Numéro 12 - Décembre 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 12 - Décembre 2019

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005)

Com., 11 décembre 2019, n° 18-18.665, (P)

Rejet

Redressement judiciaire – Période d'observation – Créanciers – Déclaration des créances – Créancier privilégié – Organisme de sécurité sociale – Créance déclarée à titre provisionnel – Titre exécutoire – Portée

Si, en principe, seules les créances des organismes de sécurité sociale n'ayant pas fait l'objet d'un titre exécutoire au moment de leur déclaration sont admises à titre provisionnel, leur établissement définitif devant ensuite intervenir par la production de ce titre dans le délai imparti au mandataire judiciaire pour la vérification du passif, le fait que l'URSSAF ait déclaré ses créances à titre provisionnel, bien qu'elle eût déjà décerné des contraintes, n'est pas de nature à entraîner le rejet de ces créances qui, par hypothèse, sont définitivement établies par des titres exécutoires avant l'expiration du délai précité.

Statuant, tant sur le pourvoi principal formé par la société Eco bati bois et la société S... X..., en qualité de mandataire judiciaire de cette société, que sur le pourvoi incident relevé par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Aquitaine (l'URSSAF) ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 30 avril 2018), que la société Eco bati bois a été mise en redressement judiciaire le 25 mars 2015 par un jugement publié le 3 avril suivant, la société S... X... étant désignée mandataire judiciaire ; que le tribunal a fixé à huit mois à compter de ce jugement le délai d'établissement de la liste des créances, soit jusqu'au 25 novembre 2015 ; que, le 2 avril 2015, l'URSSAF a déclaré des créances à titre provisionnel ; qu'elle les a déclarées à titre définitif le 2 octobre 2015 ; que, devant le juge-commissaire, les créances ont été contestées en ce que certaines faisaient déjà l'objet d'une contrainte lors de la première déclaration et que, pour les autres, les contraintes n'ont été émises et signifiées qu'à compter de janvier 2017 ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que la société Eco bati bois et le mandataire judiciaire font grief à l'arrêt d'admettre la créance de l'URSSAF pour un montant total de 45 934,16 euros alors, selon le moyen :

1°/ que, selon les articles L. 622-24 et R. 622-24 du code de commerce, tous les créanciers antérieurs à l'ouverture de la procédure collective sont tenus de déclarer leur créance dans un délai de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture ; que cette déclaration ne peut, à peine d'inopposabilité, être effectuée à titre provisionnel, sauf pour le juge à constater que la déclaration de créance révélait en fait la volonté du créancier de réclamer la somme déclarée à titre définitif et non à titre simplement provisionnel ; que si, par exception, l'article L. 622-24, alinéa 4, du code de commerce reconnaît aux organismes de prévoyance et de sécurité sociale la possibilité de procéder, dans ce même délai, à une déclaration de créance provisionnelle, à charge pour eux de procéder à une déclaration définitive et à l'émission d'un titre exécutoire dans le délai d'établissement de la liste des créances par le mandataire, ce privilège ne concerne que les créances qui n'étaient pas authentifiées par un titre exécutoire à la date à laquelle l'organisme a régularisé sa déclaration ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les créances correspondant aux cotisations de juillet, août et septembre 2014, bien qu'authentifiées par un titre exécutoire avant même l'ouverture de la procédure collective, avaient été déclarées par l'URSSAF à titre simplement provisionnel dans le délai de déclaration de créances et qu'elles avaient fait l'objet d'une déclaration à titre définitif postérieurement à l'expiration de ce délai ; qu'en jugeant qu'aucun texte n'interdisait à l'URSSAF de déclarer dans un premier temps ces créances à titre provisionnel, l'essentiel étant que celle-ci ait émis un titre exécutoire et régularisé une déclaration définitive dans les délais prévus à L. 622-24, alinéa 4, du code de commerce, cependant que ces dispositions étaient inapplicables aux créances que l'URSSAF avait authentifiées et liquidées par l'émission d'un titre exécutoire au jour où elle régularisait sa déclaration, la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 du code de commerce ;

2°/ que, selon les articles L. 622-24 et R. 622-24 du code de commerce, tous les créanciers antérieurs à l'ouverture de la procédure collective sont tenus de déclarer leur(s) créance(s) dans un délai de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture ; que cette déclaration ne peut, à peine d'inopposabilité, être effectuée à titre provisionnel, sauf pour le juge à constater que la déclaration de créance révélait en fait la volonté du créancier de réclamer la somme déclarée à titre définitif et non à titre simplement provisionnel ; que si, par exception, l'article L. 622-24, alinéa 4, du code de commerce reconnaît aux organismes de prévoyance et de sécurité sociale la possibilité de procéder, dans ce même délai, à une déclaration de créance provisionnelle, à charge de procéder à une déclaration définitive et à l'émission d'un titre exécutoire dans le délai d'établissement de la liste des créances par le mandataire, ce privilège ne concerne que les créances qui n'étaient pas authentifiées par un titre exécutoire à la date à laquelle l'organisme a régularisé sa déclaration ; qu'en admettant à titre définitif les créances que l'URSSAF prétendait détenir sur la société Eco bati bois au titre des cotisations de juillet, août et septembre 2014, sans constater, s'agissant d'une créance authentifiée et liquidée par un titre exécutoire, que la déclaration de l'URSSAF faite à titre provisionnel révélait en fait la volonté du créancier de réclamer à titre définitif la somme déclarée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 622-24 du code de commerce ;

3°/ que l'obligation, pour l'URSSAF, de déclarer à titre définitif et non provisionnel les créances authentifiées par un titre exécutoire dans un délai de deux mois suivant la publication du jugement d'ouverture au BODACC s'impose à cet organisme quand bien même son titre exécutoire serait contesté en justice ; qu'en ajoutant, pour juger régulière la déclaration de créance provisionnelle à laquelle l'URSSAF avait procédé relativement aux cotisations d'ores et déjà authentifiées par des titres exécutoires, que certains de ces titres faisaient l'objet d'un recours juridictionnel devant le tribunal des affaires de sécurité sociale à la date à laquelle l'URSSAF avait déclaré ses créances, la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 du code de commerce ;

4°/ que le juge commissaire ne peut, par lui-même, admettre définitivement au passif du débiteur en difficulté une créance faisant l'objet d'une instance en cours au jour de l'ouverture de la procédure collective ; qu'il ne peut que constater, le cas échéant, le caractère définitif de la décision de justice mettant fin à la procédure qui était en cours et ordonner que l'état des créances soit complété pour la faire figurer ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'à la date à laquelle l'URSSAF avait régularisé sa déclaration provisionnelle, deux contraintes à paiement faisaient l'objet d'un recours juridictionnel devant le tribunal des affaires de sécurité sociale ; qu'en prononçant néanmoins l'admission définitive des créances que l'URSSAF prétendait détenir sur la société Eco bati bois au titre des mois de juillet et août 2014, la cour d'appel a violé l'article L. 624-2 du code de commerce, ensemble l'article L. 622-24 du même code ;

5°/ qu'en statuant comme elle l'a fait, sans s'assurer que les créances qu'elle admettait à titre définitif avaient été judiciairement constatées par le juge saisi du litige principal à concurrence du montant qu'elle-même retenait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 624-2 et L. 622-24 du code de commerce ;

Mais attendu, en premier lieu, que si, en principe, seules les créances des organismes de sécurité sociale n'ayant pas fait l'objet d'un titre exécutoire au moment de leur déclaration sont admises à titre provisionnel, leur établissement définitif devant ensuite intervenir par la production de ce titre dans le délai imparti au mandataire judiciaire pour la vérification du passif, le fait qu'en l'espèce l'URSSAF ait déclaré ses créances à titre provisionnel, bien qu'elle eût déjà décerné des contraintes, n'était pas de nature à entraîner le rejet de ces créances qui, par hypothèse, étaient définitivement établies par des titres exécutoires avant l'expiration du délai précité ; que la cour d'appel en a exactement déduit que les créances objets des contraintes signifiées en 2014, avant l'ouverture de la procédure collective, devaient faire l'objet d'une admission définitive ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu, en second lieu, que s'il résulte de l'arrêt que deux des trois contraintes signifiées en 2014 ont fait l'objet d'un recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, il ne précise pas, contrairement à ce que soutient la quatrième branche, que ces oppositions concerneraient les cotisations sociales dues pour les mois de juillet et août 2014 ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa quatrième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que l'URSSAF fait grief à l'arrêt de rejeter sa créance, pour le montant de 61 701 euros alors, selon le moyen :

1°/ que le défaut de réponse à conclusions constitue une défaut de motif ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions reprises verbalement à l'audience, l'URSSAF soutenait que sa créance pour les mois d'octobre 2014 à mars 2015 devait être admise à titre définitif pour la somme totale de 61 701, 40 euros dès lors qu'indépendamment de la date d'émission des titres exécutoires, les créances de l'URSSAF correspondant aux déclarations de cotisations sociales effectuées sur salaire par la société n'avaient pas été contestées ni dans leur principe, ni dans leur quantum et ce que ce soit devant le juge commissaire, ou devant le tribunal des affaires de sécurité sociale ; qu'en affirmant que les contraintes émises en janvier et février 2017 et notifiées le 11 avril 2017, étaient de toute évidence hors délai, comme n'ayant pas été établies avant l'expiration du délai imparti par le tribunal pour l'établissement de la liste des créances, sans répondre à ce moyen déterminant tiré de l'absence de la moindre contestation émise par le débiteur sur le principe ou le quantum de ces créances qui étaient authentifiées par un titre exécutoire produit aux débats, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'une créance de l'URSSAF non contestée, ni devant le juge commissaire, ni devant les juridictions de sécurité sociale doit être admise définitivement quelle que soit la date à laquelle elle a été déclarée ; qu'en l'espèce les créances de l'URSSAF pour les cotisations dues pour la période d'octobre 2014 à mars 2015 avaient fait l'objet d'un titre exécutoire non contesté ; qu'en refusant d'admettre ces créances déclarées après l'expiration du délai imparti par le tribunal pour l'établissement de l'état des créances, la cour d'appel a violé les articles L. 621-2, et L. 622-24 et R. 624-6 du code du commerce ;

Mais attendu qu'ayant constaté que les créances litigieuses avaient fait l'objet de contraintes qui n'avaient été signifiées que le 11 avril 2017, c'est à bon droit que, leur établissement définitif n'ayant pas été effectué dans le délai prévu par l'article L. 622-24, alinéa 4, du code de commerce, la cour d'appel les a rejetées ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois tant principal qu'incident.

- Président : Mme Mouillard - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor et Périer ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Article L. 622-24 du code de commerce.

2e Civ., 5 décembre 2019, n° 17-23.576, (P)

Cassation

Sauvegarde – Ouverture – Procédure – Jugement – Interdiction de toute procédure d'exécution de la part des créanciers – Domaine d'application – Exclusion – Saisie pénale postérieure à la procédure de sauvegarde

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 27 juin 2017), par acte sous seing privé du 28 octobre 2009, plusieurs actionnaires, parmi lesquels Mme L... épouse Q..., ont cédé l'intégralité des actions de la SAS Vert Import à la SAS FH Holding (la société).

2. Cette dernière ayant refusé de s'acquitter du solde du prix, les cédants l'ont fait assigner devant un tribunal de commerce.

La société a sollicité, à titre reconventionnel, l'annulation de la vente.

3. Par jugement du 13 décembre 2012, la demande des cédants a été accueillie.

4. Par un arrêt, devenu irrévocable, du 23 septembre 2014, rectifié par un arrêt du 18 novembre 2014, une cour d'appel a infirmé ce jugement, annulé la cession pour dol et ordonné la restitution, par les cédants, des sommes perçues, et par les cessionnaires, des actions.

5. Par un jugement du 5 novembre 2014, un tribunal de commerce a ouvert une procédure de sauvegarde à l'encontre de la société et a désigné Mme F... en qualité d'administrateur judiciaire.

6. Les 29 septembre et 9 novembre 2015, la société et ses mandataires ont délivré à Mme L..., sur le fondement de l'arrêt du 23 septembre 2014, deux commandements valant saisie immobilière portant sur diverses parcelles de vigne dont elle est propriétaire et l'ont assignée à une audience d'orientation.

7. Le juge de l'exécution a rejeté l'ensemble des contestations soulevées et ordonné la vente forcée de l'immeuble.

8. Un jugement du 22 novembre 2016, confirmé par un arrêt du 27 juin 2017, a prononcé l'adjudication des lots saisis.

Le 5 décembre 2016, M. et Mme W... ont surenchéri du dixième pour chacune des adjudications.

9. Le 27 mars 2017, lors d'une instruction ouverte pour escroquerie au jugement et faux, un juge d'instruction a ordonné la saisie de la créance détenue par la société sur Mme L... selon les arrêts rendus par la cour d'appel de Rennes les 23 septembre 2014, 18 novembre 2014 et les décisions subséquentes. Cette ordonnance a été confirmée par un arrêt de la chambre de l'instruction de la même cour d'appel du 18 mai 2018.

La société a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt, qui a été rejeté par un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 25 septembre 2019 (Crim. 25 septembre 2019, pourvoi n° 18-83.770).

10. Mme L... a saisi le juge de l'exécution d'une contestation de la surenchère en faisant valoir que la société ne détenait pas de créance en raison de la saisie ordonnée par le juge pénal.

Examen du moyen

Vu l'avis de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 7 août 2019 (Y19-80.988, n° 40003 D) sollicité en application de l'article 1015-1 du code de procédure civile :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

11. Mme L... fait grief à l'arrêt de rejeter sa contestation relative à l'absence de créance de la société, de procéder à la vente sur surenchère des deux immeubles lui appartenant, de déclarer adjudicataires du lot n° 1 M. H... et Mme M..., et adjudicataire du lot n° 2 l'Earl C... V..., et de donner acte à la société de ce que le produit de la vente sera remis au commissaire à l'exécution du plan et qu'il ne sera utilisé qu'en concertation avec le ministère public alors qu'« une mesure de saisie pénale qui aurait été ordonnée malgré l'existence d'une procédure de sauvegarde doit produire ses effets jusqu'à ce que le juge qui l'a ordonnée en autorise la mainlevée ; que la cour d'appel de Dijon ne pouvait donc refuser de faire produire effet à une saisie pénale ordonnée par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Rennes et qui n'avait pas fait l'objet d'une mainlevée, peu important que le débiteur saisi bénéficie d'une procédure de sauvegarde ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 706-145 et 706-147 du code de procédure pénale ».

Réponse de la Cour

Vu les articles 706-144 et 706-153 du code de procédure pénale et l'article L. 622-21, II, du code de commerce :

12. Le prononcé d'une mesure de sauvegarde n'interdit pas que soit ordonnée une saisie pénale d'une créance, ni ne limite les effets d'une telle saisie préalablement ordonnée.

13. Le juge de l'exécution ne peut apprécier la validité de la saisie pénale au regard des règles relatives à la procédure de sauvegarde.

14. Pour, d'une part, confirmer le jugement du juge de l'exécution ayant rejeté la contestation de Mme L... relative à l'absence de créance de la société et procédé à la vente sur surenchère des deux immeubles appartenant à celle-ci, déclaré adjudicataires du lot n° 1 M. H... et Mme M..., adjudicataire du lot n° 2 l'Earl C... V..., et d'autre part, donner acte à la société de ce que le produit de la vente sera remis au commissaire à l'exécution du plan et qu'il ne sera utilisé qu'en concertation avec le ministère public, l'arrêt retient que si la validité d'une saisie pénale intervenue après qu'un jugement a ouvert à l'égard du saisi une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ne prête pas à discussion, la loi pénale étant d'interprétation stricte, il n'en n'est pas de même lorsque le titulaire de la créance bénéficie d'une procédure de sauvegarde, la saisie pénale ne pouvant faire obstacle à l'application des règles régissant la sauvegarde et ne pouvant s'appliquer valablement à la garantie d'une créance antérieure.

15. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

16. Mme L... fait le même grief à l'arrêt alors :

1°/ que « seule, la juridiction qui a le pouvoir d'ordonner la saisie pénale a celui d'en contrôler les conditions d'efficacité ; qu'il ne revenait donc pas à la cour d'appel de Dijon de refuser de prendre en considération une saisie pénale ordonnée par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Rennes, motif pris de l'absence de consignation ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 706-154 et 706-155 du code de procédure pénale ; »

2°/ que « la consignation étant prévue dans l'intérêt du seul créancier, il appartient à celui-ci, le cas échéant, de faire constater par le juge compétent que la consignation n'a pas été faite par le débiteur, et non pas au débiteur de saisir ce juge pour se faire dispenser de la consignation ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 706-155 du code de procédure pénale ».

Réponse de la Cour

Vu les articles 706-143 et 706-144 du code de procédure pénale :

17. Un juge de l'exécution ne peut poursuivre la vente sur surenchère d'un immeuble, quand bien même l'audience d'orientation aurait fixé les termes de la vente sur adjudication du bien immobilier et une première adjudication aurait déjà été prononcée, lorsque la saisie pénale de la créance, cause de la saisie immobilière, a été ordonnée par un juge d'instruction postérieurement à la première adjudication. Dans cette hypothèse, la vente sur surenchère de l'immeuble ne peut avoir lieu que sur l'autorisation du juge des libertés et de la détention ou du juge d'instruction délivrée en application des articles 706-143 et 706-144 du code de procédure pénale, ce juge pouvant décider que la saisie pénale sera reportée sur la somme revenant au créancier dans le prix d'adjudication et consignée sans délai auprès de l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués sur le fondement de l'article 706-160, alinéa 1, 2° du même code.

18. Pour confirmer le jugement du juge de l'exécution l'arrêt retient, d'abord, qu'en dépit des termes de l'article 706-155 du code de procédure pénale, le juge d'instruction n'a pas prononcé de dispense de consignation. Il ajoute qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que Mme L... ait, depuis lors, procédé à la consignation, ou qu'elle ait sollicité auprès de la juridiction compétente d'en être dispensée. Il en déduit que celle-ci ne peut prétendre tirer bénéfice d'une mesure de saisie pénale dont elle refuse elle-même de remplir les obligations qu'elles lui imposent.

L'arrêt retient, ensuite, qu'au moment où la saisie pénale a été ordonnée, la procédure de saisie immobilière avait déjà été validée par la cour d'appel de Dijon, qu'il avait, d'ores et déjà, été procédé à l'adjudication des biens concernés, et qu'ainsi, à supposer même la saisie pénale valable au regard des règles relatives à la procédure de sauvegarde dont bénéficie la société, elle ne saurait faire échec à la vente sur surenchère, mais verrait ses effets reportés sur le produit de cette vente, qui seul deviendrait indisponible.

19. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la quatrième branche du moyen unique, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 juin 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nancy.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Martinel - Avocat général : M. Girard - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; SCP Spinosi et Sureau -

Textes visés :

Articles 706-144 et 706-153 du code de procédure pénale ; article L. 622-21, II, du code de commerce ; articles 706-143 et 706-144 du code de procédure pénale.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 18 février 2016, pourvoi n° 14-24.321, Bull. 2016, II, n° 57 (rejet) ; Com., 15 novembre 2017, pourvoi n° 16-17.868, Bull. 2017, IV, n° 152 (rejet). 2e Civ., 12 mars 1997, pourvoi n° 95-11.807, Bulletin 1997, II, n° 71 (rejet), et l'arrêt cité.

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