Numéro 11 - Novembre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2018

TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL

Soc., 14 novembre 2018, n° 17-20.659, (P)

Cassation partielle

Heures supplémentaires – Accomplissement – Conditions – Détermination – Portée

Encourt la cassation l'arrêt qui, après avoir constaté que l'employeur avait rappelé au salarié la nécessité de respecter la durée légale du travail et mis en place un système d'autorisation préalable pour effectuer des heures supplémentaires, n'a pas recherché, ainsi qu'il le lui était demandé, si les heures de travail accomplies néanmoins par le salarié n'avaient pas été rendues nécessaires à la réalisation des tâches confiées au salarié.

Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Sungard consulting services aux droits de laquelle vient la société Softeam cadextan a engagé M. Y... le 3 janvier 2005 en qualité de consultant ; que le 10 mars 2010, invoquant le non paiement d'heures supplémentaires et de sa rémunération variable, il a pris acte de la rupture du contrat de travail ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement des heures supplémentaires, congés payés afférents, repos compensateur et indemnité de travail dissimulé, l'arrêt retient qu'il est établi que l'employeur a indiqué dans plusieurs lettres ou courriers électroniques adressés au salarié qu'il devait respecter la durée de travail de 35 heures par semaine et que les heures supplémentaires devaient faire l'objet d'un accord préalable avec le supérieur hiérarchique, qu'à l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour le déboute de toutes ses demandes relatives aux heures supplémentaires au motif que seules les heures supplémentaires demandées par l'employeur ou effectuées avec son accord, donnent lieu à paiement et que c'est à bon droit que l'employeur a refusé de payer les heures supplémentaires alléguées par le salarié dès lors qu'elle prouve, comme elle en a la charge que s'il a effectué des heures supplémentaires, cela s'est fait contre son avis, qu'en effet la mise en place des heures supplémentaires relève du pouvoir de direction de l'employeur, et, à supposer qu'il a effectué des heures supplémentaires, le salarié n'a pas à placer l'employeur qui subordonne l'exécution des heures supplémentaires à son accord préalable, devant le fait accompli, sauf abus de sa part, lequel n'est ni établi ni même allégué, que l'employeur a subordonné l'exécution des heures supplémentaires chez le client auprès duquel le salarié intervenait, à l'accord préalable de son supérieur hiérarchique de façon légitime pour pouvoir, le cas échéant, renégocier ses conditions d'intervention ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, ainsi qu'il le lui était demandé, les heures de travail accomplies avaient été rendues nécessaires à la réalisation des tâches confiées au salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Et attendu que la cassation sur le premier moyen entraîne, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif critiqué par le second moyen, pris d'une cassation par voie de conséquence ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société Softeam cadextan à verser à M. Y... une certaine somme à titre de rappel sur rémunération variable et déboute la société Softeam cadextan de sa demande de condamnation de M. Y... à lui verser une indemnité de préavis, l'arrêt rendu le 2 juin 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Ala - Avocat général : Mme Rémery - Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel ; SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer -

Textes visés :

Article L. 3171-4 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur les conditions dans lesquelles les heures supplémentaires doivent être accomplies pour être payées par l'employeur, à rapprocher : Soc., 14 novembre 2018, pourvoi n° 17-16.959, Bull. 2018, V, (rejet).

Soc., 14 novembre 2018, n° 17-16.959, (P)

Rejet

Heures supplémentaires – Accomplissement – Conditions – Détermination – Portée

Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.

Doit être approuvée la cour d'appel qui, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, a constaté que la charge de travail du salarié, qui avait donné lieu au paiement d'heures supplémentaires pour la période de mai à décembre 2012, avait été maintenue puis accrue pendant la période postérieure, faisant ainsi ressortir, peu important l'absence d'autorisation préalable de l'employeur, que la réalisation de nouvelles heures supplémentaires avait été rendue nécessaire par les tâches à accomplir.

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 21 février 2017), que M. Y... a été engagé le 6 octobre 2009 en qualité de technicien par la société AGP grande cuisine ; qu'après transfert du contrat de travail à la société ADEIHR AGP, le salarié s'est engagé, par avenant du 14 mai 2012, à solliciter l'autorisation préalable de l'employeur avant d'effectuer des heures supplémentaires ; qu'invoquant l'existence d'heures supplémentaires non payées et exposant avoir été victime de faits de harcèlement moral, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur puis a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement de sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires, de congés payés afférents et d'indemnité pour travail dissimulé, alors, selon le moyen :

1°/ que l'employeur n'est tenu au paiement que des seules heures supplémentaires accomplies avec son accord, au moins implicite, ou rendues nécessaires par les tâches confiées au salarié ; qu'il s'ensuit que le salarié refusant de déférer à son obligation contractuelle de solliciter préalablement à l'exécution d'heures supplémentaires l'accord exprès de l'employeur à leur accomplissement n'a pas droit à leur paiement ; qu'en faisant dès lors droit au paiement des heures supplémentaires réclamées par M. Y..., quand elle constatait, d'une part, que « l'employeur avait exigé qu'il donne son autorisation à l'accomplissement d'heures supplémentaires », d'autre part, que M. B... reconnaissait que des heures supplémentaires qu'il avait accomplies avec M. Y... l'avaient été « sans avoir jamais sollicité au préalable l'autorisation de les effectuer » et, enfin, que « des heures supplémentaires ont été effectuées sans l'accord de l'entreprise », ce dont il résultait que le salarié n'avait, au moins pour partie des heures supplémentaires dont il réclamait le paiement, jamais sollicité l'accord de l'employeur cependant qu'il en avait l'obligation contractuelle formelle, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-22 et L. 3171-4 du code du travail ;

2°/ que la société ADEIHR AGP soutenait qu'il était contractuellement fait interdiction à M. Y... d'exécuter la moindre heure supplémentaire en l'absence d'une demande expresse émanant de l'employeur, ce dernier se trouvant ensuite dans l'obligation - à raison du non-respect par le salarié de cette obligation, qui lui avait pourtant été rappelé par courrier - de le mettre en demeure de cesser d'exécuter des heures supplémentaires non-commandées, puis de le sanctionner par un avertissement au vu du caractère persistant du comportement de l'intéressé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'employeur, qui exigeait son accord préalable et exprès à l'exécution de toute heure supplémentaire, n'admettait pas les réclamations du salarié au titre des heures supplémentaires par lui réalisées, ne les estimant pas justifiées ; qu'en s'abstenant de rechercher si l'opposition ainsi manifestée par l'employeur à l'exécution des heures supplémentaires, par voie de courrier, de mise en demeure et d'avertissement, ne permettait pas d'exclure tout accord implicite à l'exécution des heures supplémentaires réclamées, et ainsi tout droit à paiement de ces dernières, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-22 et L. 3171-4 du code du travail ;

3°/ qu'en allouant à M. Y... un rappel d'heures supplémentaires, motif pris que, « certes, des heures supplémentaires ont été effectuées sans l'accord de l'entreprise, mais le salarié a exposé qu'il s'agissait de terminer en urgence les réparations au sein d'une cuisine de restaurant, qui ne pouvaient attendre, en sorte qu'il préférait achever ses réfections, le jour même, plutôt que de les reporter au lendemain, ce qui aurait vivement déplu aux clients et qui l'aurait contraint à rester une journée supplémentaire sur place », la cour d'appel, qui a uniquement relevé l'existence d'une préférence du salarié à l'exécution immédiate de travaux destinée à lui éviter de revenir sur le chantier le lendemain, sans donc caractériser, ce faisant, que les heures supplémentaires étaient rendues nécessaires par la charge de travail qui lui était confiée et la nature des tâches à effectuer, a - derechef - privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-22 et L. 3171-4 du code du travail, ensemble l'article 4 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

4°/ qu'en affirmant, pour dire que « le gérant savait pertinemment que des heures supplémentaires indispensables avaient été accomplies par M. Y... », que « la continuation de son travail entraînait nécessairement au moins la même charge de travail, d'autant plus qu'à compter du 1er février 2014, il a perçu une prime de responsabilité pour le service après-vente et pour exercer des responsabilités supplémentaires », la cour d'appel a statué par des motifs d'ordre général et abstrait, violant l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord au moins implicite de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées ;

Et attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, ayant constaté que la charge de travail du salarié, qui avait donné lieu au paiement d'heures supplémentaires pour la période de mai à décembre 2012, avait été maintenue puis accrue pendant la période postérieure, a fait ressortir, peu important l'absence d'autorisation préalable de l'employeur et sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que la réalisation de nouvelles heures supplémentaires avait été rendue nécessaire par les tâches confiées à l'intéressé ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en ses troisième et quatrième branches, n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen : Publication sans intérêt

Mais attendu, d'abord, que le rejet du premier moyen prive de portée le deuxième moyen, pris en sa première branche ;

Attendu, ensuite, que sous le couvert de griefs non fondés de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à contester le pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond qui ont estimé que l'intention de dissimulation de l'employeur était établie ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé : Publication sans intérêt

Sur le quatrième moyen, ci-après annexé : Publication sans intérêt

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Schamber - Avocat général : Mme Rémery - Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano ; SCP Zribi et Texier -

Textes visés :

Articles L. 3121-22 et L. 3171-4 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur les conditions dans lesquelles les heures supplémentaires doivent être accomplies pour être payées par l'employeur, à rapprocher : Soc., 14 novembre 2018, pourvoi n° 17-20.659, Bull. 2018, V, (cassation partielle).

Soc., 14 novembre 2018, n° 17-18.259, (P)

Rejet

Repos et congés – Repos hebdomadaire – Repos dominical – Dérogations résultant de la loi – Non-respect de l'obligation de consultation des partenaires sociaux – Invocabilité (non) – Portée

Les dispositions de l'article 7 § 4 de la convention n° 106 de l'Organisation internationale du travail concernant le repos hebdomadaire dans les commerces et les bureaux ne créent d'obligations de consultation des partenaires sociaux, dès lors que les dérogations au travail dominical critiquées résultent de la loi, qu'à la charge de l'Etat, de sorte que le moyen tiré de ce que la procédure ayant conduit à l'adoption de la loi n'est pas conforme à ces dispositions ne peut être accueilli.

Repos et congés – Repos hebdomadaire – Repos dominical – Dérogations – Conditions – Articles 6 et 7, § 1, de la convention n° 106 de l'Organisation internationale du travail – Loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs – Compatibilité – Détermination – Portée

Ayant relevé d'une part que le rapport du Comité de l'Organisation internationale du travail chargé d'examiner la réclamation alléguant l'inexécution par la France de la convention n° 106, des 10 et 24 mars 2016, avait noté que la commission d'experts, après analyse complète et détaillée de la législation en cause, n'avait pas considéré que les dispositions en question étaient contraires aux dispositions de la convention n° 106, et ayant d'autre part fait ressortir que les dérogations concernées étaient justifiées par la nature du travail, la nature des services fournis par l'établissement, l'importance de la population à desservir et le nombre des personnes employées et se fondaient sur des considérations économiques et sociales répondant à un besoin du public, en ce que l'aménagement de la maison auquel participe l'ameublement relève d'une activité pratiquée plus particulièrement en dehors de la semaine de travail, une cour d'appel décide à bon droit que les dispositions de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 n'étaient pas incompatibles avec celles des articles 6 et 7, § 1, de la convention n° 106.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 17 mars 2017), que M. Y... a été engagé le 10 janvier 2005 par la société Meubles Ikea France ; qu'iI a saisi la juridiction prud'homale ; que le syndicat CGT Force ouvrière des employés et cadres du commerce Val-d'Oise est intervenu volontairement à l'instance ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de l'atteinte au repos dominical pour la période postérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008, alors, selon le moyen :

1°/ que selon les alinéas 1 et 4 de l'article 7 de la Convention n° 106 de l'OIT du 26 juin 1957 sur le repos hebdomadaire dans le commerce et les bureaux, ratifiée par la France en 1971, toute mesure instaurant un régime spécial de repos hebdomadaire doit être prise en consultation avec les organisations représentatives des employeurs et des travailleurs intéressées, s'il en existe ; qu'en l'espèce, le salarié soutenait que la loi du 3 janvier 2008, en ce qu'elle avait accordé au secteur de l'ameublement une dérogation permanente de droit au principe du rapport dominical, n'était pas conforme à l'article 7 de la Convention n° 106 de l'OIT dès lors qu'aucune consultation n'avait été tenue auprès des organisations syndicales représentatives, ce que le gouvernement français avait lui-même reconnu devant la Commission des experts de l'OIT ; qu'en se bornant à relever de manière inopérante, pour rejeter le moyen d'inconventionnalité de la dérogation législative accordée aux entreprises du secteur de l'ameublement, que la nature et la forme des consultations est laissée à l'appréciation de chaque Etat, quand le salarié invoquait l'absence complète de consultation, et sans faire ressortir l'existence d'une telle consultation, la cour d'appel a violé les articles 6 et 7 de la Convention n° 106 de l'OIT et l'article 55 de la Constitution ;

2°/ que selon les alinéas 1 et 4 de l'article 7 de la Convention n° 106 de l'OIT, toute mesure instaurant un régime spécial de repos hebdomadaire doit être prise en consultation avec les organisations représentatives des employeurs et des travailleurs intéressées, s'il en existe ; qu'en relevant, pour rejeter le moyen d'inconventionnalité de la dérogation législative accordée aux entreprises du secteur de l'ameublement que le rapport du comité d'experts de l'OIT n'avait pas considéré que les dispositions de la loi du 3 janvier 2008 étaient contraires aux dispositions de la Convention n° 106, sans rechercher si le comité n'avait pas relevé dans ses conclusions finales sur la réclamation déposée par la CGT-Force ouvrière auprès de l'OIT, qui ont été approuvées par le conseil d'administration du Bureau international du travail dans sa 326e session en déclarant close la réclamation, que l'article 11 de la loi du 3 janvier 2008 avait été édicté en l'absence de toute consultation des organisations syndicales en violation de l'alinéa 4 de l'article 7 de la Convention (considérants 52 à 54) et n'avait pas formellement prié le gouvernement de tenir compte de cette observation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 6 et 7 de la Convention n° 106 de l'OIT et de l'article 55 de la Constitution ;

3°/ que l'alinéa 1 de l'article 7 de la Convention n° 106 de l'OIT subordonne la création de régimes spéciaux de repos hebdomadaire à la double condition que, d'une part, la nature du travail, la nature des services fournis par l'établissement, l'importance de la population à desservir ou le nombre des personnes employées ne permettent pas l'application du repos dominical et que, d'autre part, cela soit justifié par des considérations sociales et économiques pertinentes ; qu'en rejetant le moyen d'inconventionnalité de la dérogation législative au principe du repos dominical accordée aux entreprises du secteur de l'ameublement, sans avoir constaté que le repos dominical ne pouvait pas être appliqué dans le secteur de l'ameublement, ni dit quelles considérations sociales et économiques pertinentes empêchaient qu'il le soit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 6 et 7 de la Convention n° 106 de l'OIT et de l'article 55 de la Constitution ;

4°/ que l'alinéa 1 de l'article 7 de la Convention n° 106 de l'OIT subordonne la création de régimes spéciaux de repos hebdomadaire à la double condition que d'une part, la nature du travail, la nature des services fournis par l'établissement, l'importance de la population à desservir ou le nombre des personnes employées ne permettent pas l'application du repos dominical et que d'autre part, cela soit justifié par des considérations sociales et économiques pertinentes ; qu'en l'espèce, en relevant que le rapport du comité d'experts de l'OIT n'avait pas considéré que les dispositions de la loi du 3 janvier 2008 étaient contraires aux dispositions de la Convention n° 106, sans rechercher si le comité, dont les conclusions ont été pleinement approuvées par le conseil d'administration du Bureau international du travail, n'avait pas prié le gouvernement français de tenir compte de l'observation contenue dans son considérant n° 47, ce qu'a explicitement entériné le BIT lors de sa 326e session, ce dont il s'évinçait que les critères énoncés par l'alinéa 1 de l'article 7 de la Convention n'avaient pas été respectés par la loi du 3 janvier 2008, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 6 et 7 de la Convention n° 106 de l'OIT et de l'article 55 de la Constitution ;

5°/ que la conformité d'une loi à une convention internationale ne peut s'apprécier qu'au regard des dispositions législatives en cause, et non de la situation particulière du requérant ; qu'en l'espèce, pour juger que la loi du 3 janvier 2008 était conforme à la Convention n° 106 de l'OIT, la cour d'appel a relevé que le salarié avait travaillé le dimanche sur la base du volontariat et qu'il avait perçu une majoration de 125 % pour toute heure travaillée le dimanche en sus du taux horaire de base ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser la conformité de la loi, ne garantissant par elle-même nullement ni le volontariat ni la majoration de salaire pour les salariés qui travaillent le dimanche en application d'une dérogation permanente de droit, aux stipulations de la convention internationale n° 106 de l'OIT, de valeur supra-légale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 6 et 7 de la Convention n° 106 de l'OIT et de l'article 55 de la Constitution ;

Mais attendu, d'une part, que les dispositions de l'article 7 § 4 de la Convention n° 106 de l'Organisation internationale du travail concernant le repos hebdomadaire dans les commerces et les bureaux ne créent d'obligations de consultation des partenaires sociaux, dès lors que les dérogations au travail dominical critiquées résultent de la loi, qu'à la charge de l'Etat, de sorte que le moyen tiré de ce que la procédure ayant conduit à l'adoption de la loi n'est pas conforme à ces dispositions ne peut être accueilli ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que le rapport du Comité de l'Organisation internationale du travail chargé d'examiner la réclamation alléguant l'inexécution par la France de la Convention n° 106, des 10 et 24 mars 2016, a noté que la commission d'experts, après analyse complète et détaillée de la législation en cause, n'a pas considéré que les dispositions en question étaient contraires aux dispositions de la Convention n° 106, et ayant fait ressortir que les dérogations concernées étaient justifiées par la nature du travail, la nature des services fournis par l'établissement, l'importance de la population à desservir et le nombre des personnes employées et se fondaient sur des considérations économiques et sociales répondant à un besoin du public, en ce que l'aménagement de la maison auquel participe l'ameublement relève d'une activité pratiquée plus particulièrement en dehors de la semaine de travail, la cour d'appel a décidé à bon droit que les dispositions de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 n'étaient pas incompatibles avec celles des articles 6 et 7, § 1, de la Convention n° 106 ;

D'où il suit que le moyen, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la cinquième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Aubert-Monpeyssen - Avocat général : M. Liffran - Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Article 7, § 4, de la convention n° 106 de l'Organisation internationale du travail ; articles 6 et 7, § 1, de la convention n° 106 de l'Organisation internationale du travail ; loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs.

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