Numéro 11 - Novembre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2020

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE

Soc., 4 novembre 2020, n° 19-12.367, n° 19-12.369, (P)

Rejet

Licenciement – Cause – Cause réelle et sérieuse – Licenciement postérieur à la demande en justice du salarié – Atteinte à une liberté fondamentale – Présomption – Exclusion – Détermination – Portée

Le seul fait qu'une action en justice exercée par le salarié soit contemporaine d'une mesure de licenciement ne fait pas présumer que celle-ci procède d'une atteinte à la liberté fondamentale d'agir en justice.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° N 19-12.369 et K 19-12.367 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Caen, 20 décembre 2018), statuant en référé, MM. P... et Y... ont été engagés les 1er janvier 2008 et 24 mars 2014 par la société Derichebourg polyurbaine, aux droits de laquelle vient la société Collectes valorisation énergie déchets, en qualité d'équipier de collecte.

3. Le 5 février 2017, ils ont écrit à la direction des ressources humaines pour exprimer des revendications en ce qui concerne les temps de pause.

Le 23 mars 2017, la direction a refusé d'y faire droit et les a invités à respecter les consignes concernant la pause à proximité du lieu de collecte. Une note de service du 12 avril 2017 a demandé à l'ensemble du personnel de respecter les lieux de pause définis dans le planning hebdomadaire.

Le 12 mai 2017, les salariés ont reçu un avertissement pour non-respect des lieux de pause.

4. Le 4 octobre 2017, ils ont saisi la juridiction prud'homale en référé pour obtenir l'annulation de cette sanction, un rappel de salaire et des dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité. Cette affaire a été appelée à l'audience du 23 janvier 2018, la décision devant être rendue le 30 janvier 2018.

5. Le 4 janvier 2018, les salariés ont saisi le conseil de prud'hommes en référé pour voir ordonner la suspension de la note de service du 12 avril 2017 et que le dépôt de Giberville soit retenu comme lieu de pause.

6. Le 29 janvier 2018, à la suite d'un contrôle opéré sur une tournée, ils ont été mis à pied à titre conservatoire puis licenciés pour faute grave le 15 février 2018, au motif de la réalisation d'une collecte bilatérale interdite et dangereuse.

7. Soutenant que leur licenciement intervenait en violation de la liberté fondamentale d'agir en justice et encourait la nullité, ils ont saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes aux fins que leur réintégration soit ordonnée et que l'employeur soit condamné à leur payer des rappels de salaire depuis la mise à pied.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

8. Les salariés font grief aux arrêts de dire n'y avoir lieu à référé et de rejeter leurs demandes tendant, notamment, à voir ordonner leur réintégration sous astreinte, alors :

« 1°/ qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite par le salarié ; qu'il appartient à l'employeur d'établir que sa décision est justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner l'exercice, par le salarié, de son droit d'agir en justice ; qu'en retenant que la seule circonstance qu'une procédure de licenciement ait été engagée immédiatement après l'introduction d'une action en justice exercée par le salarié ne fait pas présumer une atteinte à la liberté fondamentale d'agir quand il appartenait à l'employeur d'établir que sa décision de licencier le salarié était justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner l'exercice par celui-ci de son droit d'agir en justice, la cour d'appel a violé les articles 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 1121-1 du code du travail et 1315, devenu 1353, du code civil ;

2°/ qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite par le salarié ; que constitue un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser le licenciement motivé par une volonté répressive du salarié ayant introduit une action en justice à l'encontre de son employeur ; qu'en écartant l'existence d'un trouble manifestement illicite, sans rechercher si le licenciement du salarié n'était pas uniquement motivé par une volonté répressive de l'employeur, qui découlait de ce que, dans le mois ayant suivi l'introduction d'une action en justice, l'employeur avait, d'une part, décidé de modifier la tournée du salarié en l'affectant pour la première fois avec deux autres salariés qui avaient participé à la même action et, d'autre part, diligenté un contrôle inopiné dont le résultat l'avait conduit, le jour même, à mettre les salariés à pied avant de les licencier pour faute grave, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme, L. 1121-1 et R. 1455-6 du code du travail. »

Réponse de la Cour

9. Le seul fait qu'une action en justice exercée par le salarié soit contemporaine d'une mesure de licenciement ne fait pas présumer que celle-ci procède d'une atteinte à la liberté fondamentale d'agir en justice.

10. La cour d'appel a constaté, dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, que les actions en justice engagées portaient sur la question du lieu de pause, soit sur une question sans rapport avec le motif de licenciement, que la lettre de licenciement ne contenait pas de référence à ces actions en justice, que la procédure de licenciement avait été régulièrement suivie et que la lettre de notification du licenciement était motivée en ce qu'elle contenait l'exposé de faits circonstanciés dont il appartient à la seule juridiction du fond de déterminer s'ils présentent un caractère réel et sérieux notamment au regard de la pratique antérieure, des consignes et de la formation reçues et qu'enfin, pour avoir été inopiné, le contrôle terrain n'en était pas moins une pratique dans l'entreprise dont la déloyauté n'était pas en l'état manifeste s'agissant de celui du 29 janvier 2018, ce dont il résultait que le licenciement ne présentait pas de caractère manifestement illicite. Elle en a, sans inverser la charge de la preuve et procédant à la recherche prétendument omise, exactement déduit l'absence d'un trouble manifestement illicite.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Duvallet - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : Me Haas ; SCP Rocheteau et Uzan-Sarano -

Textes visés :

Article L. 1221-1 du code du travail ; article 1353 du code civil ; article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Rapprochement(s) :

Sur la preuve du lien existant entre une action en justice exercée par un salarié et la rupture de son contrat de travail à l'initiative de l'employeur, à rapprocher : Soc., 9 octobre 2019, pourvoi n° 17-24.773, Bull. 2019, (rejet), et l'arrêt cité.

Soc., 4 novembre 2020, n° 18-23.029, n° 18-23.030, n° 18-23.031, n° 18-23.032, n° 18-23.033, (P)

Cassation partielle

Licenciement économique – Cause – Cause réelle et sérieuse – Motif économique – Défaut – Cas – Difficultés économiques résultant d'agissements fautifs de l'employeur – Caractérisation – Applications diverses – Erreur de l'employeur dans l'appréciation du risque inhérent à tout choix de gestion – Exclusion – Portée

Si la faute de l'employeur à l'origine de la menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise rendant nécessaire sa réorganisation est de nature à priver de cause réelle et sérieuse les licenciements consécutifs à cette réorganisation, l'erreur éventuellement commise dans l'appréciation du risque inhérent à tout choix de gestion ne caractérise pas à elle seule une telle faute.

Licenciement économique – Cause – Cause réelle et sérieuse – Motif économique – Défaut – Cas – Difficultés économiques résultant d'agissements fautifs de l'employeur – Caractérisation – Portée

Vu la connexité, joint les pourvois n° D 18-23.029, E 18-23.030, F 18-23.031, H 18-23.032 et G 18-23.033 ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1233-3 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

Attendu que si la faute de l'employeur à l'origine de la menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise rendant nécessaire sa réorganisation est de nature à priver de cause réelle et sérieuse les licenciements consécutifs à cette réorganisation, l'erreur éventuellement commise dans l'appréciation du risque inhérent à tout choix de gestion ne caractérise pas à elle seule une telle faute ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que MM. W..., P..., S..., et L... et Mme C..., salariés de la société Pages jaunes, ont été licenciés pour motif économique entre le 30 avril et le 11 août 2014 après avoir refusé la modification de leur contrat de travail pour motif économique proposée dans le cadre de la réorganisation de l'entreprise ayant donné lieu à un plan de sauvegarde de l'emploi contenu dans un accord collectif majoritaire signé le 20 novembre 2013 et validé par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France le 2 janvier 2014 ; que par arrêt du 22 octobre 2014, statuant sur le recours d'un autre salarié, une cour administrative d'appel a annulé cette décision de validation, au motif que l'accord du 20 novembre 2013 ne revêtait pas le caractère majoritaire requis par les dispositions de l'article L. 1233-24-1 du code du travail ; que le Conseil d'Etat a, le 22 juillet 2015, rejeté les pourvois formés contre cet arrêt ; que les salariés ont saisi la juridiction prud'homale pour voir juger sans cause réelle et sérieuse leur licenciement pour motif économique ;

Attendu que pour condamner la société Pages jaunes à verser aux salariés diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et ordonner le remboursement à l'organisme concerné des indemnités de chômage payées aux salariés dans la limite de trois mois d'indemnités, les arrêts retiennent que la société Pages jaunes est une filiale à 100 % au sens de l'article L. 233-1 du code de commerce de Pages jaunes groupe, aujourd'hui dénommé Solocal ; que dans le cadre d'une opération de rachat d'entreprise par endettement dite « LBO » pour « leverage buy-out », l'utilisation des ressources financières du groupe, constituées essentiellement par les ressources financières de la société Pages jaunes, n'a été possible que parce que cette dernière a accepté de prendre des décisions permettant de nourrir les besoins de sa holding, laquelle a ainsi asséché la source de financement des nécessaires et incontournables investissements stratégiques, alors même que l'essor d'un marché « V... » et la multiplication d'entreprises au modèle innovant ou spécialisées ayant une activité concurrentielle nécessitaient de proposer des prestations spécialisées et adaptées ; que si une ébauche de transformation et d'adaptation a été lancée en 2011 avec le projet « Jump », pour répondre au besoin de spécialisation du marché, force est de relever la tardiveté et l'insuffisance de cette restructuration, qui a coïncidé avec la décision de ne plus affecter les liquidités à la distribution de dividendes ; que la société Pages jaunes ne met pas la cour en mesure de considérer que l'inadaptation de son organisation à la nouvelle configuration du marché de la publicité et la dégradation de la situation économique qui s'en est suivie ne résulte pas de l'incapacité dans laquelle elle se trouvait depuis 2006 et l'opération dite « LBO », du fait de la mise à disposition de ses liquidités en 2006 et des versements continus de dividendes opérés jusqu'en 2011, de financer les évolutions nécessaires à la mise en place de barrières à l'entrée dans un marché évoluant très rapidement et de faire les indispensables investissements en recherche et développement depuis 2008 ; que dès lors le péril encouru en 2014 par la compétitivité de l'entreprise au moment de la mise en oeuvre de la procédure de licenciement n'est pas dissociable de la faute de la société Pages jaunes, caractérisée par des décisions de mise à disposition de liquidités empêchant ou limitant les investissements nécessaires, ces décisions pouvant être qualifiées de préjudiciables comme prises dans le seul intérêt de l'actionnaire, et ne se confondant pas avec une simple erreur de gestion ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs insuffisants à caractériser la faute de l'employeur à l'origine de la menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils condamnent la société Pages jaunes à verser, à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à MM. W... et L... la somme de 70 000 euros chacun, à MM. P... et S... la somme de 90 000 euros chacun, à Mme C... la somme de 60 000 euros, ordonnent le remboursement à l'organisme les ayant servies, des indemnités de chômage payées à ces salariés dans la limite de trois mois d'indemnités, les arrêts rendus le 2 août 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Paris.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Prache - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article L. 1233-3 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016.

Rapprochement(s) :

Sur le défaut de cause réelle et sérieuse du licenciement lorsque les difficultés économiques résultent d'agissements fautifs de l'employeur, à rapprocher : Soc., 24 mai 2018, pourvoi n° 17-12.560, Bull. 2018, V, n° 85 (rejet).

Soc., 18 novembre 2020, n° 19-11.686, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Licenciement – Nullité – Cas – Etat de grossesse de la salariée – Effets – Paiement des salaires pendant la période couverte par la nullité – Applications diverses – Redressement et liquidation judiciaires – Assurance contre le risque de non-paiement – Garantie – Etendue – Détermination – Portée

L'article L. 1225-71, alinéa 2, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, prévoit qu'une salariée en état de grossesse dont le licenciement est nul doit percevoir les salaires qui auraient été perçus pendant la période couverte par la nullité.

Cette créance d'un salarié bénéficiaire d'une protection spécifique relative au licenciement constitue une créance résultant du licenciement, de sorte que l'AGS en doit garantie en application de l'article L. 3253-9 du code du travail.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 20 septembre 2018) et les pièces de la procédure, Mme B... a été engagée le 6 septembre 2010 en qualité de comptable par la société BG2P (la société). Suite au prononcé le 17 octobre 2013 de la liquidation judiciaire de la société, avec maintien de l'activité jusqu'au 24 octobre 2013 et mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi, le liquidateur judiciaire, la société BTSG, en la personne de M. S..., a procédé le 12 novembre 2013 au licenciement pour motif économique de l'intéressée qui se trouvait en congé de maternité depuis le 24 septembre 2013.

2. Invoquant la période de protection allant du 24 septembre 2013 au 27 mai 2014 dont elle bénéficiait, la salariée a saisi la juridiction prud'homale pour voir juger que son licenciement était nul, et indiquant qu'elle ne sollicitait pas sa réintégration, a demandé la fixation de ses créances au passif de la liquidation judiciaire dont celle représentant les salaires qu'elle aurait dû percevoir pendant la période allant du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014.

3. Par jugement du 7 mai 2015, le conseil de prud'hommes a dit que le licenciement de la salariée intervenu pendant la période de protection du fait du congé de maternité était nul, fixé ses créances au passif de la société dont la somme de 12 901 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014, celle de 1 290 euros à titre de congés payés sur rappel de salaire et dit que le jugement était opposable à l'AGS et au CGEA dans les limites prévues aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail.

4. A la suite du refus du liquidateur de demander à l'AGS d'avancer les sommes correspondant aux rappels de salaires et congés payés au motif qu'elles ne rentraient pas dans la garantie de cet organisme, la salariée a, le 7 octobre 2015, saisi le conseil de prud'hommes en interprétation de cette décision sur les limites de la garantie de l'AGS.

5. Par jugement du 31 mars 2016, le conseil de prud'hommes a dit que les créances de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 et celle de congés payés afférents devaient être prises en charge et garanties par l'AGS.

Rectification d'erreur matérielle relevée d'office

6. Avis a été donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile.

Vu l'article 462 du code de procédure civile :

7. C'est par suite d'une erreur purement matérielle que, dans le dispositif de la décision attaquée, la cour d'appel a dit que la créance de rappel de salaire et de congés payés afférents pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 est garantie par l'AGS dans les termes énoncés à l'article L. 3253-8 d) du code du travail, au lieu de l'article L. 3253-8 5° d) du même code.

8. Il y a lieu, pour la Cour de cassation, de réparer cette erreur, qui affecte un chef de dispositif qui lui est déféré.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

9. La salariée fait grief à l'arrêt de dire que sa créance au titre de salaires pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 et des congés payés afférents, fixée dans le jugement du 7 mai 2015, était garantie par l'AGS dans les termes et limites énoncés à l'article L. 3253-8 5°d) du code du travail, alors « qu'est nul le licenciement d'une salariée en état de grossesse prononcé pendant les périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit et les dix semaines suivant leur expiration, l'employeur devant alors verser le montant du salaire qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité ; que ce versement rentre dans le champ d'application de l'article L. 3253-9 du code du travail, qui impose à l'AGS de couvrir les créances résultant du licenciement des salariés bénéficiaires d'une protection particulière relative au licenciement, dès lors que l'administrateur, l'employeur ou le liquidateur, selon le cas, a manifesté, au cours des périodes mentionnées au 2° de l'article L. 3253-8, son intention de rompre le contrat de travail ; qu'en l'espèce, il est acquis aux débats que le licenciement de Mme B..., intervenu pendant le congé de maternité durant lequel elle était protégée, est nul ; qu'il en résulte que les sommes dues à Mme B... pendant la période de protection du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 et les congés payés y afférents rentraient dans le cadre de cette garantie ; qu'en ayant dit que le jugement définitif du 7 mai 2015, ayant fixé les créances de Mme B... à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société BG2P et dit qu'il était opposable à l'AGS et au CGEA ''dans les limites prévues aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail'', s'interprétait en ce sens que la créance de rappel de salaires pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 et les congés payés y afférents était garantie par l'AGS dans les termes et limites énoncés à l'article L. 3253-8 d) du code du travail, cependant qu'il convenait de dire que la créance, qui résultait du licenciement nul, était couverte par l'AGS et le CGEA de Rouen faute de fonds suffisants de la SAS BG2P à hauteur respectivement de 12 901 euros bruts et 1 290 euros bruts, l'arrêt infirmatif a violé par fausse application l'article L. 3253-8 5°d) du code du travail, l'article L. 3253-9 du même code par refus d'application, ensemble les articles L. 1225-4 et L. 1225-71 du code du travail, et 461 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

10. L'AGS et l'UNEDIC contestent la recevabilité du moyen. Elles soutiennent que le moyen est nouveau dès lors qu'il ne résulte pas des conclusions de la salariée qu'elle a sollicité le bénéfice des dispositions de l'article L. 3253-9 du code du travail.

11. Cependant, il ressort des conclusions de la salariée devant la cour d'appel qu'elle invoquait ces dispositions et soutenait que l'AGS devait garantir la créance de salaire, assimilée à des créances de rupture.

12. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article L. 3253-9 du code du travail et l'article L. 1225-71, alinéa 2, du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :

13. D'une part, selon l'article L. 3253-9 du code du travail, sont couvertes par l'assurance prévue à l'article L. 3253-6 du même code, les créances résultant du licenciement des salariés bénéficiaires d'une protection particulière relative au licenciement dès lors que l'administrateur, l'employeur ou le liquidateur, selon le cas, a manifesté, au cours des périodes mentionnées au 2° de l'article L. 3253-8, son intention de rompre le contrat de travail.

14. D'autre part, l'article L. 1225-71, alinéa 2, du code du travail prévoit qu'une salariée en état de grossesse, bénéficiaire d'une protection spécifique relative au licenciement, dont le licenciement est nul, doit percevoir les salaires qui auraient été perçus pendant la période couverte par la nullité. Cette créance constitue une créance résultant du licenciement, de sorte que l'AGS doit sa garantie en application de l'article L. 3253-9 du code du travail.

15. Pour statuer comme il fait, l'arrêt retient que les créances dues à un salarié bénéficiant d'une protection particulière relative au licenciement, qui ne résultent pas de la rupture de son contrat de travail mais concernent des salaires dus en application de l'article L. 3253-8 du code du travail, ne sont pas garanties par l'AGS. Il en déduit que les premiers juges ne pouvaient donc interpréter le dispositif de leur jugement en disant que la créance de salaire et de congés payés de la salariée pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 devait être prise en charge par l'AGS, alors que celle-ci n'était tenue à garantie que dans la limite d'un mois et demi de travail en application de l'article L. 3253-8 5° d) du code du travail.

16. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

17. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

18. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

ORDONNE la rectification de l'arrêt RG n° 16/02073 rendu le 20 septembre 2018 par la cour d'appel de Rouen et dit que, dans son dispositif, il y a lieu de lire : « Dit que la créance de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 ainsi que la créance de congés payés sur rappel de salaire fixées par le jugement du 7 mai 2015 est garantie par l'AGS (CGEA de Rouen) dans les termes et limites énoncés à l'article L. 3253-8 5° d) du code du travail » au lieu de « Dit que la créance de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 ainsi que la créance de congés payés sur rappel de salaire fixées par le jugement du 7 mai 2015 est garantie par l'AGS (CGEA de Rouen) dans les termes et limites énoncés à l'article L. 3253-8 d) du code du travail » ;

ORDONNE la mention de cette rectification en marge de la décision rectifiée ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la créance de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 ainsi que la créance de congés payés sur rappel de salaire fixées par le jugement du 7 mai 2015 est garantie par l'AGS dans les termes et limites énoncés à l'article L. 3253-8 5° d) du code du travail et en ses dispositions relatives aux dépens, l'arrêt rendu le 20 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit que le jugement du 7 mai 2015 doit être interprété en ce sens que la créance de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2013 au 27 mai 2014 ainsi que la créance de congés payés sur rappel de salaire fixées aux sommes de 12 901 euros bruts et 1 290 euros bruts sont garanties par l'AGS (CGEA de Rouen) en application de l'article L. 3253-9 du code du travail.

- Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Pietton - Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie ; SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Articles L. 1225-71, alinéa 2, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, et L. 3253-9 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur le droit à réparation du salarié dont le licenciement est annulé sur le fondement de l'article L. 1225-71, alinéa 2, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, à rapprocher : Soc., 15 décembre 2015, pourvoi n° 14-10.522, Bull. 2015, V, n° 261 (2) (rejet), et l'arrêt cité.

Soc., 4 novembre 2020, n° 18-15.669, (P)

Cassation

Licenciement – Nullité – Cas – Violation par l'employeur d'une liberté fondamentale – Applications diverses – Dénonciation de faits dont le salarié a eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions

Selon l'article L. 1132-3-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions.

Encourt dès lors la cassation l'arrêt qui prononce, sur ce fondement, la nullité d'un licenciement, sans constater que le salarié avait relaté ou témoigné de faits susceptibles d'être constitutifs d'un délit ou d'un crime.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué statuant en référé (Versailles, 27 février 2018), M. W..., engagé en qualité de consultant senior par la société Eurodécision, spécialisée dans le développement de solutions logicielles et d'expertises dans le domaine de l'optimisation et des solutions d'aide à la décision, s'est vu confier une mission auprès d'un technocentre Renault. Lors d'un entretien du 16 mars 2016, l'employeur a évoqué avec le salarié avoir été averti de l'envoi par l'intéressé d'un courriel politique à des salariés de la société Renault.

Le 18 mars 2016, il lui a notifié une mise à pied conservatoire et l'a convoqué à un entretien préalable prévu le 25 mars suivant en vue d'un éventuel licenciement.

Le 31 mars 2016, le salarié a fait l'objet d'un avertissement pour violation du guide d'information de la société Renault et notamment de sa lettre de mission au technocentre. Il a été licencié le 21 avril 2016 pour faute grave, l'employeur lui reprochant un manquement à ses obligations de loyauté et de bonne foi, pour avoir procédé à l'enregistrement sonore de l'entretien informel du 16 mars 2016 à son insu et pour avoir communiqué cet enregistrement à des tiers afin d'assurer sa diffusion le 21 mars 2016 dans le cadre d'une vidéo postée sur le site internet Youtube.

L'enregistrement diffusé révélait qu'au cours de l'entretien du 16 mars 2016 l'employeur avait déclaré : « donc ils surveillent, ils surveillent les mails, et à ton avis les mails de qui ils surveillent en priorité '...Bah les mails des syndicalistes bien évidemment... t'es pas censé, en tant qu'intervenant chez Renault, (de) discuter avec les syndicats Renault.

Les syndicats de Renault, ils sont là pour les salariés de Renault... »

2. Le salarié, faisant valoir que son licenciement était intervenu en violation de la protection des lanceurs d'alerte, a sollicité devant le juge des référés la cessation du trouble manifestement illicite résultant de la nullité de son licenciement et l'octroi de provisions à valoir sur la réparation de son préjudice.

Les syndicats se sont joints à ces demandes.

Examen des moyens

Sur le second moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt statuant en référé, de prononcer la nullité du licenciement du salarié pour atteinte à la liberté d'expression et de le condamner au paiement de diverses sommes au bénéfice du salarié et des syndicats, alors « que la nullité du licenciement fondé sur la dénonciation par le salarié de conduites ou d'actes illicites constatés par lui sur son lieu de travail ne peut être prononcée pour violation de sa liberté d'expression que si les faits ainsi relatés sont de nature à caractériser des infractions pénales reprochables à son employeur ; qu'en prêtant au salarié la qualité de « lanceur d'alerte » en l'absence de la moindre caractérisation d'une faute pénale de l'employeur, la cour a derechef violé les dispositions de l'article L. 1132-3-3 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1132-3-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 :

4. Selon ce texte, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions.

5. Pour prononcer la nullité du licenciement et condamner l'employeur au paiement de diverses sommes au salarié et aux syndicats, l'arrêt retient que la révélation des faits d'atteinte à la liberté d'expression dans le cadre d'échanges avec un syndicat est intervenue par la voie de médias par internet lors de la diffusion de l'enregistrement litigieux le 21 mars 2016 puis de l'entretien entre le salarié et un journaliste le 22 mars 2016, alors que M. W... avait personnellement et préalablement constaté que son employeur remettait en cause son droit à sa libre communication avec les syndicats de la société Renault, au vu des propos tenus par le dirigeant de la société Eurodécision lors de l'entretien informel du 16 mars 2016 et de la procédure disciplinaire avec mise à pied conservatoire engagée dès le 18 mars 2016 et suivie d'un avertissement puis de son licenciement pour faute grave.

L'arrêt en déduit que le salarié est recevable à invoquer le statut de lanceur d'alerte et en conclut qu'en application des articles L. 1132-3-3 et L. 1132-3-4 du code du travail, il y a lieu de prononcer la nullité du licenciement.

6. En statuant ainsi, sans constater que le salarié avait relaté ou témoigné de faits susceptibles d'être constitutifs d'un délit ou d'un crime, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Richard - Avocat général : Mme Laulom - Avocat(s) : Me Bouthors ; SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Article L. 1132-3-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013.

Rapprochement(s) :

Sur l'impossibilité de licencier un salarié ayant relaté ou témoigné de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions pour ce motif, à rapprocher : Soc., 8 juillet 2020, pourvoi n° 18-13.593, Bull. 2020, (cassation partielle), et les arrêts cités.

Soc., 25 novembre 2020, n° 18-13.771, n° 18-13.772, (P)

Cassation partielle

Licenciement – Salarié protégé – Mesures spéciales – Autorisation administrative – Faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité – Demande de dommages-intérêts du salarié – Préjudice découlant de la perte de l'emploi – Appréciation – Compétence – Détermination

La décision d'autorisation de licenciement prise par l'inspecteur du travail, à qui il n'appartient pas de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute de l'employeur, ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions judiciaires compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui aurait causés une faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité, y compris le préjudice résultant de la perte de son emploi.

Dès lors, encourt la cassation l'arrêt qui, pour débouter le salarié protégé de sa demande de dommages-intérêts au titre de la faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité, retient que le préjudice découlant de la perte de son emploi ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° R 18-13.771 et S 18-13.772 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Caen, 19 janvier 2018), le groupe David, composé de la société David miroiterie et de la société David services, a été repris le 22 septembre 2010 par le groupe verrier japonais AGC (Asahi Glass Compagny limited).

La société AGC France exerçait la présidence de la nouvelle société AGC David miroiterie venue aux droits de la société David miroiterie et ayant absorbé la société David services.

Les actions de la société AGC David miroiterie étaient détenues par une autre société du groupe, également présidée par la société AGC France.

3. Les salariés non protégés ont été licenciés pour motif économique le 16 mai 2012, en raison de la cessation d'activité de la société AGC David miroiterie. Celle-ci a été placée le 9 janvier 2013 en liquidation judiciaire avec poursuite d'activité jusqu'au 9 avril 2013, Mme S... étant désignée en qualité de liquidatrice.

4. MM. W... et T..., salariés protégés, ont été licenciés le 18 avril 2013 par la liquidatrice après autorisation de l'inspecteur du travail.

5. Contestant leur licenciement, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement d'une indemnité supra conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts à l'encontre de la société AGC David miroiterie et de la société AGC France, invoquant la qualité de coemployeur de celle-ci.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal de la société AGC France, pris en sa première branche ; Publication sans intérêt

Mais sur le moyen du pourvoi principal de la société AGC France, pris en sa seconde branche ; Publication sans intérêt

Et sur le moyen du pourvoi incident des salariés, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

17. Les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leur demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la légèreté blâmable de l'employeur, alors « que la décision de l'inspecteur du travail, à qui il n'appartient pas de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute ou à la légèreté blâmable de l'employeur, ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui auraient causé cette faute ou légèreté blâmable dans l'exécution du contrat de travail ; qu'en déboutant le salarié au motif de l'absence de tout préjudice autre que celui découlant de la perte de son emploi qui ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires, la cour d'appel a violé l'article 1382 alors applicable du code civil, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III. »

Réponse de la Cour

Vu le principe de séparation des pouvoirs, la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III :

18. La décision d'autorisation de licenciement prise par l'inspecteur du travail, à qui il n'appartient pas de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute de l'employeur, ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions judiciaires compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui aurait causés une faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité, y compris le préjudice résultant de la perte de son emploi.

19. Pour débouter les salariés de leur demande de dommages-intérêts au titre de la faute ou la légèreté blâmable de l'employeur les arrêts retiennent que les salariés ont été licenciés, après autorisation de l'inspection du travail, à raison de la liquidation judiciaire de l'employeur qui conduit à la fermeture définitive de son établissement et à sa cessation d'activité, ce qui implique la suppression de leur poste, et leur licenciement, aucun reclassement dans un emploi correspondant à leurs compétences n'étant possible.

20. Les arrêts constatent ensuite que les salariés soutiennent que la cessation d'activité de la société AGC David Miroiterie trouve son origine dans la faute ou la légèreté blâmable de la société et réclament des dommages-intérêts « à raison du préjudice subi », antérieur, selon eux, à la rupture de leur contrat de travail.

21. Les arrêts relèvent que, toutefois, ils caractérisent ce préjudice par le fait que « l'absence de faute et de légèreté blâmable aurait permis le maintien de l'engagement contractuel », considérant ce faisant, que leur préjudice est bien constitué par la perte de leur emploi et donc par le licenciement et n'établissent pas, ni même ne soutiennent, que la faute et la légèreté blâmable de leur employeur leur auraient occasionné un préjudice distinct.

22. Les arrêts retiennent enfin qu'en l'absence de tout préjudice autre que celui découlant de la perte d'emploi, qui ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires, ils seront déboutés de cette demande.

23. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le principe et les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils jugent que la société AGC France est tenue, in solidum avec la société AGC David miroiterie, au paiement de la somme de 15 000 euros allouée respectivement à MM. W... et T... au titre de l'indemnité supra-légale de licenciement, disent qu'à l'égard de la société AGC France cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2013, la condamnent au paiement de ces sommes, déboutent MM. W... et T... de leur demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la légèreté blâmable de l'employeur, disent que la société AGC France est tenue, in solidum avec la société AGC David miroiterie, au paiement de la somme allouée en application de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens de première instance et d'appel, et la condamnent au paiement de ces sommes, les arrêts rendus par la cour d'appel de Caen le 19 janvier 2018 ;

Remet, seulement sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Prache - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Buk Lament-Robillot ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Principe de séparation des pouvoirs ; loi des 16-24 août 1790 ; décret du 16 fructidor an III.

Rapprochement(s) :

Sur la détermination des juridictions compétentes pour connaître d'une action en responsabilité au titre de la faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité, cf. : CE, 8 avril 2013, n° 348559, publié au Recueil Lebon ; CE, 1er août 2013, n° 351917, inédit au Recueil Lebon.

Soc., 18 novembre 2020, n° 19-10.286, (P)

Rejet

Licenciement – Salarié protégé – Mesures spéciales – Autorisation administrative – Saisine de l'inspecteur du travail – Saisine postérieure au retrait d'un premier licenciement – Conditions – Nécessité – Défaut – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 8 novembre 2018), statuant en référé, Mme F... a été engagée le 9 novembre 1999 par la société SP3 nettoyage en qualité de secrétaire commerciale.

Le 3 décembre 2013, la salariée a été élue déléguée du personnel et membre du comité d'entreprise.

En dernier lieu, elle exerçait les fonctions d'assistante sociale.

2. La salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre du 19 juin 2017.

3. Le 26 juin 2017, l'employeur a notifié à la salariée l'annulation de son licenciement et a adressé à l'inspection du travail une demande d'autorisation préalable de licenciement pour inaptitude.

4. Par lettre du 27 juillet 2017, l'inspection du travail a déclaré cette demande irrecevable. Cette décision a été confirmée par le ministre du travail le 8 juin 2018.

5. Le 1er décembre 2017, la salariée a saisi la formation de référé de la juridiction prud'homale de demandes au titre de la nullité de son licenciement intervenu en violation de la procédure administrative d'autorisation préalable et en paiement de diverses indemnités.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée à titre provisionnel des sommes à titre d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité spécifique et de dommages-intérêts pour licenciement nul, et de lui ordonner de délivrer une attestation Pôle emploi, un bulletin de salaire récapitulatif, un solde de tout compte et un certificat de travail, alors :

« 1° / que le trouble manifestement illicite résulte d'une violation évidente de la règle de droit ; que ne constitue pas un tel trouble le licenciement d'un salarié protégé prononcé sans autorisation de l'inspection du travail dès lors que le salarié a accepté de manière claire et non équivoque la rétraction par son employeur du licenciement ; qu'en l'espèce, la société SP3 nettoyage a fait valoir qu'ayant procédé par erreur au licenciement de Mme F... pour inaptitude et impossibilité de reclassement sans autorisation de l'inspecteur du travail, elle avait avisé la salariée de l'annulation de ce licenciement par courrier du 26 juin 2017, ce que Mme F... avait accepté en continuant à lui adresser des arrêts de travail postérieurement à cette date, reconnaissant ainsi la poursuite du contrat de travail ; qu'en jugeant cependant que le licenciement de Mme F... prononcé le 19 juin 2017 est effectif et qu'il a été prononcé en violation du statut protecteur de délégué du personnel et membre du comité d'entreprise sans rechercher, comme elle était invitée à le faire, si Mme F... n'avait pas accepté de manière claire et non équivoque la rétractation par son employeur du licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 1455-6, R. 1455-7 ensemble les articles L. 2411-5, L. 2411-8 du code du travail ;

2°/ en outre qu'en l'absence de demande de réintégration au sein de l'entreprise, le licenciement du salarié protégé sans autorisation administrative de licenciement, rétracté par l'employeur qui continue de verser la rémunération, ne constitue pas un trouble manifestement illicite qu'il appartient à la formation de référé de faire cesser ; qu'en jugeant le contraire alors qu'il est constant que Mme F... n'a pas sollicité sa réintégration au sein de la société SP3 nettoyage, et que la cour constate que l'employeur n'a pas cessé de lui servir sa rémunération, la cour d'appel qui a excédé ses compétences a violé l'article R. 1455-6 du code du travail ;

3°/ que la formation de référé ne peut allouer une provision au créancier que lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en l'occurrence, la société SP3 nettoyage a contesté non seulement la nullité du licenciement du fait de l'acceptation expresse par la salariée de la révocation du licenciement mais aussi la décision d'irrecevabilité de l'inspection du travail portant sur sa demande d'autorisation de licenciement en ayant formé un recours devant le tribunal administratif ; qu'en accordant néanmoins à Mme F... des provisions à titre d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité spécifique et de dommages et intérêts pour licenciement nul quand ces créances étaient sérieusement contestables, la cour d'appel a violé l'article R. 1455-7 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel, qui a constaté que par décision du 27 juillet 2017, confirmée par décision du ministre du travail du 8 juin 2018, l'inspecteur du travail avait refusé d'examiner la demande d'autorisation de licenciement aux motifs que dès l'instant où il a été notifié, le licenciement ne peut être annulé unilatéralement, sans l'accord du salarié, et qui a retenu à bon droit que ces décisions s'imposaient au juge judiciaire en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, peu important l'existence d'un recours devant le tribunal administratif dépourvu d'effet suspensif, de sorte que le licenciement de la salariée était effectif et avait été prononcé en violation du statut protecteur de délégué du personnel et membre du comité d'entreprise, a pu en déduire, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que l'obligation de l'employeur au paiement des provisions sollicitées n'était pas sérieusement contestable.

8. La cour d'appel ayant justifié sa décision par ces seuls motifs, le moyen ne peut être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Sommé - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SCP Ohl et Vexliard -

Textes visés :

Principe de la séparation des pouvoirs ; articles L. 2411-5, L. 2411-8, R. 1455-6 et R. 1455-7 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la portée, dans un autre cas, du refus de l'inspecteur du travail d'examiner la demande d'autorisation de licenciement du salarié protégé, à rapprocher : Soc., 19 mai 2016, pourvoi n° 14-26.662, Bull. 2016, V, n° 107 (cassation partielle), et l'arrêt cité.

Soc., 4 novembre 2020, n° 19-12.279, (P)

Rejet

Licenciement – Salarié protégé – Mesures spéciales – Domaine d'application – Délégué du personnel – Délégué du personnel désigné délégué syndical – Détermination – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 21 décembre 2018), M. H... a été engagé le 8 septembre 2008 par la société [...] dont le dirigeant était M. T... et, après son licenciement pour motif économique le 30 septembre 2009, est entré à compter du 1er novembre 2010 au service de la société établissements [...], en qualité de cadre commercial.

Aux termes de son contrat de travail, le salarié était soumis à une clause de non concurrence.

La société Almetal France, filiale du groupe Galloo Recycling, a pris une participation dans la société établissements S... T..., représentant 50 % du capital de cette dernière et a, selon le même procédé, repris 50 % du capital de la société [...].

Le 26 novembre 2010, M. T... et le président de Galloo Recycling, ont créé, à parts égales, la société [...], détenue à 50 % par M. T..., à titre personnel et à 50 % par la société Almetal, dont M. T... est devenu directeur général, cumulant cette fonction avec celle de président de la société établissements S... T....

Le 30 avril 2011, M. T... a quitté le groupe en cédant l'intégralité de ses parts à la société Almetal.

Les sociétés [...] et [...], désormais détenues entièrement par le groupe Galloo Recycling, sont respectivement devenues les sociétés Galloo Littoral et Almetal - Ile de France. M. H... qui a sollicité l'organisation d'élections pour la désignation de délégués du personnel au sein de la société Galloo Littoral (la société), celle-ci comportant moins de cinquante salariés, a été élu délégué du personnel titulaire le 24 juin 2011 et désigné, le 22 juillet 2011, en qualité de délégué syndical pour le collège cadres-agents de maîtrise.

Le 25 octobre 2011, il a été désigné en qualité de délégué syndical au sein de l'unité économique et sociale constituée des différentes sociétés de l'ancien groupe [...]. Cette désignation a été contestée par les sociétés du groupe Galloo Littoral devant le tribunal d'instance, lequel, par jugement du 16 août 2012, a fait droit à leur demande.

Le 28 octobre 2013, le salarié a démissionné de ses mandats de délégué du personnel et délégué syndical, à effet au 1er janvier 2014.

Le 15 juillet 2014, le salarié a été convoqué à un entretien préalable fixé au 24 juillet 2014. Après autorisation administrative de licenciement accordée le 29 septembre 2014, le salarié s'est vu notifier son licenciement pour motif économique le 6 octobre 2014.

Par décision du 3 avril 2015, le ministre du travail a annulé l'autorisation de licenciement, considérant que l'inspection du travail n'était pas compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, dans la mesure où le mandat de délégué syndical détenu par le salarié avait nécessairement pris fin au terme de son mandat de délégué du personnel et que la protection s'y rattachant avait expiré à l'issue du délai de six mois suivant la cessation des mandats, soit avant que ne soit engagée la procédure de licenciement. Cette décision n'a donné lieu à aucun recours.

2. Le 31 juillet 2015, le salarié a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la condamnation de son ancien employeur au paiement de diverses sommes.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui, pris en ses première et troisième branches, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation et, pris en sa deuxième branche, est irrecevable.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail était dépourvue de cause licite et ne pouvait produire effet à l'égard de la société, de rejeter, en conséquence, sa demande en paiement de la contrepartie financière liée à la clause de non-concurrence et de dire que la somme consignée par la société entre les mains du bâtonnier de l'ordre des avocats de Douai devra lui être restituée, alors :

« 1°/ qu'il faisait valoir, pour démontrer que les termes de la clause n'étaient ni exceptionnels ni liés au contexte de l'entrée au capital en 2010 du groupe Galloo, que plusieurs contrats contenant des clauses de non-concurrence identiques avaient été signés dès l'année 2003 au sein du groupe [...] ; qu'en retenant que la clause n'était pas conforme aux « usages » applicables au sein de l'entreprise, sans examiner ces pièces décisives, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que la clause de non-concurrence litigieuse prévoyait une pénalité forfaitaire de 10 000 euros pour chaque infraction constatée à l'obligation de non-concurrence imposée au salarié ; qu'en retenant que cette pénalité était dérisoire au regard du montant de la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence sans tenir compte, comme elle était invitée à le faire, du fait que la pénalité forfaitaire, dont le montant représentait trois mois de salaire, était susceptible de s'appliquer de façon multiple pour chaque infraction constatée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 [devenu 1103] du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;

3°/ qu'en matière contractuelle, la bonne foi est présumée ; que la société employeur ne peut se prévaloir à l'égard du salarié de l'illicéité du but que son dirigeant poursuivait en signant le contrat ou en y insérant une clause particulière, s'il n'est pas établi que le salarié partageait ou connaissait ce but illicite ; qu'en déclarant nulle la clause de non-concurrence stipulée au contrat de travail, au motif qu'elle ne pouvait avoir pour objet d'assurer une réelle protection de l'entreprise contre la concurrence d'un cadre commercial salarié et que M. T..., alors président de la société [...] ultérieurement devenue Galloo Littoral, aurait voulu octroyer à ses collaborateurs des avantages disproportionnés au détriment de l'entreprise qui ne pouvait les assumer, la cour d'appel qui n'a pas constaté que M. H... partageait ou avait connaissance de l'objectif prétendument poursuivi par M. T..., a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article L. 1222-1 du code du travail ;

4°/ que serait-elle établie, la contrariété à l'intérêt social ne constitue pas par elle-même une cause de nullité des engagements souscrits par le président d'une société par actions simplifiée à l'égard des tiers ; que la cour d'appel a affirmé, pour déclarer nulle la clause de non-concurrence stipulée au contrat de travail, qu'elle ne pouvait avoir pour objet d'assurer une réelle protection de l'entreprise contre la concurrence d'un cadre commercial salarié et que M. T..., alors président de la société [...] ultérieurement devenue Galloo Littoral, aurait voulu octroyer à ses collaborateurs des avantages disproportionnés au détriment de l'entreprise qui ne pouvait les assumer, de telle sorte que sa cause serait illicite ; qu'en statuant de la sorte, cependant que de tels faits à les supposer établis caractériseraient seulement un engagement contraire à l'intérêt social de la société, susceptible d'engager la responsabilité du dirigeant qui l'a souscrit mais non d'entraîner sa nullité, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1131 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause et par refus d'application, l'article L. 227-6 du code de commerce interprété à la lumière de l'article 10 de la directive 209/101/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, ayant codifié la première directive 68/151/CEE du Conseil, du 9 mars 1968 ;

5°/ que la cour d'appel a retenu que les usages normaux applicables au sein de l'entreprise étaient de prévoir une indemnité de non-concurrence égale à 60 % de la rémunération que le salarié aurait perçue s'il avait travaillé durant la même période ; que n'est pas dès lors pourvu d'une contrepartie dérisoire mais tout au plus lésionnaire, l'engagement de l'employeur à verser une indemnité égale à 100 % de la rémunération que le salarié aurait perçue s'il avait travaillé durant la même période en échange d'un engagement de non-concurrence sur deux départements ; qu'en déclarant nulle, comme ''dépourvue de cause licite'', la clause de non-concurrence litigieuse, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1131 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause et L. 1221-1 du code du travail ;

6°/ que le créancier de l'obligation de non-concurrence peut, en cas de manquement, refuser le paiement de la contrepartie financière ou en exiger le remboursement ; qu'il peut également obtenir en justice qu'il soit enjoint au salarié de respecter la clause ; qu'en s'appuyant exclusivement, pour déclarer que la clause litigieuse caractérisait un avantage ''exorbitant'' au profit du salarié et était donc ''dépourvue de cause licite'', sur le caractère prétendument dérisoire de la sanction convenue en cas de manquement à l'obligation de non-concurrence, sans tenir compte des autres remèdes à l'inexécution dont disposait l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1131 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause et L. 1221-1 du code du travail ;

7°/ qu'il en va d'autant plus ainsi que le caractère éventuellement dérisoire de la clause pénale en cas de violation d'une obligation ne peut caractériser une absence de contrepartie sérieuse, dès lors que le créancier victime de l'inexécution peut obtenir du juge, nonobstant toute clause contraire, une augmentation de la peine convenue si elle est manifestement dérisoire ; qu'en s'appuyant, pour déclarer que la clause litigieuse caractérisait un avantage ''exorbitant'' au profit du salarié et était donc nulle comme ''dépourvue de cause licite'', sur le caractère prétendument dérisoire de la sanction convenue en cas de manquement à l'obligation de non-concurrence, la cour d'appel a, pour cette raison supplémentaire, statué par des motifs inopérants et privé sa décision de base légale au regard des

articles 1131 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause et L. 1221-1 du code du travail ;

8°/ que l'existence d'une contrepartie non dérisoire de l'obligation est indépendante de son caractère excessif au regard de la situation financière du débiteur et de sa capacité, en conséquence, à l'assumer ; qu'en se fondant, pour déclarer que la clause litigieuse caractérisait un avantage ''exorbitant'' au profit du salarié et était donc nulle comme ''dépourvue de cause licite'', sur le fait que la situation financière de la société employeur ne lui permettait pas de l'assumer, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, privant ainsi derechef sa décision de base légale au regard des articles 1131 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause et L. 1221-1 du code du travail ;

9°/ que la faculté offerte aux parties de renoncer au bénéfice de la clause de non-concurrence est indifférente pour apprécier le caractère dérisoire de la contrepartie ; qu'en se fondant, pour déclarer que la clause litigieuse caractérisait un avantage ‘'exorbitant'‘ au profit du salarié, sur le fait qu'il n'était pas prévu une faculté de renonciation au profit de l'employeur, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a, pour cette raison supplémentaire, privé sa décision de base légale au regard des articles 1131 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause et L. 1221-1 du code du travail ;

10°/ que la lésion ne constitue pas, sauf exceptions prévues par la loi, une cause de nullité des conventions ; qu'en se fondant, pour déclarer nulle la clause de non-concurrence stipulée au contrat de travail de M. H..., sur le caractère prétendument déséquilibré, à l'avantage du salarié, de la clause

de non-concurrence, la cour d'appel a violé l'article 1118 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

11°/ qu'une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives ; que le caractère indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise s'apprécie à l'égard de l'obligation de non concurrence elle-même et non de l'équilibre entre son étendue et la contrepartie financière qu'elle prévoit ; qu'en se fondant, pour déclarer illicite la clause de non-concurrence en tant qu'elle n'aurait pas pour objet d'assurer une ''réelle protection'' de l'entreprise contre la concurrence d'un cadre commercial confirmé, sur le caractère prétendument déséquilibré de la clause à l'avantage du salarié débiteur de l'obligation de non-concurrence, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants au regard des conditions de validité propres aux clauses de non concurrence, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 [devenu 1103] du code civil ;

12°/ qu'il en va d'autant plus ainsi que seul le salarié peut se prévaloir de l'irrégularité de la clause de non-concurrence tirée de son caractère non indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise ; qu'en se fondant, pour déclarer illicite la clause de non-concurrence en tant qu'elle n'aurait pas pour objet d'assurer une ''réelle protection'' de l'entreprise contre la concurrence d'un cadre commercial confirmé, cependant que cette cause de nullité était invoquée par le seul employeur en vue de faire échec à la demande de paiement de la contrepartie financière convenue, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 [devenu 1103] du code civil ;

13°/ subsidiairement, que M. H... faisait valoir qu'il avait respecté la clause de non-concurrence stipulée au contrat de travail de telle sorte que, même en supposant cette dernière nulle, le fait de l'avoir respectée lui avait causé un préjudice dont l'employeur lui devait réparation ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen décisif, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

14°/ en toute hypothèse, qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si le respect de la clause litigieuse, à la supposer illicite, n'avait pas causé à M. H... un préjudice dont il était dès lors fondé à demander réparation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 [devenu 1240] du code civil et L. 1221-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a relevé que la clause de non-concurrence figurant au contrat de travail prévoyait une indemnisation particulièrement importante au profit du salarié qui n'était justifiée ni par l'étendue géographique de l'obligation de non concurrence, se limitant à deux départements, ni par la durée de celle-ci, ni par la nature des fonctions exercées, que le contrat du salarié avait été établi à une époque où la société rencontrait d'importantes difficultés financières, attestées par les éléments financiers et comptables joints au dossier, que cette situation avait conduit son représentant légal à se rapprocher du groupe Galloo Recycling afin de trouver des financements, que l'embauche du salarié précédait de quelques jours seulement la conclusion du pacte d'associés entre M. T... et les sociétés Almetal et Galloo NV, prévoyant une prise de participation de ces dernières dans le capital des sociétés détenues par l'actionnaire historique, ce qui venait démontrer de façon irréfutable que M. T... avait alors parfaitement conscience de la situation financière critique de son entreprise, qu'en outre, ce dernier avait établi le contrat de travail comportant la clause de non-concurrence litigieuse cinq mois avant de quitter le groupe et quatre mois avant de céder l'intégralité de ses parts à la société Almetal et que, durant cette courte période, il avait également modifié par avenants quatre autres contrats de travail de proches collaborateurs afin d'y insérer la même clause de non-concurrence et que, dans le contexte économique décrit, de telles clauses, octroyant à chacun des salariés une compensation d'un montant disproportionné au regard des sujétions imposées et faisant, dans le même temps obligation à l'employeur de procéder à son paiement en un seul versement, sans faculté pour celui-ci de lever ladite clause, constituaient des avantages exorbitants tandis que la pénalité de 10 000 euros prévue en cas de violation de l'obligation par le salarié était dérisoire au regard de la somme versée. Elle a ainsi, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en nullité du licenciement et de le débouter de sa demande tendant à obtenir la condamnation de la société à lui payer diverses sommes à titre d'indemnité égale aux salaires afférents à la période de protection, congés payés y afférents et dommages-intérêts pour licenciement nul, alors :

« 1°/ que le licenciement d'un ancien délégué syndical qui a exercé ses fonctions pendant au moins un an ne peut, durant les douze mois suivant la date de cessation de ses fonctions, intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ; que cette règle s'applique quelles que soient les conditions de la désignation du délégué syndical, peu important notamment que celle-ci soit conditionnée, dans une entreprise de moins de cinquante salariés, à sa qualité de délégué du personnel ; que la cour d'appel a décidé que M. H... bénéficiait, à la suite de la cessation de ses mandats de délégué du personnel et de délégué syndical, de la protection d'une durée limitée à six mois applicable aux délégués du personnel, et ne pouvait se prévaloir d'une protection d'une durée de douze mois nonobstant le fait qu'il avait exercé les fonctions de délégué syndical pendant plus d'un an ; qu'en statuant de la sorte au motif inopérant que la désignation en qualité de délégué syndical était subordonnée à la qualité de délégué du personnel, dans la mesure où l'entreprise comptait moins de cinquante salariés, la cour d'appel a violé par fausse application les dispositions combinées des articles L. 2143-6 et L. 2411-5 (dans sa rédaction applicable à la cause) du code du travail et par refus d'application, l'article L. 2411-3 du même code ;

2°/ que la décision du ministre du travail en date du 3 avril 2015 se bornait, dans son dispositif, à refuser l'autorisation de licenciement ; qu'en déclarant être liée par les motifs de ladite décision, selon lesquels M. H... aurait seulement pu se prévaloir de la protection de six mois suivant le terme de ses mandats en sa qualité de délégué du personnel, et non de la protection de douze mois en sa qualité de délégué syndical ayant exercé ses fonctions pendant plus d'un an, de telle sorte qu'il n'aurait pas eu la qualité de salarié protégé à la date où l'inspecteur du travail statuait, la cour d'appel a violé par fausse application la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ensemble le principe de l'autorité de la chose décidée en matière administrative ;

3°/ subsidiairement que M. H... soutenait qu'était erroné en droit le raisonnement du ministre du travail, en ce qu'il avait estimé dans les motifs de sa décision que M. H... pouvait seulement se prévaloir de la protection de six mois suivant le terme du mandat en sa qualité de délégué du personnel, et non de la protection de douze mois en sa qualité de délégué syndical ayant exercé ses fonctions pendant plus d'un an ; que cette question étant sérieuse, la cour d'appel, dès lors qu'elle estimait que le juge judiciaire était incompétent pour apprécier la légalité de ces motifs, devait surseoir à statuer et renvoyer les parties à poser cette question par voie préjudicielle à la juridiction administrative ; qu'en s'abstenant de le faire, au motif inopérant qu'elle n'était pas formellement saisie d'une demande de renvoi devant la juridiction administrative, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III et le principe de l'autorité de la chose jugée en matière administrative ;

4°/ qu'en statuant de la sorte, au motif erroné que la question de droit soulevée n'était pas sérieuse, la cour d'appel a aussi violé les articles L. 2143-6, L. 2411-5 (dans sa rédaction applicable à la cause) et L. 2411-3 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 2143-6 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, dans les établissements qui emploient moins de cinquante salariés, les syndicats représentatifs dans l'établissement peuvent désigner, pour la durée de son mandat, un délégué du personnel comme délégué syndical.

8. Aux termes de l'article L. 2411-5 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance précitée, le licenciement d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail, cette autorisation est également requise durant les six premiers mois suivant l'expiration du mandat de délégué du personnel ou de la disparition de l'institution.

9. Il résulte de ces textes que, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, seul un délégué du personnel peut être désigné délégué syndical pour la durée de son mandat de délégué du personnel et que, donc, la protection supplémentaire est celle de six mois attachée à sa qualité de délégué du personnel et non celle d'un an attachée à la qualité de délégué syndical s'il a exercé plus d'un an.

10. En conséquence, la cour d'appel, qui a rappelé que seule la protection légale de six mois trouvait à s'appliquer et a constaté que le salarié avait été désigné, le 22 juillet 2011, en qualité de délégué syndical, quelques semaines après avoir été élu délégué du personnel titulaire et qu'il avait renoncé à ses deux mandats le 28 octobre 2013, ceux-ci prenant fin le 1er janvier 2014, en a exactement conclu que le salarié relevait du statut protecteur jusqu'au 30 juin 2014 et que, celui-ci ayant été convoqué à un entretien préalable à licenciement le 15 juillet 2014, soit après l'expiration du délai de protection, sa demande en nullité du licenciement pour violation du statut protecteur devait être écartée.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Rinuy - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Articles L. 2143-6, alinéa 1, L. 2411-5 du code du travail, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017.

Soc., 4 novembre 2020, n° 19-11.865, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Rupture conventionnelle – Salarié protégé – Mesures spéciales – Autorisation administrative – Domaine d'application – Maire et adjoint au maire des communes de 10 000 habitants au moins n'ayant pas cessé d'exercer leur activité professionnelle – Conditions – Connaissance du mandat par l'employeur – Cas – Portée

Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 2123-9 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-366 du 31 mars 2015, lorsqu'ils n'ont pas cessé d'exercer leur activité professionnelle, les élus mentionnés au premier alinéa du même article, soit les maires et les adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins, sont considérés comme des salariés protégés au sens du livre IV de la deuxième partie du code du travail. C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a décidé que la rupture conventionnelle des maires et adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins, qui n'ont pas cessé leur activité professionnelle, devait être autorisée préalablement par l'inspecteur du travail.

Ayant relevé par ailleurs que le salarié avait, le 13 décembre 2014, informé son employeur de son élection aux fonctions d'adjoint délégué au sport de la commune de Bouguenais le 20 novembre précédent et constaté qu'en l'espèce, la rupture conventionnelle du contrat de travail du salarié avait fait l'objet d'une homologation par l'inspecteur du travail et non d'une autorisation préalable, la cour d'appel en a exactement déduit que cette rupture conventionnelle était nulle et produisait les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur du salarié.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 7 décembre 2018), M. C... a été engagé le 6 janvier 2014 par la société Distribution matériaux bois panneaux (la société), en qualité de technico-commercial.

Le 13 décembre 2014, le salarié a informé son employeur de son élection aux fonctions d'adjoint délégué au sport de la commune de Bouguenais le 20 novembre précédent.

Une convention de rupture conventionnelle a été signée (par les parties) le 10 décembre 2015 et homologuée tacitement par la Direccte.

Le contrat de travail a pris fin le 26 janvier 2016.

2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale, le 10 mai 2016, d'une demande d'annulation de la rupture conventionnelle pour absence d'autorisation de la Direccte malgré son statut de salarié protégé et obtenir le règlement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, de salaire pendant la période de protection et d'indemnité de préavis.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. La société fait grief à l'arrêt de dire que la rupture conventionnelle du contrat de travail du salarié est nulle et de nul effet et, en conséquence, de la condamner à lui payer certaines sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, de salaire pendant la période de protection, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents et de la condamner d'office à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de deux mois d'indemnités, alors :

« 1°/ que selon les dispositions de l'article L. 1237-15 du code du travail, la rupture conventionnelle est soumise à l'autorisation de l'inspecteur du travail pour les seuls salariés bénéficiant d'une protection qui sont mentionnés aux articles L. 2411-1 et L. 2411-2 du même code ; qu'en jugeant dès lors, pour dire nulle et de nul effet la convention de rupture homologuée, que ‘'la rupture conventionnelle du contrat de travail de M. C... a fait l'objet d'une homologation par l'inspecteur du travail et non d'une autorisation préalable alors même que l'employeur avait connaissance depuis le 13 novembre 2014, du mandat d'adjoint ‘'au sport'‘ de M. C... au sein de la commune de Bouguenais‘', cependant que l'adjoint au maire d'une commune d'au moins 10 000 habitants bénéficiant du statut de salarié protégé au titre de l'article L. 2123-9 du code général des collectivités territoriales ne compte pas au nombre des bénéficiaires mentionnés aux articles L. 2411-1 et L. 2411-2 du code du travail, la cour d'appel a violé par fausse application les textes susvisés ;

2°/ et, subsidiairement, que lorsque le salarié bénéficie d'un mandat extérieur à l'entreprise, il pèse sur lui l'obligation d'informer l'employeur, au plus tard avant la rupture du contrat de travail, de l'actualité du mandat qu'il détient ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater que le salarié avait informé la société, au cours de la procédure d'homologation de la rupture conventionnelle du contrat de travail, que son mandat d'adjoint au maire était toujours d'actualité, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1237-15 et L. 2411-1 du code du travail en leur rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 2123-9 du code général des collectivités territoriales. »

Réponse de la Cour

4. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 2123-9 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-366 du 31 mars 2015, lorsqu'ils n'ont pas cessé d'exercer leur activité professionnelle, les élus mentionnés au premier alinéa du même article, soit les maires et les adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins, sont considérés comme des salariés protégés au sens du livre IV de la deuxième partie du code du travail. C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a décidé que la rupture conventionnelle des maires et adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins qui n'ont pas cessé leur activité professionnelle devait être autorisée préalablement par l'inspecteur du travail.

5. Ayant relevé par ailleurs que le salarié avait, le 13 décembre 2014, informé son employeur de son élection aux fonctions d'adjoint délégué au sport de la commune de Bouguenais le 20 novembre précédent et constaté qu'en l'espèce, la rupture conventionnelle du contrat de travail du salarié avait fait l'objet d'une homologation par l'inspecteur du travail et non d'une autorisation préalable, la cour d'appel en a exactement déduit que cette rupture conventionnelle était nulle et produisait les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur du salarié.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le second moyen ; Publication sans intérêt

Portée et conséquences de la cassation

11. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

12. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Distribution matériaux bois panneaux à rembourser aux organismes intéressés, les indemnités de chômage versées à M. C... dans la limite de deux mois d'indemnités, l'arrêt rendu le 7 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit n'y avoir lieu à remboursement par la société Distribution matériaux bois panneaux au Pôle emploi concerné des indemnités de chômage versées au salarié.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Rinuy - Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Articles L. 1237-15, L. 2411-1 et L. 2411-2 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige ; article L. 2123-9, alinéa 4, du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-366 du 31 mars 2015.

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