Numéro 12 - Décembre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 12 - Décembre 2020

PROCEDURE CIVILE

3e Civ., 3 décembre 2020, n° 19-17.868, n° 19-20.259, (P)

Cassation partielle

Acte de procédure – Nullité – Irrégularité de fond – Régularisation – Moment – Détermination – Portée

Acte de procédure – Nullité – Irrégularité de fond – Régularisation jusqu'à ce que le juge statue – Possibilité – Cas – Association syndicale libre – Perte de capacité d'ester en justice – Mise en conformité des statuts

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° P 19-20.259 et Q 19-17.868 sont joints.

Désistements partiels

2. Il est donné acte à M. et Mme OI..., M. et Mme Y..., M. X..., M. et Mme N..., M. F..., M. R..., M. A..., M. et Mme RE... et Mme KW... du désistement de leur pourvoi.

3. Il est donné acte à la SCP d'avocats U..., Borgia, U..., Morlon et associés, prise en la personne de M. U..., ès qualités,(la SCP) et à la société Mutuelles du Mans assurances (la MMA) du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est formé contre l'ordre des avocats du barreau de Bordeaux. Faits et procédure

4. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 25 avril 2019), le 9 décembre 2003, les copropriétaires d'un immeuble ont constitué une association foncière urbaine libre (AFUL) en vue de la réalisation d'une opération de restauration immobilière éligible à un dispositif de défiscalisation.

5. Le 12 janvier 2004, l'AFUL a confié la maîtrise d'oeuvre complète à la société Arch'Imhotep, assurée par les sociétés Mutuelle des architectes français (la MAF) et Axa IARD, la réalisation des travaux tous corps d'état à la société Archi Sud bâtiment, assurée par la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (la SMABTP), et la mission de coordination en matière de sécurité et protection de la santé à M. AI....

6. Le 20 janvier 2004, l'AFUL a conclu un contrat d'assistance à la maîtrise d'ouvrage avec M. MX..., syndic de copropriété, qui, le 21 janvier 2004, a sous-traité à la SCP, assurée par la MMA et la société Allianz, les missions de conseil et de gestion administrative et comptable.

7. Le permis de construire été délivré le 20 août 2004 et la déclaration d'ouverture du chantier établie le 11 avril 2005.

8. Au mois de juillet 2006, le chantier a été abandonné et l'immeuble muré.

9. Les sociétés Archi sud bâtiment et Arch'Imhotep et M. MX... ont été mis en redressement, puis en liquidation judiciaires.

10. L'AFUL et les copropriétaires ont, après expertise, assigné la SCP, M. MX..., M. AI... et les sociétés Archi Sud bâtiment et Arch'Imhotep, ainsi que leurs assureurs, en indemnisation de leurs préjudices.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi n° Q 19-17.868

Enoncé du moyen

11. La SCP et la MMA font grief à l'arrêt de les condamner in solidum à indemniser les copropriétaires, alors « qu'une faute ne peut être retenue comme la cause d'un dommage que s'il est établi que sans elle, il ne se serait pas produit ; qu'en retenant, pour condamner la SCP U... à indemniser les copropriétaires de leurs préjudices résultant de l'inachèvement des travaux, que l'avocat aurait dû mettre en garde les membres de l'AFUL contre le risque lié au versement de 80 % du montant des travaux avant l'ouverture du chantier et de la possibilité de bénéficier de l'avantage fiscal escompté en versant les fonds directement à l'AFUL au lieu de l'entrepreneur de l'ouvrage, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si sans la faute imputée à l'avocat, l'AFUL aurait pu échapper à son engagement de payer 80 % du montant des travaux avant l'ouverture du chantier qu'elle avait souscrit avant l'intervention de ce conseil ou obtenir des constructeurs l'achèvement des travaux de rénovation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240 du code civil. »

Réponse de la Cour

12. La cour d'appel a relevé qu'il n'était pas établi que la SCP avait une mission d'assistance juridique à l'égard des membres de l'AFUL au moment de la constitution de celle-ci, lors de l'assemblée générale du 19 décembre 2003 ayant décidé de confier les travaux de rénovation de l'immeuble aux sociétés Arch'Imhotep et Archi Sud bâtiment ou encore lors de la signature, le 12 janvier 2004, du cahier des clauses administratives particulières (le CCAP) qui stipulait le paiement de 50 % du coût des travaux à la signature du marché, de 30 % à l'ouverture du chantier et de 20 % à la pose des menuiseries extérieures, ce qui exposait l'AFUL à des risques très forts induits pas ces modalités particulières d'échelonnement des paiements.

13. Toutefois, elle a retenu que, si les intervenants étaient déjà choisis et le CCAP rédigé, cette situation ne dispensait pas la SCP, en sa qualité d'assistant juridique de l'AFUL à tous les stades de l'opération de rénovation immobilière, d'analyser les contrats déjà conclus, de mettre en garde les membres de l'AFUL sur la disproportion qui existait entre le montant des paiements à l'entreprise générale par rapport au stade d'avancement des travaux, de les informer que la réception des fonds par l'AFUL et non leur versement direct à l'entreprise leur permettait de bénéficier des avantages fiscaux et d'alerter l'AFUL sur la collusion d'intérêts qui existait entre les sociétés Arch'Imohtep et Archi Sud bâtiment, dont le capital était détenu par M. AI..., et sur le danger que présentait le CCAP.

14. Elle a relevé que le versement immédiat, avant tous travaux, de 80 % du montant du marché de l'entreprise générale avait privé les membres de l'AFUL de la possibilité de mener à bien une opération en leur laissant la charge d'un bâtiment en ruines qui avait dû être muré, ce qui entraînait une dépréciation du capital immobilier qu'ils avaient acquis et la perte de tous revenus locatifs.

15. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire, procédant à la recherche prétendument omise, que le préjudice financier subi par les copropriétaires, s'il provenait directement du stratagème mis en place par M. AI... au travers de l'action concertée des sociétés Arch'Imhotep et Archi Sud bâtiment, résultait aussi de l'absence de tout conseil efficient de la part de la société d'avocats.

16. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.

Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi n° Q 19-17.868, réunis

Enoncé du moyen

17. Par leur deuxième moyen, a SCP et la MMA font grief à l'arrêt de dire que les garanties de la SMABTP et de la MAF n'étaient pas mobilisables et de rejeter les demandes des copropriétaires formées à leur encontre, alors :

« 1°/ que la garantie déclenchée par la réclamation couvre l'assuré contre les conséquences pécuniaires d'un sinistre, dès lors que le fait dommageable est antérieur à la date de résiliation ou d'expiration de la garantie, et que la première réclamation relative au sinistre est adressée à l'assuré ou à son assureur entre la prise d'effet initiale de la garantie et l'expiration d'un délai subséquent à sa date de résiliation ; qu'en retenant, pour écarter la garantie de la SMABTP, que la réclamation de l'Aful ne pouvait profiter aux copropriétaires qui avaient formé une réclamation au-delà du délai subséquent, quand ces deux réclamations portaient sur le même sinistre, de sorte que la réclamation formée par l'Aful suffisait à mettre en oeuvre la garantie de l'assureur, la cour d'appel a violé les articles L. 124-5 et L. 124-1-1 du code des assurances ;

2°/ qu'en retenant, pour écarter la garantie de la SMABTP, qu'il ressort de la clause 5.6 des conditions générales du contrat conclu avec la société Archi Sud Bâtiment que sont exclues de la garantie les conséquences pécuniaires de toute nature causées par un retard dans la réalisation des travaux, de sorte que les préjudices des copropriétaires qui relevaient de cette catégorie n'étaient pas couverts par l'assurance, quand il n'était pas imputé à la société Archi Sud Bâtiment un simple retard dans les travaux mais leur inachèvement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales. »

18. Par leur troisième moyen, la SCP et la MMA font grief à l'arrêt de dire que la garantie de la MAF n'était pas mobilisable et de rejeter les demandes des copropriétaires formées à son encontre, alors que « la police d'assurance souscrite par la société Arch'Imhotep auprès de la Mutuelle des architectes garantit l'architecte contre les conséquences pécuniaires des responsabilités qu'il encourt dans l'exercice de sa profession telle qu'elle est définie par la législation et la réglementation en vigueur ; qu'en retenant, pour écarter la garantie de la MAF, que l'architecte, qui s'était trouvé dans une situation de conflit d'intérêts, n'avait pas exercé la fonction d'architecte telle qu'elle est définie par la législation et la réglementation en vigueur, quand cette faute ne suffisait pas établir que l'architecte avait exercé une activité interdite aux architectes, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil. »

Réponse de la Cour

19. La recevabilité du deuxième moyen est contestée en défense.

20. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties que la Cour était susceptible de relever d'office l'irrecevabilité du troisième moyen.

21. La SCP et la MMA n'ayant pas qualité pour critiquer le rejet des demandes formées par les copropriétaires contre la SMABTP et la MAF, le moyen est irrecevable.

Mais sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche, du pourvoi n° P 19-20.259

Enoncé du moyen

22. L'AFUL fait grief à l'arrêt de dire qu'elle n'a pas qualité à agir, alors « que le délai de forclusion est interrompu par la demande en justice jusqu'à ce qu'il ait été statué sur celle-ci, même si l'acte de saisine de la juridiction est entaché d'un vice de procédure, quel qu'il soit ; qu'en retenant que « l'irrégularité de fond qui entache l'acte d'appel pour défaut de capacité ne peut être couverte après l'expiration du délai d'appel » alors que demeurait possible la régularisation de l'acte d'appel qui, même entaché d'un vice de procédure, avait interrompu le délai d'appel, la cour d'appel a violé les articles 2241 et 2242 du code civil et l'article 121 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

23. La SCP, la MAF et la société Allianz contestent la recevabilité du moyen. Elles soutiennent que le moyen, pris en sa deuxième branche, est nouveau et mélangé de fait et, partant, irrecevable.

24. Toutefois, le moyen est de pur droit dès lors qu'il ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond.

25. Il est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles 2241, alinéa 2, du code civil et 121 du code de procédure civile :

26. Il résulte du premier de ces textes que l'acte de saisine de la juridiction, même entaché d'un vice de procédure, interrompt les délais de prescription comme de forclusion.

27. Par arrêt du 1er juin 2017 (2e Civ., 1er juin 2017, pourvoi n° 16-14.300), la deuxième chambre civile a jugé que demeure possible la régularisation de la déclaration d'appel qui, même entachée d'un vice de procédure, a interrompu le délai d'appel.

28. Pour dire que l'AFUL n'a pas qualité à agir, l'arrêt retient que, si elle justifie avoir procédé à la mise en conformité de ses statuts et avoir accompli les 23 février et 3 mars 2018 les formalités de déclaration et de publication prévues par l'article 8 de l'ordonnance du 1er juillet 2004, l'irrégularité de fond qui entache l'acte d'appel du 5 octobre 2016 pour défaut de capacité d'ester en justice ne peut pas être couverte après l'expiration du délai d'appel, de sorte que, si l'AFUL a recouvré sa capacité à agir en justice à partir du 3 mars 2018, elle restait dépourvue de toute capacité à agir au moment où elle a interjeté appel.

29. En statuant ainsi, alors que demeurait possible, jusqu'à ce que le juge statue, la régularisation de la déclaration d'appel qui, même entachée d'un vice de procédure, avait interrompu le délai d'appel, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Demandes de mise hors de cause

30. Il n'y a pas lieu de mettre hors de cause, sur leur demande, la MAF et les sociétés Axa France IARD et Allianz, dont la présence est nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen unique du pourvoi n° P 19-20.259, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que l'AFUL n'a pas qualité à agir, l'arrêt rendu le 25 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Mutuelle des architectes français et les sociétés Axa France IARD et Allianz.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : M. Jacques - Avocat général : M. Burgaud - Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Alain Bénabent ; SCP Baraduc, Duhamel et Rameix ; SCP Boulloche ; SCP Boutet et Hourdeaux ; SCP L. Poulet-Odent ; Me Le Prado -

Textes visés :

Articles 2241, alinéa 2, du code civil ; article 121 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

3e Civ., 5 novembre 2014, pourvoi n° 13-21.014, Bull. 2014, III, n° 136 (irrecevabilité et cassation partielle) ; 2e Civ., 1er juin 2017, pourvoi n° 16-14.300, Bull. 2017, II, n° 116 (cassation).

1re Civ., 9 décembre 2020, n° 19-10.114, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Conclusions – Conclusions d'appel – Formulation expresse des moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée – Référence aux moyens figurant dans les conclusions de première instance – Irrecevabilité

Il résulte de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance. Dès lors, doit être cassé l'arrêt qui retient que l'indemnisation des préjudices subis par la victime est à la charge de la clinique, alors que l'Office National d'Indemnisation des Accidents Médicaux, des Affections Iatrogènes et des Infections Nosocomiales (ONIAM) n'avait formé aucune demande contre cette dernière et que les conclusions d'appel de la victime avaient été déclarées irrecevables, de sorte que la cour d'appel n'était saisie d'aucune demande tendant à mettre à la charge de la clinique l'indemnisation des préjudices subis par la victime.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 25 octobre 2018), P... H... est décédée le [...] à la Clinique Saint-Jean (la clinique), après y avoir subi le 23 mai une intervention à visée esthétique et, le 25 mai, une intervention de reprise.

2. Après avoir sollicité une expertise en référé, M. W... H..., Mme L... H..., agissant tant en son nom propre qu'en qualité d'ayant droit d'X... O..., décédée le [...], et d'administratrice légale de ses filles, alors mineures, Y... V..., N... V... et U... V..., Mme N... H..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit d'X... O... et d'administratrice légale de sa fille mineure W... H..., Mme L... O... et Mme K... O... (les consorts H...), ont, par acte du 20 juillet 2015, assigné notamment la clinique et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM) pour voir reconnaître que le décès de P... H... avait été causé par une infection nosocomiale contractée dans les locaux de la clinique et obtenir l'indemnisation de leurs préjudices. Ils ont mis en cause la caisse primaire d'assurance maladie du Gard.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable.

Sur le second moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

4. La clinique fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes adressées par les consorts H... à son encontre et de dire que le dispositif de réparation des préjudices subis par les patients au titre de la solidarité nationale mentionné aux articles L. 1142-1 et L. 1142-1-1 du code de la santé publique n'est pas applicable aux demandes d'indemnisation de dommages imputables à des actes à visée purement esthétique, alors « que l'article L. 1142-3-1 du code de la santé publique excluant le dispositif de réparation des préjudices subis par les patients au titre de la solidarité nationale mentionné au II de l'article L. 1142-1 et aux articles L. 1142-1-1 et L. 1142-15 aux demandes d'indemnisation de dommages imputables à des actes dépourvus de finalité contraceptive, abortive, préventive, diagnostique, thérapeutique ou reconstructrice, y compris dans leur phase préparatoire ou de suivi n'est applicables qu'aux demandes d'indemnisation postérieures au 31 décembre 2014 ; d'où il suit que ce texte est inapplicable aux demandes d'indemnisation antérieures au 31 décembre 2014 ; qu'en faisant application de l'article L. 1142-3-1 du code de la santé publique pour la raison qu'au 1er janvier 2015 aucune instance n'était en cours puisque dans son ordonnance du 17 juillet 2013 le juge des référée avait rejeté la demande de provision sur indemnisations des consorts H... et que la demande d'indemnisation au fond était en date du 20 juillet 2015, quand elle constatait que la première demande d'indemnisation des consorts H... avait été formée le 13 juin 2013 par assignation en référé, la cour d'appel a violé l'article 70 II de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article L. 1142-1, I, alinéa 2, du code de la santé publique, les établissements de santé sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. Cependant, en application de l'article L. 1142-1-1, 1°, du même code, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale, les dommages résultant d'infections nosocomiales dans ces établissements correspondant à un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales.

6. S'il a été jugé que les actes de chirurgie esthétique, constituant des actes de soins, peuvent ouvrir droit à une indemnisation au titre de la solidarité nationale (1re Civ. 5 février 2014, n° 12-29.149, Bull. I, n° 21), la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 a, ensuite, créé l'article L. 1142-3-1, I, du code de la santé publique, écartant l'application du dispositif de réparation des préjudices subis par les patients au titre de la solidarité nationale notamment mentionné à l'article L. 1142-1-1, 1°, aux demandes d'indemnisation de dommages imputables à des actes dépourvus de finalité préventive, diagnostique, thérapeutique ou reconstructrice, y compris dans leur phase préparatoire ou de suivi et ainsi exclu une indemnisation au titre de la solidarité nationale dans le cas de dommages liés à des actes à visée esthétique. Elle a, en outre, prévu à l'article 70, II, que l'article L. 1142-3-1, I, s'appliquerait aux demandes d'indemnisation postérieures au 31 décembre 2014.

7. L'arrêt retient que, si antérieurement au 31 décembre 2014, le juge des référés a été saisi par les consorts H... de demandes d'expertise médicale et de provision, il a vidé sa saisine par une ordonnance du 17 juillet 2013 accueillant la demande d'expertise médicale et rejetant la demande de provision, et que la demande d'indemnisation devant le tribunal de grande instance a été formée par assignation du 20 juillet 2015, soit postérieurement au 31 décembre 2014.

8. La cour d'appel en a déduit, à bon droit, qu'étaient applicables les dispositions de l'article L. 1142-3-1 du code de la santé publique, de sorte que l'indemnisation des dommages subis par les consorts H... n'incombait pas à l'ONIAM.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

10. La clinique fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes adressées par les consorts H... à son encontre, de dire que l'indemnisation des préjudices est à sa charge et de fixer les préjudices à certaines sommes, alors « que la partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance ; qu'il en résulte que la cour d'appel qui n'est pas saisie de conclusions par l'intimé doit, pour statuer sur l'appel, examiner les motifs du jugement ayant accueilli les prétentions de cette partie en première instance ; qu'en jugeant que l'indemnisation des préjudices subis par les consorts H... était à la charge de la clinique, après avoir réformé le jugement sur l'appel de l'ONIAM et débouté le consorts H... de leurs demandes dirigées contre elle, quand l'ONIAM ne formait aucune demande contre la clinique et que la cour d'appel n'était saisie d'aucune demande des consorts H..., intimés, à l'encontre de la clinique, leurs conclusions d'appel ayant été déclarées irrecevables par deux ordonnances du conseiller de la mise en état des 23 novembre 2017 et 8 juin 2018, la cour d'appel a violé les articles 4, 5 et 954, alinéa 4, du code de procédure civile, ce dernier dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 954 du code de procédure civile :

11. Il résulte de ce texte que la partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance.

12. Pour dire que l'indemnisation des préjudices subis par les consorts H... est à la charge de la clinique, l'arrêt relève, d'abord, que l'ONIAM et la clinique s'opposent sur le régime d'indemnisation applicable à l'espèce, celui de l'article L. 1142-1, I, ou celui de l'article L. 1142-3-1 du code de la santé publique. Il écarte, ensuite, le régime d'indemnisation de l'article L. 1142-3-1 compte tenu du caractère esthétique de l'intervention et de la date de l'assignation en indemnisation devant le tribunal, et infirme le jugement en ce qu'il a retenu la réparation des préjudices subis par les consorts H... au titre de la solidarité nationale.

13. En statuant ainsi, alors que l'ONIAM n'avait formé aucune demande contre la clinique et que les conclusions d'appel des consorts H... avaient été déclarées irrecevables, la cour d'appel, qui n'était saisie d'aucune demande tendant à mettre à la charge de la clinique l'indemnisation des préjudices subis par les consorts H..., a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

14. Tel que suggéré par le mémoire ampliatif, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile, dès lors qu'il ne reste plus rien à juger.

15. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen du pourvoi principal, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement ayant rejeté les demandes à l'encontre de la Clinique Saint-Jean et, statuant à nouveau, dit que l'indemnisation des préjudices subis est à la charge de la société Clinique Saint-Jean, l'arrêt rendu le 25 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : M. Mornet - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux ; SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Sevaux et Mathonnet -

Textes visés :

Article L. 1142-3-1, I, du code de la santé publique ; article 954 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

En sens contraire, à rapprocher : 1re Civ., 5 février 2014, n° 12-29.140, Bull. 2014, I, n°21 (rejet).

2e Civ., 10 décembre 2020, n° 18-18.504, (P)

Cassation partielle

Droits de la défense – Principe de la contradiction – Application – Mesures d'instruction – Juge chargé du contrôle – Pouvoirs des articles 166, 167 et 168 du code de procédure civile – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 17 avril 2018), la société AB Yachting, suspectant un détournement de clientèle commis par un ancien salarié, M. Q... et la société Q... Nautic, dont M. Q... est le gérant, a saisi le président d'un tribunal de grande instance d'une requête, accueillie le 17 avril 2017, à fin de voir ordonner une mesure d'instruction sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile.

2. Par une ordonnance du 20 juillet 2017, le même président a autorisé l'huissier de justice, sur requête de ce dernier agissant en qualité de mandataire de la société AB Yachting, à conserver un disque dur saisi au domicile de M. Q....

3. M. Q... et la société Q... Nautic ont assigné la société AB Yachting en rétractation des deux ordonnances. Leur demande a été rejetée par une ordonnance d'un juge des référés en date du 19 septembre 2017, dont ils ont interjeté appel.

4. La société AB Yachting a été placée en liquidation judiciaire le 26 avril 2019, la SELARL E... F... étant désignée en qualité de liquidateur.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais, sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

6. M. Q... fait grief à l'arrêt ayant confirmé l'ordonnance de référé de dire n'y avoir lieu à rétracter l'ordonnance sur requête en date du 20 juillet 2017, alors « que lorsque survient une difficulté au cours de l'exécution d'une mesure d'instruction, le juge saisi sans forme fixe la date pour laquelle les parties et, s'il y a lieu, le technicien commis seront convoqués par le greffier de la juridiction ; qu'aucun texte ne prévoit qu'en la matière le juge soit dispensé de respecter le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, le président du tribunal s'est abstenu de convoquer les parties pour étendre la mission confiée à maître R... ; qu'en retenant néanmoins que le principe de la contradiction avait été rétabli lors de l'audience statuant sur la demande rétractation tout en refusant de rétracter une ordonnance rendue non contradictoirement dans un cas où la loi imposait la convocation des parties, la cour d'appel a violé les articles 16 et 168 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 14, 16, 166, 167 et 168 du code de procédure civile :

7. Lorsque le juge chargé du contrôle d'une mesure d'instruction exerce les pouvoirs prévus par les trois derniers de ces textes, il doit respecter le principe de la contradiction et statuer, les parties entendues ou appelées.

8. Pour confirmer l'ordonnance de référé du 19 septembre 2017, en ce qu'elle a rejeté la demande de rétractation de l'ordonnance sur requête du 20 juillet 2017, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que s'il est exact que l'ordonnance a été rendue sans convocation des parties, le principe du contradictoire a été respecté dès lors que ces parties, et tout particulièrement M. Q..., ont été convoquées et entendues à l'audience statuant sur la demande de rétractation.

9. En statuant ainsi, alors que le juge chargé du contrôle d'une mesure d'instruction avait statué par ordonnance sur requête, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'en confirmant l'ordonnance de référé du 19 septembre 2017, il a rejeté la demande de rétractation de l'ordonnance du 20 juillet 2017, l'arrêt rendu le 17 avril 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Jollec - Avocat général : M. Gaillardot (premier avocat général) - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Articles 14, 16, 166, 167 et 168 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

Précision apportée sur, à rapprocher : 2e Civ., 24 avril 1989, pourvoi n° 88-10.941, Bull. 1989, II, n° 98 (rejet).

2e Civ., 10 décembre 2020, n° 19-12.257, (P)

Rejet

Fin de non-recevoir – Appel du jugement statuant sur la compétence – Irrecevabilité – Défaut de motivation – Régularisation – Modalités – Détermination – Portée

Il résulte des articles 85 et 126 du code de procédure civile que le défaut de motivation du recours, susceptible de donner lieu à la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel du jugement statuant sur la compétence, peut être régularisé, en matière de procédure avec représentation obligatoire, par le dépôt au greffe, avant l'expiration du délai d'appel, d'une nouvelle déclaration d'appel motivée ou de conclusions comportant la motivation du recours, adressées à la cour d'appel.

Ces dispositions poursuivent un but légitime au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en l'occurrence la célérité et l'efficacité de la procédure d'appel des jugements statuant sur la compétence sans se prononcer sur le fond du litige, ne constituent pas une atteinte au droit à l'accès au juge d'appel dans sa substance même et ne portent pas une atteinte disproportionnée à l'accès au juge d'appel, la faculté de régularisation de la déclaration d'appel restant ouverte à l'appelant.

La cour d'appel, qui constate que l'appelant s'est borné à déposer au greffe, dans le délai de l'appel, une requête à fin d'être autorisé à assigner à jour fixe ses adversaires, qui, bien que contenant ses conclusions sur le litige, était adressée au premier président, la cour d'appel a, à bon droit, retenu que l'appelant n'ayant pas, dans le délai d'appel, régularisé la déclaration d'appel en déposant devant la cour d'appel des conclusions portant sur la motivation de l'appel, était irrecevable.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 décembre 2018), M. S... M... (M. M...) a interjeté appel du jugement d'un tribunal de commerce ayant accueilli une exception d'incompétence soulevée par M. R..., M. Q... M..., Mme M... née R..., ainsi que M. P... M... (les consorts R... M...), et ayant renvoyé M. M... à mieux se pourvoir devant les juridictions de Dubaï.

2. M. M... a présenté au premier président de la cour d'appel une requête à fin d'être autorisé à assigner les intimés à jour fixe.

3. Devant la cour d'appel, les consorts R... M... ont soulevé l'irrecevabilité de l'appel en raison du défaut de motivation de la déclaration d'appel.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

5. M. M... fait grief à l'arrêt de déclarer l'appel irrecevable, alors :

« 1°/ que la fin de non-recevoir tirée de l'absence de motivation de l'appel formé contre un jugement statuant exclusivement sur la compétence est susceptible d'être régularisée avant l'expiration du délai d'appel ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable l'appel formé par M. S... M..., que « l'article 85 perdrait son sens si l'on considérait que la requête à jour fixe pouvait pallier l'absence de motivation de l'appel », quand le dépôt par l'appelant, le 15 mars 2018, d'une requête à fin d'être autorisé à assigner à jour fixe comportant l'ensemble de ses moyens en fait et en droit avait régularisé, avant l'expiration du délai d'appel, la fin de non-recevoir tirée du défaut de motivation de la déclaration d'appel reçue le 8 mars 2018, la cour d'appel a violé les articles 85 nouveau et 126 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en toute hypothèse, l'application des règles de procédure ne peut conduire à un formalisme excessif portant atteinte à l'équité de la procédure ; qu'en retenant, pour déclarer l'appel irrecevable, que le défaut de motivation de la déclaration d'appel ne pouvait être régularisé, même avant l'expiration du délai de recours, par le dépôt d'une requête motivée en fait et en droit tendant à être autorisé à assigner à jour fixe, la cour d'appel a, par excès de formalisme, porté une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge d'appel et violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte de la combinaison des articles 85 et 126 du code de procédure civile que le défaut de motivation du recours, susceptible de donner lieu à la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel du jugement statuant sur la compétence, peut être régularisé, en matière de procédure avec représentation obligatoire, par le dépôt au greffe, avant l'expiration du délai d'appel, d'une nouvelle déclaration d'appel motivée ou de conclusions comportant la motivation du recours, adressées à la cour d'appel.

7. Ces dispositions poursuivent un but légitime au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en l'occurrence la célérité et l'efficacité de la procédure d'appel des jugements statuant sur la compétence sans se prononcer sur le fond du litige, la compétence du juge appelé à connaître d'une affaire pouvant être définitivement déterminée dans les meilleurs délais. Elles ne constituent pas une atteinte au droit à l'accès au juge d'appel dans sa substance même. Elles ne portent pas une atteinte disproportionnée à l'accès au juge d'appel, la faculté de régularisation de la déclaration d'appel restant ouverte à l'appelant.

8. Ayant constaté que M. M... s'était borné à déposer au greffe, dans le délai de l'appel, une requête à fin d'être autorisé à assigner à jour fixe les consorts R... M..., qui, bien que contenant ses conclusions sur le litige, était adressée au premier président, la cour d'appel a, à bon droit, retenu que l'appel formé par M. M..., qui n'a pas, dans le même délai, régularisé la déclaration d'appel en déposant devant la cour d'appel des conclusions portant sur la motivation de l'appel, était irrecevable.

9. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1, et 1015 du code de procédure civile, la décision déférée se trouve légalement justifiée de ce chef.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Kermina - Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Rocheteau et Uzan-Sarano -

Textes visés :

Articles 85 et 126 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 22 octobre 2020, pourvoi n° 19-17.630, Bull. 2020, (cassation).

2e Civ., 10 décembre 2020, n° 19-20.051, (P)

Cassation

Instance – Introduction – Citation – Caducité – Jugement de caducité fondé sur l'article 469 du code de procédure civile – Recours en rétractation – Possibilité (non)

Il résulte de la combinaison des articles 17 et 407 du code de procédure civile que le pouvoir accordé au juge, en cas d'erreur, de rétracter sa décision prononçant la caducité d'une citation lui est seulement reconnu lorsque cette décision a été prise à l'insu du demandeur. En application de l'article 469 du même code, si après avoir comparu, le demandeur s'abstient d'accomplir les actes de la procédure dans les délais requis, le défendeur peut demander au juge de déclarer la citation caduque.

Dès lors, le jugement de caducité fondé sur l'article 469 du code de procédure civile, qui doit intervenir après un débat contradictoire, ne peut faire l'objet d'un recours en rétractation.

En conséquence, viole ces dispositions et les principes régissant l'excès de pouvoir, l'arrêt qui, pour déclarer irrecevable l'appel-nullité formé contre un jugement ayant rapporté la décision de caducité prise sur le fondement de l'article 469 du code de procédure civile, retient que la voie de l'appel n'est ouverte qu'à l'égard de la décision par laquelle le juge refuse de rétracter sa première décision.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 mai 2019), M. C..., ayant été licencié par la société Bourse direct (la société), a saisi un conseil de prud'hommes afin de contester ce licenciement et obtenir diverses indemnités.

2. Par un jugement du 14 avril 2017, cette juridiction a déclaré la citation caduque sur le fondement de l'article 469 du code de procédure civile et constaté l'extinction de l'instance et son dessaisissement.

3. M. C... ayant sollicité que ce jugement soit rapporté, le conseil de prud'hommes a, par un second jugement du 16 février 2018, dit que la notification du jugement de caducité visait l'article 468 du code de procédure civile, rejeté le moyen d'irrecevabilité soulevé par la société et renvoyé l'affaire à une audience ultérieure afin qu'elle soit jugée.

4. La société a formé un appel-nullité contre ce jugement, lequel a été déclaré irrecevable.

Recevabilité du pourvoi contestée par la défense

5. Sauf dans les cas spécifiés par la loi, les jugements en dernier ressort qui ne mettent pas fin à l'instance ne peuvent être frappés de pourvoi en cassation indépendamment des jugements sur le fond que s'ils tranchent dans leur dispositif tout ou partie du principal. Il n'est dérogé à cette règle qu'en cas d'excès de pouvoir.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

6. La société fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'appel-nullité qu'elle a formé à l'encontre du jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 16 février 2018, alors :

« 1°/ qu'excède ses pouvoirs le juge qui se ressaisit d'une action, sans nouvelle assignation et sans autorisation expresse de la loi, après s'en être déclaré définitivement dessaisi ; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes de Paris avait, par jugement du 14 avril 2017, constaté l'extinction de l'instance et son dessaisissement en application de l'article 469 du code de procédure civile, pour ensuite, par jugement du 16 février 2018, se ressaisir de l'affaire sur requête en rapport, au motif que la notification de son précédent jugement visait l'article 468 du code de procédure civile ; qu'en jugeant que l'appel-nullité n'était pas recevable, bien que les mentions de la notification d'un jugement soient sans emport sur le sens dudit jugement et que le conseil de prud'hommes avait excédé ses pouvoirs en faisant revivre une action définitivement éteinte et en se ressaisissant de l'affaire sans nouvelle assignation, la cour d'appel a commis un excès de pouvoir négatif, en violation de l'article 469 du code de procédure civile ;

2°/ que l'article 17 du code de procédure civile dispose que lorsque la loi permet ou que la nécessité commande qu'une mesure soit ordonnée à l'insu d'une partie, celle-ci dispose d'un recours approprié contre la décision qui lui fait grief ; que ce texte est inapplicable aux décisions rendues contradictoirement ; qu'en l'espèce, le jugement du 14 avril 2017 était « contradictoire et en premier ressort », M. C... ayant été régulièrement convoqué et ayant comparu dans la procédure ; qu'en considérant que le rapport constituait une voie de droit ouverte contre ce jugement par application de l'article 17 du code de procédure civile, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et a violé le texte susvisé, ensemble l'article 469 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 17, 407 et 469 du code de procédure civile, ensemble les principes régissant l'excès de pouvoir :

7. Il résulte de la combinaison des deux premiers de ces textes que le pouvoir accordé au juge, en cas d'erreur, de rétracter sa décision prononçant la caducité d'une citation lui est seulement reconnu lorsque cette décision a été prise à l'insu du demandeur.

En application du troisième, si après avoir comparu, le demandeur s'abstient d'accomplir les actes de la procédure dans les délais requis, le défendeur peut demander au juge de déclarer la citation caduque.

8. Pour déclarer l'appel-nullité de la société irrecevable, l'arrêt retient qu'en application de l'article 17 du code de procédure civile, le conseil de prud'hommes peut rapporter sa première décision de caducité prise à la demande du défendeur sur le fondement de l'article 469 du code de procédure civile et que la voie de l'appel n'est ouverte qu'à l'égard de la décision par laquelle le juge refuse de rétracter sa première décision.

9. En statuant ainsi, alors que le jugement de caducité fondé sur l'article 469 du code de procédure civile, qui doit intervenir après un débat contradictoire, ne peut faire l'objet d'un recours en rétractation, la cour d'appel a consacré l'excès de pouvoir commis par le conseil de prud'hommes et violé le texte et les principes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Lemoine - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Gouz-Fitoussi -

Textes visés :

Articles 17, 407 et 469 du code de procédure civile ; principes régissant l'excès de pouvoir.

2e Civ., 10 décembre 2020, n° 18-15.383, (P)

Cassation

Instance – Péremption – Demande – Moyen soulevé antérieurement à tout autre – Nécessité

Il résulte de l'article 388 du code de procédure civile que la péremption d'instance doit, à peine d'irrecevabilité, être demandée ou opposée avant tout autre moyen.

Encourt donc la cassation l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour déclarer recevable l'exception de péremption opposée par une partie et constater l'extinction de l'instance par l'effet de la péremption, retient, après avoir relevé que dans ses premières conclusions, cette partie avait contesté le montant de la créance, que la demande de péremption d'instance régulièrement soulevée en première instance peut être reprise en cause d'appel jusqu'aux dernières conclusions.

Instance – Péremption – Demande – Moyen soulevé antérieurement à tout autre – Recours formé contre une décision ayant statué sur la péremption d'instance

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen 11 janvier 2018), au cours du mois de mars 2003, le navire « Canmar Pride », porte-conteneurs appartenant à la CPS n° 5 et opéré par la société CP Ships, a fait escale au port du Havre où des conteneurs ont été chargés par la société Compagnie nouvelle de manutentions portuaires (la société CNMP).

2. Le navire ayant quitté Le Havre pour Montréal le 3 mars 2003, certains conteneurs ont chuté en mer et d'autres sur le pont au cours du transport.

3. La société OOCL France, la société OOCL UK Ltd et la société Orient Overseas Container Line Ltd OOCL (les sociétés OOCL) et la société CP Ships ont assigné la société CNMP devant le juge des référés d'un tribunal de commerce qui, par une ordonnance du 20 mai 2002, a désigné un expert judiciaire avec pour mission de déterminer les causes du sinistre.

4. Les sociétés OOCL ayant été attraites devant des juridictions canadiennes et américaines, elles ont, le 29 septembre 2003, assigné la société CNMP en garantie des condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre devant le tribunal de commerce. Ce dernier a sursis à statuer dans l'attente du rapport d'expertise, puis dans l'attente de l'issue des procédures américaines et canadiennes.

5. Les sociétés OOCL ayant, par conclusions du 22 septembre 2009, repris leur procédure devant le tribunal de commerce, la société CNMP a soulevé la péremption de l'instance.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Les sociétés OOCL font grief à l'arrêt de déclarer la CNMP recevable en sa demande de constat de la péremption de la première instance et de constater l'extinction de l'instance par l'effet de la péremption et de les condamner aux dépens et à des frais irrépétibles, alors « qu'aux termes de l'article 388, alinéa 1er, du code de procédure civile, la péremption doit, à peine d'irrecevabilité, être demandée ou opposée avant tout autre moyen ; elle est de droit ; qu'il s'ensuit qu'en cause d'appel, la partie qui entend se prévaloir de la péremption doit l'invoquer, à peine d'irrecevabilité, dans ses premières conclusions, avant tout autre moyen ; que pour déclarer en l'espèce recevable la demande de péremption d'instance présentée par la société CNMP, la cour d'appel a considéré qu'il résultait « de la combinaison des articles 388, 562 et 954 du code de procédure civile que la demande de péremption régulièrement présentée en première instance peut être reprise en cause d'appel jusqu'aux dernières conclusions » ; qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait par ailleurs relevé que la société CNMP n'avait repris en cause d'appel sa demande de péremption de la première instance qu'à partir de ses conclusions n° 2 du 30 janvier 2017, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 388, alinéa 1er, du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 388 du code de procédure civile :

7. Il résulte de ce texte que la péremption de l'instance doit, à peine d'irrecevabilité, être demandée ou opposée avant tout autre moyen.

8. Pour déclarer recevable l'exception de péremption d'instance opposée par la CNMP et constater l'extinction de l'instance par la péremption, l'arrêt retient qu'il résulte de la combinaison des articles 388, 562 et 954 du code de procédure civile que la demande régulièrement présentée en première instance peut être reprise en cause d'appel jusqu'aux dernières conclusions.

9. En statuant ainsi, alors que, dans ses premières conclusions, la CNMP arguait de deux fins de non-recevoir et, subsidiairement, contestait au fond le montant de la créance, la péremption d'instance n'étant soulevé que dans des conclusions déposées ultérieurement, la cour d'appel, qui était tenue de relever d'office l'irrecevabilité de cet incident, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Fulchiron - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SCP Boullez -

Textes visés :

Article 388 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 15 octobre 2015, pourvoi n° 14-19.811, Bull. 2015, II, n° 234 (rejet).

2e Civ., 10 décembre 2020, n° 19-22.609, (P)

Rejet

Moyens de défense – Exceptions de procédure – Recevabilité – Conditions – Invocation avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir – Compétence exclusive – Juge de la mise en état

Il résulte des articles 74 et 914 du code de procédure civile que les exceptions de nullité d'actes de procédure doivent être soulevées avant toute défense au fond, dans des conclusions spécialement adressées au conseiller de la mise en état, seul compétent pour statuer sur l'irrecevabilité de l'appel et trancher, à cette occasion, toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 février 2019), un jugement du 21 juin 2017 du juge aux affaires familiales d'un tribunal de grande instance a prononcé le divorce de M. X... et de Mme W....

2. Par déclaration en date du 18 août 2018, M. X... a relevé appel de ce jugement, en ce qu'il le condamnait à verser à Mme W... une prestation compensatoire.

3. Par ordonnance du 6 septembre 2018, le conseiller de la mise en état a déclaré l'appel irrecevable comme tardif.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. M. X... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'appel qu'il a interjeté du jugement de divorce rendu le 21 juin 2017 par le tribunal de grande instance de Draguignan, alors :

« 1°/ que si les « exceptions » de nullité d'actes de procédure doivent être soulevées avant toute défense au fond, elles peuvent en revanche être soulevées après une demande au fond, en réponse à un moyen de défense soulevé par le défendeur ; qu'en effet, la nullité de l'acte de procédure ne se trouve alors pas couverte par la demande au fond antérieure, cet acte n'ayant été opposé au demandeur que postérieurement au dépôt de ses conclusions au fond ; qu'ainsi l'appelant auquel est opposée la tardiveté de l'appel peut lui-même opposer l'irrégularité de la signification, même après avoir conclu au fond, s'il est établi qu'il a conclu avant que l'intimé ne lui oppose l'irrecevabilité de son appel ; que dès lors en reprochant à M. X..., appelant, d'avoir déposé devant la Cour ses demandes au fond le 18 novembre 2017, sans soulever in limine litis devant le juge de la mise en l'état l'exception de nullité de l'acte de signification, lequel acte ne lui a pourtant été opposé par Mme W... pour faire valoir la tardiveté de l'appel, que le 17 janvier 2018, la cour d'appel a méconnu les dispositions des articles 73, 74, 112 et 771 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

2°/ que la signification doit être faite à personne ou, si celle-ci s'avère impossible, à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence, peu importe que ceux-ci soient occupés sans droit ni titre ; qu'en écartant le moyen soulevé par M. X... qui reprochait à l'huissier et à son ex-épouse de ne pas lui avoir signifié le jugement au lieu où il habitait de façon notoire, en raison de son occupation illégale, sans droit ni titre, de celui-ci, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 654, 655, et 659 du code de procédure civile et 102 du Code civil, ensemble l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte des articles 74 et 914 du code de procédure civile que les exceptions de nullité d'actes de procédure doivent être soulevées avant toute défense au fond, dans des conclusions spécialement adressées au conseiller de la mise en état, seul compétent pour statuer sur l'irrecevabilité de l'appel et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel.

6. Ayant relevé que M. X... avait soulevé la nullité de la signification du jugement dans ses conclusions au fond en date du 18 novembre 2017, adressées à la cour d'appel, et non dans des conclusions destinées au magistrat de la mise en état, et que ce dernier avait été saisi le 17 janvier 2018 par Mme W... par des conclusions d'incident soulevant l'irrecevabilité de l'appel, formées elles-mêmes avant toute défense au fond, c'est à bon droit que la cour d'appel a déclaré M. X... irrecevable à soulever la nullité de la signification du jugement et jugé l'appel irrecevable comme tardif.

7. Dès lors, le moyen, qui s'attaque à des motifs surabondants en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Fulchiron - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret -

Textes visés :

Articles 74 et 914 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 1 février 2018, pourvoi n° 16-27.322, Bull. 2018, II, n° 21 (cassation partielle).

2e Civ., 10 décembre 2020, n° 19-22.632, (P)

Rejet

Sursis à statuer – Décision de sursis – Appel – Autorisation du premier président – Champ d'application – Portée

Il résulte des articles 379 et 380 du code de procédure civile que si la décision ordonnant un sursis à statuer peut être frappée d'appel sur autorisation du premier président et si le juge qui a ordonné le sursis à statuer, qui reste saisi, peut, soit d'office soit à la demande d'une partie, le révoquer ou en abréger le délai, il n'en est pas de même de la décision rejetant la demande de révocation de ce sursis.

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue en référé et en dernier ressort, par le premier président d'une cour d'appel (Toulouse, 16 juillet 2019), M. et Mme L... ont acquis un bien par l'intermédiaire de la société Apollonia, et contracté, à cet effet, un emprunt auprès de la banque Patrimoine et immobilier, aux droits de laquelle vient le Crédit immobilier de France développement (la banque).

2. Les acquéreurs ayant cessé de rembourser cet emprunt, la banque les a assignés en paiement devant un tribunal de grande instance le 28 novembre 2011.

3. Par ordonnance du 22 novembre 2012, le juge de la mise en état a ordonné un sursis à statuer, dans l'attente de la décision définitive à intervenir dans la procédure pénale ouverte à la suite de la plainte déposée par M. et Mme L... à l'encontre, notamment, de la société Apollonia.

4. La banque ayant sollicité la révocation de ce sursis et la reprise de la procédure, le juge de la mise en état, par une ordonnance du 14 février 2019, rectifiée le 12 mars 2019, a dit n'y avoir lieu à la levée du sursis.

5. La banque a saisi le premier président de la cour d'appel afin d'être autorisée à relever appel de cette décision.

Examen du moyen

Sur le moyen

Enoncé du moyen

6. La banque fait grief à l'ordonnance de déclarer irrecevable sa demande d'autorisation de relever immédiatement appel de la décision de rejet de sa demande de révocation de sursis à statuer rendue par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Toulouse le 14 février 2019, rectifiée le 12 mars 2019, alors :

« 1° / que l'ordonnance par laquelle le juge de la mise en état rejette la demande d'une partie tendant à la révocation du sursis à statuer préalablement ordonné peut être frappée d'appel sur autorisation du premier président de la cour d'appel ; que pour déclarer irrecevable la demande de la société CIFD tendant à ce que celle-ci soit autorisée à relever appel d'une ordonnance du juge de la mise en état ayant rejeté sa demande de révocation du sursis à statuer ordonné précédemment, le magistrat délégué aux fonctions de premier président retient que seules les décisions ordonnant le sursis à statuer peuvent faire l'objet d'un appel immédiat et que l'ordonnance rejetant une demande de révocation peut seulement faire l'objet d'un appel avec la décision sur le fond ; qu'en statuant ainsi, le magistrat délégué aux fonctions de premier président a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé les articles 380 et 776 du code de procédure civile ;

2°/ que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal dans un délai raisonnable ; que le magistrat délégué aux fonctions de premier président a dit que l'ordonnance rejetant une demande de révocation du sursis ne pouvait faire l'objet d'un appel qu'avec la décision sur le fond ; que de la sorte, la société CIFD se trouve privée de tout recours utile contre la décision maintenant le sursis, puisqu'aucune décision au fond ne peut intervenir sans que le sursis ne soit révoqué ou expiré, et ne peut, notamment, contester ce maintien du sursis au regard de son droit à obtenir une décision sur sa demande dans un délai raisonnable ; qu'en statuant comme il l'a fait sans même rechercher si l'irrecevabilité opposée à la demande n'était pas de nature à porter atteinte au droit, pour la société CIFD, d'obtenir une décision dans un délai raisonnable, le premier président a violé l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme. »

Réponse de la Cour

7. Il résulte des articles 379 et 380 du code de procédure civile que si la décision ordonnant un sursis à statuer peut être frappée d'appel sur autorisation du premier président et si le juge qui a ordonné le sursis à statuer, qui reste saisi, peut, soit d'office soit à la demande d'une partie, le révoquer ou en abréger le délai, il n'en est pas de même de la décision rejetant la demande de révocation de ce sursis.

8. C'est donc sans encourir les griefs du moyen et par une exacte application de l'article 380 du code de procédure civile, que le premier président, ayant relevé, d'une part, que la société demanderesse ne saurait invoquer une atteinte à son droit au recours, celui-ci ayant été potentiellement ouvert pour contester la décision ayant ordonné le sursis qu'elle critique, et étant, s'agissant de la décision de rejet de sa demande de révocation, seulement différée conformément aux dispositions de l'article 776, alinéa 2 du code de procédure civile, et ayant fait ressortir, d'autre part, que cette irrecevabilité tirée de l'existence d'une instance pénale en lien avec la procédure civile ne portait pas atteinte excessive au droit d'obtenir une décision dans un délai raisonnable, a jugé irrecevable la demande d'autorisation de l'appel immédiat d'une décision qui n'avait pas ordonné un sursis à statuer, mais qui avait rejeté la demande de le voir révoquer.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Maunand - Avocat(s) : SCP Gaschignard ; SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés -

Textes visés :

Articles 379 et 380 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 25 juin 2015, pourvoi n° 14-18.288, Bull. 2015, II, n° 165 (irrecevabilité), et l'arrêt cité ; 2e Civ., 27 septembre 2018, pourvoi n° 17-17.270, Bull. 2018, II (rejet).

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.