Numéro 12 - Décembre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 12 - Décembre 2020

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005)

Com., 9 décembre 2020, n° 19-14.437, (P)

Rejet

Liquidation judiciaire – Ouverture – Cessation des paiements – Report de la date de cessation des paiements – Impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible – Date d'appréciation – Détermination – Jour auquel est envisagé le report

Dès lors qu'il résulte des articles L. 631-1 et L. 631-8 du code de commerce que la date de cessation des paiements ne peut être reportée qu'au jour où le débiteur était déjà dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, c'est au jour auquel est envisagé le report de cette date que le juge doit apprécier la situation. Il en résulte que ne peut être incluse dans le passif une dette résultant d'une décision, qui, à la date envisagée, fait encore l'objet d'un recours, la dette étant par ailleurs incertaine.

Liquidation judiciaire – Ouverture – Cessation des paiements – Report de la date de cessation des paiements – Impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible – Passif exigible – Exclusion – Dette résultant d'une décision faisant l'objet d'un recours

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 octobre 2018), l'administration fiscale a notifié à la société Chiquita compagnie des bananes (la société Chiquita) une proposition de rectification au titre de la TVA, qu'elle a contestée.

2. La société Chiquita a été mise en liquidation judiciaire le 10 novembre 2016.

La société EMJ a été désignée liquidateur, puis a été remplacée dans cette fonction par la société Axyme.

3. Le jugement d'ouverture ayant fixé la date de la cessation des paiements au 10 mai 2015, la société Chiquita Europe BV, créancière de la société Chiquita, a formé tierce opposition à ce jugement, du seul chef de la fixation de la date de cessation des paiements.

Le tribunal a, sur ce recours, confirmé la date contestée.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le liquidateur fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement et de fixer la date de cessation des paiements de la société Chiquita au 15 décembre 2015, alors :

« 1°/ que seule une créance fiscale contestée dans les conditions de l'article L. 277 du Livre des procédures fiscales et pour laquelle le contribuable a sollicité et obtenu un sursis de paiement peut être exclue du passif exigible ; que la cour d'appel a constaté que la créance fiscale avait fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement le 9 août 2012, que la société Chiquita avait introduit un recours sans assortir ce dernier d'une demande de sursis à paiement ; qu'il se déduisait de ces constatations que la créance fiscale devait être prise en compte dans le passif exigible ; qu'en énonçant cependant, pour refuser de fixer la date de cessation des paiements au 10 mai 2015, que l'absence de demande de sursis à paiement ne rendait pas la créance de l'administration fiscale certaine dès lors qu'un recours devant les juridictions administratives était en cours au moment de la date de cessation des paiements retenue par le tribunal, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 277 du livre des procédures fiscales et l'article L. 631-1 du code de commerce ;

2°/ que c'est au jour où elle statue qu'une cour d'appel, saisie de l'appel d'un jugement statuant sur l'opposition formée contre un jugement ayant fixé la cessation des paiements, doit apprécier le caractère certain d'une créance exigible ; que la cour d'appel a constaté que la créance fiscale avait fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement le 9 août 2012, que la société Chiquita compagnie des bananes avait introduit un recours sans assortir ce dernier d'une demande de sursis à paiement et que le recours avait été rejeté par un jugement du 18 mars 2014, confirmé par un arrêt du 15 décembre 2015 ; qu'il se déduisait de ces constatations qu'au jour où la cour d'appel statuait, la créance fiscale exigible au 9 août 2012 était certaine ; qu'en énonçant cependant, pour refuser de fixer la date de cessation des paiements au 10 mai 2015, qu'à cette date la créance fiscale était exigible mais non certaine, seul l'arrêt du 15 décembre 2015, ayant rendu certaine ladite créance, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 631-1 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte des articles L. 631-1 et L. 631-8 du code de commerce que la date de cessation des paiements ne peut être reportée qu'au jour où le débiteur était déjà dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.

Le juge saisi d'une demande de report doit donc, pour apprécier cette situation, se placer, non au jour où il statue, mais à celui auquel est envisagé le report de la date de cessation des paiements.

Par ailleurs, ne peut être incluse dans le passif exigible une dette incertaine, comme faisant l'objet d'un recours.

6. Si l'arrêt constate qu'au 10 mai 2015, date retenue par le premier juge, la société Chiquita n'avait pas assorti sa réclamation d'une demande de sursis de paiement, il relève également qu'à cette date, le jugement du tribunal administratif qui avait rejeté son recours faisait l'objet d'un appel. C'est donc à bon droit que la cour d'appel en a déduit que la créance fiscale n'était devenue certaine qu'à la date qu'elle a retenue du 15 décembre 2015, correspondant au prononcé de l'arrêt de la cour administrative d'appel.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Articles L. 631-1 et L. 631-8 du code de commerce.

Com., 9 décembre 2020, n° 19-14.441, (P)

Rejet

Procédure (dispositions générales) – Voies de recours – Exercice – Appel – Jugement autorisant la reprise des actions individuelles des créanciers – Signification – Délai – Sanction – Nullité de l'acte de signification (non) – Portée

S'il résulte de la combinaison des alinéas 4 et 5 de l'article R. 643-18 du code de commerce que le jugement qui, postérieurement à celui clôturant la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, autorise, à titre exceptionnel, la reprise des actions individuelles des créanciers doit être signifié au débiteur dans les huit jours de son prononcé, le non-respect de ce délai n'est pas sanctionné par la nullité pour irrégularité de l'acte de signification délivré après son expiration, de sorte que cet acte fait courir le délai d'appel.

Liquidation judiciaire – Clôture – Clôture pour insuffisance d'actif – Droit de poursuite individuelle – Jugement autorisant la reprise des actions individuelles des créanciers – Signification – Délai – Sanction

Procédure (dispositions générales) – Voies de recours – Exercice – Appel – Jugement autorisant la reprise des actions individuelles des créanciers – Délai d'appel – Durée – Détermination

Le délai d'appel du jugement autorisant la reprise des actions individuelles des créanciers, que ce jugement soit celui de clôture de la liquidation judiciaire ou un jugement postérieur, lequel obéit au même régime, est le délai de dix jours prévu par l'article R. 661-3, alinéa 1, du code de commerce, ces décisions étant, au sens de ce texte, rendues en matière de liquidation judiciaire.

Liquidation judiciaire – Clôture – Clôture pour insuffisance d'actif – Droit de poursuite individuelle – Jugement autorisant la reprise des actions individuelles des créanciers – Appel – Délai – Durée – Détermination

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 17 janvier 2019), M. N..., agriculteur et négociant en bestiaux, et époux commun en biens de Mme V..., a été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 17 mars 2008 et 10 février 2009, la date de cessation des paiements étant fixée au 18 septembre 2006 et M. B... désigné liquidateur.

Le 12 décembre 2008 MM. B..., ès qualités, et N... ont été assignés par l'EURL Essertenne en paiement d'une provision.

Par assemblée générale extraordinaire du 20 décembre 2008, une SCI créée entre Mme V... et ses frères a fait l'objet d'une augmentation de capital conduisant Mme V... à devenir minoritaire. Cette délibération a été jugée inopposable pour fraude à l'EURL Essertenne par arrêt du 10 mars 2014.

La liquidation judiciaire de M. N... a été clôturée pour insuffisance d'actif le 11 mars 2014.

L'EURL Essertenne a été autorisée à reprendre à l'encontre de M. N... son action tendant au recouvrement de sa créance par jugement du 4 octobre 2016.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. M. N... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'appel qu'il a interjeté le 7 décembre 2016 à l'encontre du jugement rendu le 4 octobre 2016 par le tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu, alors :

« 1°/ que, selon l'article R. 643-18 du code de commerce, le jugement autorisant la reprise des actions individuelles de tout créancier à l'encontre du débiteur postérieurement à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif est signifié au débiteur à la diligence du greffier dans les huit jours de son prononcé ; qu'en jugeant que la notification effectuée par le greffe le 17 octobre 2016 était régulière et avait fait courir le délai d'appel, bien qu'il résultât de ses constatations que, le jugement entrepris ayant été prononcé le 4 octobre 2016, sa notification le 17 octobre 2016 ne respectait pas le délai de huit jours précité, de sorte qu'elle était irrégulière et n'avait pu faire courir le délai d'appel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a, dès lors, violé le texte susvisé, ensemble l'article L. 643-11 IV du code de commerce ;

2°/ que l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités, ne fait pas courir le délai de recours ; que le jugement du tribunal autorisant la reprise des poursuites individuelles sur le fondement de l'article L. 643-11 IV du code de commerce est susceptible d'appel dans les conditions de forme et de délai de droit commun ; qu'en considérant comme régulière la notification effectuée par le greffe le 17 octobre 2016, bien qu'il résultât de ses constatations qu'elle mentionnait, non pas le délai d'appel de droit commun, mais le délai de dix jours prévu par l'article R. 661-3 du code de commerce, la cour d'appel a violé l'article L. 643-11 IV du code de commerce, ensemble l'article 680 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

3. D'une part, s'il résulte de la combinaison des alinéas 4 et 5 de l'article R. 643-18 du code de commerce que le jugement qui, postérieurement à celui clôturant la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, autorise, à titre exceptionnel, la reprise des actions individuelles des créanciers doit être signifié au débiteur dans les huit jours de son prononcé, le non-respect de ce délai n'est pas sanctionné par la nullité pour irrégularité de l'acte de signification délivré après son expiration, de sorte que cet acte fait courir le délai d'appel.

4. D'autre part, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que le délai d'appel du jugement autorisant la reprise des actions individuelles des créanciers, que ce jugement soit celui de clôture de la liquidation judiciaire ou un jugement postérieur, lequel obéit au même régime, est le délai de dix jours prévu par l'article R. 661-3, alinéa 1er, du code de commerce, ces décisions étant, au sens de ce texte, rendues en matière de liquidation judiciaire.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Brahic-Lambrey - Avocat général : M. Lecaroz - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Article R. 643-18, alinéas 4 et 5, du code de commerce ; article R. 661-3, alinéa 1, du code de commerce.

Soc., 16 décembre 2020, n° 18-15.532, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Redressement et liquidation judiciaires – Créances – Assurance contre le risque de non-paiement – Garantie – Domaine d'application – Créances résultant de la rupture du contrat de travail – Limites – Détermination

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 20 février 2018), M. Y... a été engagé le 1er novembre 1992 par la société Union des coopérateurs d'Alsace (la société UCA) et occupait en dernier lieu les fonctions d'assistant acheteur. Il a été licencié pour motif économique le 23 avril 2014.

2. En application du plan de sauvegarde de l'emploi validé en mars 2014 par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, il devait bénéficier d'une indemnité supra-légale de licenciement payable en trois échéances, soit une échéance à hauteur de 50 % au jour du licenciement, qui a été versée, puis deux échéances à hauteur de 25 % fixées au 15 septembre 2014 puis au jour du solde de tout compte, lesquelles n'ont pas été honorées.

3. La société UCA a fait l'objet le 20 octobre 2014 d'une procédure de redressement judiciaire, puis a été mise en liquidation judiciaire le 30 mars 2015, Mme E... étant désignée liquidateur judiciaire.

4. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir l'inscription sur le relevé de créances de la société UCA de diverses sommes, notamment du montant du solde de l'indemnité supra-légale de licenciement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. L'AGS fait grief à l'arrêt de fixer à une certaine somme la créance du salarié au passif de la liquidation judiciaire de la société UCA au titre de l'indemnité supra-légale de licenciement et de déclarer que cette créance lui est opposable, alors :

« 1°/ qu'une indemnité supra légale de licenciement a pour seul objet l'indemnisation du préjudice causé par la rupture du contrat de travail ; que la garantie de l'AGS n'est pas due au titre des sommes qui concourent à l'indemnisation du préjudice causé par la rupture du contrat de travail dans le cadre d'un licenciement pour motif économique, en application d'un accord d'entreprise ou d'établissement ou de groupe, d'un accord collectif validé ou d'une décision unilatérale de l'employeur homologuée conformément à l'article L. 1233-57-3, lorsque l'accord a été conclu et déposé ou la décision notifiée moins de dix-huit mois avant la date du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, ou l'accord conclu ou la décision notifiée postérieurement à l'ouverture de la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire ; qu'il n'était pas contesté que l'indemnité supra légale de licenciement fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société UCA trouvait sa source dans un plan de sauvegarde de l'emploi datant du mois de mars 2014, le jugement d'ouverture de la procédure collective à l'encontre de la société UCA ayant été prononcé le 20 octobre 2014 ; que cette indemnité ne pouvait être garantie par l'AGS ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 3253-13 du code du travail ;

2°/ que la garantie de l'AGS prévue à l'article L. 3253-8 4° du code du travail se limite aux mesures d'accompagnement résultant d'un plan de sauvegarde de l'emploi déterminé par un accord collectif majoritaire ou par un document élaboré par l'employeur, dès lors qu'il a été validé ou homologué dans les conditions prévues à l'article L. 1233-58 avant ou après l'ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ; que l'indemnité supra légale de licenciement prévue dans un plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas une mesure d'accompagnement et ne relève pas du champ d'application de l'article L. 3253-8 4° du code du travail ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 3253-8 4° et L.3253-13 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3253-8 4° du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016, et l'article L. 3253-13 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 :

6. Selon le premier de ces textes, l'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6 du code du travail couvre les mesures d'accompagnement résultant d'un plan de sauvegarde de l'emploi déterminé par un accord collectif majoritaire ou par un document élaboré par l'employeur, conformément aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-4, dès lors qu'il a été validé ou homologué dans les conditions prévues à l'article L. 1233-58 avant ou après l'ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.

7. Selon le second des ces textes, l'assurance prévue à l'article L. 3253-6 du code du travail ne couvre pas les sommes qui concourent à l'indemnisation du préjudice causé par la rupture du contrat de travail dans le cadre d'un licenciement pour motif économique, en application d'un accord d'entreprise ou d'établissement ou de groupe, d'un accord collectif validé ou d'une décision unilatérale de l'employeur homologuée conformément à l'article L. 1233-57-3, lorsque l'accord a été conclu et déposé ou la décision notifiée moins de dix-huit mois avant la date du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, ou l'accord conclu ou la décision notifiée postérieurement à l'ouverture de la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.

8. Pour dire la créance du salarié fixée à titre d'indemnité supra-légale de licenciement opposable à l'AGS, l'arrêt retient que si celle-ci fonde sa position sur l'article L. 3253-13 du code du travail, c'est avec pertinence que le salarié invoque à son profit l'exception au principe posé par ce texte constituée par l'article L. 3253-8, alinéa 4, du code du travail. Il ajoute qu'au vu de la date d'adoption du plan de sauvegarde de l'emploi, la garantie serait exclue si l'indemnité considérée n'avait pour objet que la réparation financière de la rupture du contrat de travail, mais qu'elle est en revanche due dès lors que la somme vise à accompagner le salarié dans une demande de reclassement professionnel et de recherche d'un emploi. Il conclut qu'à l'évidence instaurée par un plan de sauvegarde de l'emploi, l'indemnité litigieuse participe de la volonté d'accroître les moyens matériels du salarié pour faciliter la mise en oeuvre de son reclassement professionnel, ce qui suffit à rendre la garantie de l'AGS mobilisable.

9. En statuant ainsi, alors qu'une indemnité supra-légale de licenciement n'est pas une mesure d'accompagnement résultant d'un plan de sauvegarde de l'emploi au sens de l'article L. 3253-8 4° du code du travail, mais une somme concourant à l'indemnisation du préjudice causé par la rupture du contrat de travail au sens de l'article L. 3253-13 du même code, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

10. La cassation n'atteint pas le chef de dispositif fixant à une certaine somme la créance du salarié au passif de la liquidation judiciaire de la société UCA au titre de l'indemnité supra-légale de licenciement.

11. Ainsi que suggéré par le mémoire ampliatif, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

12. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare opposable à l'AGS la créance de M. Y... d'un montant de 15 750 euros au titre de l'indemnité supra-légale de licenciement, l'arrêt rendu le 20 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit que l'AGS ne doit pas sa garantie pour la somme d'un montant de 15 750 euros fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Union des coopérateurs d'Alsace au titre de l'indemnité supra-légale de licenciement au profit de M. Y...

- Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Pietton - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; SCP de Nervo et Poupet -

Textes visés :

Articles L. 3253-8, 4°, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 et L. 3253-13, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, du code du travail.

Com., 9 décembre 2020, n° 19-16.542, (P)

Cassation partielle

Redressement judiciaire – Patrimoine – Revendication – Marchandise livrée au débiteur – Revente par celui-ci – Report du droit de propriété sur la créance du débiteur à l'égard du sous-acquéreur – Conflit avec l'affactureur subrogé dans les droits du débiteur – Décision statuant sur la revendication – Autorité de la chose jugée – Portée – Détermination

Selon l'article 2372 du code civil, le droit de propriété d'un bien retenu à titre de garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété se reporte sur la créance du débiteur à l'égard du sous-acquéreur.

Il résulte de l'article L. 624-18 du code de commerce que la revendication qu'il permet du prix ou de la partie du prix des biens vendus avec réserve de propriété, qui n'a été ni payé, ni réglé en valeur ni compensé entre le sous-acquéreur et le débiteur à la date du jugement ouvrant la procédure collective de ce dernier, tend seulement à rendre opposable à cette procédure le report du droit de propriété du vendeur initial sur la créance du prix de revente. Il s'ensuit que l'autorité de la chose jugée attachée à la décision statuant sur cette revendication ne prive pas l'affactureur, se prétendant subrogé dans les droits du débiteur au titre de la créance du prix de revente, de la possibilité de faire trancher, en vue d'obtenir à son profit le paiement de cette créance, le conflit qui l'oppose au vendeur bénéficiaire de la clause de réserve de propriété, la décision s'étant prononcée sur la revendication de celui-ci n'ayant pas eu pour objet de résoudre un tel conflit.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 26 février 2019), la société ETC Métrologie, aux droits de laquelle vient la société Tech Data (la société Tech Data), a vendu le 29 mars 2013, à la société Overlap, pour un montant de 468 124,28 euros, des logiciels, que cette dernière a aussitôt revendus à la société Euriware aux droits de laquelle se trouve la société Framatome (le sous-acquéreur).

2. La société Overlap a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 11 juin 2013 et 11 juin 2014, la société [...] étant désignée liquidateur.

3. N'ayant pas été payée de ses factures, la société Tech Data, se prévalant d'une clause de réserve de propriété, a adressé à l'administrateur judiciaire de la société Overlap une demande de revendication des logiciels, qui a été irrévocablement admise par un arrêt du 19 mai 2016.

4. La société Tech Data a assigné le sous-acquéreur en paiement de la somme de 468 124,28 euros.

5. La société GE capital Factofrance, devenue la société Factofrance (la société Factofrance), qui avait conclu, le 9 avril 2008, avec la société Overlap un contrat d'affacturage portant sur les créances que celle-ci détenait sur ses clients, est volontairement intervenue à l'instance pour réclamer le paiement de la somme de 507 531,39 euros au titre des factures dues par le sous-acquéreur à la société Overlap, à laquelle elle soutenait être conventionnellement subrogée.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. La société Factofrance fait grief à l'arrêt, après avoir fixé sa créance au passif de la société Overlap à la somme de 500 635,61 euros, de la débouter de sa demande principale en condamnation in solidum du sous-acquéreur et du liquidateur de la société Overlap à lui payer cette somme, alors « que l'action en revendication prévue par l'article L. 624-16 du code de commerce tend à la seule reconnaissance du droit de propriété du revendiquant, aux fins d'opposabilité de ce droit à la procédure collective ; que l'action en paiement exercée par le vendeur initial à l'encontre d'un sous-acquéreur de biens vendus avec clause de réserve de propriété s'analyse en une action personnelle et non en une action réelle ; qu'en décidant que la société Factofrance ne pouvait discuter, dans le cadre de l'action personnelle engagée par la société Tech Data France à l'égard du sous-acquéreur, la propriété des biens revendiqués qui avait été reconnue à cette dernière dans le cadre de la procédure d'acquiescement à la revendication, quand il lui appartenait de statuer sur l'opposabilité à la société Factofrance des droits invoqués par la société Tech Data France, en l'état de demandes concurrentes formulées par ces dernières à l'encontre de la société Euriware, devenue Sogeti France, sous-acquéreur, la cour d'appel a violé les articles L. 624-16 et L. 624-18 du code de commerce, ensemble l'article 2372 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1351, devenu 1355, et 2372 du code civil et L. 624-18 du code de commerce :

7. Selon le deuxième de ces textes, le droit de propriété du bien retenu à titre de garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété se reporte sur la créance du débiteur à l'égard du sous-acquéreur.

8. Il résulte du troisième que la revendication qu'il permet du prix ou de la partie du prix des biens vendus avec réserve de propriété, qui n'a été ni payé, ni réglé en valeur ni compensé entre le sous-acquéreur et le débiteur à la date du jugement ouvrant la procédure collective de ce dernier, tend seulement à rendre opposable à cette procédure le report du droit de propriété du vendeur initial sur la créance du prix de revente. Il s'ensuit que l'autorité de la chose jugée attachée à la décision statuant sur cette revendication ne prive pas l'affactureur, se prétendant subrogé dans les droits du débiteur au titre de la créance du prix de revente, de la possibilité de faire trancher, en vue d'obtenir à son profit le paiement de cette créance, le conflit qui l'oppose au vendeur bénéficiaire de la clause de réserve de propriété, la décision s'étant prononcée sur la revendication de celui-ci n'ayant pas eu pour objet de résoudre un tel conflit.

9. Pour rejeter la demande en paiement de la société Factofrance, l'arrêt retient que, dès lors que la propriété des biens revendiqués par la société Tech Data dans la procédure collective de la société Overlap a été reconnue par une décision définitive, l'affactureur ne peut en discuter l'existence, ni contester le report de ce droit sur la créance de la société Overlap à l'égard du sous-acquéreur.

10. En statuant ainsi, alors que l'arrêt du 19 mai 2016 avait seulement constaté l'opposabilité de la clause de réserve de propriété à la procédure collective de la société Overlap, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Demande de mise hors de cause

11. La société [...], en qualité de liquidateur de la société Overlap, demande sa mise hors de cause.

12. Le liquidateur, en exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 19 mai 2016, a restitué à la société Tech Data la somme de 1 304 368 euros au titre du prix de vente des marchandises vendues par elle et les sociétés qu'elle regroupe. Sa présence devant la cour de renvoi n'est donc plus nécessaire à la solution du litige qui oppose les sociétés Factofrance, Tech Data et Sogeti, devenue la société Framatome.

13. Il y a donc lieu de le mettre hors de cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce que, confirmant le jugement du 20 septembre 2017 rendu par le tribunal de commerce de Versailles, il reçoit la société Factofrance en son intervention volontaire et rejette la demande reconventionnelle en dommage-intérêts de la société Capgemini Outsourcing Services, l'arrêt rendu le 26 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Met hors de cause la société [...], en qualité de liquidateur de la société Overlap.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat général : Mme Guinamant - Avocat(s) : SCP Marc Lévis ; SCP Baraduc, Duhamel et Rameix ; SCP Buk Lament-Robillot ; SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Article 2372 du code civil ; article L. 624-18 du code de commerce.

Rapprochement(s) :

Sur les droits du revendiquant subrogé en présence d'une procédure collective, à rapprocher : Com., 24 janvier 2018, pourvoi n° 16-22.128, Bull. 2018, IV, n° 13 (rejet et cassation partielle).

Com., 9 décembre 2020, n° 19-17.579, (P)

Rejet

Redressement judiciaire – Période d'observation – Créanciers – Déclaration des créances – Relevé de forclusion – Domaine d'application – Créances ne bénéficiant pas du régime de faveur

Il résulte de la combinaison des articles L. 622-24, alinéa 6, et L. 622-17, I, du code de commerce, que les créances postérieures au jugement d'ouverture et qui ne sont pas nées pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période et qui, ainsi, n'ont pas vocation à être payées à leur échéance, peuvent donner lieu au relevé de la forclusion prévu par l'article L. 622-26 de ce code.

Redressement judiciaire – Jugement – Créanciers postérieurs – Régime de faveur – Exclusion – Relevé de forclusion – Possibilité

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 mai 2018), Mme S... a été mise en redressement judiciaire par un jugement du 17 mai 2016, M. Y... étant désigné en qualité de mandataire judiciaire. Cette décision a été publiée au BODACC le 10 juin 2016.

2. Exposant que, par un jugement du 30 mai 2016, la résolution du contrat qu'il avait conclu avec Mme S... avait été prononcée, et que celle-ci avait été déboutée de sa demande en paiement et condamnée à lui verser la somme de 500 euros à titre d'indemnité de procédure, M. C... a présenté le 5 décembre 2016 une requête en relevé de forclusion en vue de déclarer la créance correspondante.

3. Par une ordonnance du 20 mars 2017, le juge-commissaire a fait droit à cette requête.

4. Le 9 octobre 2017, le tribunal a rejeté le recours formé par Mme S....

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Mme S... fait grief à l'arrêt de confirmer ce jugement, alors « que le fait générateur des créances de dépens et d'article 700 du code de procédure civile est la décision qui les alloue ; qu'en considérant que la créance de frais irrépétibles invoquée par M. C... au soutien de sa requête en relevé de forclusion entrait dans le champ des dispositions de l'article L. 622-26 du code de commerce, cependant que cette créance a été fixée par un jugement du tribunal de commerce de Fréjus du 30 mai 2016, donc par décision postérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective de Mme S... en date du 17 mai 2016, de sorte que cette créance postérieure n'entrait pas dans le champ du texte susvisé, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 622-26 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte de la combinaison des articles L. 622-24, alinéa 6, et L. 622-17, I, du code de commerce, que les créances postérieures au jugement d'ouverture et qui ne sont pas nées pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période et qui, ainsi, n'ont pas vocation à être payées à leur échéance, peuvent donner lieu au relevé de la forclusion prévu par l'article L. 622-26 de ce code.

7. Ayant relevé que le jugement du 30 mai 2016 invoqué par M. C... au soutien de sa requête en relevé de forclusion faisait suite à une ordonnance d'injonction de payer du 19 mars 2015 et portait sur un litige relatif à un contrat antérieur à l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel, qui a ainsi fait ressortir que la créance d'indemnité de procédure, certes postérieure à cette ouverture, ne pouvait être née pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, en a exactement déduit que, cette créance devant être déclarée, son titulaire pouvait demander à être relevé de la forclusion qu'il avait encourue.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Riffaud - Avocat(s) : Me Balat -

Textes visés :

Articles L. 622-24, alinéa 6, L. 622-17, I, et L. 622-26 du code de commerce.

Com., 9 décembre 2020, n° 19-17.258, (P)

Rejet

Responsabilités et sanctions – Faillite et interdictions – Transaction – Possibilité (non)

Si la transaction, qui suppose selon l'article 2045, alinéa 1, du code civil la capacité de disposer des objets compris dans la transaction, peut mettre fin à l'instance en paiement de l'insuffisance d'actif, elle ne peut avoir pour objet de faire échec, moyennant le paiement d'une certaine somme ou de l'abandon d'une créance, aux actions tendant au prononcé d'une sanction professionnelle, la faillite personnelle et les autres mesure d'interdiction des articles L. 653-1 et suivants du code de commerce ne tendant pas à la protection de l'intérêt collectif des créanciers mais à celle de l'intérêt général par des mesures à la fois de nature préventive et punitive.

Responsabilités et sanctions – Responsabilité pour insuffisance d'actif – Transaction – Possibilité

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 mars 2019), la société Global High Tech (la société GHT) a été mise en liquidation judiciaire le 13 janvier 2016, la procédure étant étendue le 19 avril 2017 à la SCI BT Lou.

La société [...] a été désignée liquidateur.

2. Le liquidateur a assigné M. J..., en sa qualité de représentant permanent de la société HCH, dirigeante de la société débitrice, en paiement de tout ou partie de l'insuffisance d'actif et en prononcé d'une mesure de faillite personnelle ou, subsidiairement, d'interdiction de gérer.

3. Le 7 mars 2018, le juge-commissaire a, sur le fondement de l'article L. 642-24 du code de commerce, autorisé le liquidateur à transiger.

La transaction, aux termes de laquelle la société HCH s'engageait à payer une indemnité et à abandonner des créances en contrepartie de la renonciation du liquidateur à poursuivre l'action en paiement de l'insuffisance d'actif contre M. J..., ainsi que les actions exercées sur le fondement des articles L. 632-1, L. 632-2, L. 651-2 et suivants et L. 653-1 et suivants du code de commerce, a ensuite été homologuée par le tribunal.

4. Le ministère public a fait appel du jugement d'homologation.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. M. J... fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement et de rejeter la demande d'homologation de la transaction, alors :

« 1°/ que le liquidateur peut, avec l'autorisation du juge-commissaire et le débiteur entendu ou dûment appelé, compromettre et transiger sur toutes les contestations qui intéressent collectivement les créanciers ; que la cour d'appel a relevé que l'action tendant au prononcé de sanctions professionnelles était intentée dans l'intérêt collectif des créanciers, ce dont elle aurait dû déduire que le liquidateur pouvait valablement transiger sur une telle action ; qu'en retenant néanmoins, pour refuser d'homologuer la transaction litigieuse, que le liquidateur ne pouvait transiger sur les contestations ayant trait aux sanctions professionnelles susceptibles d'être prononcées à l'encontre du dirigeant, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article L. 642-24 du code de commerce ;

2°/ que le liquidateur peut, avec l'autorisation du juge-commissaire et le débiteur entendu ou dûment appelé, compromettre et transiger sur toutes les contestations qui intéressent collectivement les créanciers, peu important que ces contestations soient également susceptibles de concerner l'intérêt général et, en particulier, qu'elles tendent au prononcé d'une sanction professionnelle ; qu'en retenant au contraire, pour refuser d'homologuer la transaction litigieuse, que le liquidateur n'avait pas pouvoir de transiger pour ce qui dépassait le seul intérêt collectif des créanciers et touchait également à l'intérêt général, la cour d'appel a violé, par fausse interprétation, l'article L. 642-24 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

6. Selon l'article 2045, alinéa 1er, du code civil, pour transiger, il faut avoir la capacité de disposer des objets compris dans la transaction. C'est, dès lors, à bon droit que l'arrêt, après avoir énoncé que les articles L. 653-1 et suivants du code de commerce concernant la faillite personnelle et les autres mesures d'interdiction ne tendent pas à la protection de l'intérêt collectif des créanciers mais à celle de l'intérêt général, et qu'il s'agit de mesures à la fois de nature préventive et punitive, retient que si la transaction pouvait mettre fin à l'instance en paiement de l'insuffisance d'actif, elle ne pouvait avoir pour objet de faire échec, moyennant le paiement d'une certaine somme ou l'abandon d'une créance, aux actions tendant au prononcé d'une sanction professionnelle.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat(s) : SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre -

Textes visés :

Article 2045, alinéa 1, du code civil ; article L. 653-1 et suivants du code de commerce.

Com., 9 décembre 2020, n° 18-24.730, (P)

Rejet

Responsabilités et sanctions – Responsabilité pour insuffisance d'actif – Dirigeant – Rémunération – Absence – Portée

L'article 1992, alinéa 2, du code civil, selon lequel la responsabilité générale du mandataire est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit, ne concerne pas la situation du dirigeant d'une personne morale en liquidation judiciaire poursuivi en paiement de l'insuffisance d'actif de celle-ci sur le fondement de l'article L. 651-2 du code de commerce, la responsabilité de ce dirigeant s'appréciant, sur le fondement de ce texte spécial, de la même manière, qu'il soit rémunéré ou non.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 13 septembre 2018), la SAS Pôle élevage, dont M. P... était le président, a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 30 septembre 2014 puis 6 mars 2015, la société [...] étant désignée mandataire judiciaire puis liquidateur.

2. Le liquidateur a recherché la responsabilité pour insuffisance d'actif du dirigeant.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses troisième à douzième branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

4. M. P... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société [...], ès qualités, la somme de 500 000 euros au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif, alors :

« 1°/ que la responsabilité pour faute est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu'à celui qui reçoit un salaire, y compris au dirigeant titulaire d'un mandat social dont la responsabilité est mise en jeu pour une faute de gestion qui aurait contribué à une insuffisance d'actif ; qu'en retenant que tel ne serait pas le cas et que cette responsabilité s'appliquerait sans distinction à tous les dirigeants, qu'ils soient ou non rémunérés, de sorte que le fait que M. P... n'ait pas été rémunéré ne serait pas susceptible de diminuer sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif de la société Pôle élevage qu'il dirigeait, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce applicable en la cause en sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, par fausse application, et l'article 1992 du code civil, par refus d'application, ensemble le principe de proportionnalité ;

2°/ que le fait, pour un dirigeant de société bénévole, de louer à cette société un bien immobilier appartenant à une société civile immobilière dont il détient des parts, moyennant le paiement d'un loyer, ne constitue pas un avantage financier assimilable à une rémunération, sauf si ce loyer est surévalué par rapport au marché et que le nombre de parts qu'il détient n'est pas négligeable ; qu'en retenant que M. P... aurait tiré un avantage financier de la location à la société Pôle élevage qu'il dirigeait bénévolement de locaux appartenant à une société civile immobilière dont il détenait les parts avec son épouse, sans relever que le loyer de 3 056,92 euros consenti aurait été surévalué par rapport au marché et que M. P... aurait été propriétaire d'un nombre de parts non négligeable de cette société civile immobilière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce applicable en la cause en sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, et de l'article 1992 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel a énoncé à bon droit que l'article 1992, alinéa 2, du code civil, selon lequel la responsabilité générale du mandataire est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit, ne concerne pas la situation du dirigeant d'une personne morale en liquidation judiciaire poursuivi en paiement de l'insuffisance d'actif de celle-ci sur le fondement de l'article L. 651-2 du code de commerce, la responsabilité de ce dirigeant s'appréciant, sur le fondement de ce texte spécial, de la même manière, qu'il soit rémunéré ou non.

6. Le moyen, inopérant en sa seconde branche qui critique des motifs surabondants, n'est donc pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Brahic-Lambrey - Avocat(s) : SCP Sevaux et Mathonnet ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Article 1992, alinéa 2, du code civil ; article L. 651-2 du code de commerce.

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