Numéro 10 - Octobre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 10 - Octobre 2020

SPORTS

1re Civ., 7 octobre 2020, n° 19-18.135, (P)

Cassation partielle partiellement sans renvoi

Football – Agent sportif – Contrat – Régime juridique – Forme électronique – Validité – Signature électronique – Nécessité

Activité physique et sportive – Agent sportif – Mandat – Validité – Conditions – Existence d'une signature – Caractérisation – Message électronique

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 16 mai 2019), rendu sur renvoi après cassation, (1re Civ., 11 juillet 2018, pourvoi n° 17-10.458, publié), la société AGT UNIT, dont le gérant, M. K..., est titulaire d'une licence d'agent sportif, a assigné la société AS Saint-Etienne en paiement d'une certaine somme représentant le montant d'une commission qu'elle estimait lui être due en vertu d'un mandat reçu de cette société par échange de courriels, aux fins de négocier avec le club de football de Dortmund le transfert d'un joueur, ainsi qu'en allocation de dommages-intérêts.

Sur le moyen relevé d'office

2. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu les articles L. 222-17 du code du sport, 1108-1 et 1316-1 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, 1316-4, devenu 1367 du même code, et 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

3. Selon le premier de ces textes, le contrat en exécution duquel l'agent sportif exerce l'activité consistant à mettre en rapport les parties intéressées à la conclusion d'un des contrats mentionnés à l'article L. 222-7 du code du sport est écrit.

4. Aux termes du deuxième, lorsqu'un écrit est exigé pour la validité d'un acte juridique, il peut être établi et conservé sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 1316-1 et 1316-4 susvisés.

Selon le troisième, l'écrit sous forme électronique vaut preuve à la condition que son auteur puisse être dûment identifié et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité.

Selon le quatrième, la signature nécessaire à la perfection d'un acte juridique identifie celui qui l'appose et manifeste le consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte et lorsqu'elle est électronique, elle consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache.

5. Il en résulte que, si le contrat en vertu duquel l'agent sportif exerce son activité peut être établi sous la forme électronique, il doit alors être revêtu d'une signature électronique.

6. Cependant, si celle-ci constitue l'une des conditions de validité du contrat, son absence, alors que ne sont contestées ni l'identité de l'auteur du courriel ni l'intégrité de son contenu, peut être couverte par une exécution volontaire du contrat en connaissance de la cause de nullité, valant confirmation, au sens du dernier des textes susvisés.

7. Pour rejeter les demandes de la société AGT UNIT, l'arrêt se borne à retenir que les courriels échangés entre les parties, non dotés d'une signature électronique, ne répondent pas aux conditions d'exigence de validité de l'écrit électronique, de sorte que la société AGT UNIT ne peut se prévaloir d'un mandat conforme à l'article L. 222-17 du code du sport.

8. En statuant ainsi, alors qu'elle avait préalablement constaté que M. Q..., en sa qualité de directeur général et membre du directoire de la société AS Saint-Etienne, avait le pouvoir d'engager celle-ci et de prévoir l'objet du mandat donné à M. K..., sa durée et sa rémunération, que, le 27 juin 2013, la société AS Saint-Etienne avait ainsi donné mandat à M. K..., jusqu'au 29 juin 2013 à minuit, de mener les négociations avec le club allemand de Dortmund pour procéder à la mutation définitive d'un joueur, avec une commission de 5 % de l'indemnité de mutation, majorée de 15 % de la survaleur supérieure à 15 000 000 euros, que ce mandat avait été transmis à la Fédération française de football et que, par échange de courriels du même jour, le mandat de M. K... avait été prorogé au dimanche 30 juin 2013 à 18 heures, ce dont il résultait que les parties avaient mis à exécution le contrat, en dépit de l'absence d'une signature électronique, ce qui valait confirmation, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

11. Il y a lieu de dire que du fait de la confirmation intervenue, le contrat de mandat conclu le 27 juin 2013 entre la société AGT UNIT et la société AS Saint-Etienne n'encourt pas la nullité.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable la demande en paiement de la société AGT UNIT, l'arrêt rendu le 16 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi du chef de la validité du contrat de mandat conclu le 27 juin 2013 entre la société AGT UNIT et la société AS Saint-Etienne ;

Dit que ce contrat n'encourt pas la nullité ;

Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Montpellier, mais seulement pour qu'elle statue sur les autres points en litige.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Kloda - Avocat général : M. Chaumont - Avocat(s) : SCP Colin-Stoclet ; SCP Rousseau et Tapie -

Textes visés :

Article L. 222-17 du code du sport ; articles 1108-1 et 1316-1 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; article 1316-4, devenu 1367, du code civil.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 11 juillet 2018, pourvoi n° 17-10.458, Bull. 2018, I, n° 134 (cassation).

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