Numéro 11 - Novembre 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2019

REPRESENTATION DES SALARIES

Soc., 27 novembre 2019, n° 18-22.532, (P)

Rejet

Comité d'entreprise – Comité central – Attributions – Attributions économiques – Mission générale d'information et de consultation – Communication – Informations figurant dans la base de données économiques et sociales – Etendue – Détermination – Portée

Aux termes des articles L. 2323-8 et R. 2323-1-5 du code du travail, alors applicables, les informations figurant dans la base de données économiques et sociales portent sur l'année en cours, sur les deux années précédentes et intègrent des perspectives sur les trois années suivantes.

Il en résulte que dans le cas d'une opération de fusion, les informations fournies doivent porter, sauf impossibilité pour l'employeur de se les procurer, sur les entreprises parties à l'opération de fusion, pour les années visées aux articles précités.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 juin 2018), statuant en la forme des référés, que la société Sopra Steria Group (la société) ayant procédé à la consultation de son comité central d'entreprise (le CCE) sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et de l'emploi, au titre de l'année 2015, le CCE a, par décision du 30 septembre 2016, décidé de la désignation d'un expert, le cabinet Acee ; que le 28 novembre 2016, le CCE et le cabinet d'expertise ont saisi le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés pour obtenir la communication de documents supplémentaires portant sur la situation sociale des sociétés Sopra et Steria antérieurement à leur fusion effective au 1er janvier 2015, soit pour les années 2013 et 2014, et la prorogation des délais de consultation du CCE ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de constater qu'elle n'avait pas remis au CCE (dit « le comité d'établissement ») de la société la totalité des documents obligatoires lors de la consultation annuelle sur la politique sociale 2015, de déclarer recevable la demande de communication de pièces présentée par le CCE de la société et par le cabinet d'expertise, de dire que la société devra communiquer au cabinet d'expertise les documents dont la liste figure en pièce n° 4-2 communiquée par le CCE et par le cabinet d'expertise et de dire que cette communication devra se faire avant l'expiration du délai d'un mois à compter de la signification de son arrêt, sous astreinte, alors selon le moyen :

1°/ que, de première part, le délai à l'expiration duquel le comité d'entreprise est réputé, dans l'exercice de ses attributions consultatives, avoir été consulté et avoir rendu son avis, que le juge ne peut, en l'absence d'un accord conclu entre l'employeur et le comité d'entreprise ou, le cas échéant, le comité central d'entreprise, adopté à la majorité des membres titulaires élus du comité, ni suspendre, ni prolonger une fois qu'il est expiré, court à compter de la communication par l'employeur des informations qu'il est tenu, par le code du travail ou par un accord collectif, de communiquer pour la consultation ou de l'information par l'employeur de leur mise à disposition dans la base de données prévue par les dispositions de l'article L. 2323-8 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause ; que dès lors que ces informations ne concernent, sauf accord collectif contraire, que l'entreprise, et non le groupe auquel celle-ci Société Sopra Steria group c. comité d'établissement de la société Sopra Steria group et appartient, et dès lors qu'aucune disposition ne pose une telle obligation, l'employeur n'est pas tenu, en l'absence d'accord collectif le prévoyant, lorsque l'entreprise est issue d'une opération de fusion-absorption, de communiquer des informations relatives aux sociétés qui ont été absorbées par l'entreprise ; qu'en retenant le contraire, pour juger que la société Sopra Steria group n'avait pas remis au comité d'établissement de la société Sopra Steria group la totalité des documents obligatoires lors de la consultation annuelle sur la politique sociale 2015, pour déclarer recevable la demande de communication de pièces présentée par le comité d'établissement de la société Sopra Steria group et par la société Acee et pour dire que la société Sopra Steria group devrait communiquer, sous astreinte, dans un délai déterminé, à la société Acee les documents dont la liste figurait en pièce n° 4-2 communiquée par le comité d'établissement de la société Sopra Steria group et par la société Acee, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 2323-3, R. 2323-1, R. 2323-1-1 et R. 2323-1-5 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause ;

2°/ que, de seconde part et en tout état de cause, l'aveu judiciaire fait pleine foi contre celui qui l'a fait ; qu'en énonçant, pour juger que la société Sopra Steria group n'avait pas remis au comité d'établissement de la société Sopra Steria group la totalité des documents obligatoires lors de la consultation annuelle sur la politique sociale 2015, pour déclarer recevable la demande de communication de pièces présentée par le comité d'établissement de la société Sopra Steria group et par la société Acee et pour dire que la société Sopra Steria group devrait communiquer, sous astreinte, dans un délai déterminé, à la société Acee les documents dont la liste figurait en pièce n° 4-2 communiquée par le comité d'établissement de la société Sopra Steria group et par la société Acee, que la société Sopra Steria group n'avait pas remis la totalité des documents obligatoires lors de la consultation annuelle sur la politique sociale de l'entreprise et qu'en conséquence, les délais de consultation prévus par les dispositions des articles L. 2323-3 et R. 2323-1-1 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause, n'avaient pas commencé à courir, quand le comité d'établissement de la société Sopra Steria group et la société Acee, dans leurs écritures de première instance, avaient reconnu, comme l'avait relevé le premier juge et comme l'avait souligné la société Sopra Steria group dans ses conclusions d'appel, que la société Sopra Steria group avait transmis le dernier des documents qu'elle devait communiquer le 19 octobre 2016 et quand cet aveu judiciaire faisait pleine foi contre le comité d'établissement de la société Sopra Steria group et contre la société Acee, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1383-2 du code civil ;

Mais attendu qu'aux termes des articles L. 2323-8 et R. 2323-1-5 du code du travail, alors applicables, les informations figurant dans la base de données économiques et sociales portent sur l'année en cours, sur les deux années précédentes et intègrent des perspectives sur les trois années suivantes ; qu'il en résulte que dans le cas d'une opération de fusion, les informations fournies doivent porter, sauf impossibilité pour l'employeur de se les procurer, sur les entreprises parties à l'opération de fusion, pour les années visées aux articles précités ;

Et attendu que la cour d'appel ayant constaté qu'à la suite de la fusion absorption effective au 1er janvier 2015 des sociétés Sopra et Steria, l'employeur n'avait pas transmis au comité central d'entreprise de la société Sopra Steria Group et au cabinet d'expertise, à l'occasion de la consultation annuelle 2015 sur la politique sociale de l'entreprise, et malgré leur demande, certaines informations concernant les sociétés Sopra et Steria pour les années 2013 et 2014, en a exactement déduit que le comité central d'entreprise n'avait pas reçu l'information légalement due ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier - Avocat(s) : SCP Capron ; Me Rémy-Corlay -

Textes visés :

Articles L. 2323-8 et R. 2323-1-5 du code du travail, dans leur rédaction applicable.

Soc., 14 novembre 2019, n° 18-21.723, (P)

Rejet

Comité de groupe – Constitution – Conditions – Entreprise dominante – Définition – Siège social situé sur le territoire français – Applications diverses – Entreprise ayant son siège social en France – Entreprise contrôlée par une ou plusieurs sociétés domiciliées à l'étranger – Absence d'incidence sur la qualification d'entreprise dominante – Portée

Aux termes de l'article L. 2331-1 du code du travail, un comité de groupe doit être constitué au sein du groupe formé par une entreprise dominante dont le siège social est situé sur le territoire français et les entreprises qu'elle contrôle. Il est sans incidence que l'entreprise dominante située en France soit elle-même contrôlée par une ou plusieurs sociétés domiciliées à l'étranger.

Par ailleurs, si l'article L. 2331-4 du code du travail exclut notamment de la qualification d'entreprises dominantes les sociétés de participation financière visées au point c du § 5 de l'article 3 du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 sur les concentrations, c'est à la condition, toutefois, que les droits de vote attachés aux participations détenues ne soient exercés, notamment par la voie de la nomination des membres des organes de direction et de surveillance des entreprises dont elles détiennent des participations, que pour sauvegarder la pleine valeur de ces investissements et non pour déterminer directement ou indirectement le comportement concurrentiel de ces entreprises, c'est-à-dire à la condition, précisée par l'article 5, § 3, de la directive 78/660/CEE du Conseil du 25 juillet 1978 auquel renvoient les dispositions du règlement précité, que la société de participation financière ne s'immisce pas directement ou indirectement dans la gestion des entreprises filiales.

Comité de groupe – Constitution – Conditions – Entreprise dominante – Définition – Exclusion – Société de participation financière – Limites – Immixtion directe ou indirecte dans la gestion des entreprises filiales – Portée

Sur les deux moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 juin 2018), que le groupe UTC Fire § Security, conglomérat industriel américain, organisé autour de cinq secteurs d'activité, comprend en France dix sept sociétés, détenues par la société Sicli holding dont le siège est à [...] ; qu'un comité d'entreprise européen a été mis en place regroupant les sociétés du secteur sécurité-incendie auquel appartiennent toutes les sociétés françaises ; que, le 1er juillet 2016, le comité d'entreprise d'une des filiales françaises, la société Chubb France, auquel s'est joint par intervention le comité d'entreprise de l'UES Delta security solutions, a assigné la société Sicli holding et les dix sept filiales françaises (les sociétés) pour demander la mise en place d'un comité de groupe ;

Attendu que les sociétés font grief à l'arrêt de constater que la société Sicli holding était une société dominante et de lui ordonner de mettre en place un comité de groupe regroupant ses dix-sept filiales alors selon le moyen :

1°/ que la mise en place d'un comité de groupe n'est pas obligatoire lorsque la société holding française n'est pas la société dominante du groupe, étant elle-même contrôlée par une société ayant son siège social à l'étranger ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que la société Sicli holding était contrôlée par deux sociétés situées à l'étranger, dont la société Chubb International, située aux Pays-Bas, à hauteur de 69,25 % ; qu'il résultait ainsi des propres constatations l'arrêt que la société Sicli holding n'était pas la société dominante du groupe, et que la création d'un comité de groupe n'était donc pas obligatoire ; que dès lors, en jugeant que la société dominante n'était « pas nécessairement celle qui se situait au plus haut niveau de l'organigramme, à savoir au niveau des deux sociétés étrangères susvisées », et en jugeant pour cette raison qu'il incombait aux sociétés intimées de prouver que la société Sicli holding, « supposée dominante », était une pure société de participation et ne s'immisçait pas dans la gestion des filiales concernées, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 2331-1 du code du travail, ensemble l'article L. 2331-4 du même code ;

2°/ que ne sont pas considérées comme entreprises dominantes, les sociétés de participation financière, dont l'unique objet est la prise de participation dans d'autres entreprises, la gestion et la mise en valeur de ces participations, sans que ces sociétés s'immiscent directement ou indirectement dans la gestion des entreprises concernées ; que la simple circonstance que le dirigeant de la société holding soit également le dirigeant des autres entreprises du groupe, ne suffit pas à caractériser une immixtion de la société holding dans la gestion de ces entreprises ; que dès lors, en se bornant à relever, pour juger qu'il existait un « faisceau d'indices qui permet d'affirmer que la société Sicli Holding n'est pas une « pure » société de participation financière », que « l'influence de la société Sicli Holding sur les dix-sept autres sociétés du groupe découle déjà du fait que M. X..., président de la société Sicli holding, est également président des sociétés du sous-groupe dit Vulcain et du sous-groupe dit Delta security, mais aussi dirigeant des sociétés Vendôme, Aitec, et co-gérant de la société Chubb France, de sorte que seules trois des dix-sept sociétés du groupe (...) n'ont pas pour dirigeant M. X..., lequel concentre donc l'essentiel des pouvoirs de direction au sein des sociétés françaises du groupe, tout en étant le représentant légal des deux sociétés étrangères détenant la société Sicli Holding », et que la société holding prenait les décisions stratégiques du groupe UTC dans la mesure où M. X... en contrôlait la gestion, sans constater aucun acte d'immixtion de la société Sicli holding dans la gestion des filiales concernées en lien avec la qualité de dirigeant de M. X..., la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser une immixtion de la société Sicli holding dans la gestion des sociétés concernées, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2331-4 du code du travail ;

3°/ que la simple circonstance que la société holding ait le pouvoir de désigner le gérant de l'une de ses filiales, ne suffit pas à caractériser l'immixtion de la société holding dans la gestion de l'entreprise concernée ; que dès lors, en jugeant que la désignation par la société Sicli holding du gérant de la société Chubb France « influ[ait] nécessairement sur la gestion de la société », aux motifs que « la société Sicli Holding est la seule associée commanditée de la société en commandite simple Chubb France, de sorte que c'est la société Sicli Holding qui désigne seule le gérant de la société Chubb France », la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser une immixtion de la société Sicli holding dans la gestion de cette société, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2331-4 du code du travail ;

4°/ que la simple circonstance que les sociétés d'un groupe forment un ensemble économique cohérent, avec intégration des matériels et des services associés, et que des convergences se soient développées entre ces sociétés, n'est pas de nature à établir l'immixtion de la société holding dans la gestion de ses filiales ; que dès lors, à supposer que la cour d'appel ait entendu déduire l'immixtion de la société Sicli holding dans la gestion de ses filiales concernées, de ce que « l'ensemble de ces dix-sept sociétés constitue un ensemble économique, opérant dans le même secteur de la sécurité/gardiennage/télésurveillance et la sécurité incendie, avec intégration des matériels et des services associés », et de ce que « des convergences se sont développées entre ces différentes sociétés », la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2331-4 du code du travail ;

5°/ qu'en se fondant sur l'acquisition en 2016 par la société Sicli holding de six sociétés du groupe Vulcain pour les inclure comme filiales dans le groupe, et sur la réorganisation consécutive à ces acquisitions, pour en déduire que la société Sicli holding prenait les décisions stratégiques économiques et financières du groupe UTC et qu'elle n'était donc pas une « pure » société de participation financière, sans répondre au moyen des sociétés intimées qui faisaient valoir que le procès-verbal de l'assemblée générale du 28 avril 2016 « n'évoqu[ait] aucun acte de gestion de la société Sicli Holding mais fait simplement référence à une problématique de « reclassement des titres » afin que les sociétés du groupe Vulcain puissent faire partie du groupe d'intégration fiscale », comme l'avait justement décidé les premiers juges, lesquels avaient en outre relevé que ce procès-verbal ne visait « en aucun cas une gestion effective des sociétés concernées », la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

6°/ que le juge est tenu de respecter et de faire respecter le principe de la contradiction ; qu'en jugeant, pour retenir que la société Sicli holding s'immisçait dans la gestion de certaines filiales, que « selon le procès-verbal de délibération du 26 novembre 2013, statue sur la création d'une filiale la société Sicli Opérations France et l'acquisition par cette filiale d'une partie du fonds de commerce de la société UTC Fire & Security Services, sur la recapitalisation de la société Vendôme », sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

7°/ qu'en déduisant l'immixtion de la société Sicli holding dans la gestion de ses filiales, de ce que « selon le procès-verbal de délibération du 26 novembre 2013, statue sur la création d'une filiale la société Sicli Opérations France et l'acquisition par cette filiale d'une partie du fonds de commerce de la société UTC Fire et Security Services, sur la recapitalisation de la société Vendôme », cependant que ces actes relevaient de l'activité de société de participation financière de la société Sicli holding ainsi que de l'exercice de ses droits d'associé, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser une immixtion de la holding dans la gestion des sociétés concernées, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2331-4 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, qu'aux termes de l'article L. 2331-1 du code du travail, un comité de groupe doit être constitué au sein du groupe formé par une entreprise dominante dont le siège social est situé sur le territoire français et les entreprises qu'elle contrôle ; qu'il est sans incidence que l'entreprise dominante située en France soit elle-même contrôlée par une ou plusieurs sociétés domiciliées à l'étranger ;

Attendu, ensuite, que si l'article L. 2331-4 du code du travail exclut notamment de la qualification d'entreprises dominantes les sociétés de participation financière visées au point c du paragraphe 5 de l'article 3 du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 sur les concentrations, c'est à la condition, toutefois, que les droits de vote attachés aux participations détenues ne soient exercés, notamment par la voie de la nomination des membres des organes de direction et de surveillance des entreprises dont elles détiennent des participations, que pour sauvegarder la pleine valeur de ces investissements et non pour déterminer directement ou indirectement le comportement concurrentiel de ces entreprises, c'est-à-dire à la condition, précisée par l'article 5 du paragraphe 3 de la directive 78/660/CEE du Conseil auquel renvoient les dispositions du règlement précité, que la société de participation financière ne s'immisce pas directement ou indirectement dans la gestion des entreprises filiales ;

Et attendu que la cour d'appel a constaté que la société Sicli holding, domiciliée en France, détentrice directement ou indirectement de la quasi-totalité du capital des dix-sept autres sociétés françaises et dirigée par le même représentant légal que quatorze de ces dix-sept filiales, intervenait en amont des décisions prises par les filiales, en se prononçant par délibérations sur les projets d'acquisition, de vente de parts, de création de nouvelles filiales, ainsi que sur les opérations de concentration au sein des sociétés françaises permettant de réorganiser les pôles d'activité entre ces dernières ; qu'elle a pu en déduire, sans encourir les griefs énoncés par les sixième et septième branches du moyen, que la société Sicli holding, dès lors qu'elle s'immisçait dans la gestion des sociétés filiales au sens de l'article 5 du paragraphe 3 de la directive 78/660/CEE du Conseil, n'était pas exclusivement une société de participation financière et qu'elle constituait l'entreprise dominante, pour la mise en place du comité de groupe prévue à l'article L. 2331-1 du code du travail, du groupe formé avec ses dix-sept filiales, peu important qu'elle soit elle-même détenue par deux sociétés ayant leur siège social à l'étranger ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier - Avocat général : Mme Laulom - Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Articles L. 2331-1 et L. 2331-4 du code du travail ; article 5, § 3, de la directive 78/660/CEE du Conseil du 25 juillet 1978 concernant les comptes annuels de certaines formes de sociétés ; article 3, § 5, point c, du règlement (CE) n°139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises.

Soc., 27 novembre 2019, n° 19-14.224, (P)

Rejet

Comité social et économique – Commissions – Commission santé, sécurité et conditions de travail – Mise en place – Membres – Désignation – Modalités – Vote des membres du comité social et économique – Vote à la majorité des voix des membres présents lors du vote – Portée

Selon l'article L. 2315-39 du code du travail, les membres de la commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) sont désignés par le comité social et économique (CSE) parmi ses membres, par une résolution adoptée selon les modalités définies à l'article L. 2315-32 du code du travail, pour une durée qui prend fin avec celle du mandat des membres élus du comité. Selon l'article L. 2315-32, alinéa 1, du même code, les résolutions du comité social et économique sont prises à la majorité des membres présents.

Il en ressort que la désignation des membres d'une CSSCT, que sa mise en place soit obligatoire ou conventionnelle, résulte d'un vote des membres du CSE à la majorité des voix des membres présents lors du vote, sans qu'il soit besoin d'une résolution préalable fixant les modalités de l'élection.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Bordeaux, 14 mars 2019), que dans le cadre de l'accord relatif à la mise en place du comité social et économique (CSE) au sein de la société Stryker Spine, signé le 4 octobre 2018 entre l'employeur et les syndicats CFE-CGC, CFDT et CGT, il a été convenu de la création conventionnelle d'une commission santé sécurité et conditions de travail (CSSCT) composée de quatre membres ; que lors de la première réunion du CSE, le 3 décembre 2018, il a été procédé à la désignation des membres de la CSSCT ; que le syndicat CFDT métallurgie Gironde (le syndicat) a contesté les désignations devant le tribunal d'instance par requête du 18 décembre 2018 ; que le tribunal d'instance, après avoir rejeté comme tardive l'exception d'incompétence soulevée par l'employeur, a dit la requête non fondée ;

Attendu que le syndicat fait grief au jugement de rejeter la demande en annulation des désignations des membres de la CSSCT et de rejeter la demande tendant à suspendre le fonctionnement de cette commission, alors selon le moyen :

1°/ qu'en vertu de l'article 3.4 de l'accord relatif à la mise en place du comité social et économique (CSE) au sein de la société Stryker Spine, les membres de la commission santé sécurité et conditions de travail (CSSCT) sont désignés par le comité parmi ses membres, par une résolution adoptée à la majorité des membres présents ; que pour rejeter la demande, le tribunal a retenu que les modalités de la désignation, à savoir un vote à la majorité des membres présents, sont prévues par l'accord conclu en conformité avec les dispositions légales et que, par suite, le mode de désignation des membres de la CSSCT n'avait pas à donner lieu à une résolution préalable du CSE lors de la réunion du 3 décembre 2018 ; qu'en statuant ainsi, quand il résultait de l'article 3.4 de l'accord qu'une résolution devait obligatoirement intervenir à la majorité des membres présents du CSE, le tribunal a violé l'article 3.4 de l'accord relatif à la mise en place du comité social et économique du 4 octobre 2018 et l'article 1103 du code civil ;

2°/ qu'en vertu de l'article 3.4 de l'accord relatif à la mise en place du comité social et économique (CSE) au sein de la société Stryker Spine, les membres de la commission santé sécurité et conditions de travail (CSSCT) sont désignés par le comité parmi ses membres, par une résolution adoptée à la majorité des membres présents ; que pour rejeter la demande, le tribunal a retenu que les modalités de la désignation, à savoir un vote à la majorité des membres présents, sont prévues par l'accord conclu en conformité avec les dispositions légales et que, par suite, le mode de désignation des membres de la CSSCT n'avait pas à donner lieu à une résolution préalable du CSE lors de la réunion du 3 décembre 2018 ; qu'en statuant sans rechercher, comme il y était invité, si les modalités de désignation n'avaient pas en réalité été fixées par la présidente du CSE, le tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 2315-32 et L. 2315-39 du code du travail et 3.4 de l'accord relatif à la mise en place du comité social et économique du 4 octobre 2018 ;

Mais attendu que, selon l'article L. 2315-39 du code du travail, les membres de la commission santé, sécurité et conditions de travail sont désignés par le comité social et économique parmi ses membres, par une résolution adoptée selon les modalités définies à l'article L. 2315-32, pour une durée qui prend fin avec celle du mandat des membres élus du comité ; que selon l'article L. 2315-32, alinéa 1, du même code, les résolutions du comité social et économique sont prises à la majorité des membres présents ; qu'il en ressort que la désignation des membres d'une CSSCT, que sa mise en place soit obligatoire ou conventionnelle, résulte d'un vote des membres du CSE à la majorité des voix des membres présents lors du vote ;

Et attendu que le tribunal d'instance, après avoir constaté que l'accord sur la création d'une CSSCT au sein du CSE de la société Stryker Spine prévoyait, conformément aux dispositions légales, que les membres de cette commission étaient désignés par le CSE parmi ses membres titulaires ou suppléants, par une résolution adoptée à la majorité des membres présents, a exactement décidé que la désignation ne nécessitait pas une résolution préalable du CSE fixant les modalités de l'élection ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Articles L. 2315-32, alinéa 1, et L. 2315-39 du code du travail.

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