Numéro 11 - Novembre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2020

APPEL CIVIL

3e Civ., 26 novembre 2020, n° 19-20.024, (P)

Rejet

Appel incident – Intimé s'étant abstenu de former appel incident – Intimé ayant formé appel principal postérieurement – Effets – Portée

Faits et procédure

1. L'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 4 avril 2019) fixe le montant des indemnités revenant à M. E... au titre de l'expropriation partielle, au profit de la commune de Mallemoisson, de plusieurs parcelles lui appartenant.

Examen des moyens

Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. M. E... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'appel principal qu'il a formé le 27 septembre 2018, alors :

« 1°/ qu'en application des articles R. 311-24 et R. 311-26 du code de l'expropriation, la partie intimée, qui désire poursuivre la réformation ou l'annulation du jugement, n'est pas tenue de former un appel incident ; qu'elle peut également interjeter un appel principal à la seule condition de le faire dans le délai requis, courant à compter de la signification du jugement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a estimé que la circonstance que le jugement entrepris n'ait pas été signifié à M. E... était sans incidence sur l'irrecevabilité de son appel, dès lors que M. E... n'avait pas formé appel incident dans le délai de trois mois suivant la notification du mémoire de la commune de Mallemoisson ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles R. 311-24, R. 311-26, R. 311-29 et R. 311-30 du code de l'expropriation ;

2°/ qu'en application de l'article R. 311-29 du code de l'expropriation, les articles 899 et suivants du code de procédure civile ne régissent la procédure d'appel en matière d'expropriation que si les dispositions des articles R. 311-24 et suivants du code de l'expropriation n'y font pas obstacle ; que la procédure d'appel d'un jugement d'expropriation est exclusivement régie par les dispositions des articles R. 311-24 à R. 311-30 du code de l'expropriation, selon lesquelles le délai d'appel d'un mois court à compter de la notification du jugement par signification ; que ne concerne que les procédures régies exclusivement par les articles 550, 909 et 910 du code de procédure civile le principe selon lequel du fait de son abstention à former appel incident dans les conditions prévues par l'article 909 du code de procédure civile, alors que cette voie de recours lui est ouverte dans les conditions prévues par l'article 550 du code de procédure civile, l'intimé n'est pas recevable à relever ensuite appel principal du jugement précédemment attaqué, la date de la signification de ce dernier étant indifférente ; qu'en considérant en application des articles 550 et 909 du code de procédure civile, que l'appel principal de M. E... n'était pas recevable, du fait de son abstention de former appel incident et quand cette voie de recours lui était ouverte, peu important que le jugement qu'il critique ne lui ait pas été signifié, la cour d'appel a violé les articles R. 311-24, R. 311-26, R. 311-29 et R. 311-30 du code de l'expropriation. »

Réponse de la Cour

4. La cour d'appel a relevé que la commune de Mallemoisson avait interjeté appel le 7 février 2018 et que son mémoire, déposé le 3 mai 2018, avait été notifié le 15 mai 2018 à M. E..., qui n'avait ni conclu ni formé appel incident dans les trois mois suivant cette date, mais avait formé un appel à titre principal le 27 septembre 2018.

5. Elle en a déduit à bon droit que M. E..., qui s'était abstenu de former appel incident dans le délai de trois mois ouvert à l'intimé par l'article R. 311-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, n'était pas recevable à relever appel principal du jugement précédemment attaqué, l'absence de signification de celui-ci étant indifférente.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Djikpa - Avocat général : Mme Vassallo (premier avocat général) - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre -

Textes visés :

Article R. 311-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

Rapprochement(s) :

Sur la recevabilité de l'appel principal en cas d'abstention par l'intimé de former appel incident dans le délai prévu par l'article R. 311-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, à rapprocher : 2e Civ., 13 octobre 2016, pourvoi n° 15-25.926, Bull. 2016, II, n° 224 (rejet).

2e Civ., 19 novembre 2020, n° 18-21.550, (P)

Cassation

Appel incident – Recevabilité – Cas – Appel incident interjeté hors du délai d'appel – Conditions – Détermination

Selon l'article 550, alinéa 1, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009, sous réserve des articles 909 et 910 du code de procédure civile, l'appel incident ou l'appel provoqué peut être formé, en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l'appel principal n'est pas lui-même recevable.

Par conséquent, est recevable l'appel incident formé sur un appel principal recevable de la partie adverse, quand bien même l'appelant incident aurait précédemment formé un appel principal ayant fait l'objet d'une mesure de radiation en application de l'article 526 du code de procédure civile.

Appel incident – Recevabilité – Appelant irrecevable en son propre appel principal – Absence d'influence

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un arrêt du 3 juin 2002 a prononcé le divorce de M. Z... et de P... E... ; qu'un arrêt du 17 juin 2009 a mis à la charge de M. Z... le paiement d'une indemnité d'occupation de leur immeuble indivis à hauteur de 560 euros par mois à compter du 29 juin 1999 ; que le pourvoi formé contre cet arrêt a été déclaré non admis le 9 mars 2011 ; que P... E... est décédée le 18 août 2015, laissant pour lui succéder ses deux filles, Mmes R... et Z... ; que, par acte du 3 juin 2016, celles-ci ont assigné leur père en la forme des référés devant le président d'un tribunal de grande instance, lequel les a autorisées à vendre cet immeuble et condamné M. Z... à leur payer une somme de 14 556 euros au titre de l'indemnité d'occupation ; que celui-ci a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle avait autorisé ses filles à vendre seules le bien indivis ; que Mmes R... et Z... en ont aussi interjeté appel en ce qu'elle avait limité le montant de l'indemnité d'occupation ; que le conseiller de la mise en état ayant radié l'appel principal formé par M. Z... sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile, celui-ci a formé appel incident dans l'instance d'appel ouverte par l'appel principal de Mmes R... et Z... ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

Délibéré par la première chambre civile de la Cour de cassation, après débats à l'audience publique du 5 novembre 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Vigneau, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 550, alinéa 1, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009 ;

Attendu selon ce texte, que sous réserve des articles 909 et 910 du code de procédure civile, l'appel incident ou l'appel provoqué peut être formé, en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal ; que dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l'appel principal n'est pas lui-même recevable ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable l'appel incident de M. Z..., l'arrêt retient qu'en l'absence de motif sérieux pour ne pas payer l'indemnité d'occupation mise à sa charge par la décision du 18 août 2016 assortie de l'exécution provisoire, le conseiller de la mise en état a, faisant application de l'article 526 du code de procédure civile, radié son appel principal ;

Qu'en statuant ainsi, alors que M. Z... était recevable à former appel incident sur l'appel principal recevable de Mmes R... et Z... quand bien même l'instance ouverte par son propre appel principal avait été radiée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen, qui est recevable étant de pur droit :

Délibéré par la première chambre civile dans les mêmes conditions que le deuxième moyen ;

Vu les articles 500, 501, 504 et 579 du code de procédure civile, ensemble l'article 2224 du code civil ;

Attendu que pour écarter la fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale des échéances échues cinq ans avant la délivrance de l'assignation du 3 juin 2016 et condamner M. Z... au paiement de la somme de 93 964 euros au titre des indemnités d'occupation, l'arrêt retient que celui du 17 juin 2009, qui a posé le principe d'une indemnité d'occupation due par M. Z... depuis le 29 juin 1999, ayant acquis force exécutoire le 9 mars 2011, date du rejet du pourvoi par la Cour de cassation, la prescription quinquennale ne s'applique que pour les échéances à échoir postérieurement à cette date, de sorte que l'indemnité d'occupation est due pour les périodes du 29 juin 1999 au 9 mars 2011 puis du 3 juin 2011 au 25 juillet 2013, date de l'expulsion de M. Z... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, le pourvoi en cassation n'étant pas suspensif, l'arrêt mettant à la charge de M. Z... une indemnité d'occupation était exécutoire dès son prononcé, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Lemoine - Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article 550, alinéa 1, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 9 janvier 2014, pourvoi n° 12-27.109, Bull. 2014, II, n° 2 (cassation), et les arrêts cités.

2e Civ., 19 novembre 2020, n° 19-18.800, n° 19-18.801, (P)

Cassation

Décisions susceptibles – Applications diverses – Saisie immobilière – Jugement d'adjudication statuant sur une contestation

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° C 19-18.800 et D 19-18.801 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Paris, 4 avril 2019, RG 18/24266 et 18/24260), un jugement du 30 septembre 2016 a ordonné, à la demande de la comptable publique, responsable du pôle de recouvrement spécialisé de Seine-et-Marne (le comptable public), le partage judiciaire de l'indivision existant entre M. I... et Mme A... portant sur divers biens immobiliers et la licitation de ceux-ci en deux lots.

3. Par jugements du 18 janvier 2018, un tribunal de grande instance a adjugé le lot n° 1 aux sociétés Flaure et Foulques et le lot n° 2 à Mme P.... Après déclaration de surenchère formée pour chacune de ces ventes, deux jugements du 5 avril 2018, rendus en dernier ressort, ont rejeté les contestations formées par Mme A... comportant, notamment, une demande d'annulation rétroactive de la procédure de surenchère, et adjugé chacun des lots à la société civile immobilière du Comptoir français.

4. La cour d'appel a déclaré irrecevables les appels formés par M. I... et Mme A... à l'encontre de chacun des jugements.

Recevabilité des pourvois contestée par la défense

4. Le comptable public fait valoir que M. I... et Mme A... sont dépourvus d'intérêt à former pourvoi au motif que leur avocat a accepté le projet de distribution élaboré à la suite des adjudications et a sollicité le paiement des sommes revenant à M. I....

5. Cependant, dès lors que la contestation formée par M. I... et Mme A... tendait à l'anéantissement rétroactif de la procédure de surenchère, qui aurait pour effet l'anéantissement de la répartition du produit de la vente, ils justifient d'un intérêt à former un pourvoi contre les arrêts qui ont déclaré leur appel irrecevable.

6. D'où il suit que les pourvois sont recevables.

Examen des moyens des pourvois, qui sont identiques

Enoncé des moyens

7. M. I... et Mme A... font grief aux arrêts de déclarer l'appel irrecevable, alors :

« 1°/ qu'aux termes de l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, tout jugement d'adjudication statuant sur une contestation est susceptible d'appel ; que la cour d'appel a constaté que le jugement du 5 avril 2018 était un jugement sur incident et d'adjudication et qu'il avait tranché une contestation ; qu'en jugeant cependant ce jugement insusceptible d'appel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article R. 322-60 du code de procédures civiles d'exécution ;

2°/ qu'une partie ne peut, en l'absence d'une disposition spéciale, être privée du bénéfice de la règle du double degré de juridiction ; qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne dispose que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable au jugement sur incident et d'adjudication qui suit une licitation partage ; qu'en énonçant, pour déclarer l'appel irrecevable, que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution est inapplicable aux ventes sur licitation des immeubles, en application des dispositions des articles 1377 et 1278 du code de procédure civile, la cour d'appel a violé par fausse application les articles 1377 et 1278 du code de procédure civile et, par refus d'application, l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble les articles 527 et 543 du code de procédure civile ;

3°/ qu'à supposer même inapplicable l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, le jugement sur incident et d'adjudication intervenant à la suite d'un jugement de licitation rendu à la demande d'un créancier personnel d'un indivisaire est susceptible d'appel, aucune disposition n'excluant le droit d'appel à l'encontre d'un tel jugement ; qu'en jugeant l'appel irrecevable, la cour d'appel a privé M. et Mme I... de leur droit d'appel et a violé les articles 527 et 543 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 543 du code de procédure civile et R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution :

8. Aux termes du premier de ces textes, la voie de l'appel est ouverte en toutes matières, même gracieuses, contre les jugements de première instance s'il n'en est autrement disposé.

Selon le second, en matière de saisie immobilière, les jugements d'adjudication qui statuent sur une contestation sont susceptibles d'appel dans un délai de quinze jours à compter de leur notification.

9. S'il résulte de la combinaison des articles 1377 et 1271 à 1281 du code de procédure civile que de nombreuses règles régissant la procédure de saisie immobilière sont applicables, par renvoi de texte, à la procédure de vente judiciaire d'immeubles après partage, ces dispositions ne lui rendent pas applicable l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution. Toutefois il ne peut en être déduit que les auteurs de la réforme du droit des successions, par la loi n° 2006-728 du 23 juin 2016, et de la procédure de saisie immobilière, par l'ordonnance n° 2006-461 du 21 avril 2006 et le décret 2006-236 du 27 juillet 2006, ont entendu apporter une dérogation au principe général de l'ouverture de l'appel contre les jugements, posé par l'article 543 du code de procédure civile, dès lors qu'aucun motif tenant à la nature propre de la procédure de licitation ne permettrait de justifier l'absence d'ouverture de cette voie de recours lorsque le jugement d'adjudication a statué sur une contestation.

10. Pour déclarer l'appel irrecevable, l'arrêt retient que l'article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution n'est pas applicable en matière de licitation.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts (RG 18/24266 et 18/24260) rendus le 4 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Leroy-Gissinger - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article 543 du code de procédure civile ; article R. 322-60 du code des procédures civiles d'exécution.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 6 janvier 2011, pourvoi n° 09-70.437, Bull. 2011, II, n° 1 (rejet), et les arrêts cités ; 2e Civ.,16 mai 2012, pourvoi n° 12-18.938, Bull. 2012, II, n° 97 (cassation).

2e Civ., 19 novembre 2020, n° 19-17.934, (P)

Cassation

Délai – Point de départ – Notification – Notification à domicile – Retrait de la lettre de notification

Il résulte des articles 528, 668 et 669 du code de procédure civile qu'en cas de notification à domicile, le délai pour faire appel court, à l'égard du destinataire de la lettre de notification, à compter de la date à laquelle cette lettre lui a été remise, c'est-à-dire à compter de son retrait.

Faits et procédure

1. Selon les arrêts attaqués (Saint-Denis de la Réunion, 30 novembre 2018 et 27 mai 2019), la caisse d'allocations familiales de La Réunion (la caisse) a informé M. T..., au cours de l'année 2014, que ses droits étaient suspendus.

2. Par une lettre de mise en demeure en date du 6 mars 2015, la caisse lui a demandé de payer une certaine somme à titre de trop-perçu, tandis que M. T... a sollicité le paiement d'un rappel de prestations.

3. Par jugement en date du 31 août 2016, un tribunal des affaires de sécurité sociale a annulé la mise en demeure et rejeté les autres demandes de M. T....

4. M. T... a interjeté appel, le 12 octobre 2016, de ce jugement, qui lui a été notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 31 août 2016.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. M. T... fait grief à l'arrêt en date du 30 novembre 2018, rectifié par l'arrêt en date du 27 mai 2019, de déclarer irrecevable son appel comme tardif, alors « que la date de réception d'une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception est celle qui est apposée par l'administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire ; qu'en l'espèce, M. T... avait fait valoir qu'il n'avait retiré le pli recommandé lui notifiant le jugement du 31 août 2016 que le 13 septembre 2006, soit moins d'un mois avant d'interjeter appel dudit jugement ; qu'en retenant qu'en cas de notification à domicile, la date de notification du jugement est celle à laquelle la lettre de notification a été déposée et non celle à laquelle elle a été retirée, pour en déduire que le jugement avait été notifié à M. T... le 6 septembre 2016, date à laquelle lui a été distribué l'avis selon lequel un courrier était tenu à sa disposition au bureau de poste, et que l'appel formé le 12 octobre était irrecevable car tardif, tandis que le délai d'appel n'avait couru qu'à compter du 13 septembre 2016, date à laquelle M. T... avait retiré le courrier lui notifiant ce jugement, la cour d'appel a violé l'article 669, alinéa 3, du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 528, 668 et 669 du code de procédure civile :

6. Il résulte de ces textes que le délai d'appel, à l'égard du destinataire de la lettre de notification du jugement, court à compter de la date à laquelle la lettre lui est remise.

7. Pour déclarer l'appel irrecevable comme tardif, l'arrêt retient qu'il résulte des dispositions de l'article R. 142-28 du code de la sécurité sociale que le délai d'appel est d'un mois à compter de la notification du jugement, qu'en cas de notification à domicile, le délai court à compter du dépôt de la lettre recommandée et non pas de son retrait et qu'en conséquence, l'appel formé le 12 octobre 2016, alors que l'accusé de réception de la notification du jugement était en date du 6 septembre 2016, est manifestement hors délais.

8. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 novembre 2018, rectifié par arrêt du 27 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Fulchiron - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Cabinet Colin-Stoclet -

Textes visés :

Articles 528, 668 et 669 du code de procédure civile.

2e Civ., 19 novembre 2020, n° 19-16.009, (P)

Rejet

Intimé – Pluralité – Appel interjeté contre un seul – Litige indivisible – Effets

Il résulte des articles 552 et 553 du code de procédure civile qu'en cas d'indivisibilité du litige, d'une part, l'appel dirigé contre l'une des parties réserve à l'appelant la faculté d'appeler les autres à l'instance et, d'autre part, l'appel formé contre l'une des parties n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance.

Dès lors, la seconde déclaration d'appel, formée par l'appelant pour appeler à la cause les parties omises dans la première déclaration d'appel, régularise l'appel sans créer une nouvelle instance, laquelle demeure unique.

En conséquence, dans un litige où l'objet est indivisible, c'est à bon droit qu'une cour d'appel statue au regard des dernières conclusions, sans se référer à d'autres conclusions, quand bien même l'appelant aurait formé successivement deux appels et qu'une jonction d'instances aurait été prononcée.

Reprise d'instance

1. Il est donné acte à Mme K... E... et à MM. Q... et O... E... de ce qu'en tant qu'héritiers de M... E..., qui est décédé le 13 février 2020, ils reprennent l'instance contre lui introduite.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 6 mars 2019), un jugement a déclaré la Société d'économie mixte d'exploitation du thermalisme et du tourisme de Néris-les-Bains (la SEMETT) responsable de la légionellose dont M... E... était atteint et l'a condamnée à lui payer, ainsi qu'à son épouse, Mme K... E..., certaines sommes en réparation de leurs préjudices.

La SEMETT a en outre été condamnée à payer une certaine somme à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (la caisse de prévoyance).

3. La SEMETT a interjeté appel de ce jugement par deux déclarations d'appel distinctes, la première reçue au greffe de la cour le 31 mars 2017, dirigée contre M. et Mme E..., la seconde reçue le 11 avril 2017, dirigée contre la caisse de prévoyance.

Les deux instances ont été jointes par ordonnance du 19 septembre 2017.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

5. La SEMETT fait grief à l'arrêt, en confirmant le jugement entrepris pour le surplus, de la condamner à verser à la caisse de prévoyance la somme de 62 298,96 euros, alors « qu'une jonction d'instance ne créant pas une procédure unique, les demandes des parties sont déterminées, pour chaque instance, par les conclusions déposées dans celle-ci ; qu'en l'espèce, la SEMETT, avant l'ordonnance de jonction, avait déposé deux jeux de conclusions le 7 septembre 2017, à la fois dans l'instance l'opposant à M. et Mme E..., et à la fois dans l'instance l'opposant à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF ; qu'en statuant exclusivement au visa des conclusions du 7 septembre 2017 déposées par la SEMETT dans l'instance l'opposant à M. et Mme E... bien que la SEMETT avait aussi déposé des conclusions le même jour dans l'instance l'opposant à la caisse de prévoyance, demandant l'annulation du jugement et la constatation du caractère injustifié des sommes allouées à la caisse de prévoyance, la cour d'appel a violé les articles 368 et 954 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte des articles 552 et 553 du code de procédure civile, qu'en cas d'indivisibilité du litige, d'une part, l'appel dirigé contre l'une des parties réserve à l'appelant la faculté d'appeler les autres à l'instance, et d'autre part, l'appel formé contre l'une des parties n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance.

7. Dès lors, la seconde déclaration d'appel formée par l'appelant pour appeler à la cause les parties omises dans la première déclaration d'appel régularise l'appel, sans créer une nouvelle instance, laquelle demeure unique.

8. Ayant retenu, par des motifs non critiqués, que l'objet du litige était indivisible, ce dont il résultait que la procédure était unique, peu important que la SEMETT ait formé successivement deux appels et qu'une jonction d'instances ait postérieurement été prononcée, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui a relevé qu'elle statuait au regard des dernières conclusions notifiées le 7 septembre 2017 par la SEMETT, ne s'est pas référée à un autre jeu de conclusions.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Lemoine - Avocat(s) : SCP Marlange et de La Burgade ; SCP L. Poulet-Odent ; Me Le Prado -

Textes visés :

Articles 552 et 553 du code de procédure civile.

2e Civ., 19 novembre 2020, n° 19-16.792, (P)

Rejet

Procédure avec représentation obligatoire – Déclaration d'appel – Caducité – Cas – Procédures fondées sur l'article 905 du code de procédure civile – Défaut de signification de la déclaration d'appel dans le délai imparti – Demande d'aide juridictionnelle déposée avant la déclaration d'appel – Absence d'influence

Il résulte de l'article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, que le point de départ d'un délai de recours est reporté, au profit de celui qui demande le bénéfice de l'aide juridictionnelle avant l'expiration de ce délai, au jour de la notification de la décision statuant définitivement sur cette demande ou, en cas d'admission, à la date, si elle est plus tardive, du jour de la désignation d'un auxiliaire de justice en vue d'assister ou de représenter le bénéficiaire de cette aide pour l'exercice de ce recours. Le point de départ des délais impartis pour conclure ou former appel incident est reporté de manière identique au profit des parties à une instance d'appel sollicitant le bénéfice de l'aide juridictionnelle au cours des délais mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile.

Ces règles, qui se bornent à prévoir au profit de l'appelant, un report du délai de recours, au plus tard jusqu'au jour de la désignation d'un auxiliaire de justice, ne permettent pas un nouveau report du point de départ du délai pour signifier la déclaration d'appel, en application de l'article 905-1 du code de procédure civile, même si la demande d'aide juridictionnelle a été formée antérieurement à la déclaration d'appel et qu'un huissier de justice a été désigné postérieurement.

Elles n'en poursuivent pas moins un but légitime au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en l'occurrence la célérité de la procédure et une bonne administration de la justice. Elles sont, en outre, accessibles et prévisibles, et ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge d'appel, un rapport raisonnable existant entre les moyens employés et le but visé.

En conséquence, encourt la caducité la déclaration d'appel qui n'est pas signifiée dans le délai de 10 jours à compter de l'avis de fixation de l'affaire à bref délai, quand bien même le bénéfice de l'aide juridictionnelle, sollicité avant de relever appel, aurait été accordé à l'appelant postérieurement.

Procédure avec représentation obligatoire – Déclaration d'appel – Caducité – Signification de la déclaration d'appel – Délai – Point de départ – Demande d'aide juridictionnelle antérieure à la déclaration d'appel – Absence d'influence – Convention européenne des droits de l'homme – Compatibilité

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 12 juillet 2018), M. R... a sollicité, le 20 octobre 2017, le bénéfice de l'aide juridictionnelle, puis a relevé appel, le 7 novembre 2017, d'une ordonnance de référé ayant notamment constaté la résiliation du bail qu'il avait conclu avec la société Hogan.

2. L'aide juridictionnelle a été accordée à M. R... le 13 décembre 2017.

3. Il a déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant prononcé la caducité de sa déclaration d'appel en application de l'article 905-1 du code de procédure civile, à défaut de l'avoir signifiée dans les dix jours de la réception de l'avis de fixation de l'affaire à bref délai qui lui a été adressé par le greffe le 17 novembre 2017.

Examen du moyen

4. M. R... fait grief à l'arrêt, statuant sur déféré, de constater qu'il n'a pas procédé à la signification de sa déclaration d'appel avant l'expiration du délai imparti de dix jours, survenue le 18 janvier 2018 après obtention de l'aide juridictionnelle et la désignation consécutive d'un huissier de justice le 8 janvier 2018 et en conséquence de confirmer l'ordonnance de caducité rendue le 21 décembre 2017 par le président de la première chambre D de la cour d'appel de Montpellier alors :

« 1° / que le droit fondamental à un procès équitable implique celui d'un accès effectif au juge ; qu'en l'espèce, l'ordonnance par laquelle le conseiller de la mise en état prononce à tort la caducité d'une déclaration d'appel sur le fondement de l'article 905-1 du code de procédure civile interrompt le délai de dix jours imparti à l'appelant pour faire signifier sa déclaration d'appel à l'intimé qui n'a pas constitué avocat ; que pour confirmer la déclaration d'appel du 7 novembre 2017, la cour d'appel par un arrêt postérieur à la date à laquelle le délai de dix jours devait expirer, a retenu que M. R... aurait dû faire procéder à la signification de sa déclaration d'appel avant la date d'expiration du délai de 10 jours fixée au 18 janvier 2018, la SCP X..., huissier de justice ayant été désignée au titre de l'aide judiciaire, le 8 janvier 2018 pour apporter son concours ; qu'en se déterminant ainsi, quand le délai pour faire signifier la déclaration d'appel avait été interrompu par l'ordonnance de caducité du 21 décembre 2017 et ne pouvait recommencer à courir qu'au jour où elle rendait son arrêt, la cour d'appel, qui a ainsi porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de M. R... à un recours effectif au juge, a violé l'article 905-1 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ;

2°/ que le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat, et spécialement, sur le résultat d'investigations personnelles ; qu'au cas présent ni M. R... ni la SCI Hogan n'avaient soutenu qu'un huissier de justice en la personne de la SCP X... avait été désignée le 8 janvier 2018 pour apporter son concours ; que cette pièce ne figurait pas dans les éléments du débats et n'avait été produite par aucune des parties ; qu'en retenant ainsi, des éléments qui n'étaient pas dans le débat et qu'elle n'a donc pu se procurer que par des investigations personnelles hors la présence des parties, la cour d'appel a violé l'article 7 du code de procédure civile ;

3°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, M. R... avait fait valoir dans ses dernières conclusions du 24 mai 2018 qu'aucun huissier n'avait encore été désigné et il produisait l'attestation de dépôt du bureau d'aide juridictionnelle ainsi que la décision d'aide juridictionnelle du 13 décembre 2017 d'où il ressortait qu'aucun huissier n'avait été désigné ; que la SCI Hogan, qui sollicitait la confirmation de l'ordonnance de caducité, se bornait dans ses conclusions à soutenir que l'appel était caduc compte tenu de l'avis du 17 novembre 2017 ou des différents avis de fixation du déféré des 1er février et 28 avril 2018 qu'elle produisait : qu'il ne résulte ainsi ni des pièces de la procédure ni des énonciations de l'arrêt que la désignation de la SCP X..., huissier de justice pour apporter son concours datée du 8 janvier 2018 et à laquelle aucune des parties ne s'étaient pas référées qui n'était pas mentionnée dans leurs écritures, leur ait été communiquée, qu'en fondant sa décision sur cette pièce sans inviter les parties à s'expliquer sur cet élément, la cour a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

4°/ que le droit fondamental à un procès équitable implique celui d'un accès effectif au juge ; qu'en l'espèce, l'ordonnance par laquelle le conseiller de la mise en état prononce à tort la caducité d'une déclaration d'appel sur le fondement de l'article 905-1 du code de procédure civile interrompt le délai de dix jours imparti à l'appelant pour faire signifier sa déclaration d'appel à l'intimé qui n'a pas constitué avocat ; que pour confirmer la caducité de la déclaration d'appel du 7 novembre 2017, la cour d'appel par un arrêt postérieur à la date à laquelle le délai de dix jours devait expirer, a retenu que M. R... aurait dû faire procéder à la signification de sa déclaration d'appel avant la date d'expiration du délai de 10 jours fixée au 18 janvier 2018, la SCP X..., huissier de justice ayant été désignée au titre de l'aide judiciaire, le 8 janvier 2018 pour apporter son concours ; qu'en se déterminant ainsi, quand le délai pour faire signifier la déclaration d'appel avait été interrompu par l'ordonnance de caducité du 21 décembre 2017 et ne pouvait recommencer à courir qu'au jour où elle rendait son arrêt, la cour d'appel, qui a ainsi porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de M. R... à un recours effectif au juge, a violé les articles 905-1 du code de procédure civile et 38 du décret du 19 décembre 1991, ensemble l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte de l'article 38 du décret n°91-1266 du 19 décembre 1991, dans sa rédaction issue du décret n°2017-891 du 6 mai 2017, que le point de départ d'un délai de recours est reporté, au profit de celui qui demande le bénéfice de l'aide juridictionnelle avant l'expiration de ce délai, au jour de la notification de la décision statuant définitivement sur cette demande ou, en cas d'admission, à la date, si elle est plus tardive, du jour de la désignation d'un auxiliaire de justice en vue d'assister ou de représenter le bénéficiaire de cette aide pour l'exercice de ce recours.

Le point de départ des délais impartis pour conclure ou former appel incident est reporté de manière identique au profit des parties à une instance d'appel sollicitant le bénéfice de l'aide juridictionnelle au cours des délais mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile.

6. Ces règles, qui se bornent à prévoir, au profit de l'appelant, un report du délai de recours au plus tard jusqu'au jour de la désignation d'un auxiliaire de justice, ne permettent pas un nouveau report du point de départ du délai pour signifier la déclaration d'appel, en application de l'article 905-1 du code de procédure civile, même si la demande d'aide juridictionnelle a été formée antérieurement à la déclaration d'appel et un huissier de justice désigné postérieurement.

7. Elles poursuivent néanmoins un but légitime au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en l'occurrence la célérité de la procédure et une bonne administration de la justice. Elles sont, en outre, accessibles et prévisibles, et ne portent par une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge d'appel, un rapport raisonnable de proportionnalité existant entre les moyens employés et le but visé.

8. L'arrêt constate que par un avis de fixation de l'affaire à bref délai du 17 novembre 2017, M. R... avait été invité à signifier sa déclaration d'appel dans un délai de 10 jours à compter de sa réception et qu' il n'y avait pas procédé dans le délai imparti.

9. Il en résulte que la déclaration d'appel encourait la caducité.

10. Par ce motif de pur droit, substitué d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux critiqués par le moyen, l'arrêt se trouve légalement justifié.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Lemoine - Avocat(s) : SCP Le Bret-Desaché ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 4 juin 2020, pourvoi n° 19-24.598, Bull. 2020, (rejet).

2e Civ., 19 novembre 2020, n° 19-13.642, (P)

Rejet

Procédure avec représentation obligatoire – Déclaration d'appel – Déclarations d'appel successives – Second appel – Régularisation de la première déclaration d'appel – Portée

Il résulte de l'article 901 du code de procédure civile que la déclaration d'appel est faite par acte contenant, à peine de nullité, les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

La déclaration d'appel, nulle, erronée ou incomplète pouvant néanmoins être régularisée par une nouvelle déclaration d'appel dans le délai pour conclure, une seconde déclaration d'appel peut venir étendre la critique du jugement à d'autres chefs non critiqués dans la première déclaration, sans qu'un acquiescement aux chefs non critiqués dans un premier temps ne puisse être déduit de cette omission.

En outre, la cour d'appel ayant été saisie dès la première déclaration d'appel, la seconde déclaration s'incorpore à la première de sorte que si sont critiqués, dans la seconde déclaration d'appel, de nouveaux chefs de jugement, la cour d'appel reste saisie de la critique des chefs de jugement mentionnés dans la première déclaration d'appel.

Acte d'appel – Nullité – Vice de forme – Régularisation – Nouveaux chefs de jugement critiqués – Effets

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 14 janvier 2019), Mme F... a été licenciée suite à une lettre signée par M. N... T... (M. N...), agissant en qualité de mandataire de L... B... T... y H..., décédée quelques mois plus tard. Postérieurement, la formation des référés d'un conseil de prud'hommes a, par une ordonnance du 7 mars 2018, condamné M. N... à remettre sous astreinte à Mme F... une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et un reçu pour solde de tout compte et s'est réservé le pouvoir de liquider l'astreinte.

2. Par la suite, tandis que Mme F... a saisi la formation des référés en liquidation de l'astreinte, M. N... l'a également saisie afin de voir ordonner le rapport de l'ordonnance du 7 mars 2018.

Par ordonnance du 14 août 2018, le juge des référés a ordonné la jonction des deux procédures et a notamment rapporté l'ordonnance du 7 mars 2018 et rejeté les demandes de Mme F... en liquidation de l'astreinte.

3. Mme F... a interjeté appel de cette ordonnance par deux déclarations d'appel du même jour, visant chacune une partie des chefs de dispositif de la décision entreprise.

La cour d'appel a rendu deux arrêts le 14 janvier 2019 (numéros RG 18/02873 et 18/02875) contre lesquels M. N... a formé deux pourvois.

4. L'arrêt attaqué par le présent pourvoi est l'arrêt numéro RG 18/02875.

Examen des moyens

Sur le second moyen, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. M. N... fait grief à l'arrêt d'infirmer l'ordonnance prononcée le 14 août 2018 et de dire n'y avoir lieu de rapporter l'ordonnance prononcée le 7 mars 2018 par la formation des référés du conseil de prud'hommes de Bayonne et que cette ordonnance était pleinement exécutoire, alors :

« 1°/ qu'une même et unique décision ne peut faire l'objet que d'un seul appel de la part d'une même partie, quand bien même elle aurait été rendue à la suite de la jonction de deux instances ; qu'en jugeant au contraire que la jonction d'instance avait conservé l'autonomie des deux procédures jointes, notamment en ce qui concernait l'exercice des voies de recours, de sorte que le second appel formé par Mme F... à l'encontre de la décision concernée était recevable, au même titre que le premier, cependant qu'il était constant que les deux appels étaient relatifs à la même et unique décision rendue à la suite de la jonction d'instance, la cour d'appel a violé les articles 367 et 901 du code de procédure civile ;

2°/ que la déclaration d'appel énonce les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité de sorte que, sauf indivisibilité de l'objet du litige, la déclaration d'appel vaut acquiescement de l'appelant aux chefs du jugement attaqué non expressément visés par la déclaration ; qu'en jugeant pourtant qu'il ne pouvait être déduit de la déclaration d'appel formée par l'appelante à l'encontre de l'ordonnance du 14 août 2018, enregistrée en premier et limitée à la liquidation de l'astreinte, un quelconque acquiescement de celle-ci aux chefs de dispositif de ladite ordonnance non expressément visés par cette déclaration et en accueillant ainsi le second appel formé par l'appelante des chefs non critiqués par la première déclaration, la cour d'appel a violé l'article 901 du code de procédure civile ;

3°/ que si la rectification, dans le délai d'appel, d'une première déclaration erronée ou incomplète reste possible, la déclaration d'appel rectificative se substitue nécessairement à la déclaration initiale, de sorte que la cour d'appel, qui n'est saisie que des chefs de dispositif critiqués par la déclaration rectificative, ne peut statuer à la fois sur les chefs critiqués par la première déclaration et ceux critiqués par la seconde ; qu'en statuant à la fois sur les demandes formées par Mme F... par sa première et sa seconde déclaration d'appel, cependant qu'à supposer même que la seconde déclaration d'appel ait rectifié la première, la juridiction du second degré ne pouvait être saisie cumulativement des chefs critiqués par les deux déclarations, la cour d'appel a violé l'article 901 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

7. Il résulte de l'article 901 du code de procédure civile que la déclaration d'appel est faite par acte contenant, à peine de nullité, les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

8. La déclaration d'appel, nulle, erronée ou incomplète, peut néanmoins être régularisée par une nouvelle déclaration d'appel, dans le délai pour conclure.

9. Dès lors, une seconde déclaration d'appel peut venir étendre la critique du jugement à d'autres chefs non critiqués dans la première déclaration, sans qu'un acquiescement aux chefs du jugement non critiqués dans un premier temps ne puisse être déduit de cette omission.

10. En outre, la cour d'appel ayant été valablement saisie dès la première déclaration d'appel, la seconde déclaration s'incorpore à la première, de sorte que si sont critiqués, dans la seconde déclaration d'appel, de nouveaux chefs du jugement, la cour d'appel reste saisie de la critique des chefs du jugement mentionnés dans la première déclaration d'appel.

11. Par ce motif de pur droit, substitué d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux critiqués par le moyen, l'arrêt, qui a constaté que Mme F... avait formé successivement le même jour deux déclarations d'appel critiquant chacune des chefs distincts de l'ordonnance déférée, se trouve légalement justifié.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Lemoine - Avocat(s) : SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre ; SCP Spinosi et Sureau -

Textes visés :

Article 901 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 16 novembre 2017, pourvoi n° 16-23.796, Bull. 2017, II, n° 215 (rejet) ; 2e Civ., 30 janvier 2020, pourvoi n° 18-22.528, Bull. 2020, (cassation), et l'avis cité.

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