Numéro 10 - Octobre 2023

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 10 - Octobre 2023

LOIS ET REGLEMENTS

2e Civ., 5 octobre 2023, n° 22-14.430, (B), FRH

Rejet

Application dans le temps – Cas – Procédure de la mise en état – Conseiller de la mise en état – Compétence – Etendue – Fin de non-recevoir – Limite

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 mars 2022), les 10 et 17 janvier 2020, le comité social et économique Exploitation court courrier d'Air France, venant aux droits du comité d'établissement d'Air France Apax point à point, et le comité social et économique Exploitation Hub d'Air France, venant aux droits du comité d'établissement Air France Apax Hub, ont relevé appel d'un jugement du 26 novembre 2019 rendu dans une instance les opposant à M. [C].

2. Par ordonnance du 19 novembre 2020, un conseiller de la mise en état a rejeté l'incident soulevé par M. [C]. Ce dernier a déféré à la cour d'appel cette ordonnance.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. [C] fait grief à l'arrêt de déclarer le conseiller de la mise en état incompétent pour statuer sur les fins de non-recevoir, alors « que par l'effet du renvoi opéré par l'article 907 du code de procédure civile aux articles 780 à 807 du même code, le conseiller de la mise en état exerce les attributions qui sont celles du juge de la mise en état devant le tribunal judiciaire ; que l'article 789, 6°, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 applicable depuis le 1er janvier 2020, prévoit que le conseiller de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur des fins de non-recevoir ; qu'en vertu de l'article 55 II du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, ce dernier article est applicables aux instances d'appel introduites à compter du 1er janvier 2020 ; qu'en déclarant incompétent le conseiller de la mise en état ayant rendu le 19 novembre 2019 une ordonnance statuant sur les fins de non-recevoir formulées par M. [C] dans ses conclusions d'incident du 20 mai 2020, aux motifs « qu'il n'était pas compétent pour statuer sur ces chefs dès lors qu'à cette époque la voie du déféré n'était pas ouverte », la cour d'appel a ajouté aux articles 907 et 789, 6° du code de procédure civile une condition qui n'y figure pas et les a dès lors violés. »

Réponse de la Cour

5. Les nouvelles attributions conférées par le décret du 11 décembre 2019 au conseiller de la mise en état s'exercent sous réserve que soit ouvert contre ses décisions un déféré devant la cour d'appel, juridiction appelée à trancher en dernier ressort les affaires dont elle est saisie.

6. À cette fin, le décret n° 2020-1452 du 27 novembre 2020 a complété l'article 916 du code de procédure civile pour étendre le déféré aux ordonnances du conseiller de la mise en état statuant sur toutes fins de non-recevoir. Dans la rédaction antérieure de ce texte, le déféré n'était ouvert qu'à l'encontre des ordonnances par lesquelles ce conseiller tranchait les fins de non-recevoir tirées de l'irrecevabilité de l'appel et celles tirées de l'irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure en application des articles 909, 910 et 930-1 de ce code, dont la connaissance lui était déjà confiée par l'article 914, dans des conditions spécifiquement fixées par ce texte.

7. Il résulte de ce qui précède que le décret du 27 novembre 2020 étant, au terme de son article 12, alinéa 2, entré en vigueur le 1er janvier 2021, pour s'appliquer aux instances d'appel en cours, le conseiller de la mise en état ne peut statuer sur les autres fins de non-recevoir qui lui sont soumises ou qu'il relève d'office qu'à compter de cette date.

8. Ayant constaté que le conseiller de la mise en état avait rendu une ordonnance le 19 novembre 2020 suite aux conclusions d'incident de M. [C], notifiées le 20 mai 2020, soulevant des fins de non-recevoir tirées notamment du défaut de capacité et de pouvoir d'ester en justice des deux demandeurs, soit antérieurement à la possibilité de former un déféré contre une ordonnance ayant statué sur une fin de non-recevoir, la cour d'appel en a exactement déduit que ce conseiller de la mise en état n'était pas compétent pour statuer sur cet incident.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Martinel - Rapporteur : Mme Jollec - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel ; SARL Ortscheidt ; SARL Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Article 914 du code de procédure civile.

2e Civ., 26 octobre 2023, n° 22-16.185, (B), FRH

Cassation

Application dans le temps – Loi de forme ou de procédure – Application immédiate aux instances n'ayant pas pris fin – Décret n° 2022-245 du 25 février 2022 – Application – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 31 mars 2022), [Y] [L] est décédé le 19 janvier 2017, laissant pour lui succéder son épouse, Mme [O], et son fils issu d'une première union, M. [U] [L].

2. Des difficultés étant survenues au cours des opérations de partage de la succession, un tribunal de grande instance a ordonné le partage et la liquidation de la communauté ayant existé entre le défunt et son conjoint, puis de la succession et a désigné le président de la chambre des notaires de l'Hérault pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de cette succession.

3. Mme [O] a relevé appel de cette décision par déclaration du 3 mars 2020.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Mme [O] fait grief à l'arrêt de juger que sa déclaration d'appel en date du 3 mars 2020 était privée de tout effet dévolutif de sorte que la cour n'était saisie d'aucune demande, alors « qu'une déclaration d'appel à laquelle est jointe une annexe comportant les chefs de dispositif du jugement critiqués constitue l'acte d'appel conforme aux exigences de l'article 901 du code de procédure civile, dans sa nouvelle rédaction et ce, même en l'absence d'empêchement technique ; qu'en l'espèce Mme [J] [O] a régularisé une déclaration d'appel à laquelle était jointe une annexe comportant les chefs de dispositif du jugement critiqués ce qui constituait un acte d'appel conforme aux exigences de l'article 901 du code de procédure civile sans qu'elle n'ait à justifier d'un empêchement technique ; qu'en jugeant pourtant qu'en l'absence de difficultés techniques et à défaut d'avoir mentionné dans la déclaration d'appel les chefs de jugement critiqués l'appel tel que formulé était dépourvu de tout effet dévolutif, la cour d'appel a violé l'article 901 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 901 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2022-245 du 25 février 2022 :

5. Selon ce texte la déclaration d'appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, notamment les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

6. Par avis du 8 juillet 2022 (n° 22-70.005), la Cour de cassation a notamment dit que le décret n° 2022-245 du 25 février 2022 et l'arrêté du 25 février 2022 modifiant l'arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant la cour d'appel sont immédiatement applicables aux instances en cours pour les déclarations d'appel qui ont été formées antérieurement à l'entrée en vigueur de ces deux textes réglementaires, pour autant qu'elles n'ont pas été annulées par une ordonnance du magistrat compétent qui n'a pas fait l'objet d'un déféré dans le délai requis, ou par l'arrêt d'une cour d'appel statuant sur déféré.

7. L'instance devant une cour d'appel, introduite par une déclaration d'appel prenant fin avec l'arrêt que rend cette juridiction, soit en l'espèce l'arrêt du 31 mars 2022, le décret du 25 février 2022 est applicable au présent litige.

La cour d'appel est tenue, au besoin d'office, de faire application de ce nouveau texte.

8. Pour constater que la cour d'appel n'était saisie d'aucune demande par la déclaration d'appel de Mme [O], l'arrêt retient que, dans cette déclaration d'appel, il n'est fait mention d'aucun chef du jugement que l'appelante entend voir critiquer et que, par ailleurs, il n'est fait état d'aucune difficulté technique qui justifierait l'utilisation d'une pièce jointe comme prévue par la circulaire.

9. En statuant ainsi, alors que cette déclaration d'appel à laquelle était jointe une annexe comportant les chefs de dispositif du jugement critiqués constitue l'acte d'appel conforme aux exigences de l'article 901 du code de procédure civile, dans sa nouvelle rédaction, applicable au litige, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 mars 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : Mme Martinel - Rapporteur : Mme Bohnert - Avocat général : M. Adida-Canac - Avocat(s) : Me Soltner -

Textes visés :

Article 901 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2022-245 du 25 février 2022.

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