de la totalité des sommes échues au jour de l'ouverture de la procédure.

9. L'instance introduite par l'assignation du 12 janvier 2017 a alors repris.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième et troisième moyens

10. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Et sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

11. M. [B] fait grief à l'arrêt de le condamner, en exécution de ses engagements de caution, au paiement de diverses sommes au titre du prêt, du solde débiteur du compte courant et de la créance professionnelle cédée, alors « que si le créancier bénéficiaire d'un cautionnement consenti par une personne physique, en garantie de la dette d'un débiteur principal mis ensuite en redressement judiciaire, qui a pris des mesures conservatoires sur les biens de la caution, peut obtenir un titre exécutoire malgré l'inexigibilité de la créance contre la caution, l'exécution de ce titre n'est possible que lorsque la créance devient exigible et dans la mesure de l'exigibilité ; qu'en prononçant à l'encontre de M. [B] une condamnation pure et simple au paiement des dettes de la société CHB Miroiterie qu'il avait garanties, sans prévoir que l'exécution de ces condamnations ne serait possible que lorsque ces créances deviendraient exigibles et dans la seule mesure de leur exigibilité, exposant ainsi M. [B] au paiement intégral des créances garanties, malgré leur inexigibilité, en vertu d'une décision ayant acquis force de chose jugée, la cour d'appel a violé les articles L. 622-28 et L. 631-14 du code de commerce, R. 511-4 et R. 511-7 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article premier du Protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

12. Selon l'article L. 622-28, alinéas 2 et 3, du code de commerce, rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L. 631-14 de ce code, le créancier bénéficiaire d'un cautionnement consenti par une personne physique en garantie de la dette d'un débiteur principal mis ensuite en redressement judiciaire peut prendre des mesures conservatoires sur les biens de la caution et doit, en application des articles L. 511-4 et R. 511-7 du code des procédures civiles d'exécution, introduire dans le mois de leur exécution une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire couvrant la totalité des sommes dues, à peine de caducité de ces mesures.

13. Il en résulte que si l'obtention d'un tel titre ne peut être subordonnée à l'exigibilité de la créance contre la caution, le créancier muni de ce titre ne peut toutefois en poursuivre l'exécution forcée contre les biens de la caution qu'à la condition que la créance constatée par le titre soit exigible à l'égard de cette caution et dans la mesure de cette exigibilité, conformément aux dispositions de l'article L. 111-2 du code des procédures civiles d'exécution, le contrôle de cette exigibilité relevant, en application de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, de l'appréciation du juge de l'exécution en cas de contestation soulevée à l'occasion de l'exécution forcée du titre.

14. En conséquence, la cour d'appel, qui n'avait pas à préciser que l'exécution de son arrêt ne serait possible sur les biens de la caution que lors de l'exigibilité des créances, a, sans méconnaître le droit de propriété de M. [B], fait l'exacte application des textes précités en le condamnant à payer les sommes dues au titre de son engagement de caution.

15. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : Mme Coricon - Avocat général : Mme Guinamant - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SCP Thouin-Palat et Boucard -

Textes visés :

Article L. 622-28, alinéas 2 et 3, du code de commerce ; articles L. 111-2, L. 213-6, L. 511-4 et R. 511-7 du code des procédures civiles d'exécution ; article 213-6 du code de l'organisation judiciaire.

Com., 13 décembre 2023, n° 21-14.579, (B), FRH

Rejet

Responsabilités et sanctions – Responsabilité pour insuffisance d'actif – Dirigeants visés – Représentants permanents des dirigeants personnes morales – Applications diverses – Société par actions simplifiée dirigée par une personne morale

Lorsque la personne morale mise en liquidation judiciaire est une société par actions simplifiée (SAS) dirigée par une personne morale, la responsabilité pour insuffisance d'actif prévue à l'article L. 651-2 du code de commerce est encourue non seulement par cette personne morale, dirigeant de droit ou de fait, mais aussi par le représentant légal de cette dernière, en l'absence d'obligation légale ou statutaire de désigner un représentant permanent de la personne morale dirigeant au sein d'une SAS.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à MM. [Z] et [Y] du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés F4 Holding GMBH, Parter Capital Group GMBH et TB Management Und Holding UG.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 8 décembre 2020), le 4 avril 2011, la société Technicolor a cédé l'ensemble des titres de la société par actions simplifiée Thomson Broadcast (la SAS TB), présidée par M. [R], à la société de droit allemand F4 Holding (la société F4), elle-même filiale de la société d'investissement Parter Capital Group GMBH (la société Parter), ces deux dernières étant dirigées par M. [Y].

3. Le 3 septembre 2012, M. [R] a été révoqué de ses fonctions et remplacé par la société TB Management Und Holding UG (la société TB Management), dirigée par M. [Z] qui, le même jour, est également devenu le dirigeant de la société F4.

4. Le 1er octobre 2012, la SAS TB a été mise en redressement judiciaire, puis, le 20 décembre 2012, son plan de cession a été arrêté et sa mise en liquidation judiciaire prononcée, la société ML conseils étant désignée en qualité de liquidateur.

5. Le liquidateur de la SAS TB a assigné en responsabilité pour insuffisance d'actif les sociétés F4, Parter et TB Management, ainsi que MM. [Z] et [Y], en qualité de dirigeants, de droit pour les uns et de fait pour les autres.

Examen des moyens

Sur les troisième, quatrième, cinquième, sixième, septième, huitième et neuvième moyens

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

7. M. [Z] fait grief à l'arrêt de dire qu'il a été le dirigeant de droit de la SAS TB, de dire que la société TN [lire TB] Management et lui-même ont commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la SAS TB, et de le condamner, solidairement avec les sociétés F4, TN [lire TB] Management et Parter et M. [Y], à payer une certaine somme au titre de l'insuffisance d'actif, alors « qu'il résulte de l'article L. 651-1 du code de commerce que la responsabilité pour insuffisance d'actif, encourue sur le fondement de l'article L. 651-2 du même code, est notamment applicable aux dirigeants d'une personne morale de droit privé soumise à une procédure collective et aux personnes physiques représentants permanents de ces dirigeants personnes morales ; que, pour décider que la responsabilité pour insuffisance d'actif de M. [Z], en sa qualité de dirigeant de la société TB Management, elle-même dirigeante de la société TB SAS, pouvait être engagée, la cour d'appel a estimé qu'il était indifférent qu'il ne soit pas le représentant permanent de la personne morale dirigeante, eu égard aux dispositions de l'article L. 227-7 du code de commerce, applicables aux sociétés par actions simplifiées dirigées par des personnes morales, suivant lesquelles la personne morale dirigeant n'est pas tenue de désigner un représentant permanent, et aux stipulations des statuts de la société TB SAS ; qu'en statuant ainsi, alors même que L. 651-1 du code de commerce ne comporte aucune réserve relative à la forme sociale de la personne morale débitrice, ni aux prévisions de ses statuts, la cour d'appel a violé l'article L. 651-1 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

8. Il résulte de la combinaison des articles L. 227-7, L. 651-1 et L. 651-2 du code de commerce que, lorsque la personne morale mise en liquidation judiciaire est une société par actions simplifiée (SAS) dirigée par une personne morale, la responsabilité pour insuffisance d'actif, prévue par le troisième texte précité, est encourue non seulement par cette personne morale, dirigeant de droit, mais aussi par le représentant légal de cette dernière, en l'absence d'obligation légale ou statutaire de désigner un représentant permanent de la personne morale dirigeant au sein d'une SAS.

9. Le moyen, qui postule le contraire, n'est pas fondé.

Et sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

10. M. [Y] fait grief à l'arrêt de dire qu'il a, aux côtés des sociétés F4 et Parter, commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la SAS TB et de le condamner, solidairement avec les sociétés F4, TN [lire TB] Management et Parter et M. [Z], à payer une certaine somme au titre de l'insuffisance d'actif, alors :

« 1°/ qu'il résulte de l'article L. 651-1 du code de commerce que la responsabilité pour insuffisance d'actif, encourue sur le fondement de l'article L. 651-2 du même code, est notamment applicable aux dirigeants d'une personne morale de droit privé soumise à une procédure collective et aux personnes physiques représentants permanents de ces dirigeants personnes morales ; que ce texte n'est pas applicable aux personnes physiques, représentants de personnes morales, reconnues dirigeantes de fait de la société débitrice ; qu'en jugeant le contraire pour retenir la responsabilité de M. [Y], la cour d'appel a violé les articles L. 651-1 et L. 651-2 du code de commerce ;

2°/ qu'il résulte de l'article L. 651-1 du code de commerce que la responsabilité pour insuffisance d'actif, encourue sur le fondement de l'article L. 651-2 du même code, est notamment applicable aux dirigeants d'une personne morale de droit privé soumise à une procédure collective et aux personnes physiques représentants permanents de ces dirigeants personnes morales ; que, pour retenir la responsabilité personnelle de M. [Y], la cour d'appel s'est implicitement mais nécessairement fondée sur sa qualité de dirigeant de droit des sociétés F4 Holding et Parter Capital Group, personnes morales qu'elle a qualifiées de dirigeants de fait de la société débitrice ; qu'en en jugeant ainsi, cependant que M. [Y] ne pouvait avoir été désigné en qualité de « représentant permanent » des personnes morales dirigeants de fait de la société débitrice et ne pouvait donc endosser une responsabilité pour insuffisance d'actif, la cour d'appel a violé les articles L. 651-1 et L. 651-2 du code de commerce ;

3°/ qu'en toute hypothèse, dans ses écritures d'appel, M. [Y] a fait valoir qu'il était « intervenu dans le cadre des opérations d'acquisition de la société TB SAS en sa qualité d'associé et de dirigeant de la société Parter Capital Group et non pas à titre personnel », de sorte que les fautes imputées aux sociétés F4 Holding et à la société Parter, « à les supposer établies » ne lui étaient « pas imputables à titre personnel » ; qu'il a ajouté que le liquidateur n'invoquait, ni ne démontrait qu'il « aurait accompli des actes détachables de ses fonctions d'associé ou de dirigeant au sein de la société Parter Capital Group ou sein de la société F4 Holding » ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions dont il résultait que la responsabilité de M. [Y], distincte de celle des sociétés qu'il dirigeait, ne pouvait être recherchée par le liquidateur, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ qu'en décidant que M. [Y] avait commis des fautes de gestion ayant contribué à l'augmentation de l'insuffisance d'actifs de la SAS TB, sans donner aucun motif à sa décision sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

11. En premier lieu, contrairement à ce que postule la première branche du moyen, il résulte de la combinaison des articles L. 227-7, L. 651-1 et L. 651-2 du code de commerce que, lorsque la personne morale mise en liquidation judiciaire est une SAS dirigée de fait par une personne morale, la responsabilité pour insuffisance d'actif, prévue par le troisième texte précité, est encourue non seulement par cette personne morale, mais aussi par le représentant légal de cette dernière, en l'absence d'obligation légale ou statutaire de désigner un représentant permanent de la personne morale dirigeant au sein d'une SAS.

12. En deuxième lieu, il résulte du principe énoncé au point 11 que, ayant retenu que les sociétés Parter et F4, dirigées par M. [Y], étaient les dirigeants de fait de la SAS TB, la cour d'appel en a exactement déduit que la responsabilité pour insuffisance d'actif de M. [Y] pouvait être recherchée par le liquidateur de la SAS TB.

13. En dernier lieu, lorsqu'une SAS débitrice est dirigée par une personne morale représentée légalement par une personne physique, la faute de gestion de nature à engager la responsabilité pour insuffisance d'actif de ce dirigeant peut être caractérisée indifféremment à l'égard de celui-ci ou à l'égard de son représentant légal.

14. Il en découle qu'en retenant que les sociétés Parter et F4, dirigées par M. [Y], avaient commis des fautes de gestion en qualité de dirigeants de fait de la SAS TB, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision.

15. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : Mme Coricon - Avocat(s) : SCP Zribi et Texier ; SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh -

Rapprochement(s) :

Sur la responsabilité pour insuffisance d'actif des représentants permanents des dirigeants personnes morales, à rapprocher : Com., 19 novembre 2013, pourvoi n° 12-16.099, Bull. 2013, IV, n° 170 (rejet).

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.