Numéro 10 - Octobre 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 10 - Octobre 2022

SECRET PROFESSIONNEL

1re Civ., 26 octobre 2022, n° 20-23.333, (B), FRH

Cassation partielle sans renvoi

Secret médical – Droit au respect du secret des informations concernant le patient – Applications diverses

Faits et procédure

1.Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Aix-en-Provence, 20 octobre 2020), le 30 septembre 2020, M. [I] a été admis en soins psychiatriques sans consentement, sous la forme d'une hospitalisation complète, par décision du directeur de l'établissement, au vu d'un péril imminent, sur le fondement de l'article L.3212-1, II, 2° du code de la santé publique.

2. Le 5 octobre 2020, le directeur d'établissement a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande aux fins de poursuite de la mesure sur le fondement de l'article L. 3211-12-1 du même code.

Examen des moyens

Sur le second moyen, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais, sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Le directeur du centre hospitalier [3] fait grief à l'ordonnance de décider de la mainlevée de la mesure, alors « que constitue des difficultés particulières au sens de l'article L. 3212-1,II, 2° du code de la santé publique, le fait, pour la personne qui fait l'objet de soins psychiatriques sans consentement, de refuser que sa famille soit informée de cette mesure ; qu'en considérant que le centre hospitalier [3] ne justifiait pas avoir fait toute diligence pour informer la famille du patient, mentionnant le cas échéant les difficultés rencontrées, après avoir constaté qu'il résultait de la fiche de recherche des personnes de l'entourage dans les 24 heures de l'admission de M. [I] que l'établissement de santé n'avait pas pu procéder dans ce laps de temps à l'information d'un membre de sa famille « le patient refusant tout contact avec celle-ci et que l'hôpital ne les contacte » ce qui révélait l'existence de difficultés particulières faisant obstacle à l'information de la famille de M. [I], la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 3212-1, II, 2° du code de la santé publique, ensemble l'article L. 1110-4 du même code. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3212-1, II, 2°, alinéa 2, et L. 1110-4 du code de la santé publique :

5. Selon le premier de ces textes, en cas de décision d'admission en soins psychiatriques sans consentement prise par un directeur d'établissement au vu d'un péril imminent, celui-ci informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l'objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l'intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l'existence de relations avec la personne malade antérieures à l'admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celle-ci.

6. Constitue une difficulté particulière, au sens de ce texte, le fait, pour la personne qui fait l'objet de soins psychiatriques sans consentement, de refuser que sa famille soit informée de cette mesure dès lors qu'en application du second de ces textes, la personne a droit au respect du secret des informations la concernant.

7. Pour décider de la mainlevée de la mesure de soins, après avoir constaté que, lors de son admission, M. [I] se trouvait en errance, après avoir été mis dehors par ses parents, éprouvait un sentiment de persécution envers sa famille et avait exprimé son refus de faire prévenir celle-ci, l'ordonnance retient que le directeur établissement n'a pas fait toute diligence pour informer une personne de l'entourage de M. [I] susceptible d'agir dans l'intérêt de celui-ci.

8. En statuant ainsi, sans tirer les conséquences légales de ses constatations desquelles il résultait qu'en raison du refus exprimé par M. [I] d'une information de sa famille, le directeur d'établissement se trouvait en présence d'une difficulté particulière, le premier président a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que les délais légaux pour se prononcer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle dit l'appel recevable, l'ordonnance rendue le 20 octobre 2020, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Feydeau-Thieffry - Avocat(s) : SARL Le Prado - Gilbert -

Textes visés :

Articles L. 3212-1, II, 2°, alinéa 2, et L. 1110-4 du code de la santé publique.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.