Numéro 12 - Décembre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 12 - Décembre 2018

PROCEDURE CIVILE

2e Civ., 6 décembre 2018, n° 17-26.852, (P)

Cassation

Notification – Signification – Signification à personne – Personne morale – Copie de l'acte de signification – Mention de l'habilitation – Nécessité

Doit être censurée la cour d'appel qui a retenu qu'un acte destiné à une personne morale avait été remis à personne habilitée à le recevoir alors que la copie signifiée d'un acte d'huissier de justice tient lieu d'original pour la partie à laquelle elle a été remise ou adressée et qu'il n'y était pas mentionné que la personne ayant accepté l'acte était habilitée à cette fin mais que la remise avait été faite à personne présente au domicile.

Notification – Signification – Acte d'huissier de justice – Copie signifiée – Portée – Qualité d'original

Sur le moyen unique :

Vu l'article 654, alinéa 2, du code de procédure civile ;

Attendu, selon ce texte, que la signification à une personne morale est faite à personne lorsque l'acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute autre personne habilitée à cet effet ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la SCI Rony a fait assigner le syndicat des copropriétaires du [...] et [...] (le syndicat des copropriétaires) devant un tribunal de grande instance pour voir déclarer une clause d'un règlement de copropriété non écrite ; que la SCI Rony a interjeté appel de la décision rejetant sa demande et a fait assigner le syndicat des copropriétaires devant une cour d'appel ; que celui-ci n'a pas comparu ; que la cour d'appel a infirmé le jugement et déclaré inopposable à la SCI Rony la clause du règlement de copropriété ; que le syndicat des copropriétaires a formé opposition contre ladite décision ;

Attendu que, pour déclarer l'opposition irrecevable, l'arrêt, après avoir constaté que l'original de l'acte de signification de l'assignation mentionne que la déclaration d'appel a été remise à personne habilitée tandis que la copie remise mentionne que l'acte a été remis à personne présente au domicile, retient que la circonstance qu'il ne soit pas fait mention de cette précision relative à son acceptation n'emporte pas modification de la qualification de la signification de la déclaration d'appel en ce qu'il apparaît qu'il s'agit de la même personne, que l'huissier de justice mentionne dans la minute qu'elle s'est déclarée habilitée à recevoir l'acte, qu'il n'est pas contesté qu'elle est habilitée à le faire et que les mentions de l'acte de signification relatives aux diligences effectuées par l'huissier de justice font foi jusqu'à inscription de faux ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la copie signifiée d'un acte d'huissier de justice tient lieu d'original pour la partie à laquelle elle a été remise ou adressée et qu'il n'y était pas mentionné que la personne ayant accepté l'acte était habilitée à cette fin mais que la remise avait été faite à personne présente au domicile, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 juin 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Dumas - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano ; Me Bouthors -

Textes visés :

Article 654, alinéa 2, du code de procédure civile.

Soc., 19 décembre 2018, n° 18-60.067, (P)

Cassation

Ordonnance sur requête – Requête – Contenu – Mentions obligatoires – Diligences entreprises en vue d'une résolution amiable du litige – Exclusion – Cas – Matière d'ordre public

Sur le moyen unique qui est recevable :

Vu l'article 58 du code de procédure civile ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public, la requête ou la déclaration qui saisit la juridiction de première instance précise les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que par requête du 16 octobre 2017, l'Union des syndicats anti-précarité (l'USAP) a saisi le tribunal d'instance, notamment en annulation du protocole d'accord préélectoral conclu le 28 août 2017 et des élections des membres du comité d'établissement, délégués du personnel et membres du conseil de discipline de la société Transports du Val d'Oise ;

Attendu que pour déclarer cette requête irrecevable, le tribunal retient que l'USAP ne mentionne pas les diligences accomplies en vue de parvenir à une résolution amiable du litige et ne justifie pas davantage d'un motif légitime la dispensant de l'accomplissement de ces diligences ;

Attendu cependant que l'employeur et les organisations syndicales ne peuvent conclure un accord pour se faire juge de la validité des élections professionnelles, matière intéressant l'ordre public ;

Qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal d'instance a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 11 janvier 2018, entre les parties, par le tribunal d'instance de Sannois ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Montmorency.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Chamley-Coulet - Avocat général : M. Weissmann - Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer -

Textes visés :

Article 58 du code de procédure civile.

1re Civ., 12 décembre 2018, n° 17-19.387, (P)

Irrecevabilité et cassation partielle

Parties – Représentation – Mandat – Justification – Domaine d'application – Exclusion – Cas – Tiers qu'une personne a mandaté aux fins de donner mandat de représentation à un avocat

La justification du mandat de représentation en justice prévu à l'article 416 du code de procédure civile s'impose à celui qui entend représenter ou assister une partie, et non au tiers qu'une personne a mandaté aux fins de donner un tel mandat à un avocat.

Donne acte à M. K..., à Mme A... et à M. B... et Mme B... du désistement de leur pourvoi ;

Constate qu'à la suite du décès de Gérard C... et d'André D..., l'instance a été reprise par les demandeurs au pourvoi principal contre Mme Catherine C... et M. Pascal C..., et contre Mme Claude E..., veuve D... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'Association française d'épargne et de retraite (l'AFER), constituée par Gérard C... et André D..., ayant notamment pour objet de négocier et de souscrire pour le compte de ses adhérents des contrats d'assurance de groupe, a conclu avec la société Abeille vie, aux droits de laquelle se trouvent les sociétés Aviva vie et Aviva épargne retraite, un contrat collectif d'assurance sur la vie réservé à ses adhérents ; qu'à la suite de la révélation d'agissements illicites attribués à Gérard C... et André D..., ainsi qu'à M. F..., dirigeant de la société Abeille vie, lesquels ont fait l'objet de poursuites pénales ayant entraîné condamnation, M. G... et deux cent douze autres personnes ont assigné la société Aviva vie en réparation de leurs préjudices ;

Sur la recevabilité du pourvoi incident formé par la société Aviva vie et du pourvoi provoqué formé par M. F..., contestée par la défense :

Vu les articles 606, 607 et 608 du code de procédure civile ;

Attendu que, sauf dans les cas spécifiés par la loi, les jugements en dernier ressort qui ne mettent pas fin à l'instance ne peuvent être frappés de pourvoi en cassation, indépendamment du jugement sur le fond, que s'ils tranchent dans leur dispositif tout ou partie du principal ;

Attendu que, statuant sur appel d'une ordonnance du juge de la mise en état, l'arrêt dit n'y avoir lieu à annulation de l'assignation délivrée par Mme H... et par Mme I..., cette dernière agissant à titre personnel et en qualité d'ayant droit de son époux, non plus que des interventions volontaires des ayants droit de Michel J... et de Bernard N..., ni de celle du représentant de M. L... ;

Attendu que le pourvoi incident formé par la société Aviva vie et le pourvoi provoqué formé par M. F... sont dirigés contre l'arrêt qui, en ce qu'il dit n'y avoir lieu à annulation, d'une part, de l'assignation délivrée par Mme H... et par Mme I..., cette dernière agissant à titre personnel et en qualité d'ayant droit de son époux, d'autre part, des interventions volontaires des ayants droit de Michel J... et de Bernard N... et de celle du représentant de M. L..., ne tranche pas une partie du principal et ne met pas fin à l'instance ; que, dès lors, ils ne sont pas recevables ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :

Vu l'article 416 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour déclarer nulle l'assignation délivrée au nom de Mme X... et de plusieurs autres demandeurs à l'action, l'arrêt retient que, pour nombre de personnes, le conseil des demandeurs n'a pas été mandaté directement par la partie au nom de laquelle il a délivré l'assignation, mais détient son mandat d'un tiers qui aurait été lui-même mandaté par la partie qu'il représente ; qu'il ajoute que, si l'avocat bénéficie de la présomption de mandat ad litem prévue à l'article 416 du code de procédure civile, il n'en est pas de même de l'association SOS Principes AFER et des cabinets de courtage qui doivent justifier d'un mandat spécial et précis pour pouvoir mandater un avocat au nom de chacun de leurs adhérents, pour la première, et de chacun de leurs clients, pour les seconds ; qu'il relève que les attestations produites ne sont pas suffisantes pour établir l'existence d'un mandat qui doit nécessairement être spécial et écrit, qu'il n'est justifié d'aucun des mandats qui auraient été donnés aux tiers qui ont saisi l'avocat des demandeurs et qu'il est établi que, pour les personnes qui ne l'ont pas mandaté directement ou par l'intermédiaire de leur propre avocat, celui-ci ne dispose pas de mandat régulier ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la justification du mandat de représentation en justice prévu à l'article 416 du code de procédure civile s'impose à celui qui entend représenter ou assister une partie, et non au tiers qu'une personne a mandaté aux fins de donner un tel mandat à un avocat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen du pourvoi principal :

DÉCLARE IRRECEVABLES le pourvoi incident de la société Aviva vie et le pourvoi provoqué de M. F... ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare nulle l'assignation délivrée au nom de Mme X... et des cent soixante trois autres demandeurs au pourvoi maintenus dans l'instance, l'arrêt rendu le 2 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : M. Truchot - Avocat général : M. Chaumont - Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer ; SCP Foussard et Froger ; SCP Marlange et de La Burgade ; SCP Ohl et Vexliard -

Textes visés :

Article 416 du code de procédure civile.

2e Civ., 6 décembre 2018, n° 17-17.557, (P)

Cassation partielle

Pièces – Communication – Communication en temps utile – Production la veille de l'ordonnance de clôture – Pièces écartées par le juge – Pièces visées par des conclusions déclarées recevables – Absence d'influence

Une cour d'appel qui retient souverainement que des pièces produites la veille de l'ordonnance de clôture n'ont pas été communiquées en temps utile en déduit exactement que ces pièces doivent être écartées des débats, quand bien même les dernières conclusions qui les visent ont été déclarées recevables.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant relevé appel d'une ordonnance de référé constatant la résiliation du bail commercial d'un local appartenant à la société civile immobilière Immobilia (la SCI), faute pour elle de s'être libérée des causes d'un commandement visant la clause résolutoire du bail, la société Les trois étoiles a déposé le 26 décembre 2016 de nouvelles conclusions accompagnées de nouvelles pièces ; que la clôture a été prononcée le 27 décembre 2016 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Les trois étoiles fait grief à l'arrêt d'écarter les pièces n° 12 à 17 qu'elle a produites la veille de l'ordonnance de clôture, de constater la résiliation du contrat de bail liant les parties, d'ordonner son expulsion et de la condamner à verser à la SCI la somme de 5 773,87 euros alors, selon le moyen :

1°/ que le juge, qui se prononce sur la recevabilité de conclusions signifiées avant le prononcé de l'ordonnance de clôture, ne peut écarter des débats les pièces qui y sont jointes ; que la cour d'appel ne pouvait écarter les pièces produites au soutien de conclusions recevables, comme déposées avant l'ordonnance de clôture, sans violer les articles 15 et 16 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en s'abstenant de préciser les circonstances particulières qui, si elle avait déclaré recevables les pièces nouvellement communiquées, auraient concrètement empêché que le respect du principe de la contradiction soit assuré, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 15 et 16 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant souverainement retenu que la société Les trois étoiles n'avait pu valablement s'expliquer sur les dernières pièces produites la veille de l'ordonnance de clôture, ce dont il résultait qu'elles n'avaient pas été communiquées en temps utile, la cour d'appel en a exactement déduit que ces pièces devaient être écartées des débats, quand bien même les dernières conclusions déposées par la société avaient été déclarées recevables ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche : Publication sans intérêt ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit l'appel recevable, dit recevables les conclusions transmises par la société Les trois étoiles, et écarte les dernières pièces n° 12 à 17 produites par l'appelante la veille de la clôture, l'arrêt rendu le 2 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sauf sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. Sommer - Avocat général : Mme Vassallo - Avocat(s) : SCP Zribi et Texier ; Me Brouchot -

Textes visés :

Articles 15, 16 et 135 du code de procédure.

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