Numéro 11 - Novembre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 11 - Novembre 2018

ASSURANCE (règles générales)

Com., 21 novembre 2018, n° 17-23.598, (P)

Cassation partielle

Coassurance – Police collective – Compagnie apéritrice – Mandat – Etendue – Détermination – Portée

La société apéritrice est présumée être investie d'un mandat général de représentation, dès lors qu'aucun des coassureurs ne le conteste.

Coassurance – Police collective – Compagnie apéritrice – Mandat – Etendue – Mandat général de représentation – Présomption – Conditions – Absence de contestation des coassureurs

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Transit transport réunis (la société TTR), qui exerce une activité de transit et de logistique, est assurée auprès du GIE Groupe Concorde pour les facultés maritimes ; que l'avenant n° 4 de la police mentionne comme coassureurs les sociétés Generali IARD (la société Generali), Covea Fleet et Helvetia compagnie suisse d'assurances (la société Helvetia) ; que des marchandises ayant été endommagées durant un transport effectué par la société Mediterranean Shipping Company (la société MSC), la société TTR a établi le 7 avril 2009 un acte de subrogation reconnaissant avoir reçu la somme de 43 568,31 euros en règlement du sinistre, à raison de 10 % par Helvetia assurances, de 35 % par Covea Fleet et de 55 % par Generali ; qu'en 2009, 2010 et 2011, la société Generali a présenté plusieurs demandes de remboursement auprès de la société MSC et obtenu le « report de la prescription » ; que le 23 juillet 2012, les sociétés Generali, Helvetia et Covea Fleet, aux droits de laquelle vient la société MMA Iard assurances mutuelles, ont assigné la société MSC en paiement ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1134, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, et l'article 1984 du code civil ;

Attendu que la société apéritrice est présumée être investie d'un mandat général de représentation, dès lors qu'aucun des coassureurs ne le conteste ;

Attendu que pour juger prescrite l'action des sociétés Helvetia et Covea Fleet contre la société MSC, l'arrêt retient que l'acte de subrogation signé le 7 avril 2009 en faveur des compagnies Helvetia, Covea Fleet et Generali par la société TTR permet à la société Generali seule, en application de l'avenant n° 4 à effet du 1er janvier 2006 stipulant sa qualité d'apéritrice, de formuler, tant pour elle-même qu'aux noms de ses deux co-assureurs, toute réclamation contre la société MSC, qui doit supporter au final le préjudice survenu à la marchandise ; qu'il ajoute que, pour autant, cette subrogation, seule opposable à la société MSC, ne précise nullement que la société Generali est l'apériteur des deux autres assureurs et que par ailleurs les demandes de celle-ci auprès de la société MSC, tant pour réclamer une indemnité que pour faire reporter le point de départ de la prescription, ont été faites par elle seule mais sans aucunement mentionner qu'elle agissait également en qualité de mandataire des sociétés Helvetia et Covea Fleet ; qu'il en déduit que c'est à tort que le tribunal a retenu que les quatre reports de prescription accordés à la société Generali par la société MSC, le dernier jusqu'au 24 octobre 2011, ont bénéficié également aux deux autres assureurs ;

Qu'en statuant ainsi, tout en constatant que le mandat de représentation confié à la société Generali par les sociétés Helvetia et Covea Fleet n'avait jamais été contesté par elles, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 1134, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, et l'article 1984 du code civil ;

Attendu que la société apéritrice est présumée être investie d'un mandat général de représentation dès lors qu'aucun des coassureurs ne le conteste ;

Attendu que pour condamner la société MSC à payer à la société Generali la somme de 23 962,57 euros, l'arrêt retient que le préjudice de cette dernière s'est élevé à sa part, soit 55 % des 43 568,31 euros mentionnés dans l'acte de subrogation ;

Qu'en statuant ainsi, tout en constatant que la société TTR avait été indemnisée par les trois assureurs et les avait subrogés dans ses droits, que la police d'assurance désignait la société Generali comme apéritrice et que le mandat de représentation n'avait jamais été contesté par les autres assureurs, ce dont il résultait que la société Generali pouvait agir en paiement de la totalité de l'indemnité versée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il juge prescrite l'action des sociétés Helvetia compagnie suisse d'assurances et Covea Fleet contre la société Mediterranean Shipping Company, condamne celle-ci à payer à la société Generali Iard la somme de 23 962,57 euros et celle de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et les dépens, l'arrêt rendu le 22 juin 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Fontaine - Avocat(s) : SCP Delvolvé et Trichet ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; article 1984 du code civil.

Rapprochement(s) :

Dans le même sens que : 2e Civ., 8 juin 2017, pourvoi n° 16-19.973, Bull. 2017, II, n° 126 (cassation partielle), et l'arrêt cité.

1re Civ., 28 novembre 2018, n° 17-17.536, (P)

Cassation

Garantie – Cas – Etablissement français du sang – Contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C – Indemnisation – Substitution de l'ONIAM à l'Etablissement français du sang – Effets – Mise en jeu de la garantie des assureurs des structures reprises par l'Etablissement français du sang – Contestation relative à l'ordre de juridiction compétent – Portée

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue en référé, qu'un jugement d'un tribunal administratif du 6 juillet 2011, statuant sur la demande d'indemnisation de Mme X..., contaminée par le virus de l'hépatite C, a retenu l'origine transfusionnelle de sa contamination et condamné l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM) à payer différentes sommes à l'intéressée et à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen en réparation de cette contamination ; qu'après le versement de ces sommes, l'ONIAM a assigné en remboursement la société Axa France IARD (l'assureur), en sa qualité d'assureur du centre de transfusion sanguine de Bois Guillaume (le CTS) ; qu'une ordonnance du juge de la mise en état du 9 décembre 2016, retenant qu'il incombait au juge administratif de statuer sur la responsabilité de l'Etablissement français du sang (l'EFS), venant aux droits et obligations du CTS dans la contamination de Mme X..., a soumis au juge administratif une question préjudicielle quant à cette responsabilité et sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive de ce chef ; que l'ONIAM a sollicité du premier président de la cour d'appel l'autorisation d'interjeter appel immédiat de cette ordonnance ;

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche, ci-après annexé :

Attendu que ce grief n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu l'article 380 du code de procédure civile et les principes régissant l'excès de pouvoir ;

Attendu, d'une part, que, selon le premier de ces textes, la décision de sursis à statuer peut être frappée d'appel sur autorisation du premier président de la cour d'appel s'il est justifié d'un motif grave et légitime ; qu'il est dérogé à cette règle, comme à toute autre règle interdisant, limitant ou différant un recours, en cas d'excès de pouvoir ;

Attendu, d'autre part, que, saisi en application de l'article 35 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015 (1re Civ., 16 mai 2018, pourvoi n° 17-17.536), le Tribunal des conflits a décidé, le 8 octobre 2018 (n° 4133), que la juridiction judiciaire était compétente pour connaître du litige, après avoir relevé qu'en prévoyant, par les dispositions de l'article 72 de la loi du 17 décembre 2012, la possibilité pour l'ONIAM de chercher à être garanti, par les assureurs des structures de transfusion reprises par l'EFS, des sommes qu'il a versées, le législateur avait entendu conférer à la juridiction compétente pour connaître de cette action en garantie plénitude de juridiction pour statuer sur l'ensemble des questions qui s'y rapportent, sans qu'y fassent obstacle les dispositions de l'article 15 de l'ordonnance du 1er septembre 2005 ;

Attendu que, pour rejeter la demande de l'ONIAM, l'ordonnance retient qu'il n'appartient pas au premier président de la cour d'appel de se prononcer sur le bien-fondé de la décision du juge de la mise en état, que le délai de procédure induit par la réponse à la question préjudicielle ne peut être jugé anormalement long et qu'il n'est pas démontré l'existence de conséquences manifestement excessives liées à cette décision ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'ONIAM soutenait que la juridiction judiciaire était seule compétente pour se prononcer sur son action directe à l'encontre de l'assureur de l'EFS ou des structures reprises, ce dont il résultait qu'il se prévalait d'un excès de pouvoir négatif du juge de la mise en état, ouvrant droit à un appel immédiat, le premier président a méconnu le texte et le principe susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 2 mars 2017, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Paris.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Duval-Arnould - Avocat général : M. Ingall-Montagnier (premier avocat général) - Avocat(s) : SCP Sevaux et Mathonnet ; SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer -

Textes visés :

Article 380 du code de procédure civile ; principes régissant l'excès de pouvoir.

Rapprochement(s) :

Sur l'ordre de juridiction compétent pour connaître, dans le cas d'une action en garantie intentée par l'ONIAM contre l'assureur d'un établissement de transfusion sanguine, de la responsabilité de cet établissement, à rapprocher : 1re Civ., 16 mai 2018, pourvoi n° 17-17.536, Bull. 2018, I, (renvoi devant le tribunal des conflits et sursis à statuer) ; Tribunal des conflits, 8 octobre 2018, n° 4133, Bul. 2018, T. conflits, publié au Recueil Lebon.

2e Civ., 22 novembre 2018, n° 17-20.926, (P)

Cassation partielle

Responsabilité de l'assureur – Obligation de vérifier – Créanciers hypothécaires et privilégiés – Inscriptions d'hypothèques sur l'immeuble sinistré – Défaut – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, pour financer l'acquisition de parts des SCI Cogui et Le Rubis, propriétaires de lots dans un immeuble en copropriété, la Banque calédonienne d'investissement (BCI) a consenti à M. Y... deux prêts dont le remboursement était garanti par deux inscriptions d'hypothèques conventionnelles sur ces lots ; que le syndic de la copropriété de l'immeuble a souscrit auprès de la société AGF, aux droits de laquelle est venue la société Allianz IARD (l'assureur), une assurance multirisques ; qu'en octobre 2005, un incendie a détruit une grande partie de l'immeuble ; qu'en exécution d'un arrêt irrévocable du 9 août 2012, l'assureur a versé au syndicat des copropriétaires et aux copropriétaires, M. et Mme Z... et les deux SCI, diverses sommes au titre de la garantie souscrite par le syndic ; que se prévalant, d'une part, d'une délégation à son profit de l'assurance incendie, et, d'autre part, des dispositions de l'article L. 121-13 du code des assurances, la BCI a assigné le 15 octobre 2013 l'assureur en paiement des indemnités d'assurance dues à la suite de l'incendie ;

Sur le moyen unique du pourvoi provoqué de la BCI :

Attendu que la BCI fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement rendu le 18 janvier 2016 par le tribunal de première instance de Nouméa en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement de l'indemnité d'assurance sur le fondement de la délégation d'assurance, alors, selon le moyen :

1°/ que l'avenant au contrat d'assurance n° [...] comportait la mention « autres clauses : délégation de bénéfice au profit de la BCI » et était signé tant par le souscripteur que par l'assureur, qui avait ainsi expressément accepté la délégation ; que dès lors, en retenant, pour considérer que ces clauses ne constituaient pas une délégation, mais une simple indication de paiement au profit de la BCI, insusceptible d'être opposée par cette dernière à l'assureur, que cette mention ne pouvait valoir consentement de l'assureur à la délégation au profit de la BCI, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de l'avenant précité, a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce ;

2°/ qu'en tout état de cause, l'existence d'une délégation n'est pas subordonnée à l'existence d'un rapport juridique préexistant entre les parties et qu'il suffit, pour que la délégation soit valable, que les parties se soient volontairement engagées en connaissance de cause ; que dès lors, en retenant, pour considérer que l'assureur n'avait pas pu consentir à une délégation au profit de la BCI malgré la clause en ce sens figurant dans l'avenant n° 1 à la police d'assurance n° [...], que cette police n'avait pas été souscrite par M. Y..., créancier de la BCI, mais par la société Sunset location, syndic de copropriété de l'immeuble [...], copropriété de M. et Mme Z... et des SCI Le Rubis et Cogui dont M. Y... avait acquis les parts sociales, la cour d'appel, qui s'est fondée sur une circonstance inopérante, a violé l'article 1275 du code civil, dans sa rédaction applicable à l'espèce ;

Mais attendu qu'une partie est irrecevable à soulever pour la première fois devant la Cour de cassation un grief portant sur un élément de la décision du premier juge qu'elle n'avait pas invoqué en cause d'appel ; que la dénaturation alléguée de l'avenant au contrat d'assurance résulte des motifs adoptés du jugement ; qu'il ne ressort ni des énonciations de l'arrêt, ni des productions que la BCI l'avait invoquée en cause d'appel ;

Et attendu qu'ayant, par motifs adoptés, énoncé à bon droit qu'en l'absence d'engagement du délégué de régler le créancier, il n'y a pas de délégation, et retenu, par d'autres motifs adoptés, non utilement critiqués, que s'il était indiqué à l'avenant de la police « délégation de bénéfice au profit de la BCI », cette mention ne saurait valoir consentement de l'assureur à une délégation au profit de la BCI, créancier de M. Y..., de l'assurance qui n'avait pas été souscrite par celui-ci mais par le syndic de la copropriété comprenant notamment les deux SCI, la cour d'appel en a exactement déduit que cette mention ne constitue qu'une simple indication de paiement ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Mais, sur le moyen unique du pourvoi principal de l'assureur, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 121-13, alinéas 1 et 2, du code des assurances ;

Attendu que, selon ce texte, les indemnités dues par suite d'assurance contre l'incendie sont attribuées sans qu'il y ait besoin de délégation expresse, aux créanciers privilégiés ou hypothécaires, suivant leur rang ; que, néanmoins, les paiements faits de bonne foi avant opposition sont valables ;

Attendu que pour condamner l'assureur à verser à la BCI les indemnités dues à la suite de l'incendie, l'arrêt retient que cette banque justifie de la qualité de créancier hypothécaire sur l'immeuble sinistré, qu'il appartenait à l'assureur, auprès duquel la BCI s'était manifestée dès l'année 2007, de rechercher et de vérifier l'existence d'un éventuel créancier privilégié ou hypothécaire, et qu'en s'étant abstenu de le faire, celui-ci avait commis une faute ayant privé la banque des indemnités auxquelles elle pouvait légitimement prétendre ;

Qu'en statuant ainsi, sans avoir constaté qu'au moment où il avait réglé aux assurés les indemnités dues à la suite de l'incendie, l'assureur, qui n'était pas tenu de rechercher ou de vérifier au préalable l'existence d'éventuelles inscriptions d'hypothèques sur l'immeuble sinistré, avait reçu de la BCI une opposition à leur paiement ou que cette banque prouvait qu'il avait effectué ce règlement de mauvaise foi, en connaissance de sa qualité de créancière hypothécaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal :

REJETTE le pourvoi provoqué de la société Banque calédonienne d'investissement ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Allianz IARD, venant aux droits de la société AGF, à verser à la Banque calédonienne d'investissement, dite BCI, les indemnités dues à la suite du sinistre survenu dans l'immeuble "[...]" le 31 octobre 2005, outre les intérêts au taux légal à compter du 15 octobre 2013, date du dépôt de la demande, l'arrêt rendu le 20 avril 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. Boiffin - Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix ; SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot -

Textes visés :

Article L. 121-13, alinéas 1 et 2, du code des assurances de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 13 novembre 2002, pourvoi 98-22.462, Bull. 2002, I, n° 261 (rejet).

2e Civ., 22 novembre 2018, n° 17-26.355, (P)

Cassation

Risque – Modification – Article L. 113-2, 3°, du code des assurances – Aggravation des risques ou création de nouveaux risques – Déclaration en cours de contrat – Obligation – Portée

Selon l'article L. 113-2, 3°, du code des assurances, l'assuré doit déclarer, en cours de contrat, les circonstances nouvelles qui aggravent les risques ou en créent de nouveaux et rendent de ce fait inexactes ou caduques les réponses précédemment apportées aux questions posées par l'assureur.

Dès lors prive sa décision de base légale la cour d'appel qui annule un contrat d'assurance sur le fondement de l'article L. 113-8 du code des assurances sans constater que l'absence de déclaration, au cours du contrat, des circonstances nouvelles tenant à la détention d'un important stock d'armes et de munitions de collection dans les lieux assurés qui aggravaient les risques, rendait inexactes ou caduques les réponses précédemment apportées aux questions posées par l'assureur.

Risque – Modification – Article L. 113-2, 3°, du code des assurances – Aggravation des risques ou création de nouveaux risques – Déclaration en cours de contrat – Obligation – Cas

Risque – Déclaration – Circonstances nouvelles – Circonstances aggravantes ou créant de nouveaux risques – Obligation d'en informer l'assureur

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 113-2, 3°, et L. 113-8 du code des assurances ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que l'assuré doit déclarer, en cours de contrat, les circonstances nouvelles qui aggravent les risques ou en créent de nouveaux et rendent de ce fait inexactes ou caduques les réponses précédemment apportées aux questions posées par l'assureur ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 14 avril 2008, l'incendie de la grange appartenant à M. B..., assuré auprès de la Mutuelle d'assurance de la ville de Mulhouse (la MAVIM), s'est propagé à celle, voisine, de M. Albert X..., assuré par la société Assurances du crédit mutuel IARD (la société ACM), et l'a entièrement détruite, ainsi qu'un tracteur s'y trouvant, propriété de M. Jean-Claude X... ; que la société ACM, qui avait versé une certaine somme à son assuré, et MM. X... ont assigné en indemnisation de leurs préjudices la MAVIM, laquelle leur a opposé la nullité du contrat d'assurance souscrit par M. B... ;

Attendu que pour juger « privé d'effet » ce contrat et débouter la société ACM ainsi que MM. X... de toutes leurs demandes formées à l'encontre de la MAVIM, l'arrêt énonce que si l'article L. 113-2 du code des assurances impose à l'assuré de répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge, et si l'assuré doit, en cours de contrat, déclarer toute circonstance nouvelle de nature, soit à aggraver les risques, soit à en créer de nouveaux en rendant ainsi caduques les réponses faites à l'assureur, ces dispositions ne sont pas pour autant exclusives de l'obligation générale de bonne foi prévue par l'article 1134, ancien, du code civil, applicable à tous les contrats, y compris au contrat d'assurance, puis retient que M. B..., auquel avait été transmis par un avenant du 15 octobre 1997 le bénéfice du contrat d'assurance multirisques habitation souscrit par sa mère, a poursuivi l'exécution de ce contrat dans des conditions manifestement exclusives de toute bonne foi et a manqué à son obligation de loyauté en s'étant abstenu d'informer l'assureur qu'il détenait dans les lieux un stock d'environ 3,7 tonnes d'armes et munitions, dont 500 kilos encore actives, datant de la première guerre mondiale, qu'il collectionnait, circonstance qui ne pouvait faire l'objet d'une question de la part de l'assureur au regard du caractère illicite de cette détention, alors qu'il ne pouvait ignorer que celle-ci, essentielle pour la définition du risque assuré, aggravait tant la probabilité que l'intensité d'un sinistre, et n'était pas conforme à l'usage habituel d'un immeuble d'habitation ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans constater que l'absence de déclaration, au cours du contrat, des circonstances nouvelles ayant pour effet d'aggraver les risques ou d'en créer de nouveaux rendait inexactes ou caduques les réponses précédemment apportées aux questions posées par l'assureur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 juillet 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz.

- Président : Mme Flise (président) - Rapporteur : M. Boiffin - Avocat général : M. Grignon Dumoulin - Avocat(s) : SCP Gaschignard ; Me Balat -

Textes visés :

Articles L. 113-2, 3°, et L. 113-8 du code des assurances.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 22 janvier 2009, pourvoi n° 08-10.294, Bull. 2009, II, n° 23 (cassation partielle).

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