Numéro 10 - Octobre 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 10 - Octobre 2022

APPEL CIVIL

2e Civ., 20 octobre 2022, n° 21-15.942, (B), FRH

Cassation

Appel incident – Conclusions – Dispositif – Erreur matérielle – Conclusions adressées au conseiller de la mise en état – Sanction

Intimé – Conclusions – Délai

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 18 février 2021) et les productions, M. [G] a relevé appel, le 2 mars 2020, d'un jugement rendu le 19 décembre 2019 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Versailles dans un litige l'opposant à Mme [G] quant au divorce des époux et aux conséquences en résultant.

2. M. [G] a signifié ses premières conclusions d'appelant à Mme [G], alors non constituée, le 11 juin 2020.

3. Le 11 septembre 2020, Mme [G] a déposé ses premières conclusions d'intimée contenant appel incident, devant la 2ème chambre 1ère section de la cour d'appel.

4. Mme [G] a déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré d'office irrecevables toutes conclusions que pourrait déposer l'intimée postérieurement au 11 septembre 2020.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. Mme [G] fait grief à l'arrêt de rejeter le déféré formé contre l'ordonnance du conseiller de la mise en état, alors « que les conclusions exigées par l'article 909 du code de procédure civile sont celles, adressées à la cour d'appel, qui sont remises au greffe et notifiées dans les délais prévus par ce texte et qui déterminent l'objet du litige ; qu'en jugeant qu'elle n'était pas saisie des conclusions d'intimée contenant appel incident de Mme [F] du 11 septembre 2020, motif pris de ce que le dispositif de ces conclusions mentionnait « il est demandé à Madame ou Monsieur le conseiller de la mise en état », quand lesdites conclusions, contenant une demande de réformation partielle du jugement entrepris, ainsi que des prétentions et des moyens sur le fond, déterminaient l'objet du litige et avaient été transmises à la cour d'appel par la voie du RPVA dans le délai de trois mois suivant la notification des conclusions de l'appelant, de sorte qu'elle en était bien saisie en dépit de la référence erronée au conseiller de la mise en état, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition que celle-ci ne comporte pas, a violé les articles 909 et 910-1 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 910-1 du code de procédure civile :

6. Aux termes de ce texte, les conclusions exigées par les articles 905-2 et 908 à 910 sont celles, adressées à la cour, qui sont remises au greffe et notifiées dans les délais prévus par ces textes et qui déterminent l'objet du litige.

7. Pour déclarer d'office irrecevables toutes conclusions que pourrait déposer l'intimée postérieurement au 11 septembre 2020, l'arrêt retient qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, seul le dispositif des conclusions doit être pris en considération, que (le dispositif des) conclusions signifiées par l'intimée, qui mentionne « il est demandé au conseiller de la mise en état », est adressé au conseiller de la mise en état, et que l'indication « plaise à la cour », dans le corps des écritures, ne peut permettre de le corriger, de sorte que, les règles de procédure civile étant édictées afin de garantir aux parties, dans un cadre de sécurité juridique, un procès équitable, les conclusions de l'intimée du 11 septembre 2020 ne saisissent pas la cour d'appel et, le délai pour conclure n'ayant pas été suspendu, l'intimée n'a pas conclu dans le délai qui lui était imparti.

8. En statuant ainsi, alors que les conclusions au fond de Mme [G] contenaient une demande de réformation partielle du jugement ainsi que des prétentions et moyens sur le fond, et lui avaient été transmises par le RPVA, selon les exigences requises, la cour d'appel, qui en était saisie quand bien même elles comportaient une référence erronée au conseiller de la mise en état, et qui ne pouvait que les déclarer recevables, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Kermina - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Sevaux et Mathonnet -

Textes visés :

Article 910-1 du code de procédure civile.

2e Civ., 20 octobre 2022, n° 21-16.907, (B), FRH

Cassation partielle

Appelant – Conclusions – Recevabilité – Conditions – Obligation de concentration des demandes au fond – Exception – Prétentions nées en cours d'instance ou destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses

Selon l'article 910-4 du code de procédure civile, les parties doivent, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions, nées postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers, de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Dès lors, encourt la cassation l'arrêt qui retient que la demande de fixation d'une créance dans une procédure collective tendait à la même prétention que la demande en paiement initialement formulée, la cour d'appel ne pouvant que déclarer irrecevable cette prétention.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 1er avril 2021), par jugement du 18 octobre 2018, un tribunal de commerce a condamné la société Demax à restituer à la société Allianz IARD, les véhicules qu'elle détenait en exécution du contrat signé entre elles et résilié le 1er décembre 2016, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et par véhicule manquant, à l'expiration d'un délai de 21 jours suivant la signification de la décision.

2. Par jugement du 29 janvier 2019, une procédure de sauvegarde a été ouverte à l'égard de la société Demax.

3. Par décision du 5 mars 2019, un juge de l'exécution a liquidé l'astreinte pour la période du 15 novembre au 4 décembre 2018.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La société Demax fait grief à l'arrêt de liquider l'astreinte ordonnée par le tribunal de commerce de Paris dans son jugement en date du 18 octobre 2018 et de fixer à la somme de 920 000 euros la créance de la société Allianz IARD dans la procédure collective de la société Demax, alors « que l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai d'un mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant pour remettre ses conclusions au greffe ; qu'à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions susvisées, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond ; que demeurent recevables les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Demax avait fait l'objet d'une procédure collective ouverte par jugement du 29 janvier 2019, qu'elle a interjeté appel le 18 mars 2019 et que la société Allianz a déclaré sa créance le 25 mars 2019 pour le montant de la condamnation obtenue en première instance ; qu'elle a encore constaté qu'aux termes de ses conclusions du 24 février 2020, la société Allianz sollicitait la confirmation du jugement frappé d'appel, lequel avait condamné la société Demax au paiement d'une somme d'argent ; que pour dire toutefois que la demande tendant à la fixation de sa créance à la procédure collective de la société Demax était recevable quoique formée pour la première fois par conclusions du 21 octobre 2020, la cour d'appel a retenu que cette demande tendait à la même prétention que celle initialement formulée sauf à tenir compte de l'élément juridique nouveau ; qu'en statuant ainsi, quand la procédure collective et la déclaration de créance de la société Allianz étaient des faits antérieurs aux premières conclusions déposées par cette société, la cour d'appel a violé l'article 910-4 du code de procédure civile, en sa rédaction applicable au litige. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 910-4 du code de procédure civile :

5. Selon ce texte, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

6. Pour fixer à la somme de 920 000 euros la créance de la société Allianz IARD dans la procédure collective de la société Demax, l'arrêt retient que dans des conclusions du 24 février 2020, la société Allianz IARD sollicitait la confirmation du jugement frappé d'appel, ce qui emportait condamnation financière de la société Demax alors que la procédure collective la concernant a été ouverte le 29 janvier 2019, mais qu'avant que la cour ne statue, dans ses dernières écritures du 21 octobre 2020, elle a opportunément ajusté sa demande pour solliciter uniquement la fixation de la créance dans la procédure collective, ce qui tend à la même prétention que celle initialement formulée, sauf à tenir compte de l'élément juridique nouveau et en déduit que l'irrecevabilité ne sera pas retenue.

7. En statuant ainsi, alors que la demande de fixation de la créance de la société Allianz IARD constituait une prétention, qu'elle n'était pas destinée à répliquer aux conclusions de l'appelant ni à faire juger une question née, postérieurement aux premières conclusions, de la révélation d'un fait, la procédure collective et la déclaration de créance de la société Allianz IARD étant antérieures aux premières conclusions déposées par celle-ci, la cour d'appel, qui ne pouvait que déclarer irrecevable cette prétention, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé à la somme de 920 000 euros la créance de la société Allianz IARD dans la procédure collective de la société Demax, l'arrêt rendu le 1er avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Bohnert - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre -

Textes visés :

Articles 802, 905-2, 908, 910 et 910-4 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

Avis de la Cour de cassation, 11 octobre 2022, n° 22-70.010.

2e Civ., 20 octobre 2022, n° 21-17.375, (B), FRH

Cassation

Intimé – Conclusions – Délai – Caractère impératif – Principe de la contradiction – Effets – Insuffisance d'une note en délibéré

La remise d'une note en délibéré ne peut assurer le respect du principe de la contradiction au bénéfice d'un intimé qui n'a pas bénéficié du délai prévu à l'article 910 du code de procédure civile pour remettre ses conclusions au greffe.

Faits et procédure

1. Selon les arrêts attaqués (Paris, 15 novembre 2019 et 6 novembre 2020) et les productions, Mme [T], depuis lors placée sous curatelle renforcée, a contesté devant un tribunal de grande instance la vente de biens immobiliers lui appartenant, intervenue le 9 juillet 2014 au profit de la société Washington valorisation (la société).

2. Par un jugement du 19 décembre 2017, le tribunal l'a déboutée de ses demandes et a débouté la société de sa fin de non-recevoir et de sa demande en paiement de dommages-intérêts.

3. Statuant sur l'appel interjeté par Mme [T], une cour d'appel a, par arrêt du 15 novembre 2019, notamment rejeté la demande de nullité de l'ordonnance de clôture et la demande de rabat de clôture formées par Mme [T].

4. Par arrêt du 6 novembre 2020, la même cour d'appel a déclaré recevables la demande aux fins d'annulation de la promesse de vente du 27 mai 2014 formée par Mme [T] et sa demande de dommages-intérêts, ainsi que sa requête en inscription de faux à l'encontre de la promesse de vente reçue en la forme authentique le 27 mai 2014 et de l'acte authentique de vente du 9 juillet 2014, a rejeté cette requête, et a confirmé le jugement en toutes ses dispositions.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

6. Mme [T] et ses curateurs font grief à l'arrêt du 15 novembre 2019 de rejeter la demande de nullité de l'ordonnance de clôture et la demande de rabat de clôture formée par Mme [T] aux fins de lui ouvrir un nouveau délai pour conclure et à l'arrêt attaqué du 6 novembre 2020 de débouter Mme [T] de ses demandes, alors « qu'en l'absence de calendrier de procédure fixé par le conseiller de la mise en état à l'occasion de l'examen de l'affaire auquel il procède après l'expiration des délais pour conclure et communiquer les pièces, les parties peuvent, jusqu'à la clôture de l'instruction, invoquer de nouveaux moyens et conclure à nouveau ; qu'en retenant que le respect des dispositions de l'article 910 du code de procédure civile et le principe du contradictoire étaient assurés par l'autorisation donnée à Mme [T] de déposer une note en délibéré pour conclure sur le seul appel incident de la société Washington Valorisation, la cour d'appel a violé les articles 910 et 912 du code de procédure civile ».

Réponse de la Cour

Vu les articles 910 et 912 du code de procédure civile :

7. Selon le premier de ces textes, l'intimé à un appel incident ou à un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui lui en est faite pour remettre ses conclusions au greffe.

8. Aux termes du second, en l'absence de calendrier de procédure fixé par le conseiller de la mise en état à l'occasion de l'examen de l'affaire auquel il procède après l'expiration des délais pour conclure et communiquer les pièces, les parties peuvent, jusqu'à la clôture de l'instruction, invoquer de nouveaux moyens et conclure à nouveau.

9. Pour rejeter la demande de nullité de l'ordonnance de clôture et la demande de rabat de cette dernière formée par Mme [T], l'arrêt relève qu'elle n'a pas demandé le report de la clôture par des conclusions remises au conseiller de la mise en état avant ladite clôture, alors qu'elle a reçu les conclusions d'appel incident dès le 19 août 2019 et que la date de la clôture était connue des parties depuis le 10 mai 2019. Il ajoute que, si elle n'a effectivement pas bénéficié du délai prévu par l'article 910 du code de procédure civile, elle a été autorisée à produire une note en délibéré sur l'appel incident de la société, de sorte que le respect de ce texte est garanti par l'autorisation de conclure ainsi donnée, sans atteinte au principe du contradictoire, aucune cause grave ni excès de pouvoir ne justifiant la révocation de l'ordonnance de clôture, la cour ne prenant en compte que la partie de la note en délibéré portant sur l'appel incident.

10. En statuant ainsi, alors qu'il résulte de ses propres constatations que l'ordonnance de clôture avait été rendue prématurément par le conseiller de la mise en état et que Mme [T] n'avait pas bénéficié du délai prévu par l'article 910 du code de procédure civile pour remettre ses conclusions au greffe, dès lors que la remise d'une note en délibéré ne pouvait assurer le respect du principe de la contradiction, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquence de la cassation

11. En application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt rendu le 15 novembre 2019 entraîne, par voie de conséquence, l'annulation de l'arrêt rendu le 6 novembre 2020 qui en est la suite.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 novembre 2019 par la cour d'appel de Paris ;

ANNULE, par voie de conséquence, l'arrêt rendu le 6 novembre 2020 par la même cour d'appel ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Delbano - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret -

Textes visés :

Article 910 du code de procédure civile.

2e Civ., 20 octobre 2022, n° 21-17.407, (B), FRH

Cassation

Procédure avec représentation obligatoire – Conclusions – Prétentions récapitulées sous forme de dispositif – Cour d'appel ne statuant que sur les prétentions énoncées au dispositif – Moyens – Discussion – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 27 mai 2021), le 22 mai 2019, M [V], en qualité de liquidateur de M. [Y] a délivré un commandement de payer valant saisie immobilière à la SCI Le Manse concernant un de ses immeubles et l'a assignée devant un juge de l'exécution.

2. Par jugement d'orientation du 15 février 2021, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Compiègne a notamment ordonné la vente forcée de l'immeuble

3. Par déclaration du 15 mars 2021, la SCI Le Manse a interjeté appel de ce jugement et a été autorisée à faire assigner à jour fixe à une audience de la cour d'appel.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La SCI Villa Saint Michel, anciennement dénommée SCI Le Manse, fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement ayant mentionné que le montant retenu pour la créance de la SCP [V]-Hermont, prise en la personne de M. [V], en qualité de mandataire liquidateur de M. [Y], s'élève au 22 mai 2019 à la somme de 150 089,71 euros, outre les intérêts légaux à compter de l'assignation ou de toute mise en demeure préalable tel que prévu par l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens du 21 septembre 2010, majorés de 5 points à compter du 9 septembre 2015, d'ordonner la vente forcée des biens et droits immobiliers visés au commandement de payer valant saisie immobilière, et de dire que l'audience d'adjudication aura lieu dans les conditions fixées dans le cahier des conditions de la vente, à la barre du tribunal judiciaire de Compiègne le mardi 1er juin 2021 à 13h30, alors « qu'en appel, les prétentions des parties ainsi que les moyens sur lesquels elles sont fondées sont formulés dans les conclusions ; que la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; qu'elle ne peut se déterminer, y compris dans les procédures à jour fixe, par référence à des débats oraux n'ayant pas porté sur des points abordés par les écritures des parties ; qu'en l'espèce, pour confirmer le jugement d'orientation, la cour d'appel a relevé que Me [V] ès qualités avait fait valoir, à l'audience de plaidoiries, que dans le dispositif de ses conclusions, la SCI Le Manse ne sollicitait ni l'infirmation, ni l'annulation du jugement, de sorte que la cour d'appel ne pouvait que confirmer le jugement ; qu'en se déterminant par référence à des débats oraux non repris dans les conclusions des parties, dans lesquelles ne figurait aucune argumentation en ce sens, la cour d'appel a violé les articles 4 et 954 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 4 et 954, alinéas 1er et 3 du code de procédure civile :

5. Il résulte de ces textes que l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties, qu'en appel, dans les procédures avec représentation obligatoire, ces prétentions ainsi que les moyens sur lesquels elles sont fondées doivent être expressément formulés dans les conclusions et que la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

6. Après avoir relevé qu'à l'audience des débats, les conseils des parties ont été entendus en leurs plaidoiries, précisé que le liquidateur de M. [Y] a fait valoir que, dans le dispositif des conclusions de l'appelante, celle-ci ne sollicite ni l'infirmation ni l'annulation du jugement de sorte que la cour ne peut que confirmer le jugement et observé que la SCI Le Manse n'a rien fait valoir sur ce point, l'arrêt retient que cette dernière ne demandant dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation ni l'annulation du jugement d'orientation, le jugement ne peut qu'être confirmé des chefs critiqués par l'appelante.

7. En statuant ainsi alors que l'argumentation développée oralement par l'intimé ne figurait pas dans ses conclusions, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Durin-Karsenty - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Nicolaý, de Lanouvelle -

Textes visés :

Articles 4 et 954, alinéas 1 et 3 du code de procédure civile.

2e Civ., 20 octobre 2022, n° 21-13.558, (B), FS

Rejet

Procédure avec représentation obligatoire – Déclaration d'appel – Caducité – Domaine d'application – Détermination – Portée

Devant la cour d'appel, par application de l'article 56 du code de procédure civile, l'assignation vaut conclusions dès lors qu'elle comporte des prétentions et moyens déterminant l'objet du litige, conformément à l'article 954 du même code, et qu'elle répond aux exigences prescrites par les articles 906, 908, 910-1, 910-4 et 911. A défaut, la déclaration d'appel est caduque.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 janvier 2021) et les productions, Mme [L] a, par une déclaration du 25 janvier 2019, relevé appel du jugement par lequel un tribunal de grande instance a déclaré prescrites ses actions en nullité d'une vente consentie à M. [U], en requalification de cette vente en libéralité, en constatation de l'existence d'un recel successoral, rapport à succession et réduction de la quotité disponible et qui l'a déboutée de sa demande en paiement d'une indemnité d'occupation.

2. Le 5 avril 2019, Mme [L] a fait délivrer à M. [L], intimé n'ayant pas constitué avocat, une assignation devant la cour d'appel, avec signification de la déclaration d'appel, remise par voie électronique au greffe le 9 avril 2019.

3. Le 18 avril 2019, elle a remis au greffe des conclusions.

4. Un conseiller de la mise en état a prononcé la caducité de la déclaration d'appel, par une ordonnance que Mme [L] a déférée à la cour d'appel.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. Mme [L] fait grief à l'arrêt de prononcer la caducité de sa déclaration d'appel, alors que « l'assignation vaut conclusions ; que la caducité d'une déclaration d'appel pour absence de signification, dans le délai prescrit, des conclusions à un intimé défaillant, n'est pas encourue si la déclaration d'appel, signifiée à cet intimé, détermine l'objet du litige et l'ensemble des prétentions sur le fond ; qu'en retenant, pour prononcer la caducité de la déclaration d'appel de Mme [L], que, par application des dispositions de l'article 911 du code de procédure civile, l'intéressée disposait d'un délai de quatre mois à compter de sa déclaration d'appel, soit jusqu'au 25 mai 2019, pour faire signifier ses conclusions à M. [L], intimé défaillant, que les conclusions datées du 18 avril 2019 n'ont pas été signifiées à l'intimé défaillant malgré l'avis d'avoir à y procéder adressé par le greffe de la cour, que, préalablement, le 5 avril 2019, ainsi qu'elle l'a indiqué dans sa requête, elle « avait fait délivrer par exploit d'huissier à M. [L] une assignation avec signification de la déclaration d'appel et du jugement », que cette assignation valant conclusions ne pouvait empêcher la sanction de caducité qu'à la condition de répondre aux exigences des articles 910-1, 905-2 et 908 à 910 du code de procédure civile, c'est-à-dire de déterminer l'objet du litige et, conformément aux dispositions de l'article 910-4 du même code, de présenter l'ensemble des prétentions sur le fond et que seules les conclusions du 18 avril 2019, non signifiées à l'intimé défaillant, répondaient à ces conditions, de sorte que la caducité de l'appel est encourue, faute de signification de ces dernières conclusions à M. [L], quand la déclaration d'appel de Mme [L] déterminait suffisamment l'objet du litige et l'ensemble des prétentions sur le fond, la cour d'appel a violé les articles 4, 56, 911 et 910-1 du code de procédure civile ».

Réponse de la Cour

7. Devant la cour d'appel, par application de l'article 56 du code de procédure civile, l'assignation vaut conclusions dès lors qu'elle comporte des prétentions et moyens déterminant l'objet du litige conformément à l'article 954 du même code, et qu'elle répond aux exigences prescrites par les articles 906, 908,910-1, 910-4 et 911. À défaut la déclaration d'appel est caduque.

8. L'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que les conclusions du 18 avril 2019 n'ont pas été signifiées à l'intimé défaillant au plus tard le 25 mai 2019, malgré l'avis d'avoir à y procéder adressé à l'appelante par le greffe, et fait ressortir que l'assignation ne pouvait valoir conclusions à défaut de satisfaire aux exigences requises, de déterminer l'objet du litige et, conformément aux dispositions de l'article 910-4 du même code, de présenter l'ensemble des prétentions sur le fond.

9. Il ajoute que seules les conclusions du 18 avril 2019, non signifiées à l'intimé défaillant, répondent à ces conditions.

10. En l'état de ces constatations, énonciations et appréciations, la cour d'appel a exactement déduit que, faute de signification de ces dernières conclusions à M. [L], la caducité de l'appel était encourue.

11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Delbano - Avocat général : Mme Trassoudaine-Verger - Avocat(s) : SCP Jean-Philippe Caston ; SCP Alain Bénabent -

Textes visés :

Articles 56, 906, 908, 910-1, 910-4, 911 et 954 du code de procédure civile.

2e Civ., 20 octobre 2022, n° 20-22.099, (B), FRH

Cassation

Procédure sans représentation obligatoire – Audience – Débats devant un conseiller rapporteur – Conditions – Absence d'opposition des parties – Délai et forme de l'opposition

Il résulte de l'article 945-1 du code de procédure civile que si le magistrat chargé du rapport peut tenir seul l'audience, c'est à la double condition de constater que les avocats ou les personnes qui ont qualité pour présenter des observations orales ne s'y opposent pas et d'entendre les plaidoiries.

Une cour d'appel ne peut, dès lors, rejeter la demande de renvoi en audience collégiale au motif qu'une partie a attendu le jour de l'audience pour présenter une telle demande alors que l'opposition des parties à la tenue de l'audience devant un juge rapporteur peut être présentée le jour même de l'audience et qu'une partie ne peut être privée de son droit à ce que l'affaire l'opposant à son adversaire soit débattue contradictoirement en audience collégiale.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 11 septembre 2020), la Caisse d'assurance vieillesse des pharmaciens (la caisse) a décerné, le 15 octobre 2018, à Mme [X] (la cotisante), exerçant la profession de biologiste non-médecin, non-salarié, une contrainte pour avoir paiement des cotisations et majorations de retard afférentes au second semestre de l'année 2018.

2. La cotisante a formé opposition à cette contrainte devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Sur les premier, troisième et quatrième moyens, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, le premier étant irrecevable et les autres n'étant manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

4. La cotisante fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de renvoi en audience collégiale, alors « qu'en matière de procédure orale, le refus d'une partie d'être entendue à juge unique et son souhait de renvoi à l'audience collégiale peuvent être présentés au jour de l'audience ; qu'en ayant jugé le contraire, aux motifs inopérants du dépôt d'un calendrier de procédure, de la nécessité de respecter le contradictoire et du principe de loyauté des débats, quand la collégialité est de droit pour une partie qui doit expressément y renoncer, ce qu'elle peut parfaitement refuser de faire le jour de l'audience, la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 945-1 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 945-1 du code de procédure civile :

5. Il résulte de ce texte que si le magistrat chargé du rapport peut tenir seul l'audience, c'est à la double condition de constater que les avocats ou les personnes qui ont qualité pour présenter des observations orales ne s'y opposent pas et d'entendre les plaidoiries.

6. Pour rejeter la demande de renvoi en audience collégiale, l'arrêt relève que les parties ont été avisées par ordonnance de fixation du 1er octobre 2019 que l'affaire était inscrite au rôle d'une audience devant le magistrat rapporteur et que la cotisante qui a accusé réception de cette ordonnance n'a demandé le renvoi en audience collégiale qu'en réponse à la demande de l'intimée présentée lors de l'audience du 4 juin 2020 d'écarter des débats les pièces et conclusions transmises la veille. Il retient qu'une telle demande de renvoi se heurte au principe de loyauté des débats.

7. En statuant ainsi, alors que l'opposition des parties à la tenue de l'audience devant un juge rapporteur peut être présentée le jour même de l'audience et qu'une partie ne peut être privée de son droit à ce que l'affaire l'opposant à son adversaire soit débattue contradictoirement en audience collégiale, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Leblanc - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Melka-Prigent-Drusch -

Textes visés :

Article 945-1 du code de procédure civile.

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