Numéro 11 - Novembre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2020

SECURITE SOCIALE, CONTENTIEUX

2e Civ., 12 novembre 2020, n° 19-21.495, (P)

Cassation

Contentieux général – Pénalité – Recours gracieux – Procédure – Irrégularité – Office du juge

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal des affaires de sécurité sociale de Toulouse, 21 novembre 2018) rendu en dernier ressort, par courrier du 18 janvier 2016, la caisse d'allocations familiales du Pays Basque et du Seignanx, devenue la caisse d'allocations familiales des Pyrénées-Atlantique (la caisse), a notifié à M. T... (l'allocataire) une pénalité de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale.

2. A la suite d'un recours gracieux auprès du directeur de la caisse, l'allocataire a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L'allocataire fait grief au jugement de le débouter de son recours, alors « que la décision infligeant une pénalité en raison de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations faites pour le service de prestations doit être précédée d'un courrier invitant l'intéressé à présenter ses observations sur la sanction envisagée et doit être motivée ; que M. T... faisait valoir qu'il n'avait jamais reçu la lettre du 23 septembre 2015 à laquelle se référait la décision du 18 janvier 2016, laquelle ne comportait aucun motif et demandait l'annulation de cette décision lui infligeant une pénalité de 1 500 euros pour fraude ; qu'en statuant comme il l'a fait pour passer outre aux irrégularités formelles de la décision du 18 janvier 2016, cependant qu'un débat contradictoire et la motivation de la décision constituaient des garanties essentielles dont la méconnaissance devait être sanctionnée par la nullité de la décision infligeant la pénalité, le tribunal a violé l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 114-17, I du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, applicable à la date de la notification de la pénalité financière en litige :

4. Il appartient à la juridiction du contentieux de la sécurité sociale de se prononcer sur le moyen, soulevé devant elle, tiré d'une irrégularité de la procédure suivie pour l'application des pénalités prévues par ce texte.

5. Pour débouter l'allocataire de son recours, ayant relevé qu'il appartient à la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale de se prononcer sur le litige dont elle est saisie, peu important les éventuelles irrégularités affectant les décisions de l'organisme, le jugement retient que l'argumentation de l'allocataire est inopérante dès lors qu'il a la possibilité de contester la pénalité dans son principe et son montant devant le tribunal.

6. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que l'allocataire contestait la régularité de la procédure, le tribunal a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 21 novembre 2018, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Toulouse ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Toulouse.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Dudit - Avocat(s) : SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Article L. 114-17, I, du code de la sécurité sociale.

2e Civ., 26 novembre 2020, n° 19-18.584, (P)

Rejet

Contentieux spéciaux – Contentieux technique – Maladies professionnelles – Reconnaissance du caractère professionnel d'une maladie par la caisse – Procédure – Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles – Saisine par la caisse primaire d'assurance maladie – Exclusion – Cas – Tableau des maladies professionnelles expressément visé par la victime

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 27 mars 2019), M. K... (la victime) a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe Seine-Maritime (la caisse), le 2 février 2016, une déclaration de maladie professionnelle, accompagnée d'un certificat médical initial du 26 janvier 2016 faisant état d'une « exposition à l'amiante de plus de 30 ans. Dyspnée d'effort avec au scanner thoracique un nodule sous-pleural » et visant le tableau n° 30 des maladies professionnelles.

2. La caisse ayant refusé de prendre en charge cette affection au titre de la législation professionnelle, au motif que les nodules et l'adénopathie n'étaient pas inscrits au tableau n° 30, M. K... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur les deux moyens réunis

Enoncé du moyen

3. La victime fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, alors :

« 1°/ que l'organisme social doit instruire la demande de prise en charge d'une maladie professionnelle sans être tenu par le tableau visé par la déclaration ; que, si l'enquête fait apparaître que la maladie médicalement constatée n'est pas désignée dans le tableau visé par la déclaration, la caisse ne peut décider de son origine professionnelle qu'après l'avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et l'évaluation de l'incapacité permanente de la victime ; que, le tribunal des affaires de sécurité sociale avait justement retenu « que le médecin conseil a indiqué, à juste titre, que la pathologie déclarée ne ressortait pas du tableau 30 mais qu'il n'en demeure pas moins qu'il existe une déclaration de maladie professionnelle que la caisse se devait d'instruire et qu'en l'absence d'inscription de cette pathologie à un tableau la caisse doit d'instruire le dossier au regard des alinéas quatre et cinq de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale, qu'il appartenait donc à la caisse de saisir un comité de régional de reconnaissance des maladies professionnelles dans le délai de trois mois de la déclaration sauf à notifier la nécessité d'un délai complémentaire ce qu'elle n'a pas fait » ; que, pour infirmer ce jugement, la cour d'appel retient que la victime « n'ayant pas soumis de demande à la caisse au titre d'une maladie hors tableau, aucun différend ne l'opposait à cet organisme sur la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale - il en résulte que la caisse n'était pas tenue de faire estimer l'incapacité permanente de l'assuré par son service médical et de saisir, le cas échéant, un CRRMP, la maladie déclarée par la victime ne figurant pas dans le tableau n° 30, c'est à juste titre que la caisse a refusé sa prise en charge » ; qu'en estimant que la caisse devait instruire la demande de prise en charge de la maladie professionnelle uniquement au regard du tableau visé par la déclaration, la cour d'appel a violé l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que dans ses conclusions, l'assuré social faisait valoir « qu'à tout le moins, la victime est bien fondée à solliciter de la juridiction qu'elle enjoigne à la CPAM la saisine d'un CRRMP afin qu'il se prononce sur le lien essentiel et direct entre la maladie et le travail » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen des écritures, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. Dès lors que la demande de la victime se réfère à un tableau de maladies professionnelles, l'organisme social n'est pas tenu, en cas de refus de prise en charge, d'instruire cette demande selon les règles applicables à la reconnaissance du caractère professionnel des maladies non désignées dans un tableau.

5. L'arrêt relève que la maladie déclarée par la victime ne figurait pas au tableau n° 30, dont elle invoquait exclusivement le bénéfice.

6. De ces constatations, la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre à un moyen que celles-ci rendaient inopérant, a exactement déduit que la caisse n'était pas tenue de saisir un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Coutou - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article L. 461-1 du code de la sécurité sociale.

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