Numéro 12 - Décembre 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 12 - Décembre 2022

TRAVAIL REGLEMENTATION, SANTE ET SECURITE

Soc., 7 décembre 2022, n° 21-16.996, (B), FRH

Cassation partielle

Comité social et économique – Recours à un expert – Action en justice de l'employeur – Contestation du coût prévisionnel, de l'étendue et de la durée de l'expertise – Recevabilité – Détermination – Portée

Comité social et économique – Recours à un expert – Action en justice de l'employeur – Contestation du coût prévisionnel, de l'étendue et de la durée de l'expertise – Forclusion – Délai – Point de départ – Détermination – Portée

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Rennes, 7 mai 2021), statuant selon la procédure accélérée au fond, par acte du 5 février 2021, la société Compagnie armoricaine de transport (CAT) (la société) a sollicité, à titre principal, l'annulation de la délibération du comité social et économique de l'établissement de [Localité 13], datée du 7 janvier 2021, décidant du recours à une expertise pour risque grave et, à titre subsidiaire, la réduction du coût prévisionnel, de l'étendue et de la durée de cette expertise.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première à cinquième branches, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa sixième branche

Enoncé du moyen

3. La société fait grief au jugement de « rejeter ses demandes comme étant irrecevables », alors « que le point de départ du délai de 10 jours pendant lequel l'employeur peut contester le coût prévisionnel, l'étendue ou la durée de l'expertise votée par le comité social et économique court à compter de la notification par l'expert désigné du dernier cahier des charges établi par ses soins ; qu'en l'espèce, il était constant qu'après avoir transmis une première lettre de mission le 17 janvier 2021, la société Physiofirm avait adressé un cahier des charges rectifié le 26 janvier 2021, dans lequel l'expert réduisait la durée prévisionnelle de son intervention de 39,5 jours à 39 jours et le coût prévisionnel de la somme de 71 100 euros TTC à la somme de 63 180 euros TTC ; qu'en jugeant que l'exposante était forclose et que sa demande visant à contester le coût prévisionnel, l'étendue et la durée de l'expertise devait être déclarée irrecevable, motif pris qu'elle n'avait introduit l'instance que par assignation du 5 février [2021], et que le délai de 10 jours avait commencé à courir dès le 17 janvier 2021, le tribunal a violé les articles L. 2315-86 et R. 2315-49 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 2315-86, alinéa 1, 3°, et R. 2315-49 du code du travail :

4. Selon le premier de ces textes, sauf dans le cas prévu à l'article L. 1233-35-1, l'employeur saisit le juge judiciaire dans un délai fixé par décret en Conseil d'État de la notification à l'employeur du cahier des charges et des informations prévues à l'article L. 2315-81-1 s'il entend contester le coût prévisionnel, l'étendue ou la durée de l'expertise.

5. Aux termes de l'article R. 2315-49 du code du travail, pour chacun des cas de recours prévus à l'article L. 2315-86, l'employeur saisit le juge dans un délai de dix jours.

6. Pour rejeter la contestation du coût prévisionnel, de l'étendue et de la durée de l'expertise, le jugement retient que plus de dix jours se sont écoulés entre la notification faite par l'expert du coût prévisionnel, de l'étendue et de la durée de l'expertise, le 17 janvier 2021, et la délivrance de l'assignation, le 5 février suivant, et que c'est à tort que la société affirme que le délai de forclusion n'aurait commencé à courir qu'à compter de la notification de la seconde proposition tarifaire de l'expert, allégation non fondée en droit qui se heurte aux dispositions des articles L. 2315-86 et R. 2315-49 du code du travail en ce qu'aucun cas de prorogation du délai pour agir n'a été envisagé par le pouvoir normatif.

7. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'expert avait notifié à la société un nouveau coût prévisionnel le 26 janvier 2021, en sorte que le délai de contestation de dix jours a couru à compter de cette date et que, la saisine du tribunal ayant eu lieu le 5 février suivant, l'action en contestation du coût prévisionnel, de l'étendue et de la durée de l'expertise était recevable, le tribunal a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. Le moyen, pris en sa sixième branche, ne formulant aucune critique contre les motifs du jugement fondant le chef du dispositif déclarant irrecevable la contestation par la société de la validité de l'expertise ordonnée par le comité social et économique de l'établissement de [Localité 13], la cassation ne peut s'étendre à cette disposition du jugement.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il « rejette comme étant irrecevable » la contestation par la société Compagnie armoricaine de transport (CAT) de la validité de l'expertise ordonnée par délibération en date du 7 janvier 2021 du comité social et économique de l'établissement de [Localité 13], le jugement rendu le 7 mai 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Rennes ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Saint-Malo.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Le Masne de Chermont - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SARL Le Prado - Gilbert -

Textes visés :

Articles L. 2315-86, alinéa 1, 3°, et R. 2315-49 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur le délai en contestation du coût prévisionnel, de l'étendue et de la durée de l'expertise ordonnée par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), à rapprocher : Soc., 28 mars 2018, pourvoi n° 16-28.561, Bull. 2018, V, n° 60 (cassation), et les arrêts cités ; Soc., 06 mars 2019, pourvoi n° 17-28.503 ; Soc., 20 mars 2019, pourvoi n° 17-23.027, Bull., (cassation partielle).

Soc., 7 décembre 2022, n° 21-19.454, (B), FS

Rejet

Hygiène et sécurité – Principes généraux de prévention – Obligations de l'employeur – Prévention des risques professionnels – Prévention des risques biologiques – Etendue – Activités impliquant des agents biologiques pathogènes – Effets – Mise à disposition par l'employeur des équipements de protection individuelle appropriés – Obligation ou recommandation – Aide à domicile – Risque d'exposition au Covid-19 – Portée

Aux termes de l'article R. 4424-3 du code du travail, lorsque l'exposition des travailleurs à un agent biologique dangereux ne peut être évitée, elle doit être réduite par la mise en oeuvre de diverses mesures, notamment des mesures de protection collective ou, lorsque l'exposition ne peut être évitée par d'autres moyens, par des mesures de protection individuelle.

Selon l'article R. 4321-4 du même code, l'employeur met à disposition de ses salariés, en tant que de besoin, les équipements de protection individuelle appropriés.

Doit en conséquence être approuvé l'arrêt qui après avoir relevé que la fourniture de masques FFP2 et FFP3 n'était pas obligatoire ou même recommandée dans le secteur de l'aide à domicile au profit de bénéficiaires non positifs au Covid-19 ou ne présentant pas de symptômes, retient que la mise à disposition par l'employeur d'un masque FFP2 aux salariés intervenant au domicile d'une personne positive ou symptomatique est de nature à réduire l'exposition au Covid-19.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 29 juin 2021) et les productions, l'association Aide à domicile aux retraités Flandre Métropole (l'association) propose des services à domicile, notamment une aide à la personne et un service de soins infirmiers.

2. Dans le contexte de l'épidémie de Covid-19, l'association a mis à jour, le 5 février 2021, le « tableau des consignes » destiné au personnel, lequel prévoit désormais que lors des interventions à domicile les salariés devront porter un masque chirurgical lorsque le bénéficiaire est négatif au Covid-19 ou asymptomatique et un masque FFP2 si le bénéficiaire est positif au Covid-19 ou symptomatique.

3. Le 14 janvier 2021, l'inspectrice du travail de l'unité de contrôle n° 3 [Localité 3]-Est de la Direction régionale des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi des Hauts de France a saisi le juge des référés d'un tribunal judiciaire aux fins de voir ordonner à l'association, sous astreinte, de mettre en oeuvre un certain nombre de mesures ayant pour objet la limitation au niveau le plus bas possible du nombre de travailleurs exposés, ou susceptibles de l'être, au risque biologique lié au Covid-19 et en particulier de procurer à chaque salarié des masques de type FFP2 ou FFP3 ou équivalents pour toute intervention à domicile compte tenu des risques de contamination par aérosols et du défaut de maîtrise des règles d'aération au sein du domicile des bénéficiaires et d'adresser à tous les salariés une communication afin de les informer qu'ils ne doivent en aucun cas intervenir au domicile d'un client s'ils ne disposent pas des équipements de protection individuelle requis.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. L'inspectrice du travail fait grief à l'arrêt d'ordonner à l'association de procurer à chaque salarié amené à intervenir au domicile d'un bénéficiaire positif au Covid-19 ou symptomatique, au moins un masque de type FFP2 par intervention à domicile, de la débouter de sa demande d'astreinte et de dire que les mesures ordonnées prendront terme avec la disparition du risque sanitaire, alors :

« 1°/ qu'en application de l'article L. 4732-1 du code du travail, l'inspecteur du travail saisit le juge judiciaire statuant en référé pour voir ordonner toutes mesures propres à faire cesser le risque, telles que la mise hors service, l'immobilisation, la saisie des matériels, machines, dispositifs, produits ou autres, lorsqu'il constate un risque sérieux d'atteinte à l'intégrité physique d'un travailleur ; que constitue un risque sérieux d'atteinte à l'intégrité physique des salariés d'une association intervenant dans le domaine de l'aide à domicile l'exposition au virus Sars-Cov-2, que les bénéficiaires soient symptomatiques ou positifs à la Covid-19 ou encore asymptomatiques ou présymptomatiques, en raison des modalités de transmission de ce virus, par gouttelettes ou aérosols et par des personnes non nécessairement positives à la Covid-19, de sorte que l'employeur doit mettre à leur disposition des masques de type FFP pour toutes leurs interventions au domicile des bénéficiaires ; que la cour d'appel, qui a ordonné à l'association de procurer à chaque salarié amené à intervenir au domicile d'un bénéficiaire positif à la Covid-19 ou symptomatique au moins un masque de type FFP2 par intervention à domicile, reconnaissant ainsi que le masque de type FFP2 constitue une mesure propre à faire cesser le risque d'exposition au virus, n'a toutefois pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en refusant d'étendre cette mesure à toutes les interventions des salariés au domicile des bénéficiaires, même non positifs à la Covid-19 ou asymptomatique, en violation du texte précité ;

2°/ qu'en application de l'article R. 4321-4 du code du travail, l'employeur met à la disposition de ses salariés les équipements de protection individuelle appropriés ; qu'il résulte des articles R. 4311-8, R. 4311-12, R. 4312-6 et de son annexe II, R. 4424-3 et R. 4424-5 du code du travail que, pour les salariés exposés à un agent biologique pathogène, l'employeur doit mettre à leur disposition un équipement de protection des voies respiratoires conformes aux normes reprises dans la collection des normes nationales dont les références ont été publiées au Journal officiel de l'Union européenne ; que les masques chirurgicaux, qui ne sont pas conçus pour protéger leur porteur d'un risque de contamination par un agent biologique pathogène, ne constitue pas un équipement de protection des voies respiratoires, à l'inverse des masques de type FFP ; qu'en jugeant néanmoins qu'aucune des dispositions du code du travail ne désigne expressément les masques de type FFP2 ou FFP3 comme éléments de protection individuelle et n'exclue de façon générale les masques chirurgicaux et qu'il n'est pas justifié que la fourniture d'un masque FFP2 ou FFP3 ou équivalent est désormais obligatoire ou même recommandée, dans le secteur de l'aide à domicile au profit de bénéficiaires non positifs à la Covid-19 ou asymptomatiques, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

3°/ qu'en se déterminant de la sorte, quand l'exposante soutenait que seuls les masques de type FFP constituent un équipement de protection individuelle et, précisément, un équipement de protection des voies respiratoires, au sens des dispositions du code du travail, la cour d'appel, qui n'a pas procédé à la recherche à laquelle elle était ainsi invitée, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

4°/ qu'en ayant retenu que « l'évolution récente de la situation sanitaire en France, à savoir la baisse continue des contaminations, en corrélation avec le développement et la généralisation de la vaccination, prioritaire tant pour les aides à domicile que pour les personnes âgées, ainsi que la facilité accrue de procéder à des tests, justifient de plus fort que l'utilisation des masques FFP2 ou FFP3 ne soit pas étendue au-delà de l'intervention au domicile de bénéficiaires positifs au Covid-19 ou symptomatiques et ce, nonobstant l'existence de nouveaux variants », quand, peu important la baisse des contaminations et le développement de la vaccination, les salariés de l'association restent exposés à un risque sérieux de contamination par le virus Sars-Cov-2, dès lors qu'ils interviennent au domicile de personnes potentiellement contaminées ou dans le domicile desquelles le virus peut être présent, de sorte que l'employeur doit mettre en oeuvre les mesures de protection appropriées pour faire cesser ce risque, la cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif inopérant, a de nouveau violé l'article L. 4732-1 du code du travail ».

Réponse de la Cour

5. Selon l'article R. 4424-3 du code du travail, lorsque l'exposition des travailleurs à un agent biologique dangereux ne peut être évitée, elle doit être réduite par la mise en oeuvre de diverses mesures, notamment des mesures de protection collective ou, lorsque l'exposition ne peut être évitée par d'autres moyens, par des mesures de protection individuelle.

6. Selon l'article R. 4321-4 du même code, l'employeur met à disposition de ses salariés, en tant que de besoin, les équipements de protection individuelle appropriés.

7. La cour d'appel qui a relevé que la fourniture de masques FFP2 et FFP3 n'était pas obligatoire ou même recommandée dans le secteur de l'aide à domicile au profit de bénéficiaires non positifs au Covid-19 ou ne présentant pas de symptômes, a pu décider que la mise à disposition par l'employeur d'un masque FFP2 aux salariés intervenant au domicile d'une personne positive ou symptomatique était de nature à réduire l'exposition au Covid-19.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Sommer - Rapporteur : Mme Lacquemant - Avocat général : Mme Molina - Avocat(s) : SCP Spinosi ; SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Articles R. 4321-4 et R. 4424-3 du code du travail.

Soc., 7 décembre 2022, n° 21-12.696, (B), FS

Rejet

Inspection du travail – Prérogatives et moyens d'intervention – Procédure de référé de l'inspecteur du travail – Référé judiciaire – Recevabilité – Cas – Prévention des risques professionnels – Prévention des risques biologiques – Risque d'exposition au Covid-19 – Activité de service à la personne – Employeur privé – Détermination – Portée

Il résulte de l'article L. 4111-1, alinéa 1, du code du travail que toute personne morale ou entreprise individuelle qui exerce une activité de service à la personne, en qualité d'employeur privé, est soumise aux dispositions relatives à la prévention des risques biologiques figurant au livre IV de la quatrième partie du code du travail.

Est en conséquence recevable l'action d'un inspecteur du travail qui agit sur le fondement de l'article L. 4732-1 du code du travail à l'encontre d'une association d'aide à la personne aux fins de voir limiter le risque d'exposition de ses salariés à un agent biologique.

Hygiène et sécurité – Principes généraux de prévention – Obligations de l'employeur – Prévention des risques professionnels – Prévention des risques biologiques – Etendue – Activités impliquant des agents biologiques pathogènes – Risque d'exposition au Covid-19 – Salarié d'un employeur personne morale ou entreprise individuelle – Activité de service à la personne – Activité d'aide à domicile – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 18 décembre 2020), l'inspectrice du travail de l'unité de contrôle n° 3 Nord-Lille de la Direction régionale des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi des Hauts de France a saisi le juge des référés d'un tribunal judiciaire aux fins de voir ordonner à l'association Aide à domicile aux retraités Flandre Métropole (l'association) de mettre en oeuvre des mesures ayant pour objet la limitation au niveau le plus bas possible du nombre de travailleurs exposés, ou susceptibles de l'être, au risque biologique lié au Covid-19.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident, qui est préalable

Enoncé du moyen

2. L'association fait grief à l'arrêt de déclarer l'inspectrice du travail recevable en son action exercée sur le fondement de l'article L. 4732-1 du code du travail, alors :

« 1°/ que l'inspecteur du travail peut saisir le juge judiciaire statuant en référé pour voir ordonner toutes mesures propres à faire cesser le risque lorsqu'il constate un risque sérieux d'atteinte à l'intégrité physique d'un travailleur résultant de l'inobservation des dispositions ainsi que des textes pris pour leur application du livre IV ; que selon l'article L. 4421-1 du code du travail, les règles de prévention des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs exposés à des agents biologiques concernées par le livre IV sont déterminées par décret en Conseil d'Etat ; que selon l'article R. 4421-1 du code du travail, les dispositions spécifiques du titre II intitulé « Prévention des risques biologiques » figurant dans le livre IV relatif à la « Prévention de certains risques d'exposition » de la quatrième partie du code du travail sont applicables dans les établissements dans lesquels la nature de l'activité peut conduire à exposer les travailleurs à des agents biologiques ; qu'en jugeant Mme [N], inspectrice du travail, recevable en son action fondée sur les dispositions spécifiques du titre II intitulé « Prévention des risques biologiques » figurant dans le livre IV relatif à la « Prévention de certains risques d'exposition » de la quatrième partie du code du travail à l'encontre d'une association d'aide à domicile qui relève des dispositions du livre II de la septième partie du code du travail relatives aux activités de service à la personne, la cour d'appel a violé les articles L. 4732-1, L. 4421-1 et R. 4421-1 du code du travail par fausse application ;

2°/ que l'inspecteur du travail peut saisir le juge judiciaire statuant en référé pour voir ordonner toutes mesures propres à faire cesser le risque lorsqu'il constate un risque sérieux d'atteinte à l'intégrité physique d'un travailleur résultant de l'inobservation des dispositions ainsi que des textes pris pour leur application du livre IV ; que selon l'article L. 4421-1 du code du travail, les règles de prévention des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs exposés à des agents biologiques concernées par le livre IV sont déterminées par décret en Conseil d'Etat ; que selon l'article R. 4421-1 du code du travail, les dispositions spécifiques du titre II intitulé « Prévention des risques biologiques » figurant dans le livre IV relatif à la « Prévention de certains risques d'exposition » de la quatrième partie du code du travail ne sont pas applicables lorsque l'activité, bien qu'elle puisse conduire à exposer des travailleurs, n'implique pas normalement l'utilisation délibérée d'un agent biologique et que l'évaluation des risques prévue au chapitre III ne met pas en évidence de risque spécifique ; qu'en jugeant, pour dire recevable l'action de Mme [N], inspectrice du travail, que l'activité d'aide à domicile n'implique pas effectivement l'usage délibérée d'un agent biologique mais que l'extrait du document unique d'évaluation des risques professionnels produit par Mme [N] identifie un risque biologique spécifique lié à l'intervention à domicile pendant une épidémie ou une pandémie et le classifie en risque mortel, la cour d'appel a violé les articles L. 4732-1, L. 4421-1 et R. 4421-1 ainsi que les articles R. 4423-1 à R. 4423-4 du code du travail par fausse application ;

3°/ que l'inspecteur du travail peut saisir le juge judiciaire statuant en référé pour voir ordonner toutes mesures propres à faire cesser le risque lorsqu'il constate un risque sérieux d'atteinte à l'intégrité physique d'un travailleur résultant de l'inobservation des dispositions ainsi que des textes pris pour leur application du livre IV ; que selon l'article L. 4421-1 du code du travail, les règles de prévention des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs exposés à des agents biologiques concernées par le livre IV sont déterminées par décret en Conseil d'Etat ; que selon les articles R. 4421-3 et R. 4421-4 du code du travail du titre II intitulé « Prévention des risques biologiques » figurant dans le livre IV relatif à la « Prévention de certains risques d'exposition » de la quatrième partie du code du travail, les agents biologiques sont classés en quatre groupes en fonction du risque d'infection qu'ils présentent et sont considérés comme agents biologiques pathogènes les agents biologiques des groupes 2, 3 et 4 dont la liste est fixée par arrêté ; que l'arrêté du 27 décembre 2017 fixant la liste de ces agents biologiques pathogènes est intitulé « Arrêté du 27 décembre 2017 relatif à la liste des agents biologiques pathogènes et aux mesures de prévention à mettre en oeuvre dans les laboratoires où les travailleurs sont susceptibles d'être exposés à des agents biologiques pathogènes » ; qu'en jugeant, pour dire recevable l'action de Mme [N], inspectrice du travail, que cet arrêté, qui concerne uniquement les laboratoires, est applicable à l'activité d'aide à domicile, la cour d'appel a violé les articles L. 4421-1, R. 4421-3 et R. 4421-4 du code du travail ainsi que l'arrêté du 27 décembre 2017 par fausse application ».

Réponse de la Cour

3. Aux termes de l'article L. 4111-1, alinéa 1, du code du travail, sous réserve des exceptions prévues à l'article L. 4111-4, les dispositions de la quatrième partie du code du travail sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'aux travailleurs.

4. Selon l'article L. 4732-1 du même code, l'inspecteur du travail, lorsqu'il constate un risque sérieux d'atteinte à l'intégrité d'un travailleur résultant de l'inobservation des dispositions du livre IV de la quatrième partie du code du travail, peut saisir le juge des référés pour voir ordonner toutes mesures propres à faire cesser le risque.

5. Aux termes de l'article R. 4421-1 du même code, les dispositions relatives aux risques biologiques sont applicables dans les établissements dans lesquels la nature de l'activité peut conduire à exposer les travailleurs à des agents biologiques. Toutefois, les dispositions des articles R. 4424-2, R. 4424-3, R. 4424-7 à R. 4424-10, R. 4425-6 et R. 4425-7 ne sont pas applicables lorsque l'activité, bien qu'elle puisse conduire à exposer des travailleurs, n'implique pas normalement l'utilisation délibérée d'un agent biologique et que l'évaluation des risques prévue au chapitre III ne met pas en évidence de risque spécifique.

6. Selon l'article R. 4421-4 du même code, sont considérés comme agents biologiques pathogènes les agents biologiques des groupes 2, 3 et 4, dont la liste est fixée par arrêté conjoint des ministres chargés du travail, de l'agriculture et de la santé.

7. Il résulte du premier de ces textes que toute personne morale ou entreprise individuelle qui exerce une activité de service à la personne, en sa qualité d'employeur de droit privé, est soumise aux dispositions relatives à la prévention des risques biologiques.

8. La cour d'appel, après avoir constaté, d'une part, que l'activité d'aide à domicile pouvait conduire à exposer les salariés qui exécutent les prestations au domicile des clients, dont on ignore s'ils sont contaminés, à des agents biologiques et actuellement au Covid-19, d'autre part, que le document unique d'évaluation des risques professionnels établi par l'employeur identifiait un risque biologique spécifique lié à l'intervention à domicile pendant une pandémie ou une épidémie en le classifiant de risque mortel et permettait d'écarter l'exception prévue à l'alinéa 2 de l'article R. 4421-1, enfin, que l'objet de l'arrêté du 27 décembre 2017 était, non seulement de fixer les règles de confinement applicables aux laboratoires, mais aussi d'actualiser la liste des agents pathogènes prévue par l'arrêté du 18 juillet 1994 pris en application de l'article R. 4421-4 du code du travail, a, à bon droit, décidé que les dispositions relatives à la prévention des risques biologiques étaient applicables au sein de l'association et déclaré recevable l'action engagée par l'inspectrice du travail.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le moyen du pourvoi principal, ci-après annexé

10. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois, tant principal qu'incident.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Sommer - Rapporteur : Mme Lacquemant - Avocat général : Mme Molina - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Articles L. 4111-1, alinéa 1, et L. 4732-1 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur l'obligation pour l'employeur du secteur de l'aide à domicile de mettre à disposition du salarié un équipement individuel de protection, à rapprocher : Soc., 7 décembre 2022, pourvoi n° 21-19.454, Bull., (rejet).

Soc., 7 décembre 2022, n° 21-23.662, (B), FS

Rejet

Services de santé au travail – Examens médicaux – Conclusion du médecin du travail – Avis sur l'aptitude – Contestation – Défaut – Effets – Détermination – Portée

Une cour d'appel qui constate que l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail mentionnait les voies et délais de recours et n'avait fait l'objet d'aucune contestation dans le délai de 15 jours, en déduit exactement que cet avis s'impose aux parties comme au juge, que la contestation concerne les éléments purement médicaux ou l'étude de poste.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 15 juillet 2021), M. [J] a été engagé, à compter du 3 mai 2004, en qualité de maçon, par la société Ulysse Hervé et fils.

2. A l'issue d'un arrêt de travail, il a été déclaré « inapte total » dans un avis du 11 avril 2017, le médecin du travail précisant que son état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans l'entreprise.

3. Le salarié a été licencié le 10 mai 2017 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

4. Il a saisi la juridiction prud'homale d'une contestation de son licenciement.

Examen des moyens

Sur le second moyen, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement n'est pas nul et qu'il est fondé sur une cause réelle et sérieuse et le débouter de ses demandes relatives au licenciement, alors :

« 1°/ qu'en vertu des articles L. 4624-4 et R. 4624-42 du code du travail, le médecin se prononce sur l'inaptitude du salarié après une étude de poste ; que le licenciement prononcé en raison de l'état de santé du salarié dont l'inaptitude n'a pas été régulièrement constatée est nul ; qu'en déboutant le salarié de ses demandes aux motifs adoptés que si « la loi impose [...] au médecin du travail d'effectuer ou de faire effectuer par un membre de l'équipe pluridisciplinaire un certain nombre de diligences avant de déclarer un salarié inapte physiquement », il s'agit « d'obligations imposées au médecin du travail, sans d'ailleurs que la loi n'ait prévu de sanction en cas de non respect de ces prescriptions », qu'il n'appartient pas « à l'employeur de vérifier le travail du médecin » et que ce dernier a « en revanche [...] l'obligation de tenir compte de l'avis et des conclusions du médecin du travail », la cour d'appel a violé le principe de non discrimination, ensemble les articles L. 1132-1, L. 1132-4, L. 4624-4 et R. 4624-42 du code du travail ;

2°/ qu'en vertu des articles L. 4624-7 et R. 4624-45 du code du travail, dans leur rédaction applicable, le salarié, qui entend contester les éléments de nature médicale justifiant l'avis d'inaptitude, saisit dans un délai de quinze jours le conseil de prud'hommes en sa formation des référés aux fins de désignation d'un médecin expert ; qu'au prix d'une interprétation de l'article L. 4624-7 dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 « à la lumière » de sa rédaction adoptée par l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, la cour d'appel a considéré que « le législateur a dès la réforme de 2016 souhaité que les avis dans leur globalité soient contestés devant le conseil de prud'hommes en sa formation des référés » et estimé que « la régularité de l'avis, qu'elle concerne les éléments purement médicaux ou l'étude de son poste, ne p[ouvait] plus être contestée et l'avis du médecin du travail s'impos[ait]à l'employeur comme au juge » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 4624-7 et R. 4624-45 du code du travail dans leur rédaction applicable ;

3°/ qu'en application des articles L. 4624-4 et R. 4624-42 du code du travail, le médecin du travail se prononce sur l'inaptitude du salarié après une étude de poste ; que le licenciement prononcé en raison de l'état de santé du salarié dont l'inaptitude n'a pas été régulièrement constatée est nul ; qu'en déboutant le salarié de ses demandes aux motifs propres que l'avis d'inaptitude n'a pas été contesté dans le délai de quinze jours de sorte que « la régularité de l'avis, qu'elle concerne les éléments purement médicaux ou l'étude de son poste, ne pouvait plus être contestée et [que] l'avis du médecin du travail s'impos[ait] à l'employeur comme au juge », quand le médecin du travail ne peut conclure à l'inaptitude qu'après s'être conformé à la procédure de constatation de l'inaptitude en procédant à une étude de poste et que le non-respect de la procédure ne relève pas du champ d'application du recours contre l'avis d'inaptitude exercé devant le conseil de prud'hommes, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 1132-1, L. 1132-4, L. 4624-4, L. 4624-7, dans sa rédaction applicable, et R. 4624-42 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. Aux termes de l'article L. 4624-7 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, si le salarié ou l'employeur conteste les éléments de nature médicale justifiant les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail en application des articles L. 4624-2, L. 4624-3 et L. 4624-4, il peut saisir le conseil de prud'hommes d'une demande de désignation d'un médecin-expert inscrit sur la liste des experts près la cour d'appel.

L'affaire est directement portée devant la formation de référé.

8. L'article R. 4624-45 du même code, dans ses dispositions issues du décret n° 2017-1008 du 10 mai 2017, énonce qu'en cas de contestation portant sur les éléments de nature médicale justifiant les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail mentionnés à l'article L. 4624-7, la formation de référé est saisie dans un délai de quinze jours à compter de leur notification.

Les modalités de recours ainsi que ce délai sont mentionnés sur les avis et mesures émis par le médecin du travail.

La décision de la formation des référés se substitue aux éléments de nature médicale mentionnés au premier alinéa qui ont justifié les avis, propositions, conclusions écrites ou indications contestés.

9. Il en résulte que l'avis émis par le médecin du travail, seul habilité à constater une inaptitude au travail, peut faire l'objet tant de la part de l'employeur que du salarié d'une contestation devant la formation de référé du conseil de prud'hommes qui peut examiner les éléments de toute nature ayant conduit au prononcé de l'avis.

En l'absence d'un tel recours, cet avis s'impose aux parties.

10. La cour d'appel, après avoir constaté que l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail le 11 avril 2017 mentionnait les voies et délais de recours et n'avait fait l'objet d'aucune contestation dans le délai de 15 jours, en a exactement déduit que la régularité de l'avis ne pouvait plus être contestée et que cet avis s'imposait aux parties comme au juge, que la contestation concerne les éléments purement médicaux ou l'étude de poste.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Sommer - Rapporteur : Mme Van Ruymbeke - Avocat général : Mme Wurtz - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP de Nervo et Poupet -

Textes visés :

Articles L. 4624-7, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et R. 4624-45, dans ses dispositions issues du décret n° 2017-1008 du 10 mai 2017, du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur le principe que les avis du médecin du travail s'imposent au juge en l'absence de recours dans le délai imparti, à rapprocher : Soc., 17 décembre 2014, pourvoi n° 13-12.277, Bull. 2014, V, n° 310 (cassation partielle), et l'arrêt cité.

Soc., 7 décembre 2022, n° 21-17.927, (B), FS

Rejet

Services de santé au travail – Examens médicaux – Conclusion du médecin du travail – Avis sur l'aptitude – Contestation – Office du juge – Etendue – Détermination – Portée

Il résulte des articles L. 4624-7 et R. 4624-42 du code du travail,dans leur rédaction applicable au litige, que le juge saisi d'une contestation de l'avis d'inaptitude peut examiner les éléments de toute nature sur lesquels le médecin du travail s'est fondé pour rendre son avis. Il substitue à cet avis sa propre décision après avoir, le cas échéant, ordonné une mesure d'instruction.

La cour d'appel, qui a procédé à l'examen de la procédure suivie par le médecin du travail et relevé que l'inaptitude de l'intéressé ne résultait pas des conditions de travail mais d'une dégradation des relations entre les parties pendant l'arrêt de travail et des conséquences psychiques qui en sont résultées, a pu en déduire que l'absence d'études récentes était sans influence sur les conclusions du médecin du travail qui concernaient une période postérieure à l'arrêt de travail et décider que le salarié était inapte à son poste de travail ainsi qu'à tout poste dans l'entreprise.

Services de santé au travail – Examens médicaux – Conclusion du médecin du travail – Avis sur l'aptitude – Modalités – Détermination

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 8 avril 2021), M. [Z] a été engagé par la société Access assistance le 14 avril 2004 en qualité d'agent d'entretien.

2. Le 25 février 2019, le médecin du travail a émis un avis d'inaptitude, indiquant : « Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé.

L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

3. Le 7 mars 2019, l'employeur a saisi le conseil de prud'hommes, statuant en la forme des référés, aux fins de contester l'avis d' inaptitude et demander l'organisation d'une expertise.

4. Le médecin inspecteur régional du travail a été désigné par ordonnance du 26 avril 2019.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le salarié était inapte au poste d'agent d'entretien ainsi qu'à tout autre poste au sein de la société Access assistance, alors « que selon l'article R. 4624-42 du code du travail, un salarié ne peut être déclaré médicalement inapte à son poste qu'après, d'une part, qu'il a été réalisé un examen médical permettant un échange sur les mesures d'aménagement, d'adaptation, de mutation de poste ou sur la nécessité de proposer un changement de poste, d'autre part, qu'il a été réalisé ou fait réaliser une étude de poste, de troisième part, qu'il a été réalisé ou fait réaliser une étude des conditions de travail dans l'établissement et, enfin, qu'il a été procédé à un échange avec l'employeur ; que ces conditions cumulatives doivent être respectées quelle que soit la cause de l'inaptitude ; qu'au cas présent, la société Access Assistante faisait valoir que les avis d'inaptitude du médecin du travail et du médecin inspecteur du travail n'avaient été précédés d'aucune étude de poste, ni d'aucune étude des conditions de travail au sein de l'établissement ; que, pour confirmer l'inaptitude, la cour d'appel a énoncé qu'une telle absence serait « sans influence » au motif que l'inaptitude « ne résulte pas des conditions de travail mais d'une dégradation des relations entre les parties pendant l'arrêt de travail et des conséquences psychiques qui en sont résultées » ; qu'en statuant de la sorte par des motifs inopérants, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

6. Selon l'article L. 4624-7 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, modifiée par la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018, le salarié ou l'employeur peut saisir le conseil de prud'hommes en la forme des référés d'une contestation portant sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail reposant sur des éléments de nature médicale en application des articles L. 4624-2, L. 4624-3 et L. 4624-4.

7. Ce texte ajoute que le conseil de prud'hommes peut confier toute mesure d'instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent pour l'éclairer sur les questions de fait relevant de sa compétence et que sa décision se substitue aux avis, propositions, conclusions écrites ou indications contestées.

8. Selon l'article R. 4624-42 du code du travail dans ses dispositions issues du décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du travailleur à son poste de travail que s'il a réalisé au moins un examen médical de l'intéressé, accompagné, le cas échéant, des examens complémentaires, permettant un échange sur les mesures d'aménagement, d'adaptation ou de mutation de poste ou la nécessité de proposer un changement de poste, s'il a réalisé ou fait réaliser une étude de ce poste et une étude des conditions de travail dans l'établissement et indiqué la date à laquelle la fiche d'entreprise a été actualisée et enfin s'il a procédé à un échange, par tout moyen, avec l'employeur.

9. Il en résulte que le juge saisi d'une contestation de l'avis d'inaptitude peut examiner les éléments de toute nature sur lesquels le médecin du travail s'est fondé pour rendre son avis. Il substitue à cet avis sa propre décision après avoir, le cas échéant, ordonné une mesure d'instruction.

10. La cour d'appel, qui a procédé à l'examen de la procédure suivie par le médecin du travail et relevé que l'inaptitude de l'intéressé ne résultait pas des conditions de travail mais d'une dégradation des relations entre les parties pendant l'arrêt de travail et des conséquences psychiques qui en sont résultées, a pu en déduire que l'absence d'études récentes était sans influence sur les conclusions du médecin du travail qui concernaient une période postérieure à l'arrêt de travail et décider que le salarié était inapte au poste d'agent d'entretien ainsi qu'à tout autre poste au sein de la société Access assistance.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Sommer - Rapporteur : Mme Van Ruymbeke - Avocat général : Mme Wurtz - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Articles L. 4624-7 et R. 4624-42 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige.

Rapprochement(s) :

Sur le périmètre de la contestation de l'avis du médecin du travail en matière d'inaptitude, à rapprocher : Avis de la Cour de cassation, 17 mars 2021, n° 21-70.002, Bull.

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