Numéro 12 - Décembre 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 12 - Décembre 2019

BAIL D'HABITATION

3e Civ., 19 décembre 2019, n° 18-20.854, (P)

Rejet

Bail soumis à la loi du 6 juillet 1989 – Congé – Loi du 24 mars 2014 modifiant l'article 15, I – Congé antérieur à l'entrée en vigueur de la loi – Application rétroactive (non)

L'article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 n'est pas applicable à un congé délivré avant l'entrée en vigueur de cette loi.

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 décembre 2017), que, le 19 décembre 2013, M. L..., propriétaire d'un appartement qu'il a donné à bail d'habitation en 2011 à M. Y... et à Mme A..., leur a délivré un congé à fin de reprise pour habiter à effet au 24 juin 2014 ;

Sur la recevabilité du pourvoi de Mme A..., contestée par la défense :

Attendu que M. L... soutient que le pourvoi formé le 7 août 2018 par Mme A... est irrecevable comme tardif ;

Mais attendu que, la décision de rejet du bureau d'aide juridictionnelle ayant été notifiée à Mme A... par une lettre recommandée qui a été retournée le 4 juin 2018 avec la mention « destinataire inconnu à l'adresse » et qui n'a pas donc pas été remise à son destinataire, le délai de pourvoi en cassation n'a pas commencé à courir à son égard ;

D'où il suit que le pourvoi est recevable ;

Sur le premier moyen, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :

Attendu que M. Y... et Mme A... font grief à l'arrêt de déclarer ce congé valable, alors, selon le moyen :

1°/ que, d'une part, la loi nouvelle régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées ; que les dispositions de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 tel que modifié par l'article 5-5°-b de la loi du 24 mars 2014 dite ALUR étaient applicables au congé délivré aux preneurs le 19 décembre 2013 pour le 24 juin 2014 ; qu'en décidant le contraire quand elle constatait que le congé n'avait pas produit ses effets légaux à la date d'entrée en vigueur de la loi nouvelle, la cour d'appel a violé les articles 2 du code civil, ensemble l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014 ;

2°/ que, d'autre part, le dispositif transitoire prévu au II de l'article 82 de la loi du 6 août 2015 n'est applicable à l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 que dans sa rédaction issue de la loi nouvelle ; que, pour exclure l'application au congé donné aux exposants pour le 24 juin 2014 de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa rédaction issue de la loi ALUR du 24 mars 2014, l'arrêt attaqué a retenu que cette disposition s'appliquait, selon l'article 82-II de la loi du 6 août 2015, aux seuls contrats en cours au 7 août 2015 ; qu'en statuant ainsi quand le dispositif transitoire de l'article 82-II ne concerne que l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version issue de la loi du 6 août 2015, la cour d'appel a violé l'article 82-II de la loi du 6 août 2015 ;

Mais attendu que, la loi n'ayant point d'effet rétroactif, l'article 15, I de la loi du 6 juillet 1989, dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014, n'est pas applicable à un congé délivré avant son entrée en vigueur ; que la cour d'appel a constaté que le congé à fin de reprise avait été délivré le 19 décembre 2013 ; qu'il en résulte que le texte précité n'était pas applicable ; que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Collomp - Avocat général : Mme Valdès-Boulouque (premier avocat général) - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Colin-Stoclet -

Textes visés :

Article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014.

Rapprochement(s) :

Sur l'application dans le temps des dispositions de l'article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 modifié par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, à rapprocher : 3e Civ., 23 novembre 2017, pourvoi n° 16-20.475, Bull. 2017, III, n° 125 (rejet), et l'arrêt cité.

3e Civ., 12 décembre 2019, n° 18-13.476, (P)

Cassation

Bail soumis à la loi du 6 juillet 1989 – Transfert – Bénéficiaires – Détermination

Le travailleur handicapé au sens de l'article L. 5213-1 du code du travail bénéficie de l'exception prévue à l'article 40, I, alinéa 2, de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 en faveur des personnes présentant un handicap au sens de l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles.

Bail soumis à la loi du 6 juillet 1989 – Transfert – Bénéficiaires – Travailleurs handicapés au sens de l'article L. 5213-1 du code du travail

Sur le moyen unique :

Vu l'article 40, I, alinéa 2, de la loi du 6 juillet 1989 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 7 mars 2017), que la société Immobilière 3F, qui avait loué un appartement à W... U..., décédée le [...], a assigné M. G..., son fils, en expulsion comme étant occupant sans droit ni titre ;

Attendu que, pour accueillir la demande, l'arrêt retient que la notion de personne handicapée, au sens de l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles, coexiste avec celle de travailleur handicapé, telle que définie à l'article L. 5213-1 du code du travail, mais ne se confond pas avec elle, que seules les personnes présentant un handicap au sens de l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles bénéficient de l'exception prévue à l'article 40 de la loi du 6 juillet 1989 et que le fait que la qualité de travailleur handicapé ait été reconnue à M. G... ne le dispensait donc pas de remplir la condition de taille du ménage requise pour lui permettre de bénéficier du transfert du bail ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le travailleur handicapé au sens de l'article L. 5213-1 du code du travail bénéficie de l'exception prévue à l'article 40, I, alinéa 2, de la loi du 6 juillet 1989 en faveur des personnes présentant un handicap au sens de l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Schmitt - Avocat général : M. Sturlèse - Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier ; SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Article L. 5213-1 du code du travail ; article 40, I, alinéa 2, de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ; article L. 114 du code de l'action sociale et des familles.

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