Numéro 12 - Décembre 2021

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 12 - Décembre 2021

REGIMES MATRIMONIAUX

1re Civ., 1 décembre 2021, n° 20-10.956, (B)

Cassation partielle

Communauté entre époux – Actif – Substitut de revenus – Aide personnalisée au logement – Versement direct à l'organisme prêteur – Absence d'influence

L'aide personnalisée au logement accordée à l'acquéreur d'un bien affecté à sa résidence principale, selon la composition et les ressources de son foyer, constitue pour son bénéficiaire un substitut de revenus, de sorte que celle-ci entre en communauté, peu important qu'elle soit versée directement à l'organisme prêteur.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 22 octobre 2019), un arrêt a prononcé le divorce de M. [I] et de Mme [O], mariés sous le régime de la communauté légale.

2. Des difficultés se sont élevées lors des opérations de liquidation et partage de leurs intérêts patrimoniaux.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Mme [O] fait grief à l'arrêt de dire que le montant de la récompense due par elle à la communauté doit inclure celui des aides personnalisées au logement, de fixer cette récompense à un certain montant et de rejeter ses autres prétentions, alors :

« 1°/ que l'aide personnalisée au logement, obtenue par un époux avant le mariage et versée directement à l'organisme prêteur qui en a déduit le montant des mensualités de remboursement du prêt finançant l'acquisition d'un bien propre, n'entre pas dans le patrimoine commun et n'ouvre pas droit à récompense au profit de la communauté ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1404, 1437 et 1469 du code civil ;

2°/ en tout état de cause, que la communauté, à laquelle sont affectés les fruits et revenus des biens propres, doit supporter les dettes qui sont à la charge de la jouissance de ces biens sans que leur paiement avec des fonds communs ne donne droit à récompense au profit de la communauté ; que dès lors en jugeant que Mme [O] devait récompense au profit de la communauté de l'aide personnalisée au logement après avoir pourtant relevé que cette aide avait pour finalité d'alléger les frais de logement qui sont une charge qui incombe à la communauté, la cour d'appel a violé les articles 1401, 1403, 1433, 1437, 1469 et 1479 du code civil, ensemble les articles. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel a constaté, par motifs propres, que la communauté s'était acquittée du remboursement de l'emprunt contracté par Mme [O] pour l'acquisition d'un bien propre ayant servi de logement familial.

6. Elle a retenu à bon droit, tant par motifs propres qu'adoptés, que l'aide personnalisée au logement accordée à l'acquéreur d'un bien affecté à sa résidence principale, selon la composition et les ressources de son foyer, constitue pour son bénéficiaire un substitut de revenus, de sorte que celle-ci entre en communauté, peu important qu'elle soit versée directement à l'organisme prêteur.

7. Elle en a exactement déduit que l'aide personnalisée au logement versée directement par la caisse d'allocations familiales à l'organisme de crédit ayant consenti le prêt ne pouvait être soustraite de la récompense due par Mme [O] à la communauté au titre de la fraction en capital des échéances dont celle-ci s'était acquittée.

8. Le moyen, inopérant en sa seconde branche en ce qu'il critique un motif surabondant, n'est donc pas fondé pour le surplus.

Mais sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

9. Mme [O] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de récompense au titre du véhicule, alors « qu'un véhicule acquis pendant le mariage est un acquêt de la communauté, en sorte que son attribution en propre à l'un des époux ouvre droit à récompense au profit de la communauté ; qu'en jugeant que M. [I] ne devait pas récompense à la communauté du prix d'achat du véhicule Toyota, acquis en août 1997, pendant le mariage, au motif que ce véhicule n'aurait pas été payé au moyen de deniers communs, mais à l'aide d'un prêt dont les échéances auraient été remboursées par lui, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si ces remboursements avaient été effectués avec des fonds propres ou communs, a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1401, 1402 et 1469 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1402, alinéa 1er, du code civil :

10. Aux termes de ce texte, tout bien, meuble ou immeuble, est réputé acquêt de communauté si l'on ne prouve qu'il est propre à l'un des époux par application d'une disposition de la loi.

11. Pour rejeter la demande de récompense au profit de la communauté, l'arrêt retient que le véhicule n'a pas été payé au moyen de deniers communs, mais financé grâce à un prêt pour lequel M. [I] a contracté une assurance et dont il a réglé les échéances.

12. En se déterminant ainsi, sans rechercher la nature propre ou commune des fonds employés au paiement des échéances durant le mariage, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de récompense de Mme [O] au titre du véhicule, l'arrêt rendu le 22 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet, sur ce point l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nancy.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Dard - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article 1402, alinéa 1, du code civil.

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