Numéro 12 - Décembre 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 12 - Décembre 2019

PROTECTION DES CONSOMMATEURS

1re Civ., 11 décembre 2019, n° 18-21.164, (P)

Cassation

Clauses abusives – Définition – Clause créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties – Cas – Clause ayant pour objet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement du professionnel à l'une de ses obligations

La clause ayant pour objet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement du professionnel à l'une de ses obligations est présumée abusive de manière irréfragable.

Sur le moyen unique :

Vu l'article R. 132-1, 6°, devenu R. 212-1, 6°, du code de la consommation ;

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, qu'invoquant l'avarie de deux meubles au cours d'un déménagement exécuté le 28 septembre 2016 par la société Eurodem (la société), M. E... a assigné celle-ci en indemnisation ;

Attendu que, pour rejeter la demande de M. E... tendant à voir dire abusive la clause de limitation de valeur stipulée au contrat, le jugement retient qu'une clause ne peut être déclarée abusive au seul motif que la commission des clauses abusives en condamne le type, de manière générale, que le contrat liant les parties est un accord de volontés qui doit être formé et exécuté de bonne foi et que la lettre de voiture, qui forme le contrat entre les parties, mentionne que M. E... a fixé le montant de l'indemnisation éventuelle pour les meubles non listés à 152 euros chacun, de sorte que cette somme a été déterminée unilatéralement, sans intervention de l'entreprise de déménagement qui l'a acceptée ; qu'il en déduit que, l'accord de volontés étant ainsi formé, la clause de limitation de valeur n'a pas de caractère abusif et s'impose aux parties ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la clause ayant pour objet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement du professionnel à l'une des ses obligations est présumée abusive de manière irréfragable, le tribunal d'instance a violé le texte précité ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 11 juin 2018, entre les parties, par le tribunal d'instance de Coutances ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance d'Avranches.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Dazzan-Barel - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie ; SCP de Nervo et Poupet -

Textes visés :

Article R. 132-1, 6°, devenu R. 212-1, 6°, du code de la consommation.

1re Civ., 11 décembre 2019, n° 18-16.147, (P)

Rejet

Prescription – Prescription biennale – Domaine d'application – Caution – Garantie d'un prêt – Délai biennal prévu en matière de biens et services fournis aux consommateurs – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 10 avril 2018), que M. T... s'est porté caution solidaire d'un prêt accordé par la Caisse de crédit mutuel Belfort sud (la banque) et a consenti une hypothèque en garantie de cet engagement ; que, le 28 juillet 2016, la banque lui a délivré un commandement de payer valant saisie immobilière, avant de l'assigner à l'audience d'orientation ;

Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :

Vu l'article 606 du code de procédure civile ;

Attendu qu'en rejetant la demande d'annulation du commandement de payer valant saisie immobilière, l'arrêt tranche une partie du principal ;

Qu'il en résulte que le pourvoi est recevable ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la caution fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale et de valider le commandement de payer valant saisie immobilière, alors, selon le moyen, qu'en application de l'article 2313 du code civil, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui sont inhérentes à la dette, comme, par exemple, la prescription de la dette principale ; qu'en l'espèce, la dette principale était soumise à la prescription biennale de l'article L. 218-2 du code de la consommation s'agissant d'un prêt immobilier accordé à un consommateur ; qu'en énonçant néanmoins que « l'extinction de l'obligation principale par le jeu de la prescription biennale qui bénéficie aux seuls consommateur n'est pas inhérente à la dette mais constitue une exception purement personnelle au débiteur principal qui est un consommateur de sorte que, par application de l'article 2313 du code civil, la caution, qui n'a pas cette qualité à l'égard de la caisse faute pour celle-ci de lui avoir fourni un service quelconque, ne peut s'en prévaloir », la cour d'appel a violé l'article L. 218-2 du code de la consommation ensemble l'article 2313 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu qu'en ce qu'elle constitue une exception purement personnelle au débiteur principal, procédant de sa qualité de consommateur auquel un professionnel a fourni un service, la prescription biennale prévue à l'article L. 218-2 du code de la consommation ne pouvait être opposée au créancier par la caution ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que la caution fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts, de mentionner le montant de la créance de la banque, de la condamner aux dépens d'appel et de renvoyer le dossier devant le juge de l'exécution aux fins de poursuite de la procédure sous la forme d'une vente amiable ;

Attendu que ce moyen, rendu inopérant par le rejet du premier, ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : M. Vitse - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SCP Thouin-Palat et Boucard -

Textes visés :

Article 2313 du code civil ; article L. 218-2 du code de la consommation.

Rapprochement(s) :

Sur la notion d'exception purement personnelle au sens de l'article 2313 du code civil, à rapprocher : Ch. mixte, 8 juin 2007, pourvoi n° 03-15.602, Bull. 2007, Ch. mixte, n° 5 (rejet) ; Com., 3 juin 2009, pourvoi n° 08-13.613, Bull. 2009, IV, n° 72 (rejet) ; Com., 13 octobre 2015, pourvoi n° 14-19.734, Bull. 2015, IV, n° 144 (cassation partielle). Sur l'opposabilité, par la caution, de la prescription biennale au créancier, à rapprocher : 1re Civ., 6 septembre 2017, pourvoi n° 16-15.331, Bull. 2017, I, n° 185 (rejet).

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