Numéro 12 - Décembre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 12 - Décembre 2020

IMPOTS ET TAXES

Com., 2 décembre 2020, n° 18-25.559, (P)

Rejet

Enregistrement – Droits de mutation – Mutation à titre onéreux de meubles – Cession de droits sociaux – Société à prépondérance immobilière – Définition – Immeubles et droits réels immobiliers – Champ d'application – Exclusion – Immeubles par destination

Selon l'article 726, I, 2°, du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 2009, est à prépondérance immobilière la personne morale, quelle que soit sa nationalité, dont les droits sociaux ne sont pas négociés sur un marché réglementé d'instruments financiers et dont l'actif est principalement constitué d'immeubles ou de droits immobiliers situés en France.

Ce texte ne mentionnant que les immeubles et droits réels immobiliers, sans viser les immeubles par destination, c'est à bon droit qu'une cour d'appel retient que ces derniers ne peuvent être pris en compte pour déterminer si, au sens de l'article 726, I, 2°, susvisé, une personne morale est à prépondérance immobilière.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 23 avril 2018), par acte sous seing privé en date du 29 novembre 2010, la société Etablissement Bernard Escande et cie (la société Bernard Escande) a acquis les actions composant le capital de la SAS Société hydroélectrique de la Houille blanche, qui exploite une centrale hydroélectrique.

2. Cette mutation a été taxée au taux de 1,10 % prévu au 1° de l'article 726, I, du code général des impôts, plafonné à un certain montant.

3. Par une proposition de rectification du 1er août 2011, l'administration fiscale a considéré que, eu égard à la valeur des installations dédiées à l'exploitation, qui ont la nature d'immeubles par destination, cette cession devait être soumise au droit d'enregistrement au taux de 5 % applicable aux cessions de participations dans des personnes morales à prépondérance immobilière, conformément aux dispositions de l'article 726, I, 2°, du code général des impôts.

4. Après examen du litige par la commission départementale de conciliation, qui a donné un avis favorable sur la prépondérance immobilière de la société cédée, l'administration fiscale a émis un avis de recouvrement des droits supplémentaires réclamés.

5. La société Bernard Escande a contesté ces impositions par une réclamation qui a été rejetée le 27 avril 2015.

6. La société Bernard Escande a assigné l'administration fiscale en annulation de cette décision et en dégrèvement des droits et pénalités perçus.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Le directeur départemental des finances publiques du Pas-de-Calais fait grief à l'arrêt de déclarer non fondée et d'annuler la décision de rejet du 27 avril 2015, alors « que l'article 726.-I. du C.G.I. prévoit en son 2 ° que les cessions de droits sociaux sont soumises à un droit d'enregistrement dont le taux est fixé à 5 % pour les cessions de participations dans des personnes morales à prépondérance immobilière ; que s'agissant de la notion de « prépondérance immobilière », le même article précise qu'« est à prépondérance immobilière la personne morale (...) dont l'actif est, ou a été au cours de l'année précédant la cession des participations en cause, principalement constitué d'immeubles ou de droits immobiliers situés en France ou de participations dans des personnes morales (...) elles-mêmes à prépondérance immobilière » ; que l'article 726 du C.G.I. se réfère ainsi à la notion d'« immeubles ou de droits immobiliers », sans autre précision, pour apprécier la prépondérance immobilière ; qu'en pareil cas, à défaut de dispositions spécifiques relatives à la notion d'« immeubles ou de droits immobiliers », le caractère des biens doit nécessairement être déterminé selon les règles du droit civil ; qu'il résulte à cet égard des dispositions de l'article 517 du code civil que « les biens sont immeubles, ou par leur nature, ou par leur destination, ou par l'objet auxquels ils s'appliquent » ; que l'article 524 du même code précise par ailleurs que « les animaux et les objets que le propriétaire d'un fonds y a placé pour le service et l'exploitation de ce fonds sont immeubles par destination » et que sont notamment immeubles par destination « tous effets mobiliers que le propriétaire a attachés au fonds à perpétuelle demeure » ; que la notion d'immeuble, telle qu'elle résulte des dispositions du code civil, englobe ainsi les immeubles par nature comme les immeubles par destination, de sorte que le tarif immobilier a vocation à s'appliquer aux ventes d'immeubles par nature, aux ventes d'immeubles par destination et aux ventes d'immeubles par l'objet auxquels ils s'appliquent ; que pour l'appréciation de la prépondérance immobilière au sens des dispositions de l'article 726 du C.G.I., la notion d'immeubles et de droits immobiliers s'entend donc nécessairement de l'ensemble des immeubles, qu'il s'agisse d'immeubles par nature ou d'immeubles par destination ; qu'en jugeant le contraire, en retenant en particulier, par motifs propres et adoptés, que « le texte [de l'article] 726 du C.G.I. ne mentionne que les immeubles et droits réels immobiliers et non les immeubles par destination », de sorte que « ceux-ci ne peuvent y être inclus par référence aux dispositions du code civil », la cour d'appel de Toulouse a nécessairement violé les dispositions de l'article 726.-I. 2° du C.G.I. ainsi que celles des articles 517 et 524 du code civil. »

Réponse de la Cour

8. Selon l'article 726, I, 2°, du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 2009, est à prépondérance immobilière la personne morale, quelle que soit sa nationalité, dont les droits sociaux ne sont pas négociés sur un marché réglementé d'instruments financiers et dont l'actif est principalement constitué d'immeubles ou de droits immobiliers situés en France.

9. Ce texte ne mentionnant que les immeubles et droits réels immobiliers, sans viser les immeubles par destination, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que ces derniers ne peuvent être pris en compte pour déterminer si, au sens de l'article 726, I, 2°, susvisé, une personne morale est à prépondérance immobilière.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : M. Ponsot - Avocat général : M. Debacq - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger ; SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller -

Textes visés :

Article 726, I, 2° du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 2009.

Com., 2 décembre 2020, n° 18-26.480, (P)

Rejet

Impôt de solidarité sur la fortune – Contribution exceptionnelle sur la fortune – Caractère confiscatoire – Eléments d'appréciation – Montant d'autres impôts (non)

Le caractère confiscatoire de la contribution exceptionnelle sur la fortune, qui s'acquitte pour partie par imputation de l'impôt de solidarité sur la fortune dû au titre de l'année 2012, s'apprécie en prenant en compte le montant de cette seule contribution et non celui d'autres impôts.

Impôt de solidarité sur la fortune – Contribution exceptionnelle sur la fortune – Convention européenne des droits de l'homme – Article 1er du premier protocole additionnel – Compatibilité

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 octobre 2018, n° RG : 17/06573), M. M... et son épouse, Mme Y..., se sont acquittés, au titre de l'année 2012, de la contribution exceptionnelle sur la fortune (CEF) instituée par l'article 4 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012. Contestant la conformité de cette contribution avec les dispositions de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison de son caractère rétroactif et de l'absence de tout dispositif de plafonnement, ils en ont demandé le remboursement. Après rejet de leur réclamation, ils ont assigné l'administration fiscale pour demander l'annulation de cette décision et la restitution de l'impôt acquitté.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa septième branche

Enoncé du moyen

2. M. M... et Mme Y... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors « que méconnaissent le droit au respect des biens garanti par l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme les dispositions qui soumettent un contribuable à une imposition établie en fonction d'éléments antérieurs à l'entrée en vigueur du texte prévoyant l'imposition, si cette rétroactivité n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général suffisant ; qu'en l'espèce, la (CEF) instaurée par l'article 4 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 est établie en fonction de la valeur des biens et droits détenus au 1er janvier 2012 ; qu'en retenant que ces dispositions ne portaient pas atteinte au principe de non-rétroactivité de la loi fiscale, pour en déduire qu'elles ne méconnaissaient pas l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, la cour d'appel a méconnu ce texte. »

Réponse de la Cour

3. L'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'interdit pas, en tant que telle, l'application rétroactive d'une loi fiscale.

4. La loi n° 2012-958 du 16 août 2012, qui instaure la CEF, est intervenue au cours de l'exercice au titre duquel cet impôt est dû. Si une telle mesure est, au sens de la Convention, rétroactive en ce que la CEF due au titre de l'année 2012 est établie en fonction de la valeur des biens et droits détenus au 1er janvier 2012, ce qui s'analyse, en droit interne, comme une mesure rétrospective dès lors que le fait générateur de l'imposition est la situation du contribuable à la date de l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative, elle ne présente toutefois aucun caractère exceptionnel du point de vue du droit fiscal.

5. En outre, l'acquittement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) dû au titre de l'année 2012, par des contribuables auxquels l'allégement, issu de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011, de cet impôt a été accordé sans contrepartie, n'a pu faire naître aucune attente légitime quant au fait qu'aucun supplément d'imposition sur le patrimoine ne serait décidé par le législateur pour cette même année.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

Et sur le moyen, pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième branches

Enoncé du moyen

7. M. M... et Mme Y... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors :

« 1°/ que l'obligation financière née du prélèvement d'impôts ou de contributions méconnaît la garantie consacrée par l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme dès lors qu'elle impose au contribuable une charge excessive ou porte fondamentalement atteinte à sa situation financière ; qu'en l'espèce, M. M... et Mme Y... faisaient valoir qu'ils s'étaient acquittés en 2012 d'un montant d'impôts directs de 126 789 euros, dont 45 042 euros au titre de l'ISF et 52 425 euros au titre de la CEF, alors que leurs revenus disponibles déclarés en 2012 au titre de 2011 s'élevaient à la somme de 114 661 euros ; qu'en jugeant, par des motifs inopérants, que la CEF réclamée à M. M... et Mme Y... ne revêtait pas un caractère confiscatoire, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le montant total des impositions directes acquittées par M. M... et Mme Y... en 2012 n'avait pas excédé les revenus dont ils avaient disposé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er du premier protocole additionnel précité ;

2°/ qu'en retenant, pour juger que la CEF réclamée à M. M... et Mme Y... ne méconnaissait pas le droit au respect des biens garanti par l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, que le plafonnement par rapport aux revenus ne s'imposait pas à un impôt qui a pour assiette le patrimoine indépendamment du niveau des revenus, cependant que méconnaissent l'article 1er du premier protocole additionnel précité les impositions payées au cours d'une année dont le montant cumulé excède les revenus dont le contribuable a disposé, quelle que soit leur assiette, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier protocole additionnel précité ;

3°/ que, en se fondant, pour juger que la contribution litigieuse ne présentait pas un caractère confiscatoire, sur le fait que ce montant demeurait limité par rapport au patrimoine des contribuables, cependant que revêt un caractère confiscatoire une imposition lorsque le montant cumulé des impositions directes payées par les contribuables excède les revenus dont ils ont disposé, la cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant et a violé l'article 1er du premier protocole additionnel précité ;

4°/ que, en se fondant encore, pour juger que la contribution litigieuse ne présentait pas un caractère confiscatoire, sur le fait que cette contribution présentait un caractère exceptionnel, la cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er du premier protocole additionnel précité ;

5°/ que, en se fondant, par motifs adoptés, pour juger que la contribution litigieuse ne présentait pas un caractère confiscatoire, sur le fait que le montant des revenus de M. M... et Mme Y... aurait été le résultat des choix qu'ils avaient opérés en matière d'investissements, la cour d'appel s'est derechef déterminée par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er du premier protocole additionnel précité ;

6°/ que, en tout état de cause, M. M... et Mme Y... avaient fait valoir, pour contester le fait que le niveau de leurs revenus aurait résulté d'un choix de leur part, que leur patrimoine se composait à hauteur de 1 700 000 euros de biens immobiliers non productifs de revenus, à hauteur de zéro euro de contrat d'assurance vie et, à hauteur de 54,08 % de titres côtés de la société Schlumberger, qui avait donné lieu à un montant de dividendes de 89 763 euros au titre de l'année 2011 ; qu'en retenant que le montant des revenus de M. M... et Mme Y... résultait du choix qu'ils avaient fait de procéder à des investissements massifs non productifs de revenus, sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

8. En premier lieu, le caractère confiscatoire de la CEF, qui s'acquitte pour partie par imputation de l'ISF dû au titre de l'année 2012, s'apprécie en prenant en compte le montant de cette seule contribution et non pas celui d'autres impôts.

Les griefs des première, deuxième et troisième branches, qui postulent le contraire, manquent en droit.

9. En second lieu, l'arrêt constate que cette contribution s'est élevée, pour M. M... et Mme Y..., à la somme de 52 425 euros après imputation de l'ISF d'un montant de 45 042 euros. Il retient, par motifs propres et adoptés, que si M. M... et Mme Y... ont perçu des revenus d'un montant de 114 661 euros selon leur déclaration de 2011, ils détenaient au 1er janvier 2012 un patrimoine d'une valeur nette de 9 128 301 euros, de sorte que la CEF n'a représenté que 1,06 % de sa valeur. Il ajoute que cette contribution n'a pas conduit à la diminution de leur patrimoine, quand bien même auraient-ils choisi de céder telles ou telles actions pour s'acquitter de ces impositions, leur patrimoine déclaré imposable au titre de l'ISF ayant été estimé à la somme de 12 044 815 euros au 1er janvier 2012, puis à celle de 12 585 176 euros au 1er janvier 2013, après paiement de la CEF.

En l'état de ces seuls motifs, dont il résulte que le paiement de la CEF n'avait pas constitué, pour M. M... et Mme Y..., une charge excessive au regard de leur situation patrimoniale, la cour d'appel, qui a légalement justifié sa décision, a pu écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Par conséquent, le moyen, inopérant en ses cinquième et sixième branches, qui critiquent des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme de Cabarrus - Avocat général : M. Debacq - Avocat(s) : SCP Cabinet Colin - Stoclet ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Rapprochement(s) :

Sur la compatibilité de l'impôt de solidarité sur la fortune à l'article 1er du premier protocole additionnel, à rapprocher : Com., 25 janvier 2005, pourvoi n° 03-10.068, Bull., 2005, IV, n° 16 (rejet).

Com., 2 décembre 2020, n° 18-26.479, (P)

Rejet

Impôt de solidarité sur la fortune – Contribution exceptionnelle sur la fortune – Convention européenne des droits de l'homme – Article 1er du premier protocole additionnel – Compatibilité – Applications diverses – Contribution dépassant le montant des revenus du contribuable

Le seul fait que le montant de la contribution exceptionnelle sur la fortune dépasse le montant des revenus du contribuable pour l'année considérée ne suffit pas établir le caractère confiscatoire de cet impôt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 octobre 2018, n° RG : 17/06572), M. et Mme N... se sont acquittés, au titre de l'année 2012, de la contribution exceptionnelle sur la fortune (CEF) instituée par l'article 4 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012. Contestant la conformité de cette contribution avec les dispositions de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison de son caractère rétroactif et de l'absence de tout dispositif de plafonnement, ils en ont demandé le remboursement. Après rejet de leur réclamation, ils ont assigné l'administration fiscale pour demander l'annulation de cette décision et la restitution de l'impôt acquitté.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa huitième branche

Enoncé du moyen

2. M. et Mme N... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors :

« 8°/ que méconnaissent le droit au respect des biens garanti par l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme les dispositions qui soumettent un contribuable à une imposition établie en fonction d'éléments antérieurs à l'entrée en vigueur du texte prévoyant l'imposition, si cette rétroactivité n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général suffisant ; qu'en l'espèce, la CEF instaurée par l'article 4 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 est établie en fonction de la valeur des biens et droits détenus au 1er janvier 2012 ; qu'en retenant que ces dispositions ne portaient pas atteinte au principe de non-rétroactivité de la loi fiscale, pour en déduire qu'elles ne méconnaissaient pas l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, la cour d'appel a méconnu ce texte. »

Réponse de la Cour

3. L'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'interdit pas, en tant que telle, l'application rétroactive d'une loi fiscale.

4. La loi n° 2012-958 du 16 août 2012, qui instaure la CEF, est intervenue au cours de l'exercice au titre duquel cet impôt est dû. Si une telle mesure est, au sens de la Convention, rétroactive en ce que la CEF due au titre de l'année 2012 est établie en fonction de la valeur des biens et droits détenus au 1er janvier 2012, ce qui s'analyse, en droit interne, comme une mesure rétrospective dès lors que le fait générateur de l'imposition est la situation du contribuable à la date de l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative, elle ne présente toutefois aucun caractère exceptionnel du point de vue du droit fiscal.

5. En outre, l'acquittement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) dû au titre de l'année 2012, par des contribuables auxquels l'allégement, issu de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011, de cet impôt a été accordé sans contrepartie, n'a pu faire naître aucune attente légitime quant au fait qu'aucun supplément d'imposition sur le patrimoine ne serait décidé par le législateur pour cette même année.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

Et sur le moyen, pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième, sixième et septième branches

7. M. et Mme N... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors :

Enoncé du moyen

« 1°/ que l'obligation financière née du prélèvement d'impôts ou de contributions méconnaît la garantie consacrée par l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme dès lors qu'elle impose au contribuable une charge excessive ou porte fondamentalement atteinte à sa situation financière ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté par motifs propres et adoptés que M. et Mme N... se sont acquittés de la somme de 133 276 euros au titre de l'ISF 2012 et de la somme de 268 781 euros au titre de la seule CEF, alors que leurs revenus disponibles déclarés en 2012 au titre de 2011 s'élevaient à la somme de 160 033 euros ; qu'en jugeant, par des motifs inopérants, que la CEF réclamée à M. et Mme N... ne revêtait pas un caractère confiscatoire, cependant qu'il résultait de ses propres constatations que son montant excédait le montant des revenus dont M. et Mme N... avaient disposé, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier protocole additionnel précité ;

2°/ qu'en retenant, pour juger que la CEF réclamée à M. et Mme N... ne méconnaissait pas le droit au respect des biens garanti par l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, que le plafonnement par rapport aux revenus ne s'imposait pas à un impôt qui a pour assiette le patrimoine indépendamment du niveau des revenus, cependant que méconnaissent l'article 1er du premier protocole additionnel précité les impositions dont le montant excède les revenus dont le contribuable a disposé, quelle que soit leur assiette, la cour d'appel a derechef violé l'article 1er du premier protocole additionnel précité ;

3°/ que, en se fondant, pour juger que la contribution litigieuse ne présentait pas un caractère confiscatoire alors même que son montant excédait celui des revenus déclarés en 2012 par M. et Mme N..., sur le fait que ce montant demeurait limité par rapport au patrimoine des contribuables, cependant que revêt un caractère confiscatoire une imposition dont le montant excède les revenus dont le contribuable a disposé, la cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant et a violé l'article 1er du premier protocole additionnel précité ;

4°/ que, en se fondant encore, pour juger que la contribution litigieuse ne présentait pas un caractère confiscatoire, sur le fait que cette contribution présentait un caractère exceptionnel, la cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er du premier protocole additionnel précité ;

5°/ que, en se fondant, par motifs adoptés, pour juger que la contribution litigieuse ne présentait pas un caractère confiscatoire, sur le fait que le montant de ces revenus aurait été le résultat des choix opérés par M. et Mme N... en matière d'investissements, la cour d'appel s'est derechef déterminée par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er du premier protocole additionnel précité ;

6°/ que, en tout état de cause, M. et Mme N... avaient fait valoir, pour contester le fait que le niveau de leurs revenus aurait résulté d'un choix de leur part, que leur patrimoine se composait à hauteur de 750 000 euros de biens immobiliers non productifs de revenus, à hauteur de zéro euro de contrat d'assurance vie et, à hauteur de 49,14 %, de titres côtés de la société Schlumberger, qui avait donné lieu à un montant de dividendes de 164 255 euros au titre de l'année 2011 ; qu'en retenant que le montant des revenus de M. et Mme N... résultait du choix qu'ils avaient fait de procéder à des investissements massifs non productifs de revenus, sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

7°/ que M. et Mme N... avaient fait valoir, pour démontrer le caractère confiscatoire de la contribution mise à leur charge, que leur patrimoine net avait diminué en 2012, pour passer de 26 655 137 euros au 1er janvier 2012 à 25 550 050 euros (lire 26 550 050 euros) au 1er janvier 2013 ; qu'en retenant, pour exclure le caractère confiscatoire de la contribution mise à la charge de M. et Mme N..., que le patrimoine brut des époux N... était passé de 27 772 408 euros au 1er janvier 2012 à 29 175 107 euros au 1er janvier 2013, sans rechercher si le montant de leur patrimoine net avait évolué, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er du premier protocole additionnel précité. »

Réponse de la Cour

8. En premier lieu, le seul fait que le montant de la CEF dépasse le montant des revenus du contribuable pour l'année considérée ne suffit pas à établir le caractère confiscatoire de cet impôt.

Les griefs des première, deuxième et troisième branches procèdent donc d'un postulat erroné.

9. En second lieu, l'arrêt constate que cette contribution, d'un montant initial de 402 057 euros, s'est élevée, pour M. et Mme N..., à la somme de 268 781 euros après imputation de l'ISF. Il retient, par motifs propres et adoptés, que si M. et Mme N... ont perçu des revenus d'un montant de 160 033 euros selon leur déclaration de 2011, ils détenaient au 1er janvier 2012 un patrimoine d'une valeur nette de 26 655 137 euros, de sorte que la CEF n'a représenté que 1,44 % de sa valeur. Il ajoute que cette contribution n'a pas conduit à la diminution de leur patrimoine, quand bien même auraient-ils choisi de céder telles ou telles actions pour s'acquitter de ces impositions, leur patrimoine déclaré imposable au titre de l'ISF ayant été estimé à la somme de 27 772 408 euros, au 1er janvier 2012, puis à celle de 29 175 107 euros, au 1er janvier 2013, après paiement de la CEF.

En l'état de ces seuls motifs, dont il résulte que le paiement de la CEF n'avait pas constitué, pour M. et Mme N..., une charge excessive au regard de leur situation patrimoniale, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à la recherche invoquée par la septième branche, que ses constatations rendaient inopérante, a pu écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Par conséquent, le moyen, inopérant en ses quatrième, cinquième et sixième branches qui critiquent des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme de Cabarrus - Avocat général : M. Debacq - Avocat(s) : SCP Cabinet Colin - Stoclet ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Rapprochement(s) :

Sur la compatibilité de l'impôt de solidarité sur la fortune à l'article 1er du premier protocole additionnel, à rapprocher : Com., 25 janvier 2005, pourvoi n° 03-10.068, Bull., 2005, IV, n° 16 (rejet).

Com., 2 décembre 2020, n° 18-24.055, (P)

Rejet

Impôt de solidarité sur la fortune – Contribution exceptionnelle sur la fortune – Convention européenne des droits de l'homme – Article 1er du premier protocole additionnel – Compatibilité – Applications diverses – Loi fiscale rétroactive

L'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'interdit pas, en tant que telle, l'application rétroactive d'une loi fiscale.

La loi n° 2012-958 du 16 août 2012, qui instaure la contribution exceptionnelle sur la fortune (CEF), est intervenue au cours de l'exercice au titre duquel cet impôt est dû. Si une telle mesure est, au sens de la Convention, rétroactive en ce que la CEF due au titre de l'année 2012 est établie en fonction de la valeur des biens et droits détenus au 1er janvier 2012, ce qui s'analyse, en droit interne, comme une mesure rétrospective dès lors que le fait générateur de l'imposition est la situation du contribuable à la date de l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative, elle ne présente toutefois aucun caractère exceptionnel du point de vue du droit fiscal.

En outre, l'acquittement de l'impôt de solidarité sur la fortune dû au titre de l'année 2012, par des contribuables auxquels l'allégement, issu de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011, de cet impôt, a été accordé sans contrepartie, n'a pu faire naître aucune attente légitime quant au fait qu'aucun supplément d'imposition sur le patrimoine ne serait décidé par le législateur pour cette même année.

Par conséquent, la loi instaurant la CEF n'a pas méconnu les dispositions de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Impôt de solidarité sur la fortune – Contribution exceptionnelle sur la fortune – Convention européenne des droits de l'homme – Article 1er du premier protocole additionnel – Compatibilité – Applications diverses – Attente légitime quant à l'absence de supplément d'imposition (non)

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 septembre 2018), M. et Mme Q... se sont acquittés, au titre de l'année 2012, de la contribution exceptionnelle sur la fortune (CEF) instituée par l'article 4 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012. Contestant la conformité de cette contribution avec les dispositions de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison de son caractère rétroactif et de l'absence de tout dispositif de plafonnement, ils en ont demandé le remboursement. Après rejet de leur réclamation, ils ont assigné l'administration fiscale pour demander l'annulation de cette décision et la restitution de l'impôt acquitté.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

2. M. et Mme Q... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors :

« 2°/ qu'il ressort, tant de l'économie même de l'article 4 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012, que des travaux parlementaires ayant précédé son adoption, qu'en instaurant au titre de l'année 2012 une « contribution exceptionnelle sur la fortune » dont l'assiette était calquée sur celle de l'impôt de solidarité sur la fortune, dont le contrôle et le recouvrement obéissaient aux même procédures, garanties et privilèges que celui-ci, dont le barème progressif était fortement inspiré de celui qui s'était appliqué pour le calcul de l'impôt de solidarité sur la fortune dû au titre de 2011, et dont le paiement devait être effectué après imputation du montant de l'impôt de solidarité sur la fortune acquitté au titre de l'année 2012, le législateur a entendu rétroactivement annihiler l'allégement d'imposition accordé sous la précédente législature et porter le niveau de l'imposition sur la fortune des redevables concernés au titre de 2012 au niveau qui se serait appliqué si le barème antérieur à la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 avait été conservé ; qu'il suit de là que cette CEF n'est pas distincte de l'impôt de solidarité sur la fortune et qu'elle n'a eu d'autre objet que de permettre une élévation rétroactive du montant de cet impôt décidée postérieurement à son fait générateur, ce dont il s'évince qu'elle a méconnu le juste équilibre requis entre les exigences de l'intérêt général de la collectivité et les impératifs de la protection du droit fondamental des redevables de l'impôt au respect de leurs biens ; que, pour écarter ce grief, la cour d'appel a retenu que cette CEF était une imposition autonome de l'impôt de solidarité sur la fortune, puisque son fait générateur était la situation du contribuable à la date d'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative du 16 août 2012 et que les contribuables ayant quitté le territoire national entre le 1er janvier et le 4 juillet 2012 n'étaient imposables qu'à raison de leur patrimoine situé en France ; qu'en se déterminant ainsi au regard de l'apparence d'autonomie conférée par le législateur à cette contribution, quand il lui appartenait d'en restituer le véritable caractère dès lors que la Convention européenne des droits de l'homme a vocation à protéger des droits concrets et effectifs, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ;

3°/ que, sous peine de méconnaître le juste équilibre requis entre les exigences de l'intérêt général de la collectivité et les impératifs de la protection du droit fondamental des redevables de l'impôt au respect de leurs biens, une loi fiscale nationale adoptée postérieurement au fait générateur d'une imposition ne saurait avoir pour effet d'anéantir de manière rétroactive l'allégement de cet impôt qui résultait de la loi en vigueur au moment du fait générateur de celui-ci ; qu'en retenant, par motif adopté des premiers juges, que l'application d'une loi fiscale rétroactive ne constitue pas en soi une violation des droits garantis par l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la CEF instaurée par l'article 4 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 n'avait pas eu pour objet et pour effet d'anéantir de manière rétroactive les effets de l'allégement de l'impôt de solidarité sur la fortune dû au titre de l'année 2012, qui avait été décidé par l'effet de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011, et de porter ainsi atteinte aux attentes légitimes des contribuables qui, ayant acquitté leur impôt de solidarité sur la fortune pour l'année 2012, pouvaient légitimement s'estimer libérés, pour cette année, de toute imposition sur la détention de leur patrimoine, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention susvisée. »

Réponse de la Cour

3. L'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'interdit pas, en tant que telle, l'application rétroactive d'une loi fiscale.

4. La loi n° 2012-958 du 16 août 2012, qui instaure la CEF, est intervenue au cours de l'exercice au titre duquel cet impôt est dû. Si une telle mesure est, au sens de la Convention, rétroactive en ce que la CEF due au titre de l'année 2012 est établie en fonction de la valeur des biens et droits détenus au 1er janvier 2012, ce qui s'analyse, en droit interne, comme une mesure rétrospective dès lors que le fait générateur de l'imposition est la situation du contribuable à la date de l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative, elle ne présente toutefois aucun caractère exceptionnel du point de vue du droit fiscal.

5. En outre, l'acquittement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) dû au titre de l'année 2012, par des contribuables auxquels l'allégement, issu de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011, de cet impôt a été accordé sans contrepartie, n'a pu faire naître aucune attente légitime quant au fait qu'aucun supplément d'imposition sur le patrimoine ne serait décidé par le législateur pour cette même année.

6. Le moyen, inopérant en sa deuxième branche qui critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus.

Et sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. M. et Mme Q... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors « qu'en vertu de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens et nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; que si l'instauration par l'article 4 de la loi du 16 août 2012 d'une CEF s'est, dans son principe, inscrite dans le cadre du droit que détient tout Etat partie à la Convention susvisée de mettre en vigueur des lois qui assurent le paiement de l'impôt, les stipulations conventionnelles susvisées imposaient néanmoins de respecter un juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général de la collectivité et les impératifs de la protection du droit fondamental de chaque individu au respect de ses biens, ce dont il se déduit que la contribution instaurée, dût-elle ne s'appliquer que pour une seule année, ne devait pas revêtir le caractère d'une confiscation, fût-elle partielle du patrimoine des assujettis, en imposant à ces derniers une captation fiscale supérieure aux revenus permettant de l'acquitter ; que pour juger néanmoins que l'instauration de la contribution en cause n'avait pas méconnu le droit des époux Q... au respect de leurs biens, la cour d'appel a énoncé que « le plafonnement par rapport aux revenus ne s'impose pas à un impôt qui a pour assiette le patrimoine indépendamment du niveau des revenus » ; qu'en se prononçant de la sorte, cependant qu'une imposition sur la fortune peut revêtir un caractère confiscatoire dès lors qu'elle n'est pas plafonnée à hauteur des revenus qui permettraient de l'acquitter, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme. »

8. L'arrêt constate que la CEF s'est élevée, pour M. et Mme Q..., à la somme de 802 091 euros après imputation de l'ISF d'un montant de 338 395 euros. Il relève que M. et Mme Q... ne justifient pas du montant des revenus dont ils ont disposé en 2011, qu'ils ne démontrent ni même n'allèguent que leurs revenus auraient été absorbés intégralement par la CEF ni qu'ils auraient été contraints de céder une partie de leur patrimoine pour s'en acquitter, ni même que leur patrimoine ait diminué sur la période considérée.

En l'état de ces seuls motifs, dont il résulte qu'il n'était pas établi que le paiement de la CEF ait constitué, pour M. et Mme Q..., une charge excessive au regard de leur situation patrimoniale, la cour d'appel a justifié le rejet du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le moyen, qui critique des motifs surabondants, est donc inopérant.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme de Cabarrus - Avocat général : M. Debacq - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Rapprochement(s) :

Sur la compatibilité de l'impôt de solidarité sur la fortune à l'article 1er du premier protocole additionnel, à rapprocher : Com., 25 janvier 2005, pourvoi n° 03-10.068, Bull., 2005, IV, n° 16 (rejet).

Com., 16 décembre 2020, n° 18-16.801, (P)

Rejet

Redressement et vérifications (règles communes) – Procédures de contrôle – Transmission de pièces par l'autorité judiciaire à l'administration des finances – Pièces issues de la commission d'un délit – Condition

Selon l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, dans sa version alors applicable, l'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration des finances toute indication qu'elle peut recueillir, de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale ou une manoeuvre quelconque ayant eu pour objet ou ayant eu pour résultat de frauder ou de compromettre un impôt, qu'il s'agisse d'une instance civile ou commerciale ou d'une information criminelle ou correctionnelle, même terminée par un non-lieu.

En matière de procédures de contrôle de l'impôt, à l'exception de celles relatives aux visites en tous lieux, même privés, les pièces issues de la commission d'un délit ne peuvent être écartées au seul motif de leur origine dès lors qu'elles ont été régulièrement portées à la connaissance de l'administration fiscale par application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales et que les conditions dans lesquelles elles lui ont été communiquées n'ont pas été ultérieurement déclarées illégales par un juge.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 mars 2018), Mme O... a été définitivement condamnée le 11 juin 2014, par un tribunal correctionnel, pour des faits de fraude fiscale découverts à la suite de la transmission à l'administration fiscale par un procureur de la République, sur le fondement de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, d'informations laissant supposer qu'elle était titulaire de comptes bancaires ouverts, au nom de sociétés de droit panaméen, dans les livres d'une banque établie en Suisse.

2. Parallèlement, le 16 octobre 2013, l'administration fiscale a notifié deux propositions de rectification à Mme O..., portant sur des rappels de droits d'enregistrement selon la procédure de taxation d'office prévue à l'article 755 du code général des impôts au titre de ses avoirs figurant sur deux comptes étrangers, sur l'impôt de solidarité sur la fortune et sur la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.

3. Le 24 avril 2014, l'administration fiscale a émis un avis de mise en recouvrement et, après rejet de sa contestation, Mme O... l'a assignée afin d'obtenir l'annulation de la décision de rejet et la décharge des sommes mises en recouvrement.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Mme O... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors :

« 1°/ que la transmission par le procureur de la République, au titre de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, de documents volés ou détournés ou présumés volés ou détournés, ne peut rendre licite leur détention et leur production par les agents de l'administration pour fonder des propositions de rectification ; qu'il n'est pas contesté que les données informatiques versées au soutien de la plainte de l'administration fiscale contre Mme O... le 10 décembre 2010, dont des extraits ont été transmis à l'appui des propositions de rectification, avaient été dérobées par M. N..., ancien informaticien salarié de la filiale suisse de la banque HSBC ; qu'en retenant que les pièces sur la base desquelles les propositions de rectification ont été fondées, avaient une origine apparemment licite dès lors qu'elles avaient été versées dans le cadre régulier d'une communication régulière à l'administration fiscale les 9 juillet 2009, 2 septembre 2009 et 12 janvier 2010, conformément aux dispositions des articles L. 101 et L. 135 du livre des procédures fiscales, bien que la transmission desdites pièces n'ait pas suffi à leur conférer une origine apparemment licite, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales et l'article 6 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°/ que pour établir des propositions de rectification, l'administration fiscale ne peut fonder les rectifications sur des documents illicites ; qu'au cas présent, pour fonder les rectifications opérées, l'administration fiscale a fait état des éléments qu'elle aurait obtenus dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, notamment des extraits issus de fichiers informatiques de la banque HSBC à Genève et qui concerneraient des comptes ouverts dans cet établissement ; que la transmission par le procureur de la République, au titre de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, de documents volés ou détournés ou présumés volés ou détournés, ne peut rendre licite leur détention et leur production par les agents de l'administration pour fonder des propositions de rectification ; que la détention de ces données informatiques par l'administration fiscale ne pouvant donc être considérée comme licite, ces données ne pouvaient valablement être opposées à Mme O... comme fondement à des rectifications ; qu'il suffit qu'une seule pièce illicite ait été retenue parmi d'autres pour entraîner la nullité de la procédure d'imposition ; qu'en retenant, pour considérer que les propositions de rectification établissaient que Mme O... détenait des avoirs à l'étranger, que lesdites propositions étaient fondées non seulement sur les documents illicites qui lui ont été transmis par l'autorité judiciaire mais sur des éléments tirés de l'enquête pénale pour fraude fiscale diligentée à l'encontre de Mme O..., la cour d'appel a violé l'article L. 101 du livre des procédures fiscales et l'article 6 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

5. En dépit des effets patrimoniaux qu'il a nécessairement quant à la situation des contribuables, le contentieux de l'impôt échappe au champ des obligations de caractère civil de l'article 6 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. Selon l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, dans sa version alors applicable, l'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration des finances toute indication qu'elle peut recueillir, de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale ou une manoeuvre quelconque ayant eu pour objet ou ayant eu pour résultat de frauder ou de compromettre un impôt, qu'il s'agisse d'une instance civile ou commerciale ou d'une information criminelle ou correctionnelle, même terminée par un non-lieu.

7. En matière de procédures de contrôle de l'impôt, à l'exception de celles relatives aux visites en tous lieux, même privés, les pièces issues de la commission d'un délit ne peuvent être écartées au seul motif de leur origine dès lors qu'elles ont été régulièrement portées à la connaissance de l'administration fiscale par application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales et que les conditions dans lesquelles elles lui ont été communiquées n'ont pas été ultérieurement déclarées illégales par un juge.

8. Après avoir relevé qu'il n'était pas contesté que les données informatiques versées au soutien de la plainte de l'administration fiscale contre Mme O... avaient été dérobées à la banque par un de ses salariés et avaient été obtenues au cours d'une perquisition légalement effectuée au domicile de ce salarié sur une commission rogatoire internationale délivrée par les autorités judiciaires helvétiques puis régulièrement communiquées à l'administration fiscale par le procureur de la République en application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, l'arrêt retient qu'il n'est pas établi que l'administration fiscale ait confectionné les pièces litigieuses ni participé directement ou indirectement à leur production, le rapprochement et le décryptage des données informatiques ne pouvant s'analyser comme une confection d'éléments de preuve par une autorité publique.

9. L'arrêt relève encore, par motifs propres et adoptés, que le tribunal correctionnel a, par un jugement définitif, rejeté l'exception de nullité de la plainte tirée de l'obtention illicite des documents qui la fondaient.

10. De ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel a déduit, à bon droit, que ces données constituaient des preuves admissibles, de sorte que les propositions de rectifications notifiées à Mme O... par l'administration fiscale étaient régulières.

11. En conséquence, le moyen, inopérant en sa seconde branche qui critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

12. Mme O... fait le même grief à l'arrêt, alors « que la procédure de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales concernant les demandes de justification de l'origine des avoirs placés sur un compte bancaire à l'étranger non déclaré, qui est applicable aux demandes de l'administration fiscale à compter du 1er janvier 2013, ne peut rouvrir une prescription acquise à cette date, dès lors que l'article 755 du code général des impôts qui prévoit les conséquences de la mise en oeuvre des demandes de justifications, ne s'appliquent qu'aux délais de reprise venant à expiration à compter du 1er janvier 2013 ; que, par ailleurs, les dispositions de l'article L. 181-0 A du livre des procédures fiscales, qui prévoient un délai de reprise de dix ans en matière de droits de succession ou d'impôt de solidarité sur la fortune, en cas de non-déclaration d'un compte bancaire ou d'un contrat d'assurance-vie ouvert ou souscrit auprès d'un établissement ou organisme sis à l'étranger, s'appliquent aux délais de reprise venant à expiration à compter du 1er janvier 2013 ; qu'en l'espèce, la mère de Mme O..., T... M..., étant décédée le [...] et la déclaration de succession définitive ayant été déposée le 27 septembre 2006, la prescription en matière de droits d'enregistrement était acquise au 31 décembre 2012 conformément aux dispositions de l'article L. 186 du livre des procédures fiscales ; que la proposition de rectification, seul acte interruptif de prescription, a été adressée à Mme O... le 16 octobre 2013 ; qu'il en résulte que les dispositions de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, entrées en vigueur le 1er janvier 2013, ne pouvaient donc être appliquées au cas présent, dès lors que la prescription était acquise à cette date ; qu'en jugeant le contraire, en retenant que Mme O... ne pouvait invoquer la prescription du droit de reprise de l'administration s'agissant des avoirs dont elle a hérité de sa mère, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 23 C, L. 186 et L. 181-0 A du livre des procédures fiscales ainsi que l'article 755 du code général des impôts. »

Réponse de la Cour

13. Selon les dispositions combinées des articles 1649 A du code général des impôts et L. 23 C du livre des procédures fiscales, les personnes physiques domiciliées en France sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts utilisés ou clos à l'étranger. Lorsque cette obligation n'a pas été respectée au moins une fois au titre des dix années précédentes, l'administration peut demander à la personne physique soumise à cette obligation de fournir, dans un délai de soixante jours, les informations ou justifications sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte et, lorsque la personne a répondu de façon insuffisante aux demandes de l'administration, elle lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours. Il en résulte le fait générateur de l'imposition correspond à la date d'expiration des délais prévus à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales et constitue le point de départ de la prescription décennale fixée par l'article L. 181-0 A du livre des procédures fiscales.

14. Après avoir énoncé que la procédure de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, dont les conséquences de la mise en oeuvre sont codifiées aux articles 755 du code général des impôts et L. 71 du livre des procédures fiscales, est applicable aux demandes de l'administration fiscale à compter du 1er janvier 2013 et relevé que celle-ci avait adressé à Mme O... une première demande d'information le 17 mai 2013, à laquelle elle avait répondu le 15 juillet 2013, puis, jugeant la réponse insuffisante, l'avait mise en demeure, le 29 août 2013, de compléter sa réponse, de sorte que les dispositions de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales étaient applicables, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que Mme O... ne peut invoquer la prescription du droit de reprise de l'administration, s'agissant des avoirs qu'elle prétend avoir hérités de sa mère, à défaut d'avoir rapporté la preuve de cette succession, et qu'en application des dispositions précitées, le fait générateur de l'imposition doit être fixé au 30 septembre 2013, trente jours après l'envoi de la mise en demeure, ajoutant que la prorogation du délai de reprise prévue à l'article L. 188 B du livre des procédures fiscales en cas de plainte de l'administration pour fraude fiscale est également applicable en matière d'impôt de solidarité sur la fortune. De ces constatations et appréciations, la cour d'appel a déduit à bon droit que la prescription de l'action de l'administration fiscale n'était pas acquise au moment de l'envoi des propositions de rectification, le 16 octobre 2013.

15. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

16. Mme O... fait encore le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ qu'en application de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, lorsque l'obligation prévue au deuxième alinéa de l'article 1649 A ou à l'article 1649 AA du code général des impôts n'a pas été respectée au moins une fois au titre des dix années précédentes, l'administration peut demander à la personne physique soumise à cette obligation de fournir dans un délai de soixante jours toutes informations ou justifications sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte ou le contrat d'assurance-vie ; qu'il résulte de la demande adressée le 17 mai 2003 à Mme O..., qu'elle excédait largement les dispositions précitées puisqu'aux termes de cette dernière « les explications et justifications que vous produirez concernant l'origine et l'acquisition des avoirs acquis à l'étranger devront comporter, notamment, toutes les précisions suivantes : l'identité et l'adresse de la partie versante pour chaque versement sur les comptes, le motif des versements, le montant et la date des versements, la nature des sommes versées, les pièces bancaires ou tous documents permettant au service de vérifier le bien-fondé de vos affirmations » ; qu'au regard du texte précité, l'administration fiscale ne pouvait demander des justifications que sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte, en dehors de tout autre élément ; qu'en retenant, au contraire, que tous les éléments demandés entraient bien dans le cadre de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, la cour d'appel a violé le texte précité ;

2°/ qu'en application de l'article 755 du code général des impôts, les avoirs figurant sur un compte ou un contrat d'assurance-vie étranger et dont l'origine et les modalités d'acquisition n'ont pas été justifiées dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 23 du livre des procédures fiscales sont réputés constituer, jusqu'à preuve contraire, un patrimoine acquis à titre gratuit assujetti, à la date d'expiration des délais prévus au même article L. 23 C, aux droits de mutation à titre gratuit au taux le plus élevé ; que ces dispositions ne trouvent à s'appliquer que dans l'hypothèse d'une origine inconnue des avoirs, laquelle reste inconnue du fait du défaut de réponse à la suite d'une demande visée à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales ; que tel n'est pas le cas lorsque l'administration fiscale a entendu elle-même amener cette preuve de l'origine des avoirs dès la mise en oeuvre ; qu'au cas présent, l'administration fiscale a eu connaissance, par l'exercice du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, de l'origine et des modalités d'acquisition des avoirs à l'étranger que Mme O... détenait via les sociétés Newproad Investments SA et Ferncroft Holding SA ; que tout au long de la procédure, l'administration fiscale a entendu elle-même apporter la preuve de l'origine des avoirs et des modalités d'acquisition par les héritiers ; que, par conséquent, l'administration fiscale ne pouvait se fonder sur un défaut de réponse suffisante à ses courriers modèles n° 3907 et 3907 bis des 17 mai et 29 mai 2013 pour procéder à un rappel de droits de mutation à titre gratuit calculé sur la base des avoirs à l'étranger dont l'intéressée avait la disposition suite au décès de sa tante, U... Q..., et de sa mère, T... M... ; qu'en retenant que c'est à juste titre que l'administration avait à bon droit mis en oeuvre la procédure de taxation d'office en calculant les droits de mutation à titre gratuit sur les avoirs figurant sur les comptes étrangers au taux le plus élevé, la cour d'appel a violé l'article 755 du code général des impôts. »

17. Selon l'article 755 du code général des impôts, les avoirs figurant sur un compte ou un contrat d'assurance-vie étranger et dont l'origine et les modalités d'acquisition n'ont pas été justifiées dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales sont réputés constituer, jusqu'à preuve contraire, un patrimoine acquis à titre gratuit, assujetti aux droits de mutation à titre gratuit au taux le plus élevé.

18. Après avoir constaté que les demandes de l'administration fiscale ne visaient qu'à lui permettre de connaître l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs litigieux au regard des conditions d'application de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que les informations qu'elle détenait ne lui permettaient pas de déterminer par quels moyens Mme O... avait obtenu le contrôle exclusif des comptes bancaires détenus par sa tante et sa mère par l'intermédiaire de sociétés de droit panaméen ni s'ils avaient été transmis par voie de succession et partagés entre les héritiers, Mme O... n'ayant ni expliqué et justifié de l'origine et des modalités d'acquisition des avoirs en cause, cependant qu'elle y avait été invitée à deux reprises, ni transmis les relevés de comptes litigieux et alors même que la déclaration de succession de sa tante ne mentionnait pas ces avoirs.

19. L'arrêt relève encore, s'agissant des avoirs que Mme O... a soutenu avoir hérités de sa mère, que le fait que les comptes aient pu être auparavant rattachés à sa tante et sa mère ne suffit pas à établir la transmission de ces avoirs par succession. Il relève enfin qu'après avoir nié devant l'administration avoir connaissance de l'existence de ces comptes, ce n'est que devant le juge pénal que Mme O... a déclaré en avoir eu connaissance en 2005 ou 2006 et reconnu « sa pleine conscience d'être devenue copropriétaire par le jeu de la dévolution successorale, des fonds litigieux. »

20. De ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire que l'administration fiscale avait régulièrement mis en oeuvre la procédure de taxation d'office prévue par l'article 755 du code général des impôts.

21. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme Daubigney - Avocat général : M. Debacq - Avocat(s) : SARL Cabinet Briard ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article L. 101 du livre des procédures fiscales.

Rapprochement(s) :

Sur la production par l'administration fiscale de pièces ayant une origine illicite en matière d'autorisation de visites domiciliaires, à rapprocher : Com., 31 janvier 2012, pourvoi n° 11-13.097, Bull. 2012, IV, n° 22 (rejet).

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