Numéro 11 - Novembre 2021

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2021

SECURITE SOCIALE, ALLOCATIONS DIVERSES

2e Civ., 25 novembre 2021, n° 20-14.237, (B)

Cassation partielle

Allocation aux adultes handicapés – Conditions – Résidence sur le territoire métropolitain ou assimilé – Défaut – Force majeure – Absence d'influence

Selon l'article L. 821-1, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, applicable au litige, toute personne résidant sur le territoire métropolitain ou dans les départements mentionnés à l'article L. 751-1 du même code ou à Saint-Pierre-et-Miquelon ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé et dont l'incapacité permanente est au moins égale à un pourcentage fixé par décret perçoit, dans les conditions prévues au titre II du livre VIII du code de la sécurité sociale, une allocation aux adultes handicapés.

Selon l'article R. 821-1, alinéa 2, du même code, dans sa rédaction résultant du décret n° 2005-724 du 29 juin 2005, est considérée comme résidant sur le territoire métropolitain ou dans les départements mentionnés à l'article L. 751-1 ou à Saint-Pierre-et- Miquelon la personne handicapée qui y réside de façon permanente. Est également réputée y résider la personne handicapée qui accomplit hors de ces territoires :

- soit un ou plusieurs séjours dont la durée n'excède pas trois mois au cours de l'année civile. En cas de séjour de plus de trois mois hors de ces territoires, soit de date à date, soit sur une année civile, l'allocation aux adultes handicapés n'est versée, dans les conditions précisées à l'article L. 552-1, que pour les seuls mois civils complets de présence sur ces territoires ;

- soit un séjour de plus longue durée lorsqu'il est justifié, dans les conditions prévues à l'article R. 512-1, 2°, que le séjour est nécessaire pour lui permettre soit de poursuivre ses études, soit d'apprendre une langue étrangère, soit de parfaire sa formation professionnelle.

Viole ces textes l'arrêt qui, pour annuler la réclamation d'un indu au titre de l'allocation aux adultes handicapés formée par une caisse d'allocations familiales à l'encontre d'un allocataire, retient que ce dernier, qui a séjourné en Thaïlande plus de trois mois, justifie d'un cas de force majeure résultant de ce qu'il a dû y prolonger son séjour en raison d'une hospitalisation, alors que la force majeure ne peut, sauf dérogation expresse, suppléer l'absence des conditions d'ouverture du droit.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 janvier 2020), ayant été informée par une caisse primaire d'assurance maladie que M. [U] (l'allocataire), bénéficiaire de l'allocation aux adultes handicapés et de l'allocation de logement, avait demandé le remboursement de soins médicaux engagés au cours d'un séjour en Thaïlande du 14 janvier au 24 juin 2014, la caisse d'allocations familiales des Alpes-Maritimes (la caisse) a réclamé à l'allocataire le remboursement de deux indus, l'un au titre de l'allocation aux adultes handicapés, l'autre au titre de l'allocation de logement, versées au cours de cette période.

2. L'allocataire a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le second moyen, pris en ses trois branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La caisse fait grief à l'arrêt d'annuler l'indu au titre de l'allocation aux adultes handicapés, alors :

« 1°/ que nul texte n'envisage, pour le service de l'allocation adulte handicapé, que la force majeure déroge à la condition de résidence ; qu'en affirmant, au visa erroné de l'article R. 821-1 du code de la sécurité sociale, et en se référant en réalité à la lettre de l'article R. 831-1 de ce même code, texte afférent à la seule allocation logement, que la caisse n'était pas en droit de réclamer répétition de l'allocation adulte handicapé servie par cela seul que le séjour prolongé de l'allocataire en Thaïlande procéderait d'un cas de force majeure, la cour d'appel a violé les articles L. 821-1 et R. 821-1 du code de la sécurité sociale par refus d'application et R. 831-1 du même code applicable à l'espèce avant son abrogation par l'ordonnance n° 2019-770 du 17 juillet 2019 par fausse application. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 821-1 et R. 821-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction résultant, pour le premier, de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 et pour le second, du décret n° 2005-724 du 29 juin 2005, applicables au litige :

5. Selon le premier de ces textes, toute personne résidant sur le territoire métropolitain ou dans les départements mentionnés à l'article L. 751-1 du même code ou à Saint-Pierre-et-Miquelon ayant dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé et dont l'incapacité permanente est au moins égale à un pourcentage fixé par décret perçoit, dans les conditions prévues au titre II du livre VIII du code de la sécurité sociale, une allocation aux adultes handicapés.

6. Selon le second de ces textes, est considérée comme résidant sur le territoire métropolitain ou dans les départements mentionnés à l'article L. 751-1 ou à Saint-Pierre-et- Miquelon la personne handicapée qui y réside de façon permanente.

Est également réputée y résider la personne handicapée qui accomplit hors de ces territoires :

 - soit un ou plusieurs séjours dont la durée n'excède pas trois mois au cours de l'année civile.

En cas de séjour de plus de trois mois hors de ces territoires, soit de date à date, soit sur une année civile, l'allocation aux adultes handicapés n'est versée, dans les conditions précisées à l'article L. 552-1, que pour les seuls mois civils complets de présence sur ces territoires ;

 - soit un séjour de plus longue durée lorsqu'il est justifié, dans les conditions prévues au 2° de l'article R. 512-1, que le séjour est nécessaire pour lui permettre soit de poursuivre ses études, soit d'apprendre une langue étrangère, soit de parfaire sa formation professionnelle.

7. Pour accueillir le recours de l'allocataire au titre de l'indu d'allocation aux adultes handicapés, l'arrêt relève qu'en application de la circulaire DGAS/1C n° 2005-411 du 7 septembre 2005, cette allocation est maintenue en cas d'hospitalisation à l'étranger à condition que la personne en situation de handicap justifie d'un accord de prise en charge d'un organisme français de sécurité sociale et justifie d'une résidence antérieure en France. Il énonce que la condition de résidence en France de l'allocataire n'était pas discutée avant son départ en Thaïlande en janvier 2014 et que les pièces produites établissent sa résidence au [Adresse 3]. Il ajoute qu'il est justifié par une attestation du directeur de Mutuaid assistance que l'allocataire a été pris en charge en Thaïlande du 12 mars 2014 au 15 mai 2014 pour des fractures avec chirurgie sur place, liées à un accident de la route, et que l'allocataire justifie avoir demandé une extension de visa en raison de son hospitalisation sur place. Il en déduit qu'il est ainsi justifié d'un cas de force majeure à l'origine du séjour prolongé de l'allocataire en Thaïlande en sorte que la caisse n'était pas en droit de lui réclamer un indu.

8. En statuant ainsi, alors que la force majeure ne peut, sauf dérogation expresse, suppléer l'absence des conditions d'ouverture du droit, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il annule la notification à M. [U] de l'indu d'allocation de logement référencé IN 4 001 d'un montant de 1 623,78 euros pour la période de janvier à juin 2014, l'arrêt rendu le 10 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Renault-Malignac - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; Me Soltner -

Textes visés :

Articles L. 821-1 et R. 821-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction résultant, pour le premier, de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 et pour le second, du décret n° 2005-724 du 29 juin 2005.

Rapprochement(s) :

Sur le fait que la force majeure ne peut, sauf dérogation expresse, suppléer l'absence des conditions d'ouverture du droit, à rapprocher : Soc., 28 mai 1986, pourvoi n° 84-14.260, Bull. 1986, V, n° 257 (cassation) ; 2e Civ., 10 novembre 2009, pourvoi n° 08-19.510, Bull. 2009, II, n° 265 (cassation sans renvoi).

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.