Numéro 11 - Novembre 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2019

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL

Soc., 20 novembre 2019, n° 18-11.811, (P)

Cassation partielle

Conventions et accords collectifs – Conventions diverses – Bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils et sociétés de conseils – Convention collective nationale du 15 décembre 1987 – Article 32 – Ingénieurs et cadres – Rémunération – Contrôle du respect de la rémunération minimale conventionnelle – Comparaison avec le salaire minimum conventionnel mensuel – Modalité – Détermination – Portée

L'article 32 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, dite Syntec, dispose que pour établir si l'ingénieur ou le cadre reçoit au moins le minimum le concernant, les avantages prévus ci-dessus doivent être intégrés dans la rémunération annuelle dont 1/12 ne doit, en aucun cas, être inférieur à ce minimum.

Il en résulte qu'en instituant un contrôle du respect de la rémunération minimale conventionnelle, une fois l'année écoulée, par comparaison entre le salaire minimum conventionnel mensuel et le douzième de la rémunération annuelle à intégrer dans l'assiette de comparaison, la convention collective fait exception au principe selon lequel les éléments de salaire à versement non mensuel ne doivent être pris en compte dans la comparaison avec le salaire minimum mensuel que pour le mois où ils ont été effectivement versés.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé, que M. D... a été engagé le 27 juillet 2000 en qualité de technicien micro-réseaux par la société GMF-BMI ; que le contrat de travail a été transféré à des employeurs successifs, en dernier lieu à la société Sogeti France ; que depuis le 31 décembre 2016 le salarié est classé, au sein de la catégorie cadre, à la position 3.1, coefficient 170, grade A de la classification des emplois de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, dite Syntec ; que le salarié a saisi la formation des référés d'une juridiction prud'homale de diverses demandes ; que le syndicat Alliance ouvrière est intervenu volontairement devant la cour d'appel ;

Sur les deux moyens du pourvoi incident du salarié et du syndicat :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur :

Vu l'article 32 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 ;

Attendu, selon ce texte, que dans les barèmes des appointements minimaux garantis afférents aux positions définies, sont inclus les avantages en nature évalués d'un commun accord et mentionnés dans la lettre d'engagement ainsi que les rémunérations accessoires en espèces, mensuelles ou non, fixées par la lettre d'engagement ou par la lettre de régularisation d'engagement ou par un accord ou une décision ultérieure ; que pour établir si l'ingénieur ou le cadre reçoit au moins le minimum le concernant, les avantages prévus ci-dessus doivent être intégrés dans la rémunération annuelle dont 1/12 ne doit, en aucun cas, être inférieur à ce minimum ; que par contre, les primes d'assiduité et d'intéressement, si elles sont pratiquées dans l'entreprise, les primes et gratifications de caractère exceptionnel et non garanties ne sont pas comprises dans le calcul des appointements minimaux, non plus que les remboursements de frais, les indemnités en cas de déplacement ou détachement ; qu'il en résulte qu'en instituant un contrôle du respect de la rémunération minimale conventionnelle, une fois l'année écoulée, par comparaison entre le salaire minimum conventionnel mensuel et le douzième de la rémunération annuelle à intégrer dans l'assiette de comparaison, la convention collective fait exception au principe selon lequel les éléments de salaire à versement non mensuel ne doivent être pris en compte dans la comparaison avec le salaire minimum mensuel que pour le mois où ils ont été effectivement versés ;

Attendu que pour condamner l'employeur au paiement, par provision, de la différence entre le salaire brut mensuel versé au salarié sur la période de juillet 2014 à juillet 2017 inclus et le salaire brut mensuel conventionnellement garanti, exception faite des mois de juin et de décembre de chaque année comprise dans cette période, l'arrêt retient que si les primes de vacances et de fin d'année ne doivent pas être déduites des appointements minimaux bruts garantis, en revanche, contrairement à l'argumentaire de l'employeur tendant à une appréciation année par année du respect du minimum conventionnel, c'est mois par mois qu'il doit être vérifié si le salaire brut est au moins égal au minimum mensuel conventionnel garanti ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Sogeti France au paiement, par provision, de la différence entre le salaire brut mensuel versé au salarié sur la période de juillet 2014 à juillet 2017 inclus et le salaire brut mensuel conventionnellement garanti, exception faite des mois de juin et de décembre de chaque année comprise dans cette période, l'arrêt rendu le 7 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Schamber - Avocat général : Mme Grivel - Avocat(s) : SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller ; SCP Didier et Pinet -

Textes visés :

Article 32 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, dite convention Syntec.

Rapprochement(s) :

Sur le principe que les éléments de salaire à versement non mensuel ne doivent être pris en compte dans la comparaison avec le salaire minimum mensuel que pour le mois où ils ont été effectivement versés, à rapprocher : Soc., 14 novembre 2018, pourvoi n° 17-22.539, Bull. 2018, V, (cassation partielle).

Soc., 6 novembre 2019, n° 18-19.752, (P)

Cassation partielle

Conventions et accords collectifs – Conventions diverses – Convention collective nationale des organismes gestionnaires de foyers et services pour jeunes travailleurs du 16 juillet 2003 – Avenant n° 2 du 21 octobre 2004 – Aménagement du temps de travail des cadres – Convention individuelle de forfait en jours sur l'année – Protection de la sécurité et de la santé du salarié – Nécessité – Défaut – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. R... a été engagé par l'association Noël Paindavoine en qualité de directeur général le 29 mars 2013 et licencié pour faute grave le 8 octobre 2014 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de ce licenciement et en paiement notamment de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires ;

Sur les premier et deuxième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu l'alinéa 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 151 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne se référant à la Charte sociale européenne et à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, l'article L. 3121-45 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, interprété à la lumière de l'article 17, §§ 1 et 4, de la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993, des articles 17, § 1, et 19 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et de l'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Attendu, d'abord, que le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles ;

Attendu, ensuite, qu'il résulte des articles susvisés des directives de l'Union européenne que les Etats membres ne peuvent déroger aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur ;

Attendu, enfin, que toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires ;

Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires, congés payés afférents et indemnité pour travail dissimulé, l'arrêt retient que, sans remettre en cause les dispositions de la convention collective applicable prévoyant une rémunération forfaitaire pour les cadres dits « autonomes » prévoyant un nombre de jours travaillés de deux cent sept jours auxquels, nécessairement vient s'ajouter la journée de solidarité, le salarié soutient que les dispositions de son contrat de travail étaient irrégulières en ce qu'elles ne mentionnaient ni les modalités de décompte des journées ou demi-journées travaillées, en ce que le nombre de jours annuels était fixé à deux cent huit alors que la convention collective les limite à deux cent sept et en ce qu'aucun entretien individuel n'était mis en place pour l'exécution de la convention de forfait, que toutefois, d'une part, la stipulation du contrat de travail fixant à deux cent huit le nombre annuel de jours de travail n'est pas irrégulière au regard de la convention collective dès lors que doit être prise en compte la journée de solidarité, que d'autre part, s'il est vrai que, aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, dans les circonstances spécifiques de l'espèce, l'association est fondée à soutenir que, alors que le salarié en qualité de directeur salarié, avait la charge de s'assurer du respect par l'association de la réglementation sociale, notamment en ce qu'elle vise la durée du travail et son aménagement, la contestation par celui-ci du respect des règles dont il avait la charge, est faite de mauvaise foi ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 9 de la convention collective nationale des organismes gestionnaires de foyers et services pour jeunes travailleurs du 16 juillet 2003 prévoit que, pour les directeurs, l'organisation du travail peut retenir le forfait en jours dans la limite de deux cent sept jours par an, que l'avenant n° 2 du 21 octobre 2004 à cette convention collective, relatif à l'aménagement du temps de travail des cadres, se limite à prévoir, en son article 2, que dans l'année de conclusion de la convention de forfait, la hiérarchie devra examiner avec le cadre concerné sa charge de travail et les éventuelles modifications à y apporter, que cet entretien fera l'objet d'un compte rendu visé par le cadre et son supérieur hiérarchique, que les années suivantes, l'amplitude de la journée d'activité et la charge de travail du cadre seront examinées lors de l'entretien professionnel annuel, en son article 3 que les jours travaillés et les jours de repos feront l'objet d'un décompte mensuel établi par le cadre et visé par son supérieur hiérarchique qui devra être conservé par l'employeur pendant une durée de 5 ans, que ces dispositions, en ce qu'elles ne prévoient pas de suivi effectif et régulier par la hiérarchie des états récapitulatifs de temps travaillé transmis, permettant à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, ne sont pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé, ce dont il se déduisait que la convention de forfait en jours était nulle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. R... de ses demandes de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires, congés payés afférents et indemnité pour travail dissimulé, l'arrêt rendu le 10 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy.

- Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Prache - Avocat général : Mme Rémery - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Alinéa 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ; article 151 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne se référant à la Charte sociale européenne et à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs ; article L. 3121-45 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, interprété à la lumière de l'article 17, §§ 1 et 4, de la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993, des articles 17, § 1, et 19 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et de l'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; article 9 de la convention collective nationale des organismes gestionnaires de foyers et services pour jeunes travailleurs du 16 juillet 2003 ; article 2 de l'avenant n° 2 du 21 octobre 2004 relatif à l'aménagement du temps de travail des cadres.

Rapprochement(s) :

Sur les conditions de validité des conventions de forfait en jours au regard de la durée du travail et des repos, journaliers et hebdomadaires, à rapprocher : Soc., 17 janvier 2018, pourvoi n° 16-15.124, Bull. 2018, V, n° 2 (cassation partielle), et les arrêts cités.

Soc., 20 novembre 2019, n° 18-14.118, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Conventions et accords collectifs – Conventions diverses – Convention collective nationale des remontées mécaniques et domaines skiables du 15 mai 1968 – Article 16-II – Reconduction des contrats saisonniers – Clause de reconduction – Portée

Si, selon l'article L. 1244-2, alinéa 2, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, une convention ou un accord collectif peut prévoir que tout employeur ayant occupé un salarié dans un emploi à caractère saisonnier doit lui proposer, sauf motif réel et sérieux, un emploi de même nature, pour la même saison de l'année suivante et que, selon l'article 16-II de la convention collective nationale des remontées mécaniques et domaines skiables du 15 mai 1968, étendue par arrêté du 3 février 1971, se rapportant à la reconduction des contrats saisonniers, les salariés ayant déjà effectué une ou plusieurs saisons au service de l'entreprise se voient proposer un emploi saisonnier de même nature à condition qu'ils fassent acte de candidature, la reconduction de contrats saisonniers en application de ce mécanisme conventionnel n'a pas pour effet d'entraîner la requalification de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée.

Viole ces dispositions légales et conventionnelles, la cour d'appel qui, pour requalifier les contrats à durée déterminée saisonniers du salarié en un contrat à durée indéterminée et condamner l'employeur au paiement d'un complément d'indemnité légale de licenciement, retient que les contrats successifs de l'intéressé constituent un ensemble à durée indéterminée, dont la rupture équivaut de la part de l'employeur à un licenciement.

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1244-2, alinéa 2, du code du travail dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 et l'article 16-II de la convention collective nationale des remontées mécaniques et domaines skiables du 15 mai 1968, étendue par arrêté du 3 février ;

Attendu, d'abord, que selon le premier de ces textes, une convention ou un accord collectif peut prévoir que tout employeur ayant occupé un salarié dans un emploi à caractère saisonnier doit lui proposer, sauf motif réel et sérieux, un emploi de même nature, pour la même saison de l'année suivante ; que selon le second, qui se rapporte à la reconduction des contrats saisonniers, les salariés ayant déjà effectué une ou plusieurs saisons au service de l'entreprise se verront proposer un emploi saisonnier de même nature à condition qu'ils fassent acte de candidature, la non-reconduction à l'initiative de l'employeur pour un motif réel et sérieux entraînant le versement à l'agent d'une indemnité de non-reconduction ;

Attendu, ensuite, que la reconduction de contrats saisonniers en application du mécanisme conventionnel prévu par les dispositions susvisées n'a pas pour effet d'entraîner la requalification de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée ; qu'il en résulte qu'en cas de non-reconduction du dernier contrat saisonnier sans motif réel et sérieux, seuls des dommages-intérêts réparant le préjudice subi par le salarié peuvent être octroyés par le juge ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. L... a été employé à compter du mois de février 1978, en qualité de chauffeur d'engin de damage par la Régie d'exploitation des équipements sportifs de Monetier-les-bains, aux droits de laquelle vient la société Serre Chevalier Vallée domaine skiable, suivant une succession de contrats à durée déterminée saisonniers, soumis à la convention collective des remontées mécaniques et domaines skiables du 15 mai 1968 ; que, le 9 mars 2015, il a reçu notification de la non-reconduction de son dernier contrat pour motif réel et sérieux ; que, le 16 novembre 2015, il a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir la requalification de ses contrats en un contrat à durée indéterminée et l'allocation d'une indemnité légale de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu que pour requalifier les contrats à durée déterminée saisonniers du salarié en un contrat à durée indéterminée et condamner l'employeur au paiement d'un complément d'indemnité légale de licenciement, l'arrêt retient que l'article 16-II de la convention collective nationale des téléphériques et engins de remontées mécaniques prévoit que les saisonniers ayant déjà effectué une ou plusieurs saisons au service de l'entreprise se verront proposer un emploi saisonnier de même nature, sauf motif réel et sérieux, que cette clause intitulée « reconduction des contrats saisonniers » qui n'est applicable qu'aux entreprises de plus de vingt salariés et ne présentant pas un chiffre d'affaires d'une grande variabilité, met à la charge de l'employeur une obligation de réemploi du salarié sauf motif réel et sérieux, qu'il est constant entre les parties que depuis le mois de février 1978 date de son premier engagement le salarié a bénéficié de contrats à durée déterminée saisonniers successifs reconduits d'année en année, sans interruption, en vertu de ces dispositions, qu'il en résulte que, du fait des renouvellements intervenus sur le fondement d'une clause de reconduction, ces contrats successifs constituent un ensemble à durée indéterminée, même si chaque période de travail n'est garantie que pour la saison, dont la rupture est soumise à l'exigence d'une cause réelle et sérieuse et équivaut de la part de l'employeur à un licenciement ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Gap du 16 novembre 2015 en ce qu'il a dit que la succession de contrats à durée déterminée saisonniers de M. L... ne valait pas contrat à durée indéterminée, dit que la non-reconduction du contrat de travail saisonnier de M. L... reposait sur des motifs réels et sérieux, débouté M. L... de sa demande en paiement d'un solde d'indemnité de licenciement et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il requalifie les contrats de travail à durée déterminée ayant lié M. L... à la société Serre Chevalier Vallée domaine skiable en contrat de travail à durée indéterminée et condamne cette société à verser à M. L... la somme de 2 225,12 euros au titre du solde d'indemnité légale de licenciement et la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 23 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déboute M. L... de sa demande de requalification de ses contrats à durée déterminée saisonniers en un contrat à durée indéterminée et de sa demande en paiement d'un complément d'indemnité.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Monge - Avocat général : Mme Grivel - Avocat(s) : SCP Boullez ; SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot -

Textes visés :

Article L. 1244-2, alinéa 2, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ; article 16-II de la convention collective nationale des remontées mécaniques et domaines skiables du 15 mai 1968, étendue par arrêté du 3 février 1971.

Rapprochement(s) :

Sur l'absence de requalification d'un contrat saisonnier en contrat à durée indéterminée par la seule présence d'une disposition conventionnelle de priorité d'emploi, à rapprocher : Soc., 8 juillet 2015, pourvoi n° 14-16.330, Bull. 2015, V, n° 142 (cassation), et l'arrêt cité.

Soc., 27 novembre 2019, n° 17-31.442, (P)

Cassation partielle

Conventions et accords collectifs – Dispositions générales – Arrêté d'extension – Effets – Champ d'application – Représentativité des organisations syndicales et patronales signataires – Vérification – Office du juge judiciaire – Détermination – Portée

Dans le cadre d'un accord collectif professionnel, l'arrêté d'extension suppose nécessairement, sous le contrôle du juge administratif, vérification de la représentativité dans ce champ des organisations syndicales et patronales signataires ou invitées à la négociation. Il y a lieu dès lors de juger désormais que le juge judiciaire n'a pas à vérifier, en présence d'un accord professionnel étendu, que l'employeur, compris dans le champ d'application professionnel et territorial de cet accord en est signataire ou relève d'une organisation patronale représentative dans le champ de l'accord et signataire de celui-ci.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 octobre 2017), les fédérations patronales Syntec et Cinov ont signé avec les organisations syndicales F3C CFDT, FIECI CFE-CGC, FO, CFTC/CSFV et CGT, le 28 octobre 2009, un avenant n° 37 prévoyant notamment l'intégration dans le champ d'application de la convention nationale des bureaux d'études, dite convention Syntec, du 15 décembre 1987 des activités d'analyses, essais et inspections techniques.

L'avenant a fait l'objet d'un arrêté d'extension du 17 mai 2010, l'étendant à tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 tel que modifié par l'avenant n° 37 du 28 octobre 2009.

2. Les sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas ont saisi le tribunal de grande instance d'une demande visant à l'annulation de l'avenant, et subsidiairement à son inopposabilité à leur égard.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

4. Les fédérations Syntec et Cinov reprochent à l'arrêt d'avoir accueilli les demandes en inopposabilité formées par les sociétés alors qu' « il résulte de l'article L. 2261-15 du code du travail que l'arrêté d'extension du ministre du travail a pour effet de rendre obligatoire les stipulations d'une convention de branche pour tous les salariés et employeurs compris dans le champ d'application de cette convention ; qu'au cas présent, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que, par arrêté du 17 mai 2010, le ministre du travail a procédé à l'extension de l'avenant n° 37 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseil, dite Syntec, qui « a notamment pour finalité d'élargir le champ d'application de la convention [...] aux activités de contrôle technique et de vérifications techniques » ; qu'il résulte également des constatations de l'arrêt attaqué qu' « en procédant le 17 mai 2010 à l'extension de cet avenant, le ministre a nécessairement apprécié la représentativité dans le secteur des analyses, essais et inspections techniques (code 7120B) des organisations syndicales d'employeurs et de salariés réunies en commission paritaire pour négocier et signer ledit avenant, de sorte que leur représentativité dans le secteur du contrôle technique ne peut plus être contestée devant le juge judiciaire » ; qu'il résulte enfin des constatations de l'arrêt attaqué qu' « en tout état de cause, les appelants ne rapportent pas la preuve du défaut de représentativité des signataires de l'avenant litigieux dans le secteur du contrôle technique », et qu'il n'est pas fait état d'organisations patronales ou syndicales qui « auraient dû être conviées à la négociation et ne l'ont pas été » ; qu'il résulte de ces constatations qu'en vertu de l'arrêté d'extension du ministre du travail du 17 mai 2017, les dispositions de l'avenant n° 37 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseil, dite Syntec, étaient applicables à l'ensemble des salariés et employeurs dans le secteur du contrôle technique ; qu'en déclarant néanmoins cet avenant inopposable aux sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas aux motifs inopérants qu'elles n'étaient pas adhérentes aux fédérations Syntec et Cinov, signataires de l'avenant, et qu'aucune organisation patronale représentative dans le secteur des activités de contrôle dont relèvent ces sociétés n'y adhère, la cour d'appel a méconnu les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, et a violé l'article L. 2261-15 du code du travail et l'arrêté d'extension du ministre du travail du 17 mai 2010 ».

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 2261-15 et L. 2261-19 du code du travail, ensemble le principe de séparation des pouvoirs :

5. Selon l'article L. 2261-15 du code du travail, les dispositions d'une convention de branche ou d'un accord professionnel ou interprofessionnel peuvent être rendues obligatoires pour tous les salariés et employeurs compris dans le champ d'application de cette convention ou cet accord par arrêté du ministre du travail.

L'extension suppose, selon l'article L. 2261-19 du code du travail, que la convention de branche ou l'accord professionnel ou interprofessionnel ait été négocié et conclu au sein d'une commission paritaire composée de représentants des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives dans le champ d'application considéré.

6. L'extension étant formalisée par un arrêté, c'est au ministre du travail, sous le contrôle du juge administratif, qu'il appartient donc de vérifier si les conditions de négociation de l'accord permettent son extension.

7. Le Conseil d'Etat a précisé que la légalité de l'arrêté d'extension était subordonnée à la condition que toutes les organisations syndicales et patronales représentatives dans le secteur aient été invitées à la négociation de l'accord, peu important que toutes ne l'aient pas signé (CE, 6 décembre 2006, n° 273773).

8. En application du principe de séparation des pouvoirs, le juge judiciaire n'a pas compétence pour vérifier la régularité des conditions de négociation et de conclusion d'un accord collectif étendu, dès lors que ce contrôle incombe ainsi que rappelé ci-dessus au seul juge administratif dans le cadre de son contrôle de la légalité de l'arrêté d'extension.

9. En revanche, il appartient au juge judiciaire de statuer sur les contestations pouvant être élevées par une ou plusieurs entreprises déterminées sur le champ d'application sectoriel d'un accord interprofessionnel étendu, dès lors que ce dernier ne précise pas ce champ.

10. La Cour de cassation en a déduit, par une jurisprudence constante (Soc., 16 mars 2005, pourvoi n° 03-16.616, Bull. 2005, V, n° 97 ; Soc., 21 novembre 2006, pourvoi n° 05-13.601, Bull. 2006, V, n° 351) que, dans le cadre d'un accord professionnel ou interprofessionnel étendu, le juge judiciaire devait vérifier si les employeurs compris dans le champ d'application professionnel et territorial auxquels il était demandé l'application de l'accord étaient signataires de l'accord ou relevaient d'une organisation patronale représentative dans le champ de l'accord et signataire de l'accord.

11. Toutefois, lorsqu'il s'agit d'un accord collectif professionnel, l'arrêté d'extension suppose nécessairement, sous le contrôle du juge administratif, vérification de la représentativité dans ce champ des organisations syndicales et patronales signataires ou invitées à la négociation. Il y a lieu dès lors de juger désormais que le juge judiciaire n'a pas à vérifier, en présence d'un accord professionnel étendu, que l'employeur, compris dans le champ d'application professionnel et territorial de cet accord en est signataire ou relève d'une organisation patronale représentative dans le champ de l'accord et signataire de celui-ci.

12. En l'espèce, l'avenant n° 37 de la convention Syntec avait expressément pour objet de rendre la convention Syntec applicable au secteur des activités d'analyses, essais et inspections techniques. Dès lors que cet avenant avait fait l'objet d'un arrêté d'extension, le juge judiciaire n'avait pas à contrôler qu'il avait été signé par les organisations syndicales et patronales représentatives de ce secteur sauf, en cas de doute sérieux sur la légalité de l'arrêté d'extension, à saisir le juge administratif d'une exception d'illégalité. Il lui appartenait seulement de vérifier si l'activité des sociétés concernées par le litige relevait du secteur analyses, essais et inspections techniques, champ d'application visé par l'avenant n° 37.

13. Pour déclarer inopposable aux sociétés Apave, Socotec France, et au Bureau Veritas l'avenant n° 37 de la convention Syntec, la cour d'appel retient que ces sociétés n'adhèrent pas aux fédérations signataires et qu'aucune organisation patronale représentative dans le secteur des activités de contrôle dont relèvent ces sociétés n'y adhère.

14. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel, la Cour :

DIT n'y avoir lieu à mettre hors de cause la Fédération confédérée Force ouvrière de la métallurgie et la Fédération CFE-CGC métallurgie ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare inopposable aux sociétés Apave, Socotec France, et Bureau Veritas, l'avenant n° 37 à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseils dite Syntec, l'arrêt rendu le 26 octobre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer ; SCP Gatineau et Fattaccini ; Me Haas -

Textes visés :

Articles L. 2261-15 et L. 2261-19 du code du travail ; principe de séparation des pouvoirs.

Soc., 20 novembre 2019, n° 18-19.578, n° 18-19.579, n° 18-19.581, n° 18-19.642, n° 18-19.645, n° 18-19.646, (P)

Rejet et cassation partielle

Usages et engagements unilatéraux – Usages de l'entreprise – Usage en concours avec une disposition légale – Cumul – Possibilité – Conditions – Cas – Cumul entre l'usage dit « coup de chapeau » pratiqué par l'établissement public la Monnaie de Paris et l'indemnité légale de départ à la retraite

L'usage dit du « coup de chapeau » pratiqué par l'établissement public la Monnaie de Paris en faveur de salariés n'ayant pas atteint le dernier échelon indiciaire et leur permettant de bénéficier, six mois avant leur départ à la retraite, à la fois d'une augmentation de salaire et d'une majoration consécutive du montant de leur retraite, et l'indemnité de départ à la retraite de l'article L. 1237-9 du code du travail versée par l'employeur à tout salarié quittant volontairement l'entreprise pour bénéficier d'une pension de vieillesse n'ont pas le même objet et peuvent donc se cumuler.

Vu la connexité, joint les pourvois n° 18-19.642, 18-19.645, 18-19.646, 18-19.578, 18-19.579 et 18-19.581 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que MM. U..., T... et M..., qui ont été employés par l'établissement public la Monnaie de Paris, ont saisi la juridiction prud'homale en paiement de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice d'anxiété résultant de leur exposition aux poussières d'amiante ainsi que d'une indemnité de départ à la retraite ;

Sur le moyen unique, pris en ses quatre premières branches communes aux pourvois n° 18-19.578, 18-19.579 et 18-19.581, et sur la cinquième branche du pourvoi n° 18-19.578 de l'employeur :

Attendu que l'employeur fait grief aux arrêts de le condamner à payer à MM. U..., T... et M... une indemnité de départ à la retraite, alors, selon le moyen :

1°/ que selon l'article L. 1211-1 du code du travail, le personnel salarié d'un établissement public industriel et commercial bénéficie des dispositions du livre II du code du travail, sous réserve des dispositions particulières ayant le même objet résultant du statut qui régit ce personnel ; qu'en l'espèce, les ouvriers d'Etat employés par l'EPIC La Monnaie de Paris relèvent du régime de retraite des ouvriers des établissements industriels de l'Etat selon lequel la pension de retraite est calculée sur la rémunération des six derniers mois, et bénéficient, en complément, d'un dispositif « coup de chapeau » consistant à revaloriser leur échelon et partant leur rémunération six mois avant leur départ en retraite ; que ce dispositif « coup de chapeau » qui constitue, comme l'indemnité de départ à la retraite prévue par l'article L. 1237-9 du code du travail, un complément de salaire lié au départ à la retraite a donc le même objet que cette indemnité de départ à la retraite ; qu'en affirmant le contraire, au motif inopérant qu'ils s'agit de deux avantages différents, certes liés au départ à la retraite, mais pouvant fonctionner de façon indépendante et selon leur mécanisme propre, la cour d'appel a violé les articles L. 1211-1 et L. 1237-9 du code du travail ;

2°/ qu'en cas de concours de normes, les avantages qui ont le même objet ne se cumulent pas, seul le plus favorable d'entre eux pouvant être accordé, peu important que les deux avantages aient une nature différente et n'obéissent pas au même régime ; que l'indemnité de départ à la retraite prévue par l'article L. 1237-9 du code du travail n'a pas pour objet de compenser un préjudice mais constitue un complément de rémunération attribué au salarié à l'occasion de son départ en retraite ; que le dispositif « coup de chapeau » dont bénéficient les ouvriers d'Etat de l'EPIC La Monnaie de Paris consiste à attribuer au salarié un échelon supérieur six mois avant son départ à la retraite, aux fins de majorer le montant de la rémunération prise en compte, dans le régime spécial de retraite des ouvriers d'Etat, pour déterminer le montant de la pension de retraite ; qu'il en résulte que ce dispositif « coup de chapeau » constitue également une gratification de fin de carrière et, partant, qu'il a le même objet que l'indemnité de départ à la retraite ; qu'en affirmant néanmoins que l'indemnité de départ à la retraite et le dispositif « coup de chapeau » n'ont pas le même objet car il s'agit d'avantages différents pouvant fonctionner de façon indépendante et selon leur mécanisme propre, de sorte qu'il n'y a pas lieu de les comparer pour déterminer lequel serait le plus avantageux, la cour d'appel a violé l'article L. 1237-9 du code du travail, ensemble le principe de faveur ;

3°/ qu'en relevant que les salariés ayant déjà atteint le dernier échelon indiciaire ne bénéficient pas du « coup de chapeau », pour affirmer que le dispositif « coup de chapeau » n'a pas le même objet que l'indemnité légale de départ à la retraite et que ces deux avantages peuvent en conséquence se cumuler, cependant que les éventuelles différences quant aux conditions posées pour l'octroi d'un avantage ne modifient pas son objet et qu'en présence d'un concours de normes, le caractère plus favorable doit s'apprécier globalement pour l'ensemble des salariés, la cour d'appel a encore violé les articles L. 1237-9 du code du travail, ensemble le principe de faveur ;

4°/ que l'accord du 16 décembre 2008 sur les classifications, rémunérations et évolutions professionnelles prévoit que ses dispositions se substituent de plein droit à toute disposition statutaire portant sur les mêmes thèmes et que les parties se réfèrent, pour tout ce qui ne fait pas l'objet de cet accord, aux dispositions législatives et réglementaires applicables au personnel ouvrier de l'Etat ; que s'il n'exclut pas le paiement d'une indemnité de départ à la retraite, il ne prévoit pas non plus que les dispositions du code du travail sur l'indemnité de départ à la retraite s'appliquent aux ouvriers d'Etat ; qu'en retenant encore, pour conforter sa décision, que cet accord collectif ne comporte aucune disposition relative à une indemnité de départ à la retraite, la cour d'appel s'est fondée sur un motif radicalement inopérant, en violation de l'article L. 1237-9 du code du travail ;

5°/ qu'en affirmant encore que la suppression du pécule de départ en retraite ne peut remettre en cause les droits que les ouvriers d'Etat détiennent par application des dispositions du code du travail, cependant que l'abrogation de ce dispositif, par une décision ministérielle, est sans emport sur l'éventuel cumul entre l'indemnité de départ à la retraite et le dispositif du « coup de chapeau », la cour d'appel a encore statué par un motif inopérant et violé l'article L. 1237-9 du code du travail ;

Mais attendu que l'usage dit du « coup de chapeau » pratiqué par l'employeur en faveur de salariés n'ayant pas atteint le dernier échelon indiciaire et leur permettant de bénéficier, six mois avant leur départ à la retraite, à la fois d'une augmentation de salaire et d'une majoration consécutive du montant de leur retraite, et l'indemnité de départ à la retraite de l'article L. 1237-9 du code du travail versée par l'employeur à tout salarié quittant volontairement l'entreprise pour bénéficier d'une pension de vieillesse n'ont pas le même objet ; que c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que ces deux dispositifs pouvaient se cumuler ; que le moyen, qui, en ses troisième, quatrième et cinquième branches, critique des motifs surabondants, n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique des pourvois n° 18-19.642, 18-19.645 et 18-19.646 des salariés : Publication sans intérêt

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois n° 18-19.578, 18-19.579 et 18-19.581 ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils déboutent MM. U..., T... et M... de leurs demandes de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice d'anxiété, les arrêts rendus le 16 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ces points, les causes et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Duval - Avocat général : M. Desplan - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer -

Textes visés :

Articles L. 1211-1 et L. 1237-9 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur le principe de non-cumul d'avantages ayant le même objet en cas de conflit de normes, à rapprocher : Soc., 4 novembre 2015, pourvoi n° 14-11.172, Bull. 2015, V, n° 222 (rejet), et les arrêts cités.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.