Numéro 11 - Novembre 2021

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2021

POUVOIRS DES JUGES

2e Civ., 10 novembre 2021, n° 19-24.696, (B) (R)

Rejet

Appréciation souveraine – Accident de la circulation – Protocole assureurs-organismes sociaux – Domaine d'application – Véhicules soumis à l'obligation d'assurance

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 6 mai 2019), [Y] [B], salarié de la société de transport Michel, a été victime, le 7 mai 2007, d'un accident mortel alors qu'il participait, sur le site exploité par la société Saint-Gobain [Localité 6] (Saint-Gobain PAM), au chargement de tuyaux en fonte d'un poids de huit tonnes chacun et qu'il se trouvait entre deux camions stationnés en parallèle lorsque le tuyau, que le cariste soulevait, a roulé sur les fourches de son engin de levage et l'a heurté en tombant.

2. La société Saint-Gobain PAM a été déclarée coupable du délit d'homicide involontaire pour ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour faire respecter par les chauffeurs des camions assurant le transport des tuyaux les mesures de sécurité en vigueur dans l'entreprise.

3. La caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle (la caisse) a assigné la société Saint-Gobain PAM et ses assureurs de responsabilité, les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, sur le fondement des articles L. 454-1 et D. 454-1 du code de la sécurité sociale, aux fins de condamnation solidaire à lui payer le montant des débours exposés par elle à l'occasion de l'accident et des indemnités de frais de gestion.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. La caisse fait grief à l'arrêt, infirmant le jugement, de dire que le protocole d'accord conclu entre assureurs et organismes sociaux doit trouver à s'appliquer en l'espèce et de la débouter de son recours exercé contre la société Saint-Gobain PAM et ses assureurs selon les règles du droit commun, alors « que le protocole d'accord du 14 mai 1983 conclu entre les organismes sociaux et les entreprises d'assurances, faisant obstacle à ce que la caisse exerce son recours selon les règles du droit commun, ne s'applique qu'en présence d'un accident de la circulation au sens de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ; que n'est pas un accident de la circulation au sens de ce texte, l'accident impliquant un élément d'équipement d'un véhicule terrestre à moteur étranger à sa fonction de circulation ; qu'en retenant toutefois qu'il n'y avait pas lieu de vérifier si, au moment de l'accident, le chariot élévateur circulait ou était à l'arrêt et utilisé comme machine outil, les juges du fond ont violé les articles L. 454-1 et D. 454-1 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et L. 211-1 et R. 221-5 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

5. Le protocole d'accord assureurs-organismes sociaux conclu le 24 mai 1983 est relatif au recouvrement des créances des organismes de protection sociale auprès des entreprises d'assurances à la suite d'accidents causés par des véhicules terrestres à moteur et par des bicyclettes.

6. Son règlement d'application pratique et ses annexes, en leur version applicable au litige, prévoient qu'il s'applique aux accidents survenus à compter du 6 avril 2000 et « occasionnés par des véhicules soumis à l'obligation d'assurance (articles L. 211-1 et suivants, R. 211-1 et suivants du code des assurances), ainsi que par des bicyclettes, même lorsqu'elles sont tenues à la main ».

7. Le protocole d'accord assureurs-organismes sociaux conclu le 24 mai 1983 est relatif au recouvrement des créances des organismes de protection sociale auprès des entreprises d'assurances à la suite d'accidents causés par des véhicules terrestres à moteur et par des bicyclettes.

8. C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel a décidé que l'accord liant les parties s'appliquait aux accidents causés par des véhicules terrestres à moteur soumis à l'obligation d'assurance.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Et sur le second moyen

10. La caisse fait grief à l'arrêt de dire que le protocole conclu entre assureurs et organismes sociaux doit trouver à s'appliquer en l'espèce et de la débouter de son recours exercé contre la société Saint-Gobain PAM selon les règles du droit commun, alors « que le protocole d'accord du 14 mai 1983 conclu entre les organismes sociaux et les entreprises d'assurances, faisant obstacle à ce que la caisse exerce son recours selon les règles du droit commun, n'a vocation qu'à régir les relations entre la caisse et les assureurs de l'auteur de l'accident ; qu'en déboutant la caisse de son recours en tant qu'il était dirigé contre la société Saint-Gobain [Localité 6], auteur de l'accident, motif pris de l'applicabilité du protocole, les juges du fond ont violé les articles L. 454-1 et D. 454-1 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

11. Les sociétés Saint-Gobain PAM, MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles contestent la recevabilité du moyen. Elles soutiennent que le moyen, mélangé de fait et de droit, est nouveau.

12. Cependant, le moyen qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond, est de pur droit.

13. Le moyen est, dès lors, recevable.

Bien-fondé du moyen

14. Le tiers à un contrat peut invoquer à son profit, comme constituant un fait juridique, la situation créée par ce contrat.

15. C'est, par suite, sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, pour statuer sur la demande de la caisse dirigée contre le tiers responsable, a pris en compte le protocole litigieux, lequel constituait un fait juridique pouvant être invoqué à son profit par ce tiers.

16. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Bouvier - Avocat général : M. Grignon Dumoulin - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger ; Me Le Prado -

Textes visés :

Articles L. 211-1 et suivants, R. 211-1 et suivants du code des assurances ; protocole assureurs-organismes sociaux du 24 mai 1983, relatif au recouvrement des créances des organismes de protection sociale auprès des entreprises d'assurances.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 5 octobre 2006, pourvoi n° 04-11.581, Bull. 2006, II, n° 251 (cassation sans renvoi).

1re Civ., 24 novembre 2021, n° 20-15.789, (B)

Rejet

Appréciation souveraine – Référé – Mesures conservatoires ou de remise en état – Trouble manifestement illicite – Existence

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 février 2020), la société Cooperl arc Atlantique, coopérative agricole spécialisée dans l'achat, l'abattage et la découpe de porc, et sa filiale, la société Brocéliande-ALH, qui fabrique de la charcuterie, sont en relations d'affaires depuis 2011 avec la société Mix'buffet, qui prépare et vend des produits alimentaires.

2. Invoquant l'augmentation du cours du porc, la société Cooperl arc Atlantique a, courant juin 2019, proposé une hausse du prix de ses produits à la société Mix'buffet.

Les négociations n'ayant pas abouti, la société Cooperl arc Atlantique a, le 4 juillet 2019, notifié à la société Mix'buffet la cessation de leurs relations commerciales à compter du 3 juillet 2019 concernant deux produits.

3. Le 8 juillet 2019, la société Mix'buffet a assigné les sociétés Cooperl arc Atlantique et Brocéliande-ALH devant le juge des référés d'un tribunal de commerce aux fins de voir constater la rupture brutale des relations commerciales et ordonner leur poursuite pour une durée de douze mois avec obligation de renégocier de bonne foi les prix.

Les sociétés Cooperl arc Atlantique et Brocéliande-ALH ont opposé l'incompétence du juge des référés du tribunal de commerce au profit du juge des référés du tribunal de grande instance et, en l'absence de médiation préalable, l'irrecevabilité des demandes de la société Mix'buffet.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Les sociétés Cooperl arc Atlantique et Brocéliande-ALH font grief à l'arrêt de rejeter leur exception d'incompétence, alors « que selon l'article L. 521-1 du code rural, les sociétés coopératives agricoles ont pour objet l'utilisation en commun par des agriculteurs de tous moyens propres à faciliter ou à développer leur activité économique, à améliorer ou à accroître les résultats de cette activité et que selon l'article L. 521-5 du même code, ces sociétés et leurs unions relèvent de la compétence des juridictions civiles, ce dont il ressort que les sociétés coopératives ont un objet non commercial les faisant échapper à la compétence des tribunaux de commerce, même si elles accomplissent des actes tels que des achats pour revendre, réputés actes de commerce, dès lors que ceux-ci sont effectués au profit des agriculteurs coopérateurs ; qu'en décidant néanmoins, pour retenir la compétence du juge des référés du tribunal de commerce de Rennes, que les tribunaux de commerce étaient compétent pour trancher les contestations relatives aux actes de commerce, tels que définis à l'article 632 ancien du code de commerce, que les sociétés coopératives ou leurs unions peuvent accomplir avec des tiers, bien qu'il ait été constant que la coopérative, en sa qualité de société coopérative agricole, achetait, au profit de ses agriculteurs coopérateurs, leurs produits pour les revendre à la société Mix'buffet, par l'intermédiaire de la société Brocéliande-ALH, ce dont il résultait que le tribunal de commerce de Rennes n'était pas compétent pour statuer sur le litige qui l'opposait à la société Mix'buffet, la cour d'appel a violé les articles L. 521-1 et L. 521-5 du code rural et de la pêche maritime. »

Réponse de la Cour

5. Dès lors que la cour d'appel, saisie par l'effet dévolutif, était juridiction d'appel tant du tribunal de grande instance que du tribunal de commerce, les sociétés Cooperl arc Atlantique et Brocéliande-ALH sont sans intérêt à reprocher à l'arrêt de confirmer la compétence du juge des référés de ce tribunal.

6. Le moyen est donc irrecevable.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

7. Les sociétés Cooperl arc Atlantique et Brocéliande-ALH font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à voir déclarer irrecevables les demandes formées à leur encontre par la société Mix'buffet, alors « que tout litige entre professionnels relatif à l'exécution d'un contrat ayant pour objet la vente de produits agricoles ou alimentaires doit, préalablement à toute saisine du juge et à peine d'irrecevabilité, faire l'objet d'une procédure de médiation par le médiateur des relations commerciales agricoles, sauf si le contrat prévoit un autre dispositif de médiation ou en cas de recours à l'arbitrage ; qu'en cas d'échec de la médiation menée par le médiateur des relations commerciales, toute partie au litige peut saisir le président du tribunal compétent pour qu'il statue sur le litige en la forme des référés sur la base des recommandations du médiateur des relations commerciales agricoles ; que cette exigence s'impose également dans le cadre d'une procédure de référé engagée en raison de l'urgence ; qu'en décidant néanmoins que la disposition prescrivant le recours à une médiation préalable ne prive pas le juge des référés du pouvoir de prendre toute mesure propre à faire cesser un trouble manifestement illicite si l'urgence justifie de passer outre le processus de procédure amiable, bien que l'urgence n'ait pas autorisé la société Mix'buffet à s'affranchir de l'obligation légale de soumettre le litige à la médiation du médiateur des relations commerciales agricoles, dès lors qu'il portait sur la vente de produits alimentaires, la cour d'appel a violé l'article L. 631-28 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2019-738 du 17 juillet 2019, ensemble l'article 873 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

8. En cas de trouble manifestement illicite ou de dommage imminent, les dispositions de l'article L. 631-28 du code rural et de la pêche maritime instituant une procédure de médiation obligatoire et préalable ne font pas obstacle à la saisine du juge des référés.

9. C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a retenu que ces dispositions ne privaient pas la société Mix'buffet de la faculté de saisir le juge des référés sur le fondement de l'article 873, alinéa 1er, du code de procédure civile.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

11. La société Brocéliande-ALH fait grief à l'arrêt de lui ordonner sous astreinte de continuer à livrer à la société Mix'buffet, de juillet à octobre 2019, au prix accepté par celle-ci s'agissant de deux catégories de jambon, l'ensemble des produits actuellement commercialisés entre elles, et ce dans des volumes conformes au niveau des mêmes mois de l'année précédente, alors :

« 1°/ que dans leurs conclusions d'appel, les sociétés Cooperl arc Atlantique et Brocéliande-ALH faisaient valoir qu'il ne résultait d'aucune pièce du dossier qu'elles auraient été le fournisseur exclusif de la société Mix'buffet en jambon ; qu'en affirmant néanmoins, pour retenir que les conditions de la rupture de la relation commerciale établie étaient constitutives d'un trouble manifestement illicite et de nature à causer un dommage imminent à la société Mix'buffet, qu'il n'était pas discuté que la société Cooperl arc Atlantique était son fournisseur exclusif en jambon, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de leurs conclusions d'appel, en violation de l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

2°/ que le juge des référés ne peut, sans excéder ses pouvoirs, imposer à l'auteur d'une rupture brutale de relations commerciales établies la poursuite de la relation commerciale en lui imposant un prix de vente de ses marchandises, si les parties n'étaient pas convenues, avant la rupture, de l'application d'un prix déterminé pendant une certaine durée ; qu'en imposant néanmoins, comme mesure conservatoire, la poursuite des relations commerciales en enjoignant à la société Brocéliande-ALH de céder ses marchandises aux prix unilatéralement fixés par la société Mix'buffet et que la société Brocéliande-ALH avait refusés lors des négociations, comme étant insuffisants, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs au regard de l'article 873 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 442-1 et L. 442-4 du code de commerce ;

3°/ que le bordereau de pièces annexé aux conclusions d'appel des sociétés Cooperl arc Atlantique et Brocéliande-ALH mentionne, en pièce n° 37, une « Attestation du Commissaire aux Comptes du 22 novembre 2019 relative aux marges brutes négatives réalisées sur la période de juillet à octobre 2019 » ; qu'en affirmant néanmoins, pour imposer à la société Brocéliande-ALH les prix de vente acceptés par la société Mix'buffet pendant les négociations tandis qu'elle les avait refusés, que les sociétés Cooperl arc Atlantique et Brocéliande-ALH se bornant à produire des documents internes, il n'était pas démontré que ces prix auraient eu pour effet d'imposer au fournisseur une marge commerciale négative, la cour d'appel a dénaturé ce bordereau de pièces, en violation de l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

4°/ qu'en se se bornant à énoncer, pour imposer à la société Brocéliande-ALH les prix de ventes acceptés par la société Mix'buffet pendant les négociations tandis qu'elle les avait refusés, qu'il n'était pas démontré que ces prix auraient eu pour effet d'imposer au fournisseur une marge commerciale négative, dès lors que les sociétés Cooperl arc Atlantique et Brocéliande-ALH se bornaient à produire des documents internes, sans rechercher, comme elle y été invitée, si cette marge brute négative était confirmée par l'attestation établie le 22 novembre 2019 par la société Rouxel Tanguy & associés - Actheos, commissaire aux comptes, laquelle avait procédé aux vérifications et rapprochements nécessaires au calcul de la perte de marge et du montant des pertes en résultant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 873 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 442-1 et L. 442-4 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

12. Après avoir constaté qu'une relation commerciale existait entre les parties depuis 2011, la cour d'appel a relevé, par motifs propres et adoptés, qu'aucun préavis de rupture n'avait été adressé à la société Mix'buffet et qu'une telle précipitation avait causé de graves problèmes d'approvisionnement à cette société qui avait été brusquement privée d'un fournisseur stratégique pendant une période de forte activité, ce dont elle a pu déduire que cette rupture était constitutive d'un trouble manifestement illicite.

13. Elle a ainsi légalement justifié sa décision d'ordonner, afin de faire cesser le trouble constaté, le rétablissement de juillet à octobre 2019 des relations commerciales au prix majoré que la société Mix'buffet avait accepté lors des négociations ayant précédé la rupture, sans excéder ses pouvoirs ni être tenue de procéder à une recherche que la nécessité d'un tel rétablissement rendait inutile.

14. Le moyen, inopérant en ses première et troisième branches qui critiquent des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : M. Vitse - Avocat général : M. Lavigne - Avocat(s) : SCP Richard ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Article L. 631-28 du code rural et de la pêche maritime ; article 873, alinéa 1, du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

Sur les mesures pouvant être ordonnées par le juge : 1re Civ., 7 novembre 2000, pourvoi n° 99-18.576, Bull. 2000, I, n° 286 (cassation).

2e Civ., 10 novembre 2021, n° 19-26.183, (B)

Rejet

Premier président – Avocat – Honoraires – Contestation – Convention d'honoraires – Réduction – Condition

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance rendue par le premier président d'une cour d'appel (Nîmes, 24 octobre 2019), M. [N], avocat, a reçu mandat de Mme [Y], selon convention d'honoraires signée le 7 octobre 2016, aux fins d'assurer la défense de ses intérêts devant la commission arbitrale des journalistes de Paris, dans une instance l'opposant à la société Midi libre.

Les parties ont conclu une convention d'honoraires aux termes de laquelle les honoraires de l'avocat seraient de 120 euros TTC, outre un honoraire complémentaire de résultat fixé selon un taux variable en considération de sommes allouées par la juridiction.

2. Contestant le montant des honoraires, Mme [Y] a saisi le 26 avril 2017 le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de [Localité 4] d'une demande de fixation de ceux-ci.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. M. [N] fait grief à l'ordonnance de confirmer l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de [Localité 4] en date du 31 octobre 2017 en ce qu'elle fixe à la somme de 1 200 euros TTC le montant de ses honoraires pour la défense des intérêts de sa cliente, Mme [Y], et le condamne à restituer à cette dernière la somme de 6 840 euros qu'elle lui avait déjà versée, alors « que toute fixation d'honoraires, qui ne le serait qu'en fonction du résultat judiciaire est interdite ; qu'est licite la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu ; qu'en annulant la convention d'honoraires en date du 7 octobre 2016 au motif que l'« honoraire de résultat est à mettre en rapport avec l'honoraire fixe de 100 euros HT, soit 120 euros TTC, et il présente un caractère manifestement dérisoire par comparaison avec l'honoraire de résultat de 6 700 euros HT, soit 8 040 euros TTC » et que « c'est en conséquence à bon droit qu'au regard de cette disproportion, le bâtonnier de l'ordre des avocats de [Localité 4] en a déduit la nullité de la convention d'honoraires », le premier président, qui a ajouté à l'article 10 alinéa 5 de la loi du 31 décembre 1971 précité une condition de proportion qu'il ne comporte pas, a violé ce texte. »

Réponse de la Cour

4. L'ordonnance retient que Mme [Y] a obtenu un gain de 67 000 euros à la suite de la procédure devant la commission arbitrale des journalistes, pour laquelle elle a bénéficié de l'assistance de M. [N], qu'en application des dispositions de la convention d'honoraires, un honoraire de résultat de 10 % du gain obtenu, soit 6 700 euros HT, reviendrait à M. [N].

L'ordonnance ajoute que cet honoraire de résultat est à mettre en rapport avec l'honoraire fixe de 100 euros HT, soit 120 euros TTC et qu'il présente un caractère manifestement dérisoire par comparaison avec l'honoraire de résultat de 6 700 euros HT, soit 8 040 euros TTC.

5. De ces constatations et énonciations procédant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, le premier président a pu déduire que l'honoraire de diligence revêtait un caractère manifestement dérisoire par comparaison avec l'honoraire de résultat et que la convention était illicite.

6. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

7. M. [N] fait le même grief à l'ordonnance, alors « que si le premier président apprécie souverainement, d'après les conventions des parties et les circonstances de la cause, le montant de l'honoraire dû à l'avocat, il ne lui appartient pas de le réduire dès lors que le principe et le montant de l'honoraire ont été acceptés par le client après service rendu, que celui-ci ait ou non été précédé d'une convention ; qu'en le condamnant à restituer à Mme [Y] la somme trop perçue de 6 840 euros qu'elle lui avait déjà versée sans rechercher si, comme il le soutenait, Mme [Y] n'avait pas autorisé le prélèvement de l'honoraire de résultat le 31 mars 2017 sur le compte CARPA, après service rendu, le premier président a privé sa décision de base légale au regard des articles 1104 du code civil et 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971. »

Réponse de la Cour

8. La règle selon laquelle, le client qui a librement payé les honoraires d'avocat après service rendu ne peut plus les contester, ne s'applique que lorsque le paiement est effectué en toute connaissance de cause.

9. Le premier président ayant prononcé la nullité de la convention d'honoraire, c'est par une juste application de cette règle, que sans avoir à procéder à la recherche visée au moyen, il a fixé les honoraires par référence aux critères de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 au montant qu'il a retenu.

10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Pradel - Avocat général : M. Grignon Dumoulin - Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Article 10 de la loi du 31 décembre 1971.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 18 septembre 2003, pourvoi n° 01-16.013, Bull. 2003, II, n° 279 (cassation) ; 2e Civ., 6 mars 2014, pourvoi n° 13-14.922, Bull. 2014, II, n° 62 (cassation).

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