Numéro 11 - Novembre 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2019

ASTREINTE (loi du 9 juillet 1991)

2e Civ., 14 novembre 2019, n° 18-22.213, (P)

Rejet

Condamnation – Caractère de l'astreinte – Mesure accessoire – Portée

L'astreinte étant une mesure accessoire destinée à assurer l'exécution d'une condamnation, les personnes qui n'étaient pas parties à la décision ayant prononcé l'astreinte sont irrecevables à solliciter à leur profit la liquidation de celle-ci ou le prononcé d'une nouvelle astreinte et à intervenir volontairement à l'instance en liquidation à ces fins.

Liquidation – Action en liquidation d'astreinte – Personne n'étant pas partie à la décision ayant prononcé l'astreinte – Recevabilité (non)

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 29 juin 2018), rendu sur renvoi après cassation, que la société Leader Menton (la société) a été condamnée, sous astreinte, à la demande du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] (le SDC), à retirer une rampe métallique qu'elle avait installée à l'arrière du magasin qu'elle exploite dans des locaux loués au sein de cet immeuble ; qu'un jugement d'un juge de l'exécution a liquidé à 50 000 euros cette astreinte ; que l'arrêt statuant sur l'appel de ce jugement a été partiellement cassé (2e Civ., 28 septembre 2017, pourvoi n° 16-23.497) et que devant la cour d'appel de renvoi, saisie par le SDC, seize copropriétaires sont intervenus volontairement à l'instance, en sollicitant les 16/41e de la somme à laquelle ils demandaient que la société soit condamnée au titre de la liquidation de l'astreinte et la fixation d'une nouvelle astreinte ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le SDC et les copropriétaires intervenants font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'intervention volontaire de ces derniers, alors, selon le moyen :

1°/ que chaque copropriétaire a le droit d'exiger le respect du règlement de copropriété ou la cessation d'une atteinte aux parties communes, sans être tenu de démontrer qu'il subit un préjudice personnel et distinct de celui dont souffre la collectivité des membres du syndicat ; qu'en l'espèce, les copropriétaires intervenants demandaient, notamment, de fixer une nouvelle astreinte pour le retrait de la plaque métallique posée sur les parties communes de la copropriété ; qu'en affirmant que les copropriétaires seraient irrecevables dans leur intervention au motif qu'ils n'auraient pas « qualité pour agir pour obtenir à leur profit la liquidation d'une astreinte prononcée dans une instance où ils étaient représentés par le syndicat des copropriétaires sans qu'ils se soient manifestés », sans tenir compte de la demande des copropriétaires de fixation d'une nouvelle astreinte visant à faire cesser une atteinte aux parties communes, la cour d'appel a violé l'article 15 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;

2°/ que chaque copropriétaire a le droit d'exiger le respect du règlement de copropriété ou la cessation d'une atteinte aux parties communes, sans être tenu de démontrer qu'il subit un préjudice personnel et distinct de celui dont souffre la collectivité des membres du syndicat ; qu'en l'espèce, les copropriétaires intervenants demandaient la liquidation de plusieurs astreintes, et la fixation d'une nouvelle astreinte, visant à faire cesser les atteintes aux parties communes de la copropriété commises par la société Leader Menton ; qu'en déclarant irrecevable l'intervention des copropriétaires, au motif inopérant que « le litige ne porte pas sur la violation du règlement de copropriété mais sur l'exécution d'une mesure de contrainte ordonnée dans l'intérêt général », quand les copropriétaires agissaient dans le but d'obtenir la cessation d'atteintes aux parties communes, la cour d'appel a violé l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965 ;

3°/ que chaque copropriétaire a le droit d'exiger le respect du règlement de copropriété ou la cessation d'une atteinte aux parties communes, sans être tenu de démontrer qu'il subit un préjudice personnel et distinct de celui dont souffre la collectivité des membres du syndicat ; qu'en l'espèce, les copropriétaires intervenants demandaient, notamment, de fixer une nouvelle astreinte pour le retrait de la plaque métallique posée sur les parties communes de la copropriété ; qu'en affirmant que les copropriétaires seraient irrecevables dans leur intervention au motif qu'ils n'auraient pas « qualité pour agir pour obtenir à leur profit la liquidation d'une astreinte prononcée dans une instance où ils étaient représentés par le syndicat des copropriétaires sans qu'ils se soient manifestés », sans tenir compte de la demande des copropriétaires de fixation d'une nouvelle astreinte visant à faire cesser une atteinte aux parties communes, la cour d'appel a violé l'article 15 de la loi n° 65-557 du juillet 1965 ;

4°/ subsidiairement qu'un copropriétaire peut toujours agir s'il démontre l'existence d'un préjudice distinct de celui dont souffre la collectivité des membres du syndicat ; qu'en l'espèce, les copropriétaires exposants faisaient valoir qu'ils souffraient de préjudices propres consistant en des nuisances, dégradations et décotes de leurs biens, des risques d'accident provenant des installations et engins de la société Leader Menton, ainsi que la privation de leur droit de libre circulation dans les parties communes confisquées par la société Leader Menton ; qu'en affirmant que les copropriétaires intervenant volontairement à titre personnel pouvaient uniquement exercer les actions concernant leur propre lot, pour déclarer irrecevable leur intervention, quand ceux-ci pouvaient également agir en réparation d'un préjudice personnel qui n'avait pas nécessairement son siège dans leur propre lot, la cour d'appel a violé les articles 15 de la loi du 10 juillet 1965 et 31 du code de procédure civile ;

Mais attendu que l'astreinte est une mesure accessoire destinée à assurer l'exécution d'une condamnation ; qu'ayant relevé que les intervenants volontaires n'étaient pas parties à l'instance à l'issue de laquelle la société avait été condamnée sous astreinte, la cour d'appel en a exactement déduit, justifiant légalement sa décision par ces seuls motifs, qu'ils étaient dépourvus du droit de solliciter à leur profit sa liquidation ou le prononcé d'une nouvelle astreinte et qu'ils étaient irrecevables à intervenir volontairement à l'instance ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Leroy-Gissinger - Avocat général : M. Girard - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot -

Textes visés :

Article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 24 septembre 2015, pourvois n° 14-14.977, Bull. 2015, II, n° 210 (rejet).

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