Numéro 11 - Novembre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2018

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE

Soc., 14 novembre 2018, n° 17-18.891, (P)

Cassation partielle

Licenciement – Cause – Accident du travail ou maladie professionnelle – Suspension du contrat – Rupture pendant la période de suspension – Conditions – Détermination – Portée

Il résulte des articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail, qu'au cours des périodes de suspension du contrat de travail du salarié consécutives à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l'employeur ne peut rompre ce contrat que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance de ces dispositions étant nulle.

Viole ces articles la cour d'appel qui retient que la rupture par la survenance du terme d'un contrat de travail à durée déterminée requalifié postérieurement en contrat à durée indéterminée constitue non un licenciement nul mais un licenciement sans cause réelle et sérieuse alors qu'elle avait constaté qu'à la date de cette rupture le contrat de travail était suspendu consécutivement à un accident du travail dont le salarié avait été victime.

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. Y... a été engagé par le département de Paris en qualité d'agent d'entretien dans le cadre d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi à durée déterminée du 13 octobre 2010 au 12 avril 2011, renouvelé jusqu'au 12 octobre 2011 ; que, victime d'un accident du travail le 8 juillet 2011, il a été en arrêt de travail du 13 juillet au 12 septembre 2011 puis à compter du 4 octobre 2011 ; que le 27 janvier 2012, il a saisi la juridiction prud'homale pour demander la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ;

Sur le second moyen, ci-après annexé : Publication sans intérêt

Mais sur le premier moyen :

Vu les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail ;

Attendu, selon ces textes, qu'au cours des périodes de suspension du contrat de travail du salarié consécutives à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l'employeur ne peut rompre ce contrat que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance de ces dispositions étant nulle ;

Attendu que pour dire que la rupture constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse et non un licenciement nul comme le soutenait le salarié, l'arrêt retient qu'en vertu de l'article L. 1226-19 du code du travail, la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ne fait pas obstacle à l'échéance du contrat à durée déterminée, si bien que la rupture par la seule survenance du terme d'un contrat qui est requalifié postérieurement en contrat à durée indéterminée constitue non un licenciement nul mais un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir requalifié les contrats d'accompagnement dans l'emploi à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, la cour d'appel, qui a constaté qu'à la date de la rupture le contrat de travail de l'intéressé était suspendu et que les parties s'accordaient pour indiquer que cette suspension était consécutive à un accident du travail, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il ce qu'il déboute le syndicat CGT des cadres parisiens des services publics de sa demande de dommages-intérêts, requalifie en contrat à durée indéterminée les contrats d'accompagnements dans l'emploi à durée déterminée conclus entre M. Y... et le département de Paris et condamne ce dernier au paiement des sommes de 1 365,03 euros à titre d'indemnité de requalification et de 1 250 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de formation, l'arrêt rendu le 3 mars 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Duval - Avocat général : M. Liffran - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail.

Soc., 21 novembre 2018, n° 17-16.766, n° 17-16.767, (P)

Cassation partielle

Licenciement – Cause – Cause réelle et sérieuse – Appréciation – Exclusion – Licenciement pour motif économique – Plan de sauvegarde de l'emploi – Plan de reclassement – Homologation – Décision administrative – Effets – Obligation de reclassement – Examen par le juge judiciaire – Possibilité (non)

Vu la connexité, joint les pourvois n° 17-16.766 et 17-16.767 ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 1235-7-1 du code du travail, ensemble la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III et le principe de la séparation des pouvoirs ;

Attendu, selon le premier des textes susvisés, que l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 du code du travail, le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, les décisions prises par l'administration au titre de l'article L. 1233-57-5 et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-4 ; que ces litiges relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux ; que si le juge judiciaire demeure compétent pour apprécier le respect par l'employeur de l'obligation individuelle de reclassement, cette appréciation ne peut méconnaître l'autorité de la chose décidée par l'autorité administrative ayant homologué le document élaboré par l'employeur par lequel a été fixé le contenu du plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde de l'emploi ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que l'association Aide aux mères de famille et aide aux personnes âgées (AMF-APA) a été placée en redressement judiciaire par jugement d'un tribunal de grande instance en date du 10 octobre 2013, M. C... étant nommé en qualité d'administrateur judiciaire et Mme D... en qualité de mandataire judiciaire ; que le 19 décembre 2013, le tribunal a arrêté un plan de cession de l'association et ordonné le transfert de 320 contrats à durée indéterminée ainsi que le licenciement des salariés non repris ; que le document élaboré par l'administrateur judiciaire et fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, homologué par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi le 24 décembre 2013, indiquait, en ce qui concerne les « mesures d'aide au reclassement dans les autres sociétés du « groupe » destinées à limiter le nombre de licenciements envisagés », que « l'AMF-APA étant une association, aucun reclassement interne ne peut être envisagé » ; que la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire a été prononcée le 18 avril 2014, Mme D... étant désignée mandataire liquidateur ; que Mmes Y... et Z..., qui avaient été licenciées pour motif économique, ont saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que, pour juger les licenciements dénués de cause réelle et sérieuse et fixer à une certaine somme les créances de dommages-intérêts dues à ce titre aux salariées, les arrêts retiennent qu'il ressort des débats et de leurs écritures que les intéressées doivent être regardées comme soutenant que leur licenciement est sans cause réelle et sérieuse du fait non seulement de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi mais également de l'absence de recherche de reclassement à leur égard, tant interne qu'externe ; qu'il en résulte que ces moyens qui ne concernent pas le bien-fondé de la décision administrative ayant homologué le plan et sont sans incidence sur sa légalité, ne relèvent que la compétence de la juridiction judiciaire ; que, sur la contestation relative au non-respect de l'obligation de reclassement, le salarié est fondé à contester le caractère réel et sérieux de la mesure sur le terrain du respect, par les organes de la procédure collective chargés de mettre en oeuvre les licenciements, de l'obligation de reclassement, cette obligation ayant une dimension individuelle, ainsi que cela résulte des dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail, mais aussi collective, le plan de sauvegarde de l'emploi ne pouvant faire l'économie des mesures de reclassement prévues par les textes susvisés ; qu'en l'espèce, le plan de sauvegarde de l'emploi élaboré dans le cadre du licenciement collectif pour motif économique visant le personnel de l'association AMF-APA comporte un paragraphe 5.1 relatif au reclassement « dans les autres sociétés du groupe » ainsi rédigé : « L'AMF-APA étant une association, aucun reclassement interne ne peut être envisagé » ; que force est ainsi de constater que les recherches de reclassement interne au sein du groupe expressément visé dans le plan de sauvegarde de l'emploi n'ont nullement été envisagées et ont même été expressément exclues au motif de la forme associative de l'entreprise, qui ne dispensait toutefois nullement l'employeur de son obligation de satisfaire aux prescriptions de l'article L. 1233-4 du code du travail ; qu'à cet égard, ni le liquidateur ni l'AGS ne produisent le moindre élément sur la structure et l'étendue du groupe, de nature à vérifier que les sociétés ou associations qui en sont membres et au sein desquelles la permutation du personnel était envisageable aient effectivement été interrogées par les organes de la procédure collective, sur les possibilités de reclasser les salariées, étant ici observé que les lettres de licenciement ne font nulle référence à une quelconque recherche de reclassement ; que dans ces conditions, tant en raison de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi que de l'absence de recherche individualisée, sérieuse et loyale de reclassement, les licenciements doivent être jugés sans cause réelle et sérieuse ;

Qu'en statuant ainsi, sur le fondement d'une insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi, alors que le contrôle du contenu de ce plan relève de la compétence exclusive de la juridiction administrative, la cour d'appel a violé les textes et principe susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils jugent les licenciements des salariées dénués de cause réelle et sérieuse et fixent dans la procédure collective de l'association à une certaine somme les créances des intéressées à titre de dommages-intérêts, les arrêts rendus le 17 février 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Leprieur - Avocat général : M. Boyer - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Article L. 1235-7-1 du code du travail, issu de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 ; loi des 16-24 août 1790 ; décret du 16 fructidor an III ; principe de la séparation des pouvoirs.

Soc., 21 novembre 2018, n° 17-12.599, n° 17-12.600, n° 17-12.601, n° 17-12.613, (P)

Cassation partielle

Licenciement économique – Domaine d'application – Cas – Salarié employé par un syndicat de copropriétaires n'assurant pas uniquement l'administration et la conservation de l'immeuble commun – Portée

Dès lors que le syndicat de copropriétaires est chargé d'administrer une résidence de personnes âgées qui dispose d'un service médical et n'assure pas seulement l'administration et la conservation de l'immeuble commun en vertu de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de copropriété, les licenciements des infirmières affectées au service médical relèvent des dispositions des articles L. 1233-1 et suivants du code du travail concernant les licenciements pour motif économique.

Vu la connexité, joint les pourvois n° 17-12.599, 17-12.600, 17-12.601 et 17-12.613 ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1233-1 du code du travail ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que Mme Y... et trois autres salariées ont été engagées en qualité d'infirmières par le syndicat des copropriétaires du [...] aux droits duquel vient le syndicat des copropriétaires [...] afin de travailler dans le service médical d'une résidence-service destinée aux personnes âgées ; que les salariées ont été licenciées par lettre du 9 mai 2011, l'employeur invoquant l'obligation de supprimer l'ensemble du service médical de la résidence pour se mettre en conformité avec la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement et modifiant la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 relative au statut de la copropriété des immeubles bâtis et la suppression de leurs postes ; que le syndicat des copropriétaires [...] a fait l'objet à compter du 2 octobre 2014 d'une procédure d'administration provisoire, Mme C... D... étant administrateur provisoire dudit syndicat ;

Attendu que pour dire les licenciements fondés sur une cause réelle et sérieuse et rejeter les demandes des salariées au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les arrêts retiennent que les dispositions relatives aux licenciements économiques ne sont applicables selon l'article L. 1233-1 du code du travail qu'aux entreprises, ce qui exclut les syndicats de copropriétaires et que le motif de la rupture ne repose pas sur des difficultés économiques qu'aurait rencontrées le syndicat des copropriétaires de la résidence du [...] mais se trouve justifié par la mise en oeuvre des dispositions d'ordre public issues de la loi du 13 juillet 2006 contraignant ledit syndicat à supprimer son service médical ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le syndicat de copropriétaires était chargé d'administrer une résidence de personnes âgées qui disposait d'un service médical et n'assurait pas seulement l'administration et la conservation de l'immeuble commun en vertu de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété, de sorte que les licenciements des infirmières affectées au service médical relevaient des dispositions des articles L. 1233-1 et suivants du code du travail concernant les licenciements pour motif économique, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils disent les licenciements de Mmes Y..., Z..., A..., B... fondés sur une cause réelle et sérieuse et rejettent leurs demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, les arrêts rendus le 8 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Duvallet - Avocat général : M. Boyer - Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article L. 1233-1 du code du travail.

Soc., 7 novembre 2018, n° 17-18.936, n° 17-18.937, n° 17-18.940, n° 17-18.941, n° 17-18.942, n° 17-18.943, (P)

Rejet

Licenciement économique – Mesures d'accompagnement – Congé de reclassement – Participation aux résultats de l'entreprise – Accord de participation – Bénéficiaires – Détermination – Portée

Vu leur connexité, joint les pourvois n° 17-18.936, 17-18.937, 17-18.940, 17-18.941, 17-18.942 et 17-18.943 ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 30 mars 2017), que Mmes et MM. A..., B..., Y..., Z..., C... et D..., salariés de la société Abbott France, ont été licenciés pour motif économique en décembre 2011 et juin 2012 ; qu'ils ont bénéficié, dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, d'un congé de reclassement qui s'est achevé en 2014 pour certains d'entre eux, et en 2015 pour les autres ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale en juin 2013 pour contester le mode de calcul de leur prime de participation pendant leur congé de reclassement ;

Attendu que la société fait grief aux arrêts de la condamner à verser à chaque salarié une certaine somme à titre de rappel de droit à participation au titre de l'année 2012 et jusqu'à l'expiration de leur congé de reclassement alors, selon le moyen, que les sommes versées pendant le congé de reclassement ne sont pas des rémunérations au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale devant être retenues pour le calcul du montant de la réserve spéciale de participation et pour sa répartition entre les salariés ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 3324-1, L. 3324-5, D. 3324-1, D. 3324-10 du code du travail, ensemble les articles L. 1242-1 et L. 131-1 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 3342-1 du code du travail que, sous réserve d'une condition d'ancienneté qui ne peut excéder trois mois, tous les salariés d'une entreprise compris dans le champ des accords de participation bénéficient de leurs dispositions, de sorte que les titulaires d'un congé de reclassement, qui demeurent salariés de l'entreprise jusqu'à l'issue de ce congé en application de l'article L. 1233-72 du code du travail, bénéficient de la participation, que leur rémunération soit ou non prise en compte pour le calcul de la réserve spéciale de participation ; que c'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a statué comme elle a fait ; que le moyen est inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; Me Rémy-Corlay -

Textes visés :

Articles L. 1233-72 et L. 3342-1 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la détermination des bénéficiaires de la répartition des résultats de l'entreprise, à rapprocher : Soc., 22 mai 2001, pourvoi n° 99-12.902, Bull. 2001, V, n° 179 (rejet) ; Soc., 6 juin 2018, pourvoi n° 17-14.372, Bull. 2018, V, (rejet), et l'arrêt cité.

Soc., 21 novembre 2018, n° 17-11.122, (P)

Cassation partielle

Licenciement – Nullité – Cas – Violation par l'employeur d'une liberté fondamentale – Applications diverses – Droit d'agir en justice – Etendue – Effets – Indemnités – Calcul – Détermination

Il résulte de l'alinéa premier du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie, le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite ou susceptible d'être introduite par le salarié à l'encontre de son employeur.

Dès lors, le salarié qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont il a pu bénéficier pendant cette période.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 9 février 2005 par la société Atos Euronext en qualité de chef de projet, M. Y... a été affecté ultérieurement par avenant auprès d'Atos Origin Malaisie pour une mission de deux ans renouvelable, jusqu'au 30 juin 2012, l'activité informatique de cotation de marché exercée par l'employeur étant reprise par la société Nyse technologies aujourd'hui dénommée Euronext technologies ; que par lettre du 13 août 2012, M. Y... a été licencié pour motif personnel ; qu'estimant que son licenciement était nul, il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen pris en ses trois premières branches, les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens du pourvoi principal de l'employeur et sur les premier et deuxième moyens du pourvoi incident du salarié :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité du licenciement, d'ordonner la réintégration du salarié dans un emploi équivalent en matière de fonction, de responsabilités et de rémunération ainsi qu'à lui verser, en deniers ou en quittance, le montant des salaires entre le 15 novembre 2012 jusqu'à la date de réintégration, sur la base d'une rémunération mensuelle brute de 6 750 euros, revalorisée sur la base de la moyenne des augmentations générales dans l'entreprise depuis 2000 augmentée d'un 13e mois, dont sont à déduire les sommes qui ont été versées à titre de revenus de remplacement, alors, selon le moyen, que seule la référence, dans la lettre de licenciement, à une action judiciaire effectivement engagée par le salarié est susceptible de constituer une atteinte effective au droit d'agir en justice et ce faisant, de justifier l'annulation du licenciement ; qu'en affirmant que la référence à la procédure envisagée par le salarié était constitutive d'une atteinte à la liberté fondamentale d'agir en justice entraînant à elle seule la nullité du licenciement, la cour d'appel a violé, par fausse application, les dispositions de l'article L. 1121-1 du code du travail, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la lettre de licenciement reprochait notamment au salarié d'avoir menacé l'employeur d'entamer des procédures à l'encontre de la société, la cour d'appel en a exactement déduit que la seule référence dans la lettre de rupture à une procédure contentieuse envisagée par le salarié était constitutive d'une atteinte à la liberté fondamentale d'ester en justice entraînant à elle seule la nullité de la rupture ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen du pourvoi incident du salarié :

Vu l'alinéa premier du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

Attendu qu'il résulte de ces textes qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie, le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite ou susceptible d'être introduite par le salarié à l'encontre de son employeur ; que le salarié qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont il a pu bénéficier pendant cette période ;

Attendu que la cour d'appel, après avoir prononcé la nullité du licenciement pour atteinte au droit d'agir en justice, ordonne que soit déduit du rappel de salaires dû entre la date du licenciement et la date effective de réintégration du salarié dans l'entreprise, les sommes perçues à titre de revenus de remplacement ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit qu'il convient de déduire des sommes dues à M. Y... au titre du rappel de salaires entre le 15 novembre 2012 et jusqu'à la date effective de réintégration les sommes versées au salarié à titre de revenu de remplacement, l'arrêt rendu le 23 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Duvallet - Avocat général : M. Boyer - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Alinéa premier du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ; article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789.

Rapprochement(s) :

Sur la nullité du licenciement intervenu en raison d'une atteinte au droit d'agir en justice, à rapprocher : Soc., 16 mars 2016, pourvoi n° 14-23.589, Bull. 2016, V, n° 50 (cassation partielle), et l'arrêt cité. Sur le calcul de l'indemnisation en cas de licenciement prononcé en violation d'une liberté fondamentale, à rapprocher : Soc., 9 juillet 2014, pourvoi n° 13-16.434, Bull. 2014, V, n° 186 (cassation partielle), et l'arrêt cité. Soc., 25 novembre 2015, pourvoi n° 14-20.527, Bull. 2015, V, n° 236 (cassation partiellement sans renvoi), et l'arrêt cité.

Soc., 14 novembre 2018, n° 17-14.932, (P)

Rejet

Licenciement – Nullité – Effets – Réintégration – Possibilité (non) – Salarié ayant fait valoir ses droits à la retraite

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 janvier 2017), que M. Y... a été engagé le 11 novembre 1975 par la société Air France en qualité d'officier pilote de ligne ; qu'il exerçait en dernier lieu les fonctions de commandant de bord ; que, par lettre du 25 septembre 2009, l'employeur a notifié au salarié la rupture de son contrat de travail en application des dispositions des articles L. 421-9 et suivants du code de l'aviation civile, le salarié ayant atteint la limite d'âge prévue le 13 août 2009 et les recherches de reclassement menées parmi les emplois au sol étant infructueuses ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de réintégration dans l'entreprise à un poste au sol et de paiement d'une indemnité correspondant aux salaires bruts et congés payés afférents pour la période du 25 août 2009 au 15 novembre 2016, somme qui sera incrémentée au prorata temporis, à compter du 15 novembre 2016 jusqu'à la date de réintégration effective de M. Y..., des salaires complémentaires, alors, selon le moyen, que lorsque le licenciement est nul, le salarié a droit à réintégration dans son emploi ou, à défaut, dans un emploi équivalent ; que pour débouter M. Y... de sa demande de réintégration dans son emploi, la cour d'appel a retenu qu'il avait fait valoir ses droits à la retraite au 1er avril 2010 et qu'ainsi « le salarié qui a fait valoir ses droits à la retraite, ne peut ultérieurement solliciter sa réintégration dans son emploi ou dans un emploi équivalent » ; qu'en se déterminant, par des motifs ne caractérisant pas une impossibilité pour l'employeur de réintégrer le salarié dans un emploi au sol, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1132-1, dans sa rédaction alors applicable, et L. 1132-4 du code du travail ;

Mais attendu que, pour percevoir sa pension de retraite, le salarié doit rompre tout lien professionnel avec son employeur ; qu'il en résulte que le salarié dont le contrat a été rompu par l'employeur qui a fait valoir ses droits à la retraite, ne peut ultérieurement solliciter sa réintégration dans son emploi ou un emploi équivalent ;

Et attendu que la cour d'appel après avoir relevé que le salarié avait fait valoir ses droits à la retraite au 1er avril 2010, en a exactement déduit, sans encourir le grief du moyen, que sa réintégration sur un poste au sol était impossible ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Publication sans intérêt

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Salomon - Avocat général : M. Liffran - Avocat(s) : SCP Didier et Pinet ; Me Le Prado -

Textes visés :

Articles L. 1132-1 du code du travail dans sa rédaction applicable et L. 1132-4 de ce même code.

Rapprochement(s) :

Sur la nécessité de rompre tout lien avec l'employeur pour percevoir la pension de retraite, à rapprocher : 2e Civ., 12 mars 2015, pourvoi n° 13-27.313, Bull. 2015, II, n° 62 (rejet).

Soc., 28 novembre 2018, n° 17-13.199, (P)

Cassation partielle

Licenciement – Reclassement – Obligation de l'employeur – Domaine d'application – Exclusion – Cas – Impossibilité d'exécution du contrat de travail – Retrait du titre d'accès à une zone sécurisée

Aucune obligation légale ou conventionnelle de reclassement ne pèse sur l'employeur dans le cas de retrait du titre d'accès à une zone sécurisée rendant impossible l'exécution du contrat de travail par le salarié.

Licenciement – Indemnités – Indemnité compensatrice de préavis – Privation – Impossibilité d'exécution – Effets – Retrait du titre d'accès à une zone sécurisée

Le salarié ne peut prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité d'exécuter.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. A... a été engagé en qualité de tourneur par la société Air France (la société) le 24 avril 1989 et occupait en dernier lieu les fonctions de technicien révision moteurs en zone réservée de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle ; que le 4 avril 2012, la société lui a notifié la rupture de son contrat de travail au motif que l'autorité préfectorale lui avait refusé l'habilitation à accéder en zone réservée aéroportuaire ; que contestant le bien-fondé de la résiliation de son contrat de travail, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 1231-1 du code du travail et l'article L. 1235-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige ;

Attendu que pour dire que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que si le retrait d'une habilitation constitue une difficulté étrangère à la volonté de l'employeur qui ne l'a pas provoqué et à laquelle il doit se soumettre, il lui appartenait d'en tirer toutes conséquences en cherchant de manière sérieuse et loyale un autre poste compatible avec les capacités de l'intéressé et, à défaut de proposition possible, ou en cas de refus du salarié, de le licencier ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le retrait du titre d'accès à une zone sécurisée rendait impossible l'exécution du contrat de travail par le salarié et que, dans de telles circonstances, aucune obligation légale ou conventionnelle de reclassement ne pèse sur l'employeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 1234-5 du code du travail ;

Attendu que pour condamner l'employeur à payer au salarié une indemnité compensatrice de préavis, l'arrêt retient qu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ouvre droit à une indemnité compensatrice de préavis en application de l'article L. 1234-1 du code du travail que le salarié est fondé à réclamer dans la mesure où la société ne l'a pas mis en mesure d'exercer ses fonctions pendant la durée de deux mois correspondant à la période de préavis conventionnelle en rompant le contrat à effet immédiat à la date de réception du courrier ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié était, du fait du retrait de l'habilitation préfectorale, dans l'impossibilité d'effectuer son préavis, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société Air France à payer à M. A... la somme de 35 914,25 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, l'arrêt rendu le 14 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Capitaine - Avocat général : Mme Grivel - Avocat(s) : Me Le Prado ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article L. 1231-1 du code du travail ; article L. 1235-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige ; article L. 1234-5 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur l'exclusion de l'indemnité de préavis en cas d'impossibilité d'exécuter celui-ci, dans le même sens que : Soc., 23 novembre 2005, pourvoi n° 04-47.653, Bull. 2005, V, n° 335 (cassation partielle sans renvoi), et l'arrêt cité.

Soc., 7 novembre 2018, n° 17-14.716, (P)

Cassation partielle

Licenciement – Salarié protégé – Mesures spéciales – Inobservation – Réintégration – Demande du salarié – Date – Effet – Indemnisation

Sur le moyen unique :

Vu l'article 4 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 2412-7, L. 2411-10 et L. 2411-13 du code du travail, alors applicables ;

Attendu que lorsque le salarié demande sa réintégration pendant la période de protection, il a droit, au titre de la méconnaissance du statut protecteur, à une indemnité égale à la rémunération qu'il aurait perçue depuis la date de son éviction jusqu'à sa réintégration ; que cette indemnité lui est également due lorsque la demande de réintégration est formulée après l'expiration de la période de protection en cours pour des raisons qui ne sont pas imputables au salarié ; que, toutefois, dans cette dernière hypothèse, le salarié qui présente de façon abusive sa demande de réintégration tardivement, n'a droit, au titre de la violation du statut protecteur, qu'à la rémunération qu'il aurait perçue du jour de la demande de réintégration à celui de sa réintégration effective ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y..., engagé en qualité de technicien informatique et réseaux par la société Savane à laquelle vient aux droits la société Safari technologies, a informé, le 5 avril 2011, son employeur de sa candidature aux élections des représentants du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; que, convoqué le 15 septembre 2011 à un entretien préalable, il a été licencié le 7 octobre 2011 ;

Attendu que, pour limiter l'indemnité due au titre de la violation du statut protecteur à la somme de 1 550 euros, la cour d'appel retient que le salarié n'explique pas les raisons qui ne lui sont pas imputables pour lesquelles il a attendu le 9 octobre 2015, soit quatre années après son licenciement, pour solliciter sa réintégration et qu'en conséquence, il ne peut prétendre qu'à une rémunération égale à la rémunération due entre le 16 septembre 2011, date de réception de la convocation à l'entretien préalable, jusqu'au 4 octobre 2011, date de l'expiration de sa protection ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que le salarié avait été licencié le 7 octobre 2011 tandis que la période de protection avait expiré le 4 octobre 2011, ce dont il résultait que la demande de réintégration avait été formulée après l'expiration de la période de protection pour des motifs non imputables au salarié, mais que celui-ci avait abusivement tardé à demander sa réintégration postérieurement à l'expiration de la période de protection, ce dont elle aurait dû déduire qu'il était en droit de percevoir la rémunération dont il aurait bénéficié de la date de sa demande de réintégration jusqu'à sa réintégration effective, somme qui n'était pas contestée par l'employeur, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite l'indemnité due au titre de la violation du statut protecteur à la somme de 1 550 euros, l'arrêt rendu le 24 mars 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Le Masne de Chermont - Avocat général : Mme Berriat - Avocat(s) : SCP Delvolvé et Trichet -

Textes visés :

Articles L. 2412-7, L. 2411-10 et L. 2411-13 du code du travail dans leur rédaction applicable ; article 4 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

Sur l'étendue de l'indemnité due au salarié protégé en cas de demande de réintégration suite à un licenciement intervenu en violation du statut protecteur, dans le même sens que : Soc., 11 décembre 2001, pourvoi n° 99-42.476, Bull. 2001, V, n° 381 (2) (rejet).

Soc., 28 novembre 2018, n° 15-29.330, (P)

Cassation partielle

Résiliation judiciaire – Action intentée par le salarié – Résiliation prononcée aux torts de l'employeur – Cas – Information de l'employeur de l'état de grossesse postérieure à la demande de résiliation judiciaire – Effets – Effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse – Portée

Lorsqu'au jour de la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, la salariée n'a pas informé l'employeur de son état de grossesse, la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y..., épouse Z..., a été engagée le 29 novembre 2012 par la société Ambulances Championnet (la société) en qualité d'infirmière à temps partiel ; que le 29 juillet 2013, elle a saisi la juridiction prud'homale en résiliation judiciaire de son contrat de travail ; que par lettre distribuée le 12 décembre 2013 elle a transmis à la société une déclaration de grossesse ; qu'elle a été licenciée pour faute grave le 18 décembre 2013 ;

Sur le moyen unique, pris en ses quatre premières branches : Publication sans intérêt

Mais sur le moyen unique, pris en ses deux dernières branches, qui sont recevables :

Vu les articles 1184 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, L. 1225-4 et L. 1225-71 du code du travail dans leur rédaction applicable en la cause ;

Attendu que, lorsqu'au jour de la demande de résiliation judiciaire, la salariée n'a pas informé l'employeur de son état de grossesse, la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu que pour dire que la résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement nul, l'arrêt retient que la salariée avait informé l'employeur de son état de grossesse ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la salariée n'avait informé l'employeur de son état de grossesse que postérieurement à la saisine de la juridiction prud'homale aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement nul et condamne la société Ambulances Championnet à payer à Mme Y... les sommes de 12 000 euros au titre des salaires dûs jusqu'au 24 août 2014 et 7 200 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul, l'arrêt rendu le 5 novembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Duval - Avocat général : Mme Rémery - Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer ; SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Article 1184 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; articles L. 1225-4 et L. 1225-71 du code du travail dans leur rédaction applicable.

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