Numéro 11 - Novembre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2018

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL

Soc., 14 novembre 2018, n° 17-11.294, (P)

Rejet

Conventions et accords collectifs – Accords collectifs – Accords d'entreprise – Société La Poste – Accord du 6 juin 2006 sur les nouveaux dispositifs de promotion ouverts à l'ensemble des postiers, salariés et fonctionnaires – Accès aux fonctions de cadre supérieur – Modalités – Dispositif de reconnaissance du potentiel professionnel – Applications diverses – Instruction RH du 4 février 2005 – Nouvelle fonction de rattachement d'un poste de travail – Fonction de rattachement d'un niveau supérieur au niveau de classification du salarié – Accès du salarié au niveau de classification du poste – Portée

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 25 novembre 2016), et les pièces de la procédure, que M. Y... a été engagé, à compter du 1er octobre 2006, en qualité d'intégrateur sur plates formes par la société La Poste, niveau III-3 de la convention commune de La Poste France-Télécom ; qu'à la suite d'une campagne de maintenance des postes de travail ouverte en 2010, son poste a été rattaché à la fonction de chef de projet MOE informatique groupe A classification IV-1 à compter du 21 septembre 2010 ; que revendiquant une reclassification professionnelle et une revalorisation salariale, il a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes de rattachement à la fonction de chef de projet MOE informatique relevant du grade ICS-1 à compter du 21 septembre 2010, du grade ICS2 à compter du 21 septembre 2012 et de ses demandes de rappel de salaires, alors, selon le moyen :

1°/ que pour déterminer la qualification attribuée à un salarié, le juge doit se prononcer au vu des fonctions réellement exercées ; qu'en se contentant, pour débouter le salarié de ses demandes, d'écarter l'application de l'accord d'entreprise du 12 juillet 1996 pour l'amélioration de la gestion des agents contractuels régis par la convention commune La Poste France-Télécom pour retenir celle de l'accord du 6 juin 2006 relatif à la promotion au sein de la société La Poste, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si M. Y... n'exerçait pas effectivement des fonctions supérieures à celles prévues dans son contrat de travail, ce qui résultait d'ailleurs des constatations mêmes des premiers juges et avait été admis par les supérieurs hiérarchiques du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1103 du code civil ;

2°/ qu'ainsi que le soulignait M. Y... dans ses écritures, l'accord d'entreprise du 12 juillet 1996 pour l'amélioration de la gestion des agents contractuels régis par la convention commune La Poste France-Télécom, toujours en vigueur et non remis en cause par l'accord du 6 juin 2006 relatif à la promotion au sein de la société La Poste, régit les modifications de classification de poste résultant notamment des opérations de maintenance des postes de travail ; que, conformément aux dispositions de l'article 7 de cet accord d'entreprise, en cas de classification du contrat de travail à un niveau supérieur à celui du contrat détenu, l'agent bénéficie d'un avenant afin de porter le niveau figurant sur le contrat au niveau de reclassification obtenu après vérification de son poste ; qu'en estimant, pour débouter de l'ensemble de ses demandes M. Y..., dont il était par ailleurs constant qu'il occupait des fonctions supérieures à celles prévues dans son contrat de travail, que les dispositions de l'accord d'entreprise du 12 juillet 1996 ne régiraient que les conséquence de la classification initiale de 1996 et n'étaient pas applicables, la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil et L. 2254-1 du code du travail ;

3°/ qu'en écartant l'application de l'accord d'entreprise du 12 juillet 1996 dont l'article 7 dispose qu'en cas de classification du contrat de travail à un niveau supérieur à celui du contrat détenu, l'agent bénéficie d'un avenant afin de porter le niveau figurant sur le contrat au niveau de reclassification obtenu après vérification de son poste, au bénéfice d'une instruction du 4 février 2005 publiée au bulletin des ressources humaines de la société La Poste, énonçant que l'accès du salarié au niveau supérieur de classification de sa nouvelle fonction de rattachement, se fera selon les dispositifs de promotion en vigueur, la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil et L. 2254-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant rappelé, par motifs propres et adoptés, qu'aux termes de l'instruction du 4 février 2005 relative à la maintenance des postes de travail, lorsque la nouvelle fonction de rattachement est d'un niveau supérieur au niveau de classification du salarié, l'accès de celui -ci au niveau de classification du poste se fera selon les dispositifs de promotion en vigueur, et qu'aux termes de l'accord d'entreprise du 6 juin 2006 relatif à la promotion au sein de la société La Poste, l'accès aux fonctions de cadre supérieur qui constituent un franchissement significatif de niveau de responsabilité, s'effectue par la seule voie de la reconnaissance du potentiel professionnel (RPP), la cour d'appel, qui a constaté qu'à la suite de la campagne de maintenance 2010, le poste de travail du salarié avait été rattaché à la fonction de chef de projet MOE informatique relevant du groupe A, en a exactement déduit, sans encourir les griefs visés par la deuxième et la troisième branches du moyen, qu'il devait se soumettre à la procédure de promotion interne résultant de l'accord du 6 juin 2006 ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Van Ruymbeke - Avocat général : M. Liffran - Avocat(s) : Me Le Prado ; SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret -

Textes visés :

Accord d'entreprise du 6 juin 2006 relatif à la promotion au sein de la société La Poste ; instruction RH de la société La Poste du 4 février 2005 relative à la maintenance des postes de travail.

Soc., 14 novembre 2018, n° 17-22.539, (P)

Cassation partielle

Conventions et accords collectifs – Conventions diverses – Convention collective nationale métropolitaine des entreprises de maintenance, distribution, location de matériels agricoles, de travaux publics, bâtiment, manutention, de motoculture de plaisance et activités connexes dite SDLM du 23-04-2012 – Articles 4.21.1 et 4.21.2 – Rémunération – Salaire minimum mensuel conventionnel garanti – Définition – Eléments à prendre en compte – Treizième mois – Versement – Moment – Portée

Il résulte des articles 4.21.1 et 4.21.2 de la convention collective nationale métropolitaine des entreprises de la maintenance, distribution et location de matériels agricoles, de travaux publics, de bâtiment, de manutention, de motoculture de plaisance et activités connexes, dite SDLM du 23 avril 2012 que si le treizième mois fait partie des éléments de rémunération à prendre en compte dans la comparaison avec le salaire minimum conventionnel, en l'absence de disposition conventionnelle contraire, son montant ne doit être pris en compte que pour le mois où il a été effectivement versé.

Encourt la cassation l'arrêt qui retient que le treizième mois étant un élément de salaire à inclure dans le minimum conventionnel quelle que soit sa périodicité de versement, sa prise en compte n'est pas limitée au mois au cours duquel il a été versé.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y... a été engagée le 16 juin 2003 en qualité d'assistante service clientèle par la société Rain Bird Europe ; qu'au dernier état de la relation contractuelle elle était classée au niveau VII, coefficent C10, statut cadre de la convention collective nationale métropolitaine des entreprises de la maintenance, distribution et location de matériels agricoles, de travaux publics, de bâtiment, de manutention, de motoculture de plaisance et activités connexes, dite SDLM du 23 avril 2012 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et de diverses demandes en découlant ;

Sur le premier moyen : Publication sans intérêt

Mais sur le deuxième moyen :

Vu les articles 4.21.1 et 4.21.2 de la convention collective nationale métropolitaine des entreprises de la maintenance, distribution et location de matériels agricoles, de travaux publics, de bâtiment, de manutention, de motoculture de plaisance et activités connexes, dite SDLM du 23 avril 2012 ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que pour l'application du salaire minimum mensuel conventionnel garanti, il y a lieu de prendre en compte tous les éléments de rémunération quels qu'en soient l'origine, l'objet, les critères d'attribution, l'appellation et la périodicité des versements, sans autres exceptions que celles énoncées à l'article 4.21.2 ; que, selon le second, ne sont pas pris en compte dans la définition du salaire minimum mensuel conventionnel garanti les éléments de la rémunération qui ne sont pas la contrepartie directe du travail ainsi que les primes et gratifications dont l'attribution présente un caractère aléatoire ; qu'il en résulte que si le treizième mois fait partie des éléments de rémunération à prendre en compte dans la comparaison avec le salaire minimum conventionnel, en l'absence de disposition conventionnelle contraire, son montant ne doit être pris en compte que pour le mois où il a été effectivement versé ;

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de rappels de salaires au titre des minima conventionnels, congés payés afférents, de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail, remise de bulletins de salaire rectifiés, l'arrêt retient qu'il résulte de l'article 4.21.1 que le treizième mois est un élément de salaire à inclure dans le minimum conventionnel quelle que soit sa périodicité de versement en sorte que sa prise en compte n'est pas limitée au mois au cours duquel il a été versé ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du deuxième moyen entraîne la cassation sur les chefs de dispositif visés par le troisième moyen pris d'une cassation par voie de conséquence ainsi que ceux se rapportant au titre de rappel de prime d'ancienneté outre congés payés afférents par un lien de dépendance nécessaire ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le quatrième moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute Mme Y... de ses demandes en paiement d'heures supplémentaires outre congés payés afférents, l'arrêt rendu le 2 juin 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Ala - Avocat général : Mme Rémery - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Articles 4.21.1 et 4.21.2 de la convention collective nationale métropolitaine des entreprises de la maintenance, distribution et location de matériels agricoles, de travaux publics, de bâtiment, de manutention, de motoculture de plaisance et activités connexes, dite SDLM du 23 avril 2012.

Rapprochement(s) :

Sur la prise en compte du treizième mois, pour le mois où il a été versé, pour le calcul du salarie minimum conventionnel, dans le même sens que : Soc., 14 novembre 1991, pourvoi n° 87-44.094, Bull. 1991, V, n° 501 (cassation partielle).

Soc., 28 novembre 2018, n° 17-20.007, n° 17-20.008, (P)

Rejet

Conventions et accords collectifs – Dispositions générales – Application – Application dans le temps – Rétroactivité – Exclusion – Cas

Il résulte de l'article 2 du code civil qu'une convention ou un accord collectif, même dérogatoire, ne peut priver un salarié des droits qu'il tient du principe d'égalité de traitement pour la période antérieure à l'entrée en vigueur de l'accord.

Vu la connexité, joint les pourvois n° 17-20.007 et 17-20.008 ;

Sur les premier et second moyens des pourvois réunis :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Rennes, 29 mars 2017), que Mmes Y... et C..., salariées de La Poste, ont, par acte du 29 mai 2013, saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappel de salaires au titre du « complément Poste » ;

Attendu que La Poste fait grief aux arrêts de faire droit aux demandes des salariées, alors, selon le moyen :

1°/ que les différences de traitement entre catégories professionnelles opérées par voie de conventions ou d'accords collectifs, négociés et signés par des organisations syndicales représentatives, investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l'habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées de sorte qu'il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle ; qu'en l'espèce,

La Poste avait rappelé, dans ses écritures, qu'un accord collectif conclu à La Poste le 5 février 2015 a supprimé le complément Poste et lui a substitué une double allocation comprenant d'une part, un complément de rémunération et, d'autre part, pour certains agents bénéficiant, à sa date, d'un complément Poste plus élevé que ce complément de rémunération, une « indemnité de carrière antérieure personnelle » destinée à permettre (article II-1) « le maintien, à titre personnel, du montant du complément Poste acquis avant la date de mise en oeuvre du présent accord », et dont il est précisé qu'elle « est héritée notamment de la perte antérieure de dispositifs de primes et indemnités » ; qu'en accueillant cependant la demande en rappel de complément Poste des demandeurs sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si cet accord n'avait pas à la fois validé pour le passé et pérennisé pour l'avenir les différences de traitement existantes dans l'attribution du complément Poste, dont les partenaires sociaux ont ainsi reconnu qu'elles étaient non seulement fondées mais justifiées par la compensation de la perte des primes et indemnités antérieures, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement ;

2°/ que le complément Poste, tel que finalisé par la décision n° 717 du 4 mai 1995, a pour double vocation, d'une part, de rémunérer le niveau de fonction et la maîtrise du poste, d'autre part, d'indemniser les agents de la perte de primes et indemnités antérieures ; que, selon l'article 63 de cette décision et l'article 13 du « guide mémento des règles de gestion RH » PS-II.1, le « différentiel de complément Poste » versé à certains agents de droit privé ayant perçu antérieurement à son institution des primes et indemnités « hors normes », constitue une « composante » du complément Poste, qui représente « la différence entre ce complément et le complément indemnitaire précédemment versé » ; que cet élément de rémunération, dont l'unique particularité est d'être destiné aux agents ayant perçu des primes et indemnités d'un montant excédant le maximum du champ de normalité ou du seuil unique en l'absence de champ de normalité, a donc le même objet et la même finalité que la part indemnitaire du complément Poste, à savoir permettre le maintien, à titre personnel, de ces primes et indemnités antérieurement acquises ; qu'en décidant le contraire la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 63 de la décision n° 717 du 4 mai 1995, ensemble l'article 13 du « Guide mémento des règles de gestion » PS-II.1 ;

Mais attendu, d'abord, qu'il résulte de l'article 2 du code civil qu'une convention ou un accord collectif, même dérogatoire, ne peut priver un salarié des droits qu'il tient du principe d'égalité de traitement pour la période antérieure à l'entrée en vigueur de l'accord ;

Attendu, ensuite, que l'égalité de rémunération doit être assurée pour chacun des éléments de la rémunération ; qu'ayant relevé que le « différentiel complément Poste » institué par les articles 61 et 63 de la décision n° 717 du 4 mai 1995 du président du conseil d'administration de La Poste constitue un complément indemnitaire accordé aux agents affectés avant le 1er janvier 1995 au service général afin de maintenir le niveau de leurs indemnités après l'instauration du niveau unique du complément Poste, que les pratiques indemnitaires anciennes introduisant une dispersion hors norme pour moins de 10 % des agents, il a été décidé que la différence entre le complément Poste et le complément indemnitaire précédemment attribué sera versée sous l'appellation « différentiel complément Poste », la cour d'appel en a déduit à bon droit que cette indemnité dont bénéficiaient les deux salariées en cause qui ont été engagées avant 1995, ayant un objet et une finalité distincts de celui du complément Poste, ne devait pas être prise en compte dans la comparaison entre le complément Poste versé aux salariés et celui versé aux fonctionnaires se trouvant dans une situation identique ou similaire ;

Attendu, enfin, que, selon la délibération du 25 janvier 1995 du conseil d'administration de La Poste, les primes et indemnités perçues par les agents de droit public et les agents de droit privé et initialement regroupées au sein d'un complément indemnitaire ont été supprimées et incorporées dans un tout indivisible appelé « complément Poste » constituant désormais de façon indissociable l'un des sous-ensembles de la rémunération de base de chaque catégorie de personnel et, selon la décision n° 717 du 4 mai 1995 du président du conseil d'administration de La Poste, la rémunération des agents de La Poste se compose de deux éléments, d'une part, le traitement indiciaire pour les fonctionnaires ou le salaire de base pour les agents contractuels, lié au grade et rémunérant l'ancienneté et l'expérience, d'autre part, le « complément Poste », perçu par l'ensemble des agents, qui rétribue le niveau de fonction et tient compte de la maîtrise du poste ; qu'en application du principe d'égalité de traitement, pour percevoir un complément Poste du même montant, un salarié doit justifier exercer au même niveau des fonctions identiques ou similaires à celles du fonctionnaire auquel il se compare ;

Et attendu qu'après avoir constaté que La Poste s'était engagée, aux termes de l'accord salarial du 10 juillet 2001 à combler d'ici fin 2003 l'écart existant entre les compléments poste des agents contractuels des niveaux I.2, I.3 et II.1 et ceux perçus par les fonctionnaires de même niveau, la cour d'appel a relevé d'abord, que les salariées, qui avaient renoncé à leurs demandes postérieures à l'entrée en vigueur de l'accord du 2 février 2015, se comparaient à un fonctionnaire exerçant comme elles les fonctions de guichetier confirmé, dont le montant mensuel du « complément Poste » était supérieur à celui qu'elles percevaient, ensuite, que La Poste fournissait pour seule explication à cette différence, un historique de carrière distinct du fonctionnaire ainsi que la renonciation par les fonctionnaires aux indemnités et primes perçues avant 1995, contredisant ainsi le plan de convergence progressive qu'elle avait mis en place pour combler l'écart existant ; qu'elle en a exactement déduit que la différence de traitement n'était justifiée par aucune raison pertinente et que le principe « à travail égal salaire égal » avait été méconnu ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président et rapporteur) - Avocat général : Mme Rémery - Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; Me Balat -

Textes visés :

Article 2 du code civil ; décision n° 717 du 4 mai 1995 du président du conseil d'administration de La Poste ; principe d'égalité de traitement.

Rapprochement(s) :

Sur l'application dans le temps d'une convention ou d'un accord collectif, à rapprocher : Soc., 24 janvier 2007, pourvoi n° 04-45.585, Bull. 2007, V, n° 14 (2) (cassation partielle sans renvoi), et l'arrêt cité. Sur le principe que l'égalité de rémunération doit être assurée pour chacun des éléments de la rémunération, cf. : CJCE, arrêt du 17 mai 1990, Barber, C-262/88, § 34 ; CJCE, arrêt du 26 juin 2001, Brunnhofer, C-381/99, § 35 et suivants. Sur le contentieux dit du « complément Poste », à rapprocher : Soc., 4 avril 2018, pourvoi n° 16-27.703, Bull. 2018, V, n° 63 (cassation sans renvoi), et les arrêts cités.

Soc., 14 novembre 2018, n° 17-14.937, (P)

Rejet

Conventions et accords collectifs – Dispositions générales – Contenu – Principe d'égalité de traitement – Atteinte au principe – Défaut – Cas – Différence d'évolution de carrière résultant de l'entrée en vigueur d'un accord collectif – Conditions – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 18 janvier 2017), que M. Y... a été engagé le 14 février 1977 par la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine en qualité d'employé aux écritures ; que le 1er juin 1977, il a été muté au Centre de traitement électronique inter caisses de Bretagne ; qu'au mois de septembre 1983, il a réussi le concours de l'école des cadres ; que le 1er mai 1984, il a été engagé par l'URSSAF d'Ille-et-Vilaine devenue l'URSSAF de Bretagne et a été promu agent de contrôle des employeurs devenu inspecteur du recouvrement ; qu'il a fait valoir ses droits à la retraite le 30 mai 2012 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen, après avis donné aux parties, en application de l'article 1015 du code de procédure civile :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de réparation du préjudice subi pour perte de rémunération et de sa demande de dommages-intérêts pour violation du principe de l'égalité de traitement et non-respect des dispositions conventionnelles alors, selon le moyen :

1°/ qu'au regard du respect du principe d'égalité de traitement, la seule circonstance que des salariés, appartenant à la même catégorie professionnelle et exerçant les mêmes fonctions, aient été engagés avant ou après l'entrée en vigueur d'un accord collectif ne saurait suffire à justifier des différences de rémunération entre eux ; qu'en l'espèce, pour écarter une inégalité de traitement entre les inspecteurs du recouvrement selon qu'ils avaient été diplômés avant ou après le 1er janvier 1993, la cour d'appel a jugé que les différences de traitement inhérentes à la succession de régimes juridiques dans le temps n'étaient pas en soi contraires au principe d'égalité ; qu'en statuant ainsi, quand au contraire, en présence d'une différence de traitement entre des salariés appartenant à la même catégorie professionnelle et exerçant les mêmes fonctions née de la seule succession de conventions collectives, et donc a priori contraire au principe d'égalité, il appartenait à l'URSSAF de Bretagne de justifier que la différence de traitement instituée ainsi entre les inspecteurs du recouvrement selon qu'ils avaient été diplômés avant ou après le 1er janvier 1993 était justifiée par une raison objective et pertinente autre que la conclusion d'un nouvel accord collectif, la cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement ;

2°/ qu'au regard du respect du principe d'égalité de traitement, la seule circonstance que des salariés, appartenant à la même catégorie professionnelle et exerçant les mêmes fonctions, aient été engagés avant ou après l'entrée en vigueur d'un accord collectif ne saurait suffire à justifier des différences de rémunération entre eux ; qu'en l'espèce, après avoir dit que les différences de traitement entre catégories professionnelles opérées par voie de conventions ou d'accords collectifs sont présumées justifiées et que cette présomption de justification s'étend également aux différences de traitement opérées par voie d'accord collectif entre des salariés exerçant, au sein d'une même catégorie professionnelle, des fonctions distinctes, la cour d'appel a jugé que M. Y... ne démontrait pas que la différence de traitement était étrangère à toute considération de nature professionnelle ; qu'en statuant ainsi, quand les inspecteurs du recouvrement, qu'ils aient été diplômés avant ou après le 1er janvier 1993, exercent des fonctions identiques au sein d'une même catégorie professionnelle, de sorte que la différence de traitement instituée entre eux selon la date d'obtention de leur diplôme ne pouvait être présumée conforme au principe d'égalité à charge pour l'agent de démontrer le contraire, la cour d'appel a derechef violé le principe d'égalité de traitement, ensemble l'article 1315 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;

3°/ qu'il résulte des articles 32 et 33 dans leur rédaction issue du protocole d'accord du 14 mai 1992 que les échelons attribués à l'agent après sa réussite à l'examen sanctionnant la fin d'études de la formation des cadres option « agent de contrôle des employeurs » organisé par l'UCANSS devaient être conservés par le salarié lors de sa promotion aux fonctions d'inspecteur de recouvrement ; que le fait que les partenaires sociaux aient ultérieurement supprimé les échelons d'avancement n'est pas de nature à remettre en cause l'inégalité de traitement existant entre les inspecteurs du recouvrement diplômés après le 1er janvier 1993 qui ont gardé leurs échelons d'avancement et qui ont vu ces derniers pris en compte lors de la transposition de classification intervenue en 2005, et les inspecteurs du recouvrement diplômés avant le 1er janvier 1993 qui ont été privés de ces échelons d'avancement ce qui a affecté leur classification en 2005 ; qu'en relevant que les partenaires sociaux avaient du reste, au fil des protocoles depuis celui de 1992, réduit la portée de l'attribution des échelons au mérite dans l'évolution de carrière des salariés, qu'elle résulte de l'appréciation par la hiérarchie ou de l'obtention d'un diplôme, et que les échelons de l'article 32 avaient même disparu en 2005, quand de tels motifs étaient impropres à écarter une inégalité de traitement illicite entre les inspecteurs du recouvrement diplômés avant et après le 1er janvier 1993, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement ;

Mais attendu que le principe d'égalité de traitement ne fait pas obstacle à ce que les salariés embauchés postérieurement à l'entrée en vigueur d'un nouveau barème conventionnel soient appelés dans l'avenir à avoir une évolution de carrière plus rapide dès lors qu'ils ne bénéficient à aucun moment d'une classification ou d'une rémunération plus élevée que celle des salariés embauchés antérieurement à l'entrée en vigueur du nouveau barème et placés dans une situation identique ou similaire ;

Et attendu qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que le salarié se plaignait d'une inégalité de traitement au seul motif de l'évolution des dispositions conventionnelles sans soutenir que les salariés relevant des dispositions du protocole d'accord du 14 mai 1992 avaient bénéficié d'une classification ou d'une rémunération plus élevée que celle des salariés promus sous l'empire des dispositions conventionnelles antérieures et placés dans une situation identique ou similaire ;

Qu'il en résulte l'absence d'atteinte au principe d'égalité de traitement ;

Que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, la décision déférée se trouve légalement justifiée en son dispositif ;

Que le moyen ne peut donc être accueilli ;

Sur le deuxième moyen : Publication sans intérêt

Sur le troisième moyen : Publication sans intérêt

Sur le quatrième moyen, pris en ses deux dernières branches : Publication sans intérêt

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Ala - Avocat général : Mme Rémery - Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano ; SCP Gatineau et Fattaccini -

Textes visés :

Principe d'égalité de traitement.

Rapprochement(s) :

Sur le défaut d'atteinte au principe d'égalité de traitement en cas de différence d'évolution de carrière résultant de l'entrée en vigueur d'un accord collectif, à rapprocher : Soc., 17 octobre 2018, pourvoi n° 16-26.729, Bull. 2018, V, (cassation partielle), et les arrêts cités.

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