Numéro 11 - Novembre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2020

JUGEMENTS ET ARRETS

2e Civ., 19 novembre 2020, n° 19-19.514, (P)

Cassation

Exposé des moyens et des prétentions des parties – Forme – Visa des conclusions des parties – Dernières conclusions – Défaut – Effet

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 14 décembre 2018) et les productions, Mme V... a été licenciée le 16 mars 2015 par la société Bureau de contrôle fédéral.

2. La société Bureau de contrôle fédéral a interjeté appel du jugement la condamnant à payer à Mme V... diverses sommes.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La société Bureau de contrôle fédéral fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, puis de le condamner à payer au salarié diverses sommes à l'exception de l'indemnité de travail dissimulé, alors :

« 1°/ que le Bureau de contrôle fédéral a déposé des conclusions assorties de pièces nouvelles le 9 octobre 2018 ; qu'ayant été déposées antérieurement à l'ordonnance de clôture, intervenue le 10 octobre 2018, ces conclusions étaient en principe recevables ; qu'en s'abstenant de viser les conclusions du 9 octobre 2018, et de statuer au vu de ces conclusions, les juges du fond ont violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en tout cas, pour avoir ignoré les conclusions déposées le 9 octobre 2018, sans se prononcer sur leur mise à l'écart, les juges du fond ont à tout le moins violé les articles 12, 782, 783 et 907 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 455, alinéa 1er, et 954, alinéa 2, du code de procédure civile :

4. Il résulte de ces textes que s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date.

5. Pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, puis le condamner à payer au salarié diverses sommes à l'exception de l'indemnité de travail dissimulé, l'arrêt se prononce au visa des conclusions notifiées par la société Bureau de contrôle fédéral le 11 juillet 2017.

6. En statuant ainsi, alors qu'il ressort des productions que la société Bureau de contrôle fédéral avait déposé le 9 octobre 2018 des conclusions développant une argumentation complémentaire portant sur l'examen des fiches horaires établies par Mme V..., la cour d'appel, qui n'a pas visé ces dernières conclusions et qui s'est prononcée par des motifs dont il ne résulte pas qu'elle les aurait prises en considération, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Fulchiron - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Articles 455, alinéa 1, et 954, alinéa 2, du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 4 juin 2007, pourvoi n° 06-10.574, Bull. 2007, I, n° 223 (cassation) ; 3e Civ., 31 mai 2011, pourvoi n° 10-20.846, Bull. 2011, III, n° 88 (cassation), et les arrêts cités ; 2e Civ.,21 février 2013, pourvoi n° 11-24.421, Bull. 2013, II, n° 34 (cassation), et l'arrêt cité.

2e Civ., 19 novembre 2020, n° 19-17.934, (P)

Cassation

Notification – Notification en la forme ordinaire – Lettre recommandée – Avis de réception – Retrait de la lettre de notification – Portée

Faits et procédure

1. Selon les arrêts attaqués (Saint-Denis de la Réunion, 30 novembre 2018 et 27 mai 2019), la caisse d'allocations familiales de La Réunion (la caisse) a informé M. T..., au cours de l'année 2014, que ses droits étaient suspendus.

2. Par une lettre de mise en demeure en date du 6 mars 2015, la caisse lui a demandé de payer une certaine somme à titre de trop-perçu, tandis que M. T... a sollicité le paiement d'un rappel de prestations.

3. Par jugement en date du 31 août 2016, un tribunal des affaires de sécurité sociale a annulé la mise en demeure et rejeté les autres demandes de M. T....

4. M. T... a interjeté appel, le 12 octobre 2016, de ce jugement, qui lui a été notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 31 août 2016.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. M. T... fait grief à l'arrêt en date du 30 novembre 2018, rectifié par l'arrêt en date du 27 mai 2019, de déclarer irrecevable son appel comme tardif, alors « que la date de réception d'une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception est celle qui est apposée par l'administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire ; qu'en l'espèce, M. T... avait fait valoir qu'il n'avait retiré le pli recommandé lui notifiant le jugement du 31 août 2016 que le 13 septembre 2006, soit moins d'un mois avant d'interjeter appel dudit jugement ; qu'en retenant qu'en cas de notification à domicile, la date de notification du jugement est celle à laquelle la lettre de notification a été déposée et non celle à laquelle elle a été retirée, pour en déduire que le jugement avait été notifié à M. T... le 6 septembre 2016, date à laquelle lui a été distribué l'avis selon lequel un courrier était tenu à sa disposition au bureau de poste, et que l'appel formé le 12 octobre était irrecevable car tardif, tandis que le délai d'appel n'avait couru qu'à compter du 13 septembre 2016, date à laquelle M. T... avait retiré le courrier lui notifiant ce jugement, la cour d'appel a violé l'article 669, alinéa 3, du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 528, 668 et 669 du code de procédure civile :

6. Il résulte de ces textes que le délai d'appel, à l'égard du destinataire de la lettre de notification du jugement, court à compter de la date à laquelle la lettre lui est remise.

7. Pour déclarer l'appel irrecevable comme tardif, l'arrêt retient qu'il résulte des dispositions de l'article R. 142-28 du code de la sécurité sociale que le délai d'appel est d'un mois à compter de la notification du jugement, qu'en cas de notification à domicile, le délai court à compter du dépôt de la lettre recommandée et non pas de son retrait et qu'en conséquence, l'appel formé le 12 octobre 2016, alors que l'accusé de réception de la notification du jugement était en date du 6 septembre 2016, est manifestement hors délais.

8. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 novembre 2018, rectifié par arrêt du 27 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Fulchiron - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Cabinet Colin-Stoclet -

Textes visés :

Articles 528, 668 et 669 du code de procédure civile.

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