Numéro 11 - Novembre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2018

VENTE

3e Civ., 22 novembre 2018, n° 17-23.366, (P)

Cassation

Promesse de vente – Immeuble – Cession d'un immeuble ou d'un droit réel immobilier – Promesse synallagmatique – Acte ne mentionnant pas la superficie de la partie privative des lots vendus – Réitération par acte authentique – Effets – Portée

Lorsque la promesse de vente ne comporte pas la mention de la superficie de la partie privative des lots vendus, seule la signature de l'acte authentique constatant la réalisation de la vente mentionnant la superficie de la partie privative du lot ou de la fraction de lot entraîne la déchéance du droit à engager ou à poursuivre une action en nullité de la promesse ou du contrat qui l'a précédée, fondée sur l'absence de mention de cette superficie.

Dès lors, viole l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965 la cour d'appel qui, pour rejeter la demande en nullité d'une promesse de vente, retient que les parties peuvent convenir de compléter, par un additif de même valeur juridique, un avant-contrat dans lequel le vendeur aurait omis de déclarer la superficie réglementaire, que les signatures des acquéreurs, après mention de la formule « pris connaissance », aux côtés de celles du représentant des vendeurs, sur le certificat de mesurage vaut régularisation conventionnelle de celui-ci, lequel forme avec le certificat signé un ensemble manifestement indissociable et un même contrat et que sont indifférentes les circonstances que la signature du certificat de mesurage ne porte pas de date et que l'avant-contrat ne mentionne pas avoir annexé ce certificat.

Sur le moyen unique :

Vu l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 juin 2017), que, par acte sous seing privé du 5 décembre 2013, Mme N... Z..., M. O... Z..., Mme Christiane Z..., Mme Marie Z..., Mme Isabelle Z... et Mme Brigitte Z... (les consorts Z...) ont vendu à M. et Mme X... deux appartements et une cave d'un immeuble en copropriété, la réitération par acte authentique étant fixée au plus tard le 2 avril 2014 ; que, M. et Mme X..., auxquels M. S... X... s'était substitué, n'ayant pas comparu devant le notaire pour signer l'acte authentique de vente, les consorts Z... les ont assignés en paiement de la clause pénale ; que M. X... a sollicité reconventionnellement la nullité de la promesse de vente ;

Attendu que, pour rejeter la demande en nullité, l'arrêt retient que, si l'alinéa 5 de l'article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précise que la signature de l'acte authentique constatant la réalisation de la vente et mentionnant la superficie de la partie privative du lot ou de la fraction de lot entraîne la déchéance du droit à engager ou poursuivre une action en nullité de l'avant-contrat qui l'a précédée, il doit être admis que les parties peuvent également convenir de compléter, par un additif de même valeur juridique, un avant-contrat dans lequel le vendeur aurait omis de déclarer la superficie réglementaire, que, nonobstant le défaut de mention de la superficie réglementaire dans l'instrumentum de l'avant-contrat litigieux, le premier juge doit être approuvé d'avoir retenu que les signatures des époux X..., après mention de la formule « pris connaissance », aux côtés de celles du représentant des vendeurs, sur le certificat de mesurage valait régularisation conventionnelle de celui-ci, lequel forme avec le certificat signé un ensemble manifestement indissociable et un même contrat, étant indifférentes les circonstances que la signature du certificat de mesurage ne porte pas de date et que l'avant-contrat ne mentionne pas avoir annexé ce certificat et qu'il ne peut être soutenu dans ces conditions que le certificat de mesurage aurait été remis en mains propres aux époux X..., après qu'ils en eurent pris connaissance, sans que ceux-ci eussent renoncé à se prévaloir de l'irrégularité de l'avant-contrat ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, lorsque la promesse de vente ne comporte pas la mention de la superficie de la partie privative des lots vendus, seule la signature de l'acte authentique constatant la réalisation de la vente mentionnant la superficie de la partie privative du lot ou de la fraction de lot entraîne la déchéance du droit à engager ou à poursuivre une action en nullité de la promesse ou du contrat qui l'a précédée, fondée sur l'absence de mention de cette superficie, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 juin 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Guillaudier - Avocat général : M. Kapella - Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

3e Civ., 8 novembre 2018, n° 14-25.005, (P)

Cassation partielle

Réméré – Prise de possession de l'immeuble – Conditions – Détermination

A défaut d'accord des parties, le vendeur qui use du pacte de rachat ne peut entrer en possession de l'immeuble qu'après avoir réglé le prix et les frais définitivement fixés judiciairement.

Réméré – Prise de possession de l'immeuble – Conditions – Paiement du prix et des frais – Détermination – Défaut d'accord des parties – Fixation judiciaire définitive – Nécessité

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 12 mai 2014), que la société civile immobilière (SCI) de la Bourne a vendu à la SCI Pont Peillon un immeuble avec faculté de rachat ; que le vendeur a exercé son droit de rachat ; que, les parties étant en désaccord sur le montant des sommes à rembourser, la SCI de la Bourne a assigné la SCI Pont Peillon en fixation de ces sommes ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu que la SCI Pont Peillon fait grief à l'arrêt de limiter à une certaine somme le montant de la condamnation de la SCI de la Bourne ;

Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur probante des pièces qui lui étaient soumises, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur l'absence de production au dossier des pièces 35, 36 et 37, a pu, sans dénaturation des conclusions d'appel et par une décision motivée, rejeter la demande relative à la régularisation de la taxe sur la valeur ajoutée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :

Vu les articles 1659 et 1673 du code civil ;

Attendu que, à défaut d'accord des parties, le vendeur qui use du pacte de rachat ne peut entrer en possession de l'immeuble qu'après avoir réglé le prix et les frais définitivement fixés judiciairement ;

Attendu que, pour condamner la SCI de la Bourne à verser à la SCI Pont Peillon la totalité des loyers payés par le locataire du bien objet du réméré à compter du mois de novembre 2011 jusqu'à complet paiement du prix définitif, l'arrêt retient que le transfert de propriété n'intervient qu'à la date où le prix, définitivement arrêté par une décision ayant autorité de chose jugée, aura été versé effectivement et dans son intégralité ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la SCI de la Bourne avait versé une somme, au titre du remboursement du prix et des frais visés par l'article 1673 du code civil, d'un montant supérieur à celui retenu par l'arrêt, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la SCI de la Bourne à payer à la SCI Pont Peillon la totalité des loyers versés par le locataire occupant l'immeuble objet du réméré à compter du mois de novembre 2011 jusqu'à complet paiement du prix définitif, l'arrêt rendu le 12 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Georget - Avocat général : M. Charpenel (premier avocat général) - Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie ; SCP Leduc et Vigand -

Textes visés :

Articles 1659 et 1673 du code civil.

3e Civ., 22 novembre 2018, n° 17-26.209, (P)

Rejet

Vendeur – Obligations – Obligation d'information – Terrain sur lequel une installation classée a été implantée – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 juin 2017), qu'en 1992 et 1993, la société E..., aux droits de laquelle se trouve la société Faiveley transports Amiens (la société Faiveley), a vendu à la société civile immobilière GDLMA (la SCI GDLMA) des terrains faisant partie d'un site industriel sur lequel une activité de fabrication de systèmes de freinage automobile et ferroviaire a été exercée de 1892 à 1999, incluant des installations classées pour la protection de l'environnement ; qu'en 2010, à l'occasion d'une opération de réaménagement, la SCI GDLMA a découvert l'existence d'une pollution du sol des terrains vendus ; qu'elle a assigné la société Faiveley en réparation de ses préjudices ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la SCI GDLMA fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande au titre d'un manquement de la société Faiveley à l'obligation d'information de l'article L. 514-20 du code de l'environnement, alors, selon le moyen, que, lorsqu'une installation soumise à autorisation a été exploitée sur un terrain, le vendeur de ce terrain est tenu d'en informer par écrit l'acheteur ; que cette obligation porte non seulement sur la vente des parties du site sièges des activités relevant du régime de l'autorisation, mais également sur la vente de tout terrain issu de la division de ce site ; que, pour débouter la société GDLMA, acquéreur d'une parcelle comprise dans un ancien site industriel relevant du régime de l'autorisation, de sa demande au titre du manquement du vendeur à son obligation spécifique d'information, l'arrêt retient qu'il n'aurait pas été démontré qu'elles auraient été le siège d'une installation classée soumise à autorisation ou d'une installation connexe ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 8-1 de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 modifiée relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, devenu l'article L. 514-20 du code de l'environnement ;

Mais attendu que l'article L 514-20 du code de l'environnement, qui dispose que, lorsqu'une installation classée soumise à autorisation ou à enregistrement a été exploitée sur un terrain, le vendeur de ce terrain est tenu d'en informer par écrit l'acheteur, nécessite, pour son application, qu'une installation classée ait été implantée, en tout ou partie, sur le terrain vendu ; qu'ayant relevé qu'aucune des installations classées implantées sur le site industriel de Sevran-Livry-Gargan n'avait été exploitée sur les parcelles cédées à la SCI GDLMA et retenu qu'il n'était pas établi qu'une installation de nature, par sa proximité ou sa connexité, à en modifier les dangers ou inconvénients, au sens de l'article R. 512-32 du même code, y eût été exploitée, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le vendeur n'avait pas manqué à son obligation d'information ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

Attendu que la SCI GDLMA fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande contre la société Faiveley pour manquement à son obligation de remise en état ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les installations classées exploitées sur le site d'activités de la société E... étaient implantées uniquement sur deux parcelles qui n'étaient pas celles dont la SCI GDLMA était propriétaire et retenu que, si une pollution du sol avait bien été constatée dans le rapport Soler environnement de 2010, aucun des rapports produits postérieurement par la société GDLMA ne permettait d'établir avec certitude que cette pollution avait existé antérieurement ni de la rattacher à l'activité de la société E..., ces documents n'excluant pas que des polluants en provenance d'autres sites à risques eussent été transportés par les eaux souterraines, la cour d'appel, devant laquelle aucune mesure d'expertise n'était demandée, a pu déduire de ces seuls motifs, sans inverser la charge de la preuve et sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, ni de répondre à de simples allégations sur l'origine de la pollution non assorties d'une offre de preuve, que la responsabilité délictuelle de la société Faiveley ne pouvait être retenue ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Farrenq-Nési - Avocat général : M. Kapella - Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix ; SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin -

Textes visés :

Articles L. 514-20 et R. 512-32 du code de l'environnement.

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