Numéro 11 - Novembre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2018

SEPARATION DES POUVOIRS

Tribunal des conflits, 12 novembre 2018, n° 18-04.139, (P)

Compétence judiciaire – Domaine d'application – Assurance responsabilité – Action directe de la victime contre l'assureur de l'auteur du sinistre – Distinction de l'action en responsabilité contre l'auteur du dommage – Portée

Si l'action directe ouverte par l'article L. 124-3 du code des assurances à la victime d'un dommage ou à l'assureur de celle-ci contre l'assureur de l'auteur responsable du sinistre tend à la réparation du préjudice subi par la victime, elle se distingue de l'action en responsabilité contre l'auteur du dommage en ce qu'elle poursuit l'exécution de l'obligation de réparer qui pèse sur l'assureur en vertu du contrat d' assurance.

Dès lors, il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de connaître des actions tendant au paiement des sommes dues par un assureur au titre de ses obligations de droit privé, alors même que l'appréciation de la responsabilité de son assuré dans la réalisation du fait dommageable relèverait de la juridiction administrative.

Compétence judiciaire – Domaine d'application – Litige entre personnes privées – Applications diverses – Litige entre deux sociétés privées dont l'une exécute un marché de prestation de service confié par une commune

La société qui, en application d'un marché de prestation de service, vérifie la conformité des installations d'assainissement non collectif aux prescriptions applicables, rédige et transmet aux services de la commune des rapports techniques comportant des propositions de décision, ne peut être regardée comme gérant le service public de l'assainissement non collectif. Dès lors, le litige qui l'oppose à une société tiers est un litige entre personnes privées relevant de la compétence de la juridiction judiciaire.

Vu l'expédition du jugement du 14 juin 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans, saisi de l'action en garantie introduite par la SARL Millet BTP et la SMABTP, son assureur, contre l'association PACT du Cher, aux droits de laquelle est venue en cours d’instance l'association Solidarité habitat Centre - Val de Loire, et contre la compagnie d’assurance AXA France IARD a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 32 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu l'ordonnance du 14 juin 2017 par laquelle le juge de la mise en état du tribunal de grande instance s'est déclaré incompétent pour connaître de ce litige ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée à la SARL Millet BTP, à la SMABTP, à l'association Solidarité habitat Centre - Val de Loire, à la compagnie d'assurance AXA IARD et au ministre de la transition écologique et solidaire qui n'ont pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;

Vu le code des assurances ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Considérant que M. Z... et Mme A... ont fait construire par la SARL Millet BTP, sur un terrain leur appartenant situé sur le territoire de la commune de Grossouvre (Cher), une maison d’habitation dotée d’un dispositif d'assainissement non collectif ; qu’en raison du mauvais fonctionnement de ce dispositif, ils ont assigné la société, ainsi que son assureur, la SMABTP, devant le tribunal de grande instance de Bourges au titre de la garantie décennale ; que les défendeurs ont appelé en garantie l’association PACT du Cher et son assureur, la compagnie AXA France IARD, en faisant valoir que le dispositif litigieux avait été réalisé conformément à une solution technique préconisée par cette association à l’issue d’un contrôle effectué en janvier 2010 dans le cadre du service public de l’assainissement non collectif ; que, par une ordonnance du juge de la mise en état du 14 juin 2017, le tribunal de grande instance a décliné la compétence de la juridiction judiciaire pour connaître de l'action en garantie ; que, par un jugement du 14 juin 2018, le tribunal administratif d’Orléans, estimant que cette action ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, a renvoyé au Tribunal, sur le fondement de l'article 32du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;

Considérant, d’une part, que si l’action directe ouverte par l'article L. 124-3 du code des assurances à la victime d'un dommage ou à l'assureur de celle-ci subrogé dans ses droits, contre l’assureur de l'auteur responsable du sinistre, tend à la réparation du préjudice subi par la victime, elle se distingue de l'action en responsabilité contre l'auteur du dommage en ce qu'elle poursuit l'exécution de l'obligation de réparer qui pèse sur l'assureur en vertu du contrat d'assurance ; qu’il suit de là qu’il n’appartient qu’aux juridictions de l'ordre judiciaire de connaître des actions tendant au paiement des sommes dues par un assureur au titre de ses obligations de droit privé, alors même que l'appréciation de la responsabilité de son assuré dans la réalisation du fait dommageable relèverait de la juridiction administrative ; que, dès lors, le litige opposant la SARL Millet BTP et la SMABTP à la compagnie AXA France IARD relève de la compétence de la juridiction judiciaire ;

Considérant, d'autre part, qu'en vertu des dispositions du III de l'article L. 2224-8 du code général des collectivité territoriales, la commune assure le contrôle des installations d'assainissement non collectif ; que la compétence que la commune de Grossouvre tirait de ces dispositions a été transférée à la communauté de communes des Trois provinces ; qu'il ressort des pièces du dossier que cet établissement public confie à un prestataire privé, par des marchés de prestations de services, la vérification de la conformité des installations d'assainissement non collectif aux prescriptions applicables ainsi que la rédaction et la transmission aux services de la communauté de rapports techniques comportant des propositions de décision ; que le titulaire du marché ne peut être regardé comme gérant le service public de l’assainissement non collectif, qui demeure exploité en régie par la communauté de communes ; que le litige opposant la SARL Millet BTP et la SMABTP à l'association PACT du Cher, au titre d’une faute que cette association aurait commise à l'occasion d'une vérification effectuée en exécution d’un tel marché, est un litige entre personnes privées relevant de la juridiction judiciaire ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le litige opposant la SARL Millet BTP et la SMABTP à l’association Solidarité habitat Centre - Val de Loire, venant aux droits de l’association PACT du Cher, et à la compagnie AXA France IARD relève de la compétence de la juridiction judiciaire ;

D E C I D E :

Article 1er :

La juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant la SARL Millet BTP et la SMABTP à l’association Solidarité habitat Centre - Val de Loire, venant aux droits de l’association PACT du Cher, et à la compagnie AXA France IARD.

Article 2 :

L'ordonnance du 14 juin 2017 du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Bourges est déclarée nulle et non avenue.

La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.

Article 3 :

La procédure suivie devant le tribunal administratif d'Orléans est déclarée nulle et non avenue, à l'exception du jugement rendu par ce tribunal le 14 juin 2018.

- Président : M. Maunand - Rapporteur : M. Chauvaux - Avocat général : M. Liffran (Rapporteur public) -

Textes visés :

Loi des 16-24 août 1790 ; décret du 16 fructidor an III ; loi du 24 mai 1872 ; décret du 26 octobre 1849 modifié ; article L. 124-3 du code des assurances ; loi des 16-24 août 1790 ; décret du 16 fructidor an III ; loi du 24 mai 1872 ; décret du 26 octobre 1849 modifié ; article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales.

Rapprochement(s) :

Tribunal des conflits, 15 avril 2013, Bull. 2013, T. conflits, n° 8, et les arrêts cités.

Tribunal des conflits, 12 novembre 2018, n° 18-04.136, (P)

Compétence judiciaire – Domaine d'application – Litige relatif à un contrat de droit privé – Contrat de droit privé – Caractérisation – Cas – Contrat d'avenir et contrat unique d'insertion – Requalification en contrat à durée indéterminée – Effets

Selon les dispositions des articles L. 5134-41, L. 5134-19-3 et L. 5134-24 du code du travail, le contrat d'avenir et le contrat unique d'insertion, sont des contrats de droit privé à durée déterminée. Il appartient en principe à l'autorité judiciaire de se prononcer sur les litiges nés de la conclusion, de l'exécution et de la rupture de tels contrats.

La juridiction administrative est seule compétente d'une part, dans le cas où la contestation met en cause la légalité de la convention passée ; d'autre part pour tirer les conséquences d'une éventuelle requalification d'un contrat, soit lorsque celui-ci n'entre en réalité pas dans le champ des catégories d'emplois, d'employeurs ou de salariés visées par le code du travail, soit lorsque la requalification effectuée par le juge judiciaire, pour un autre motif, a pour conséquence la poursuite d'une relation contractuelle entre le salarié et la personne morale de droit public gérant un service public administratif.

Dès lors, la requalification à laquelle a procédé un conseil de prud'hommes, qui a eu pour effet de transformer en licenciement la rupture ultérieurement notifiée pour arrivée à terme des contrats, et n'a pas eu pour conséquence de placer la relation de travail en dehors du droit privé ni d'entraîner la poursuite de la relation contractuelle de l'intéressée au-delà du terme du dernier contrat aidé, relève des juridictions judiciaires.

Vu l'expédition de la décision du 18 mai 2018 par lequel le Conseil d’Etat, saisi du pourvoi de Mme X... tendant à l'annulation de l’ordonnance rendue le 30 septembre 2016 par le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Nantes qui a rejeté, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître sa demande de condamnation de l’Etat à lui payer la somme de 10000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices qu’elle estime avoir subis en raison de la succession illégale de contrats aidés de septembre 2006 à juin 2012, exécutés au sein du lycée Savary de Mauléon, a renvoyé au Tribunal, par application des articles 32 et 35 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de la compétence ;

Vu le jugement du 11 juin 2012 par lequel le conseil de prud’hommes des Sables d'Olonne, saisi par Mme X... d'une demande de requalification de son contrat en contrat indéterminée, de dommages-intérêts au titre d'une exécution déloyale du contrat et d’une indemnité de requalification sur le fondement de l'article L. 1245-2 du code du travail, a ordonné la requalification, renvoyé l'intéressée devant le tribunal administratif de Nantes, compétent pour tirer les conséquences indemnitaires résultant de la requalification du contrat et condamné le lycée Savary de Mauléon à verser à Mme X... la somme de 2 500 euros de dommages-intérêts à Mme X... au titre d'une exécution déloyale de son contrat ;

Vu le mémoire présenté par le ministre de l'éducation nationale tendant à ce que la juridiction judiciaire soit déclarée compétente par le motif que les contrats en cause sont des contrats de droit privé, que la demande de Mme X... ne met pas en cause la légalité de la convention de droit public ayant servi de cadre à la passation de son contrat de travail mais tend seulement à obtenir l'indemnisation de la requalification de son contrat qui n'a pas eu pour effet de la placer en dehors du droit privé ni d’entraîner la poursuite des relations contractuelles au-delà du terme du dernier contrat aidé le 30 juin 2012 et que le fait de distinguer la nature des fautes commises par l’administration ne semble pas concourir à une bonne administration de la justice ;

Vu les pièces dont il résulte que la saisine du Tribunal des conflits a été communiquée à Mme X... et au lycée Savary de Mauléon qui n’ont pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;

Vu le code du travail ;

Considérant que Mme X... a été recrutée, entre le 1er septembre 2006 et le 30 juin 2012, par plusieurs « contrats d’avenir » et « contrats uniques d’insertion - contrats d'accompagnement dans l’emploi », conclus avec le lycée Savary de Mauléon, pour exercer des fonctions d’agent d'administration puis d’assistante administrative ; que, saisi par Mme X... alors qu’elle exerçait ces dernières fonctions, le conseil de prud’hommes des Sables d'Olonne a, par un jugement du 11 juin 2012, d’une part, requalifié les contrats de l'intéressée en contrat à durée indéterminée et condamné le lycée Savary de Mauléon à lui payer des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat, d’autre part, rejeté sa demande d’indemnité de requalification présentée sur le fondement de l'article L. 1245-2 du code du travail, en jugeant qu’elle avait le statut d'agent contractuel de droit public et que la juridiction judiciaire n’avait pas compétence pour tirer les conséquences indemnitaires de la requalification des contrats ; que, saisi par Mme X... d’une demande de condamnation de l'Etat, pour le compte duquel les contrats avaient été conclus par le lycée Savary de Mauléon, à réparer le préjudice qu’elle estime avoir subi en raison de la succession des contrats aidés l’ayant maintenue dans une situation de précarité et d’agissements illégaux ayant notamment permis de la recruter par un contrat d’avenir en septembre 2009, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande comme présentée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ; que Mme X... s'étant pourvue en cassation, le Conseil d'Etat a sursis à statuer et, par application des article 32 et 35 du décret du 27 février 2015, renvoyé au Tribunal le soin de décider sur la question de compétence ;

Considérant que selon les dispositions, alors en vigueur, de l'article L. 5134-41 du code du travail, le « contrat d'avenir » est un contrat de travail de droit privé à durée déterminée ; qu'il en est de même du « contrat unique d'insertion » aux termes des dispositions combinées des articles L. 5134-19-3 et L. 5134-24 du même code ; qu'il appartient en principe à l'autorité judiciaire de se prononcer sur les litiges nés de la conclusion, de l'exécution et de la rupture de tels contrats, même si l'employeur est une personne publique gérant un service public à caractère administratif ; qu'il lui incombe, à ce titre, de se prononcer sur une demande de requalification de ces contrats et d’indemnisation des conséquences des manquements de l’employeur, y compris lorsqu’ils portent sur les conditions dans lesquelles les contrats ont été conclus et renouvelés ;

Considérant toutefois que, d'une part, dans le cas où la contestation met en cause la légalité de la convention passée, notamment, entre l'Etat et l'employeur, la juridiction administrative est seule compétente pour se prononcer sur la question préjudicielle ainsi soulevée ; que, d'autre part, le juge administratif est également seul compétent pour tirer les conséquences d'une éventuelle requalification d'un contrat, soit lorsque celui-ci n'entre en réalité pas dans le champ des catégories d'emplois, d'employeurs ou de salariés visées par le code du travail, soit lorsque la requalification effectuée par le juge judiciaire, pour un autre motif, a pour conséquence non la réparation du préjudice résultant de la rupture du contrat mais la poursuite d'une relation contractuelle entre le salarié et la personne morale de droit public gérant un service public administratif, au-delà du terme du ou des contrats relevant de la compétence du juge judiciaire ;

Considérant que si la requalification à laquelle a procédé le conseil de prud’hommes des Sables d’Olonne par son jugement du 15 octobre 2012 a eu pour effet de transformer en licenciement la rupture ultérieurement notifiée pour arrivée à terme des contrats, elle n’a pas eu pour conséquence de placer la relation de travail en dehors du droit privé ni d’entraîner la poursuite de la relation contractuelle de l’intéressée au-delà du terme du dernier contrat aidé relevant de la compétence judiciaire ; qu’aucun travail n’a plus été fourni ni aucun salaire versé après la date initialement convenue comme devant marquer la fin des relations contractuelles ; qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le juge judiciaire est compétent pour tirer l’ensemble des conséquences de la requalification des contrats et pour connaître du préjudice que Mme X... estime avoir subi du fait des conditions selon elle abusives dans lesquelles les contrats ont été successivement conclus ;

D E C I D E :

Article 1er :

La juridiction judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant Mme X... à l’Etat et à l’établissement public local d'enseignement « Lycée Savary de Mauléon » des Sables d’Olonne.

Article 2 :

Le jugement du conseil de prud’hommes des Sables d'Olonne du 11 juin 2012 est déclaré nul et non avenu en tant qu’il a décliné sa compétence pour connaître du litige lié à la requalification du contrat de travail conclu entre l’établissement public local d’enseignement « Lycée Savary de Mauléon » des Sables d'Olonne et Mme X....

L'affaire et les parties sont renvoyées dans cette mesure devant cette juridiction.

Article 3 :

La procédure suivie devant la juridiction administrative est déclarée nulle et non avenue à l'exception de la décision rendue par le Conseil d'Etat le 18 mai 2018.

- Président : M. Maunand - Rapporteur : Mme Duval-Arnould - Avocat général : M. Daumas (Rapporteur public) -

Textes visés :

Loi des 16-24 août 1790 ; décret du 16 fructidor an III ; loi du 24 mai 1872 ; décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ; articles L. 5134-41, L. 5134-19-3 et L. 5134-24 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Tribunal des conflits, 13 décembre 2010, n° 3805, T. conflits, Bull. 2010, n° 32, et l'arrêt cité.

Tribunal des conflits, 12 novembre 2018, n° 18-04.137, (P)

Compétence judiciaire – Exclusion – Cas – Litige relatif à un service public – Service public – Enseignement – Formation professionnelle – Greta

En raison tant de son objet que de son mode de fonctionnement, le service public assuré par les groupements d'établissements (Greta), dépourvus de personnalité morale et constitués entre les établissements publics d'enseignement relevant du ministère de l'éducation nationale pour l'exercice de leurs missions de formation professionnelle, est un service public administratif.

Dès lors, le litige opposant un Greta à une société, à laquelle était réclamé le paiement de prestations de formation professionnelle continue demeurées impayées, relève de la compétence de la juridiction administrative.

Vu l'expédition du jugement par lequel le tribunal administratif de Pau, statuant sur la demande de la Société de maintenance pétrolière tendant à ce que le tribunal la décharge des sommes mises à sa charge par les titres de recettes et l’état exécutoire émis le 30 juin 2016 par le proviseur du lycée louis Z... (Pau) pour le groupement d'établissements publics locaux d'enseignement (Greta) Sud Aquitaine, au titre de prestations de formations professionnelles continues que ce groupement lui a délivrées au cours des années 2015 et 2016, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 35 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er octobre 2018, présentée pour la Société de maintenance pétrolière qui conclut à la compétence des juridictions de l’ordre judicaire ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée au préfet des Pyrénées-atlantiques, au ministre du travail, au ministre de l’éducation nationale, au recteur de l'académie de Bordeaux et au Greta du lycée Louis Z..., qui n’ont pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;

Vu le code du travail, notamment ses articles L. 6111-1, L. 6351-1 et L. 6351-1A ;

Vu le code de l’éducation, notamment ses articles L. 122-5, L. 423-1 et D. 423-1 et suivants ;

Considérant que la Société de maintenance pétrolière a conclu avec le groupement d’établissements publics d’enseignement (Greta) Sud Aquitaine, des conventions de formation professionnelle dont plusieurs de ses salariés ont bénéficié ; que des prestations étant demeurées impayées, le proviseur du lycée Louis Z..., établissement public support du Greta, a émis à son encontre des titres de recettes les 25 août 2015 et 28 avril 2016 ainsi qu’un état exécutoire le 30 juin 2016 ; que la société a saisi le tribunal administratif de Pau d’une demande tendant à être déchargée du paiement des sommes contestées ; que, par jugement du 24mai 2008, le tribunal administratif de Pau a sursis à statuer sur cette demande et a renvoyé au Tribunal des conflits, par application de l’article 35 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence pour connaître de ce litige ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-5 du code de l'éducation : « (...) L'éducation permanente fait partie des missions des établissements d'enseignement (...)» ; qu'aux termes de l'article L. 423-1 de ce code : « Pour la mise en oeuvre de leur mission de formation continue ainsi que de formation et d'insertion professionnelles, les établissements scolaires publics s'associent en groupement d'établissements dans des conditions définies par décret »; que son article D. 423-1 dispose : « I.- Sont soumis aux dispositions de la présente section les groupements d'établissements (Greta) mentionnés à l'article L. 423-1 du code de l'éducation, constitués entre les établissements scolaires publics d'enseignement relevant du ministère de l'éducation nationale pour exercer une mission de formation continue dans le cadre de l'éducation et la formation tout au long de la vie. /Ils sont créés par une convention conclue entre les établissements. / II (...) Dans le cadre des orientations nationales déterminées par le ministre chargé de l'éducation, le recteur définit la stratégie académique de développement de ces groupements. Il arrête la carte des groupements de l'académie (...) ainsi que la liste des établissements supports de ces groupements.»; qu’aux termes de l’article D. 423-6 du même code : « Le chef de l'établissement support du groupement est ordonnateur des recettes et des dépenses du groupement. / il exerce l'autorité hiérarchique sur les personnels employés par l'établissement support pour exercer les missions de formation continue confiées au groupement (...) ; qu’enfin, en vertu des articles D. 423-9 et D. 423-10 de ce code, l'agent comptable de l'établissement support est agent comptable du groupement, lequel est géré sous forme de budget annexe au budget de cet établissement public support ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que les missions de formation professionnelle font partie des missions légalement dévolues aux établissements publics d'enseignement ; que les établissements publics d'enseignement relevant du ministère de l'éducation nationale exercent ces missions en s'associant dans des groupements dépourvus de personnalité morale dits Greta ; que le recteur d’académie arrête la composition et le fonctionnement du groupement et détermine l’établissement public support, membre de ce groupement, chargé d’en assurer la gestion administrative, financière et comptable ; que l’ordonnateur et le comptable du groupement sont ceux de l’établissement public support ; qu'en raison tant de son objet que de son mode de fonctionnement, le service public assuré par le Greta est un service public administratif ; que, par suite, le litige opposant la D... Sud Aquitaine relève de la compétence de la juridiction administrative.

D E C I D E :

Article 1er :

La juridiction administrative est compétente pour connaître du litige opposant la D... Sud Aquitaine.

- Président : M. Maunand - Rapporteur : M. Schwartz - Avocat général : M. Liffran (Rapporteur public) - Avocat(s) : Me Brouchot -

Textes visés :

Loi des 16-24 août 1790 ; décret du 16 fructidor an III ; loi du 24 mai 1872 ; décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ; articles L. 6111-1, L. 6351-1 et L. 6351-1A du code du travail ; articles L. 122-5, L. 423-1 et D. 423-1 et suivants du code de l'éducation.

Rapprochement(s) :

Tribunal des conflits, 14 mai 2018, pourvoi n° 18-04.120, Bull. 2018, T. conflits, et les arrêts cités.

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