Numéro 12 - Décembre 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 12 - Décembre 2019

ELECTIONS PROFESSIONNELLES

Soc., 11 décembre 2019, n° 19-12.596, (P)

Cassation

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Listes de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Défaut – Annulation de l'élection des élus du sexe dont le positionnement sur la liste n'est pas conforme – Modalités – Portée

Il résulte des articles L. 2314-32, alinéa 4, et L. 2314-29 du code du travail que la constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à l'article L. 2314-30, alinéa 1, seconde phrase, du même code entraîne l'annulation de l'élection des élus du sexe dont le positionnement sur la liste des candidats ne respecte pas ces prescriptions et que pour l'application de cette règle, le juge tient compte de l'ordre des élus tel qu'il résulte le cas échéant de l'application des règles relatives à la prise en compte des ratures dont le nombre est égal ou supérieur à 10 % des suffrages exprimés.

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 2314-32 du code du travail ;

Attendu qu'aux termes des troisième et quatrième alinéas du texte susvisé, la constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2314-30 entraîne l'annulation de l'élection d'un nombre d'élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d'hommes que celle-ci devait respecter.

Le juge annule l'élection des derniers élus du sexe surreprésenté en suivant l'ordre inverse de la liste des candidats.

La constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la seconde phrase du premier alinéa du même article L. 2314-30 entraîne l'annulation de l'élection du ou des élus dont le positionnement sur la liste de candidats ne respecte pas ces prescriptions ; que par ailleurs, l'article L. 2314-29 du même code dispose dans ses troisième et quatrième alinéas : « Lorsque le nom d'un candidat a été raturé, les ratures ne sont pas prises en compte si leur nombre est inférieur à 10 % des suffrages exprimés en faveur de la liste sur laquelle figure ce candidat. Dans ce cas, les candidats sont proclamés élus dans l'ordre de présentation » ;

Attendu qu'il en résulte que la constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 2314-30 du code du travail entraîne l'annulation de l'élection des élus du sexe dont le positionnement sur la liste des candidats ne respecte pas ces prescriptions et que pour l'application de cette règle, le juge tient compte de l'ordre des élus tel qu'il résulte le cas échéant de l'application des règles relatives à la prise en compte des ratures dont le nombre est égal ou supérieur à 10 % des suffrages exprimés ;

Attendu selon jugement attaqué, que les sociétés Vente-Privée.com, Oosearch, Digital commerce et Vente-Privée logistique constituent une unité économique et sociale comportant deux établissements distincts, « siège » et « logistique », ce dernier composé des salariés de la société Vente-privée logistique (la société) ; que les élections des membres du comité social et économique de l'établissement « logistique » se sont déroulées le 10 octobre 2018 ; que dans le premier collège, ont été élus en qualité de titulaires, sur des listes établies par le syndicat CFTC, outre Mme E..., en première position, M. G..., figurant en troisième position après M. B... sur la liste des candidats et en seconde position dans l'ordre des élus après prise en compte des ratures ; que par déclaration déposée au greffe le 23 octobre 2018, la société a notamment saisi le tribunal d'une demande d'annulation de l'élection de M. G... au motif que la liste sur laquelle il figurait ne respectait pas l'alternance hommes/femmes imposée par le code du travail ;

Attendu que pour rejeter cette demande d'annulation, le tribunal d'instance retient que la liste CFTC présentée pour l'élection des titulaires dans le premier collège, et qui a obtenu deux sièges, était ainsi composée dans l'ordre de présentation de Mme R... E..., M. C... B..., M. O... G..., Mme Q... S... K..., (...) et qu'ont été élus Mme R... E... et M. O... G... ; qu'il est observé que si cet ordre de présentation n'avait pas été modifié par les ratures affectant la candidature de M. C... B..., la liste aurait obtenu un élu de chaque sexe conformément à l'objectif poursuivi par le législateur ; qu'en raison du pourcentage de ratures ayant affecté la candidature de M. C... B..., c'est encore un résultat conforme à cet objectif qui a été atteint ; qu'en revanche, si la règle d'alternance avait été respectée - Mme Émilie S... K... étant alors en troisième position -, ce sont deux candidats du même sexe qui auraient été élus, soit un résultat contraire à l'objectif légal ; qu'une interprétation et une application téléologiques de la règle d'alternance reposant sur sa finalité telle que voulue par le législateur s'opposent donc à l'annulation de l'élection de M. O... G... dès lors que le non-respect de cette règle s'avère, en l'espèce, n'avoir porté aucune atteinte à l'objectif poursuivi par la loi ;

Qu'en statuant comme il a fait, le tribunal a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 8 février 2019, entre les parties, par le tribunal d'instance d'Aulnay-sous-Bois ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Bobigny.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Lanoue - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Article L. 2314-32 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Dans le même sens que : Soc., 17 avril 2019, pourvoi n° 18-60.173, Bull. 2019, (rejet).

Soc., 11 décembre 2019, n° 19-10.826, (P)

Rejet

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Listes de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Modalités – Applications diverses – Présentation d'une liste comprenant un nombre de candidats égal au nombre de sièges à pourvoir – Application des règles de proportionnalité et de l'arrondi à l'entier inférieur – Portée

Lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir, les organisations syndicales sont tenues de présenter une liste conforme à l'article L. 2314-30 du code du travail, c'est à dire respectant la proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré et devant comporter au moins un candidat au titre du sexe sous-représenté. Lorsque l'application des règles de proportionnalité et de l'arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5 conduit au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l'un ou l'autre sexe, il résulte de l'article précité que les listes de candidats peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues. Les dispositions de l'article L. 2314-30 du code du travail étant d'ordre public absolu, le protocole préélectoral ne peut y déroger.

En revanche, lorsque l'organisation syndicale choisit de présenter une liste comprenant un nombre de candidats inférieur au nombre de sièges à pourvoir, l'application de la règle de l'arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5 provoquée par le nombre de candidats que l'organisation syndicale a choisi de présenter ne peut conduire, s'agissant de textes d'ordre public absolu, à éliminer toute représentation du sexe sous-représenté qui aurait été autrement représenté dans une liste comportant autant de candidats que de sièges à pourvoir.

Dès lors, statue à bon droit en annulant l'élection de la dernière élue du sexe féminin surreprésenté le tribunal qui, ayant, d'une part, constaté que quatre postes étaient à pourvoir et que les deux sexes étaient représentés au sein du collège considéré, d'autre part fait ressortir que l'application, en fonction du nombre de candidats présentés sur la liste incomplète, de la règle de l'arrondi à l'entier inférieur conduisait à exclure de toute représentation le sexe sous-représenté qui aurait été nécessairement représenté sur une liste comportant autant de candidats que de postes à pourvoir, en a exactement déduit l'irrégularité de la liste composée de deux représentants du sexe féminin surreprésenté, une liste de deux candidats devant dans ce cas nécessairement comporter un candidat de l'un et l'autre sexe.

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Liste de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Modalités – Applications diverses – Présentation d'une liste comprenant un nombre de candidats inférieur au nombre de sièges à pourvoir – Règles de proportionnalité et de l'arrondi – Respect – Nécessité – Conditions – Portée

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Liste de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Respect – Nécessité – Fondement – Dispositions d'ordre public absolu – Portée

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Liste de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Défaut – Annulation de l'élection des derniers élus du sexe surreprésenté – Modalités – Portée

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Courbevoie, 11 janvier 2019), qu'un protocole d'accord préélectoral en vue de l'organisation de l'élection des membres de la délégation du personnel au comité social et économique de la société Fiducial Outsourcing Performance a été conclu le 5 juillet 2018, prévoyant concernant le premier collège un nombre de sièges à pourvoir de quatre membres titulaires et de quatre membres suppléants et précisant la composition du corps électoral du collège concerné représentant 85 % de femmes et 15 % d'hommes ; qu'ont été déclarées élues le 29 octobre 2018 à l'issue du second tour Mme M..., élue titulaire sur la liste présentée par le syndicat CGT des travailleurs réunis du site de l'arsenal de Cherbourg et ne comportant que son seul nom, et Mmes T... et P..., élues suppléantes sur la liste présentée par la fédération CFTC commerce-service et force de vente (la fédération) et ne comportant que leurs deux seuls noms ; que, le 12 novembre 2018, la société a saisi le tribunal d'instance aux fins d'annuler l'élection de ces trois élues ;

Attendu que la fédération et Mmes T... et P... font grief au jugement d'annuler l'élection du 29 octobre 2018 au comité social et économique de Mme P... (CFTC), en qualité de membre suppléant du premier collège, alors, selon le moyen :

1°/ que les syndicats sont en droit de présenter des listes de candidats incomplètes, d'autre part, dans chaque collège, l'application de la règle de la proportionnalité et celle de l'arrondi peuvent conduire à présenter des listes avec des candidats uniquement féminins ou masculins, les syndicats ayant dans ce cas la faculté mais non l'obligation de présenter un candidat de l'autre sexe et qu'enfin, la règle de l'alternance ne s'applique qu'aux listes comportant des candidats des deux sexes ; qu'en l'état de quatre sièges à pourvoir, le tribunal a annulé l'élection de Mme P..., deuxième élue du syndicat CFTC, aux motifs que la liste, comportant uniquement deux candidates, était irrégulière ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand il n'était pas contesté que quatre sièges étaient à pourvoir et que la proportion de femmes s'élevait à 85 % et la proportion d'hommes à 15 %, ce dont il résultait que le syndicat était en droit de présenter une liste incomplète comportant deux candidats femmes, le tribunal a violé les articles L. 2314-30 et L. 2314-32 du code du travail ;

2°/ que la régularité de la liste dépend de la proportion de femmes et d'hommes dans chaque collège ; qu'en l'état de quatre sièges à pourvoir, le tribunal a annulé l'élection de Mme P..., deuxième élue du syndicat CFTC, aux motifs que la liste, comportant uniquement deux candidates, était irrégulière ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans rechercher quelle était la proportion de femmes et d'hommes dans le premier collège et donc si le syndicat était en droit de présenter, sur une liste incomplète, uniquement deux candidats femmes, le tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 2314-30 et L. 2314-32 du code du travail ;

Mais attendu que, lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir, les organisations syndicales sont tenues de présenter une liste conforme à l'article L. 2314-30 du code du travail, c'est à dire respectant la proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré et devant comporter au moins un candidat au titre du sexe sous-représenté ; que lorsque l'application des règles de proportionnalité et de l'arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5 conduit au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l'un ou l'autre sexe, il résulte de l'article précité que les listes de candidats peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues ; que les dispositions de l'article L. 2314-30 du code du travail étant d'ordre public absolu, le protocole préélectoral ne peut y déroger ;

Attendu qu'en revanche, lorsque l'organisation syndicale choisit de présenter une liste comprenant un nombre de candidats inférieur au nombre de sièges à pourvoir, l'application de la règle de l'arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5 provoquée par le nombre de candidats que l'organisation syndicale a choisi de présenter ne peut conduire, s'agissant de textes d'ordre public absolu, à éliminer toute représentation du sexe sous-représenté qui aurait été autrement représenté dans une liste comportant autant de candidats que de sièges à pourvoir ;

Et attendu qu'ayant, d'une part, constaté que quatre postes étaient à pourvoir et que les deux sexes étaient représentés au sein du collège considéré, d'autre part fait ressortir que l'application, en fonction du nombre de candidats présentés sur la liste incomplète, de la règle de l'arrondi à l'entier inférieur conduisait à exclure de toute représentation le sexe sous-représenté qui aurait été nécessairement représenté sur une liste comportant autant de candidats que de postes à pourvoir, le tribunal, qui a procédé à la recherche prétendument omise, en a exactement déduit l'irrégularité de la liste composée de deux représentants du sexe féminin surreprésenté, une liste de deux candidats devant dans ce cas nécessairement comporter un candidat de l'un et l'autre sexe, et a, à bon droit, décidé l'annulation de l'élection de Mme P..., dernière élue du sexe surreprésenté ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Ott - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Article L. 2314-30 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur l'application de la règle imposant d'assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les instances représentatives du personnel, à rapprocher : Soc., 9 mai 2018, pourvoi n° 17-14.088, Bull. 2018, V, n° 78 (cassation partielle) ; Soc., 17 avril 2019, pourvoi n° 17-26.724, Bull. 2019, (cassation partielle sans renvoi), et l'arrêt cité ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 19-10.855, Bull. 2019, (rejet), et les arrêts cités ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 18-26.568, Bull. 2019, (2) (irrecevabilité partielle et cassation partielle) ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 18-23.513, Bull. 2019, (rejet), et les arrêts cité.

Soc., 11 décembre 2019, n° 19-10.855, (P)

Rejet

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Listes de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Modalités – Applications diverses – Présentation d'une liste comprenant un nombre de candidats égal au nombre de sièges à pourvoir – Application des règles de proportionnalité et de l'arrondi à l'entier inférieur – Portée

Lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir, les organisations syndicales sont tenues de présenter une liste conforme à l'article L. 2314-30 du code du travail, c'est à dire respectant la proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré et devant comporter au moins un candidat au titre du sexe sous-représenté. Lorsque l'application des règles de proportionnalité et de l'arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5 conduit, au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l'un ou l'autre sexe, il résulte de l'article précité que les listes de candidats peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues. Les dispositions de l'article L. 2314-30 du code du travail étant d'ordre public absolu, le protocole préélectoral ne peut y déroger.

Dès lors, lorsqu'en application de la règle de la proportionnalité et de la règle de l'arrondi au regard du nombre de postes à pourvoir, aucun siège ne devait être attribué à une femme, un protocole préélectoral ne peut prévoir la présence obligatoire d'une femme et une liste composée d'un candidat unique du sexe masculin est valable.

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Liste de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Respect – Nécessité – Fondement – Dispositions d'ordre public absolu – Portée

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Nice, 10 janvier 2019), qu'en juillet 2018, en vue de la mise en place du comité social et économique, un protocole d'accord préélectoral a été conclu entre la société Triverio construction et les organisations syndicales représentatives ; qu'il prévoyait notamment que, dans le premier collège, six sièges étaient à pourvoir tant pour les titulaires que pour les suppléants et que la répartition des sexes dans ce collège était de 96 % d'hommes et 4 % de femmes, « soit une femme titulaire/ une femme suppléante » ; que l'Union syndicale de la construction du bois et de l'ameublement CGT des Alpes-Maritimes (le syndicat CGT) a présenté un candidat unique, M. X..., en qualité de titulaire, et un candidat unique, M. L..., en qualité de suppléant, qui ont tous deux été élus au premier tour des élections le 27 septembre 2018 ; que la Fédération générale Force ouvrière construction (le syndicat FO) a saisi le tribunal d'instance le 11 octobre 2018 en annulation de l'élection de M. X... et de M. L... aux motifs que les listes du syndicat CGT ne respectaient pas les dispositions du protocole pré-électoral et celles du code du travail ;

Sur l'irrecevabilité du mémoire en défense soulevée par le demandeur au pourvoi :

Attendu que le mémoire en défense a été adressé au greffe de la Cour de cassation par un avocat du barreau de Nice agissant comme mandataire de MM. X... et L... ainsi que du syndicat CGT, sans qu'il soit justifié d'un pouvoir spécial ;

Qu'il est dès lors irrecevable ;

Sur le moyen unique :

Attendu que le syndicat FO fait grief au jugement de rejeter sa demande d'annulation de l'élection de M. X... et de M. L... alors, selon le moyen, que la règle de mixité prévue à l'article L. 2314-30 du code du travail suppose que les listes de candidats, pour chaque collège électoral, comportent plusieurs candidats masculins et féminins correspondant à la part de femmes et d'hommes inscrits sur la liste électorale ; qu'au cas présent, la liste de candidats au premier collège devait, conformément aux prévisions du protocole d'accord préélectoral, comporter cinq candidats masculins et un candidat féminin, pour assurer la mixité de la représentation du personnel ; que le tribunal d'instance a constaté que le syndicat CGT n'avait présenté qu'un homme comme candidat titulaire au sein du premier collège et qu'un homme comme candidat suppléant au sein du premier collège ; que pour la dire régulière, le tribunal d'instance a néanmoins retenu que la liste CGT au premier collège ne méconnaissait pas les exigences de mixité et de représentation équilibrée des hommes et des femmes au sein des instances de représentation du personnel ; qu'en statuant ainsi, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 2314-30 du code du travail ;

Mais attendu que, lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir, les organisations syndicales sont tenues de présenter une liste conforme à l'article L. 2314-30 du code du travail, c'est à dire respectant la proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré et devant comporter au moins un candidat au titre du sexe sous-représenté ; que lorsque l'application des règles de proportionnalité et de l'arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5 conduit, au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l'un ou l'autre sexe, il résulte de l'article précité que les listes de candidats peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues ; que les dispositions de l'article L. 2314-30 du code du travail étant d'ordre public absolu, le protocole préélectoral ne peut y déroger ;

Et attendu qu'après avoir constaté que l'application de la règle de la proportionnalité et de la règle de l'arrondi au regard du nombre de postes à pourvoir conduisait à ce qu'aucun siège ne soit attribué à une femme, le tribunal a statué à bon droit ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Lanoue - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Article L. 2314-30 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur l'application de la règle imposant d'assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les instances représentatives du personnel, à rapprocher : Soc., 9 mai 2018, pourvoi n° 17-14.088, Bull. 2018, V, n° 78 (cassation partielle) ; Soc., 17 avril 2019, pourvoi n° 17-26.724, Bull. 2019, (cassation partielle sans renvoi), et l'arrêt cité ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 19-10.826, Bull. 2019, (rejet), et les arrêts cités ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 18-26.568, Bull. 2019, (2) (irrecevabilité partielle et cassation partielle) ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 18-23.513, Bull. 2019, (rejet).

Soc., 11 décembre 2019, n° 18-23.513, (P)

Rejet

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Listes de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Modalités – Applications diverses – Présentation d'une liste comprenant un nombre de candidats inférieur au nombre de sièges à pourvoir – Règles de proportionnalité et de l'arrondi – Respect – Nécessité – Conditions – Portée

Lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir, les organisations syndicales sont tenues de présenter une liste conforme à l'article L. 2314-30 du code du travail, c'est à dire respectant la proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré et devant comporter au moins un candidat au titre du sexe sous-représenté. Lorsque l'application des règles de proportionnalité et de l'arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5 conduit, au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l'un ou l'autre sexe il résulte de l'article précité que les listes de candidats peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues. Les dispositions de l'article L. 2314-30 du code du travail étant d'ordre public absolu, le protocole préélectoral ne peut y déroger.

Il s'ensuit que c'est à bon droit qu'un tribunal, ayant constaté que la proportion de femmes et d'hommes dans le collège concerné était respectivement de 30,46 % et de 69,54 % et que deux postes étaient à pourvoir, ce dont il résultait que la règle de proportionnalité donnant une décimale supérieure à 5, un poste devait être attribué à une femme, et que le syndicat n'avait présenté qu'un candidat homme, annule l'élection de ce dernier.

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Liste de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Respect – Nécessité – Fondement – Dispositions d'ordre public absolu – Portée

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance d'Amiens, 28 septembre 2018), que la société Locanor a organisé, le 29 juin 2018, le premier tour des élections des membres de la délégation du personnel au comité social et économique ; qu'au sein du collège « Tam ingénieurs et cadres », deux sièges étaient à pourvoir, la proportion des hommes et des femmes dans ce collège étant respectivement de 69,54 % et de 30,46 % ; que le syndicat CFDT a présenté la candidature unique, en qualité à la fois de titulaire et de suppléant, de M. X... ; que ce dernier a été élu en qualité de suppléant ; que la société Locanor a saisi le tribunal d'instance, le 13 juillet 2018, d'une demande d'annulation de l'élection de M. X... ; que M. X... a formé, en cours d'instance, une demande reconventionnelle en annulation des élections ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il est fait grief au jugement de déclarer irrecevable le salarié en sa demande d'annulation des élections, alors, selon le moyen, que la saisine du tribunal d'instance par toute partie recevable à agir aux fins d'annulation des élections professionnelles, interrompt le délai de forclusion de l'article R. 2314-24 du code du travail au bénéfice des autres parties à l'instance dont les demandes tendent à contester les mêmes élections ; que le tribunal, après avoir constaté que la société Locanor l'avait saisi dans le délai de 15 jours suivant l'élection, a déclaré irrecevable la demande de M. X... tendant à l'annulation de la même élection ; qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal a violé les articles R. 2314-24 du code du travail et 2241 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la demande principale tendait, non à l'annulation des élections, mais à l'annulation de l'élection d'un élu présent sur une liste ne respectant pas la parité des hommes et des femmes et que la demande reconventionnelle en annulation des élections avait été formée postérieurement au délai de forclusion de quinze jours, le tribunal d'instance a dit à bon droit cette demande irrecevable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il est fait grief au jugement d'annuler l'élection du salarié en qualité de membre suppléant du comité social et économique alors, selon le moyen :

1°/ qu'une liste peut comprendre un nombre de candidats inférieur au nombre de sièges à pourvoir et que, d'autre part, un salarié peut se porter candidat à une même fonction en qualité de titulaire et en qualité de suppléant ; qu'après avoir constaté que deux sièges étaient à pourvoir, le tribunal a annulé l'élection du salarié, homme, présenté comme seul candidat par le syndicat CFDT ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand il n'était pas contesté que la proportion d'hommes s'élevait à 69,44 % et la proportion de femmes de 30,56 %, ce dont il résultait que le syndicat était en droit de présenter, en première position de liste, un salarié, homme, tandis que la liste pouvait comprendre un nombre de candidats inférieur au nombre de sièges à pourvoir et qu'enfin, le salarié pouvait se porter candidat à une même fonction en qualité de titulaire et en qualité de suppléant, le tribunal a violé les articles L. 2314-30 et L. 2314-32 du code du travail ;

2°/ qu'en application de l'article L. 2314-32 du code du travail, la constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2314-30 entraîne l'annulation de l'élection d'un nombre d'élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d'hommes que celle-ci devait respecter ; que le juge annule l'élection des derniers élus du sexe surreprésenté en suivant l'ordre inverse de la liste des candidats ; que la constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la seconde phrase du premier alinéa du même article L. 2314-30 entraîne l'annulation de l'élection du ou des élus dont le positionnement sur la liste de candidats ne respecte pas ces prescriptions ; qu'en annulant l'élection de M. X..., quand celui-ci n'est pas « élu du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d'hommes que celle-ci devait respecter » et n'était pas mal positionné sur la liste, le tribunal a violé les articles L. 2314-30 et L. 2314-32 du code du travail ;

Mais attendu que, lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir, les organisations syndicales sont tenues de présenter une liste conforme à l'article L. 2314-30 du code du travail, c'est à dire respectant la proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré et devant comporter au moins un candidat au titre du sexe sous-représenté ; que lorsque l'application des règles de proportionnalité et de l'arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5 conduit, au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l'un ou l'autre sexe il résulte de l'article précité que les listes de candidats peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues ; que les dispositions de l'article L. 2314-30 du code du travail étant d'ordre public absolu, le protocole préélectoral ne peut y déroger ;

Qu'il s'ensuit que le tribunal, ayant constaté que la proportion de femmes et d'hommes dans le collège concerné était respectivement de 30,46 % et de 69,54 % et que deux postes étaient à pourvoir, ce dont il résultait que la règle de proportionnalité donnant une décimale supérieure à 5, un poste devait être attribué à une femme, et que le syndicat n'avait présenté qu'un candidat homme, a statué à bon droit ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Article L. 2314-30 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur l'application de la règle imposant d'assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les instances représentatives du personnel, à rapprocher : Soc., 9 mai 2018, pourvoi n° 17-14.088, Bull. 2018, V, n° 78 (cassation partielle) ; Soc., 17 avril 2019, pourvoi n° 17-26.724, Bull. 2019, (cassation partielle sans renvoi), et l'arrêt cité ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 19-10.855, Bull. 2019, (rejet), et les arrêts cités ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 18-26.568, Bull. 2019, (2) (irrecevabilité partielle et cassation partielle) ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 19-10.826, Bull. 2019, (rejet), et les arrêts cités.

Soc., 11 décembre 2019, n° 18-26.568, (P)

Irrecevabilité partielle et cassation partielle

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Listes de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Régularité de la liste électorale – Contestation – Modalités – Détermination – Portée

Le tribunal d'instance peut être saisi, avant l'élection, d'une contestation relative à la composition des listes de candidats en application de l'article L. 2314-30 du code du travail et déclarer la liste électorale irrégulière au regard de ce texte, dès lors qu'il statue avant l'élection, en reportant le cas échéant la date de l'élection pour en permettre la régularisation.

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Listes de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Modalités – Applications diverses – Présentation d'une liste comprenant un nombre de candidats inférieur au nombre de sièges à pourvoir – Règles de proportionnalité et de l'arrondi – Respect – Nécessité – Conditions – Portée

Lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir, les organisations syndicales sont tenues de présenter une liste conforme à l'article L. 2314-30 du code du travail, c'est à dire respectant la proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré et devant comporter au moins un candidat au titre du sexe sous-représenté ; lorsque l'application des règles de proportionnalité et de l'arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5 conduit, au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l'un ou l'autre sexe, il résulte de l'article précité que les listes de candidats peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues. Les dispositions de l'article L. 2314-30 du code du travail étant d'ordre public absolu, le protocole préélectoral ne peut y déroger. Il en résulte que si, alors que deux sièges sont à pourvoir, le pourcentage de salariés d'un sexe, en application de la règle de l'arrondi, ne donne droit à aucun siège, le syndicat peut présenter, soit deux candidats du sexe majoritairement représenté, soit un candidat de chacun des deux sexes, soit un candidat unique du sexe surreprésenté.

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Liste de candidatures – Alternance des candidats – Représentation équilibrée des femmes et des hommes – Respect – Nécessité – Fondement – Dispositions d'ordre public absolu – Portée

Attendu, selon le jugement attaqué, que la société Faurecia intérieur industrie (la société) a organisé les élections pour la mise en place du comité social et économique de l'établissement de Bains-Sur-Oust et signé avec plusieurs syndicats, le 31 octobre 2018, un protocole préélectoral précisant, s'agissant du 2e collège électoral, la présence de 89 % d'hommes et de 11 % de femmes, soit, au regard des deux postes à pourvoir, un pourcentage de 0,22 % de femmes ; que le premier tour des élections était fixé le 18 décembre 2018 ; que le 4 décembre 2018, la société a saisi le tribunal d'instance d'une contestation des listes de candidatures déposées respectivement par le syndicat CFDT chimie énergie Bretagne pour le 1er collège et par le syndicat CGT pour le 2e collège, au motif que ces listes ne respectaient pas l'exigence de représentation équilibrée femmes hommes en ce qu'elles ne comportaient qu'un candidat alors que plusieurs postes étaient à pourvoir ;

Sur le pourvoi en ce qu'il est formé par le syndicat CFDT et M. D... ;

Vu l'article 978 du code de procédure civile ;

Attendu que le syndicat CFDT et M. D... se sont pourvus en cassation contre le jugement du 17 décembre 2018, mais ne soutiennent aucun moyen à l'appui de leur pourvoi ;

D'où il suit qu'il y a lieu de constater la déchéance du pourvoi s'agissant du syndicat CFDT et de M. D... ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois dernières branches :

Attendu que le syndicat CGT fait grief au jugement de dire recevable la contestation et de déclarer irrégulière la liste présentée par lui pour le 2e collège (titulaires et suppléants) des élections du comité social et économique de l'établissement Bains-sur-Oust, alors selon le moyen :

1°/ qu'en jugeant que le syndicat CGT n'avait pas respecté le protocole d'accord préélectoral du 31 octobre 2018 qu'il avait signé quand ce syndicat n'était pas signataire dudit protocole, le tribunal a violé le principe selon lequel il est fait interdiction au juge de dénaturer les documents qui lui sont soumis ;

2°/ subsidiairement que, d'une part, les stipulations d'un protocole d'accord préélectoral qui méconnaissent les principes généraux du droit électoral ne peuvent être valablement opposées et que, d'autre part, le droit de présenter une liste comprenant un nombre de candidats inférieur au nombre de sièges à pourvoir est un principe général du droit électoral ; qu'en opposant au syndicat les stipulations du protocole d'accord qui méconnaissaient les principes généraux du droit électoral, le tribunal a violé le principe général du droit électoral autorisant la présentation d'une liste comprenant un nombre de candidats inférieur au nombre de sièges à pourvoir.

3°/ en tout état de cause que l'article L. 2314-32 du code du travail ne prévoit que des sanctions limitativement énumérées, applicables après l'élection, et consistant à annuler non pas les listes, mais l'élection des salariés ne satisfaisant pas aux conditions légales ; que le tribunal, statuant avant l'élection, a déclaré la liste irrégulière ; qu'en se prononçant avant l'élection et en appliquant une sanction qui n'est pas prévue légalement, le tribunal a violé les articles L. 2314-30 et L. 2314-32 du code du travail ;

Mais attendu d'abord que si, en application de l'article L. 2314-32 du code du travail, la constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2314-30 entraîne la seule sanction de l'annulation de l'élection d'un nombre d'élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d'hommes que celle-ci devait respecter, le tribunal d'instance peut être saisi, avant l'élection, d'une contestation relative à la composition des listes de candidats en application de l'article L. 2314-30 du même code et déclarer la liste électorale irrégulière au regard de ce texte, dès lors qu'il statue avant l'élection, en reportant le cas échéant la date de l'élection pour en permettre la régularisation ;

Et attendu ensuite que les dispositions de l'article L. 2314-30 étant d'ordre public absolu, les obligations qui en découlent ne résultent pas des clauses du protocole préélectoral ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 2314-30 du code du travail ;

Attendu que, lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir, les organisations syndicales sont tenues de présenter une liste conforme à l'article L. 2314-30 du code du travail, c'est à dire respectant la proportion de la part des hommes et des femmes dans le collège électoral considéré et devant comporter au moins un candidat au titre du sexe sous-représenté ; que lorsque l'application des règles de proportionnalité et de l'arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à cinq conduit, au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l'un ou l'autre sexe, il résulte de l'article précité que les listes de candidats peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues ; que les dispositions de l'article L. 2314-30 du code du travail étant d'ordre public absolu, le protocole préélectoral ne peut y déroger ;

Attendu que pour dire irrégulière la liste présentée par le syndicat CGT, le tribunal d'instance énonce qu'en vertu de l'article L. 2314-30 du code du travail articulé avec les principes constitutionnels de liberté syndicale et de parité, en cas de pluralité de sièges à pourvoir dans le cadre de l'élection, les organisations syndicales ne peuvent pas présenter de liste avec une candidature unique, les listes peuvent être incomplètes mais doivent respecter les dispositions relatives à la représentation homme-femme prévues ; que dès lors que le collège électoral présente une mixité, les deux sexes doivent être représentés au sein des listes électorales présentées par les organisations syndicales et qu'en l'espèce la CGT a présenté deux listes de candidatures uniques, ce qui ne respecte pas l'article L. 2314-30 du code du travail ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que les femmes ne représentaient que 11 % des effectifs du deuxième collège, soit, pour deux sièges à pourvoir, un pourcentage en application de la règle de l'arrondi ne donnant droit à aucun siège, ce qui autorisait le syndicat à présenter, soit deux candidats du sexe majoritairement représenté, soit un candidat de chacun des deux sexes, soit un candidat unique du sexe surreprésenté, le tribunal d'instance a violé, par fausse application, le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi formé par syndicat CFDT et M. D... ;

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable l'action, le jugement rendu le 17 décembre 2018, entre les parties, par le tribunal d'instance de Redon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Rennes.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Célice, Texidor et Périer -

Textes visés :

Article L. 2314-30 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur l'application de la règle imposant d'assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les instances représentatives du personnel, à rapprocher : Soc., 9 mai 2018, pourvoi n° 17-14.088, Bull. 2018, V, n° 78 (cassation partielle) ; Soc., 17 avril 2019, pourvoi n° 17-26.724, Bull. 2019, (cassation partielle sans renvoi), et l'arrêt cité ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 19-10.855, Bull. 2019, (rejet), et les arrêts cités ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 19-10.826, Bull. 2019, (rejet) ; Soc., 11 décembre 2019, pourvoi n° 18-23.513, Bull. 2019, (rejet), et les arrêts cité.

Soc., 11 décembre 2019, n° 18-20.841, (P)

Cassation

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Protocole d'accord préélectoral – Contenu – Fixation de la proportion d'hommes et de femmes composant chaque collège électoral – Validité – Contestation – Recevabilité – Conditions – Détermination – Portée

Un syndicat ayant, sans réserves, signé un protocole préélectoral et présenté des candidats aux élections professionnelles, n'est pas recevable à invoquer par voie d'exception, après les élections, une proportion d'hommes et de femmes composant le corps électoral différente de celle figurant dans le protocole préélectoral conclu selon les conditions de l'article L. 2314-6 du code du travail.

Attendu, selon le jugement attaqué, que le premier tour des élections des membres du comité social et économique au sein de la société Vauban pièces de rechange (VPR) a eu lieu le 5 juin 2018, suivant les modalités prévues par un protocole d'accord préélectoral en date du 26 avril 2018, fixant notamment, au sein du collège des ouvriers et employés, le nombre de membres titulaires ou suppléants à trois personnes, soit une femme et deux hommes, correspondant à la répartition des femmes et des hommes fixée à 17,54 % et 82,46 % ; que, par requête présentée le 18 juin 2018, la société a saisi le tribunal d'instance en annulation de l'élection de M. Y... en qualité de membre titulaire au sein de ce collège, au motif que la liste de candidatures présentée par l'union départementale des syndicats CGT du Val-d'Oise, ne comportant que des hommes, ne respectait pas les dispositions prévues à l'article L. 2314-29 du code du travail ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel qui est préalable : Publication sans intérêt

Mais sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu l'article L. 2314-13 du code du travail ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, la répartition des sièges entre les différentes catégories de personnel et la répartition du personnel dans les collèges électoraux font l'objet d'un accord entre l'employeur et les organisations syndicales conclu selon les conditions de l'article L. 2314-6 ; cet accord mentionne la proportion de femmes et d'hommes composant chaque collège électoral ;

Attendu que, pour dire la liste présentée par le syndicat CGT régulière en ce qu'elle comportait trois candidats masculins, le tribunal retient que, si le protocole préélectoral du 26 avril 2018 indique une répartition pour le collège considéré de 82,46 % d'hommes et de 17,54 % de femmes, il s'agit d'une simple erreur de calcul puisqu'en réalité le pourcentage s'établit à 86 % d'hommes et 14 % de femmes ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur faisait valoir sans être contredit que le syndicat CGT avait signé sans réserves le protocole préélectoral ayant recueilli la double majorité et avait présenté des candidats aux élections sans émettre de réserves, ce dont il résultait qu'il n'était pas recevable à invoquer par voie d'exception une proportion d'hommes et de femmes composant le corps électoral différente de celle figurant dans le protocole préélectoral, le tribunal a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 24 juillet 2018, entre les parties, par le tribunal d'instance de Pontoise ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Montmorency.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Chamley-Coulet - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Zribi et Texier ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Article L. 2314-13 du code du travail.

Soc., 11 décembre 2019, n° 18-19.379, (P)

Cassation partielle

Comité social et économique – Opérations électorales – Modalités d'organisation et de déroulement – Régularité – Défaut – Sanction – Annulation du scrutin – Absence 'incidence sur la désignation régulière d'un salarié en qualité de délégué syndical – Portée

Il résulte de l'article L. 2143-3 du code du travail que l'annulation, en application des dispositions de l'article L. 2314-32 du code du travail, de l'élection d'un candidat ayant recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des élections est sans effet sur la condition du score électoral personnel requise, sous réserve d'un certain nombre d'exceptions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 2143-3, par le premier alinéa de ce même texte.

Dès lors, il n'y a pas lieu à annulation de la désignation régulière d'un salarié en qualité de délégué syndical à l'issue de son élection en qualité de membre du comité social et économique lorsque cette élection est ultérieurement annulée.

Attendu, selon le jugement attaqué, que, le 5 juin 2018, a été organisée l'élection du comité social et économique au sein de la société Lebronze Alloys (la société), selon les modalités prévues par un protocole préélectoral aux termes duquel, notamment, le deuxième collège du groupe A était composé de 78,4 % d'hommes et de 21,6 % de femmes, trois postes étant à pourvoir ; que Mme C..., candidate unique de la liste du syndicat Force ouvrière (FO) pour le collège en cause, a été élue au premier tour ; que, par lettre du 6 juin 2018, le syndicat FO a informé l'employeur de la désignation de cette salariée en qualité de délégué syndical, et, par lettre du 8 juin 2018, de sa désignation en qualité de délégué syndical central ; que, par requête du 18 juin 2018, la société a saisi le tribunal d'instance afin d'obtenir l'annulation de l'élection de Mme C... au comité social et économique et de ses désignations en qualité de délégué syndical FO et délégué syndical central FO ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le syndicat et la salariée font grief au jugement d'annuler l'élection de cette dernière en qualité de membre titulaire du comité social et économique de la société, alors, selon le moyen, qu'une organisation syndicale est libre de présenter une liste ne comportant qu'un seul candidat à l'élection des membres du comité social et économique, quand bien même plusieurs sièges seraient à pourvoir ; que, dans un tel cas, lorsque la proportion des hommes et des femmes inscrits sur les listes électorales implique la représentation des deux sexes, l'organisation syndicale peut librement choisir de présenter un candidat de sexe masculin ou de sexe féminin ; qu'en considérant que l'Union locale Force ouvrière de Châlons-en-Champagne ne pouvait, sans détourner l'objectif de représentation proportionnée des hommes et des femmes fixé par le législateur, présenter une liste comportant un candidat unique, le tribunal d'instance a violé les articles L. 2314-29 et L. 2314-30 du code du travail ;

Mais attendu que le tribunal a retenu à bon droit que trois postes étant à pourvoir, l'organisation syndicale était tenue de présenter une liste conforme à l'article L. 2314-30 du code du travail, c'est-à-dire comportant nécessairement un homme et une femme, cette dernière au titre du sexe sous-représenté dans le collège considéré ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article L. 2143-3 du code du travail ;

Attendu qu'aux termes de deux premiers alinéas de ce texte, chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement d'au moins cinquante salariés, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli à titre personnel et dans leur collège au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article L. 2143-12, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur. Si aucun des candidats présentés par l'organisation syndicale aux élections professionnelles ne remplit les conditions mentionnées au premier alinéa du présent article ou s'il ne reste, dans l'entreprise ou l'établissement, plus aucun candidat aux élections professionnelles qui remplit les conditions mentionnées au même premier alinéa, ou si l'ensemble des élus qui remplissent les conditions mentionnées audit premier alinéa renoncent par écrit à leur droit d'être désigné délégué syndical, une organisation syndicale représentative peut désigner un délégué syndical parmi les autres candidats, ou, à défaut, parmi ses adhérents au sein de l'entreprise ou de l'établissement ou parmi ses anciens élus ayant atteint la limite de durée d'exercice du mandat au comité social et économique fixée au deuxième alinéa de l'article L. 2314-33 ;

Qu'il en résulte que l'annulation, en application des dispositions de l'article L. 2314-32 du code du travail, de l'élection d'un candidat ayant recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des élections est sans effet sur la condition du score électoral personnel requise, sous réserve d'un certain nombre d'exceptions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 2143-3, par le premier alinéa de ce même texte ;

Attendu que pour annuler les désignations de la salariée en qualité de délégué syndical et de délégué syndical central à l'issue des élections, le tribunal a retenu que l'annulation de l'élection de la salariée emporte l'impossibilité de procéder à sa désignation en qualité de délégué syndical au titre d'une candidature aux élections professionnelles et de l'existence d'un score de 10 % des suffrages exprimés au premier tour des élections ;

Qu'en statuant ainsi, le tribunal a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule les désignations de Mme C... en qualité de délégué syndical FO et délégué syndical central FO, le jugement rendu le 4 juillet 2018, entre les parties, par le tribunal d'instance de Châlons-en-Champagne ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Reims.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Lanoue - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : Me Haas ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Article L. 2143-3 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur les effets de l'annulation des élections des membres du comité d'entreprise sur la désignation en qualité de délégué syndical, à rapprocher : Soc., 11 mai 2016, pourvoi n° 15-60.171, Bull. 2016, V, n° 91 (cassation).

Soc., 11 décembre 2019, n° 19-60.094, n° 19-60.095, n° 19-60.102, n° 19-60.111, (P)

Rejet

Procédure – Décision du tribunal d'instance – Contentieux de la régularité de l'élection – Décision par défaut – Voies de recours – Pourvoi en cassation – Détermination – Portée

Vu la connexité, joint les pourvois n° 19-60.094, 19-60.095, 19-60.102 et 19-60.111 ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les jugements attaqués (tribunal d'instance d'Aulnay-sous-Bois, 21 janvier 2019), que le syndicat SUD aérien a formé opposition aux jugements n° RG 11-18-001295, 11-18-001297, 11-18-001298 et 11-18-001299 du 22 juin 2018 ayant annulé, le premier la désignation de M. H... en qualité de représentant syndical au comité central d'entreprise de la société Acna (la société), le deuxième la désignation de M. L... en qualité de délégué syndical au sein de l'établissement Roissy Charles de Gaulle de la société, le troisième la désignation de M. V... en qualité de délégué syndical au sein de la société, le quatrième la désignation de M. H... en qualité de représentant syndical au comité d'établissement Roissy Charles de Gaulle de la société ;

Attendu que le syndicat fait grief aux jugements de déclarer irrecevables ses oppositions alors, selon le moyen, qu'en jugeant irrecevables ces oppositions, le tribunal a fait une inexacte application de l'article R. 2143-5 du code du travail et des dispositions des articles 473 et suivants et 571 à 578 du code de procédure civile ;

Mais attendu que les termes de l'article R. 2143-5 du code du travail, selon lesquels la décision du tribunal d'instance qui statue en dernier ressort sur les contestations relatives aux conditions de désignation des délégués syndicaux légaux ou conventionnels est susceptible d'un pourvoi en cassation dans un délai de dix jours, écartent tant l'appel que l'opposition ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Rinuy - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor et Périer -

Textes visés :

Article R. 2143-5 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Dans le même sens que : Soc., 14 janvier 2014, pourvoi n° 12-29.253, Bull. 2014, V, n° 3 (rejet).

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