Numéro 10 - Octobre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 10 - Octobre 2020

SANTE PUBLIQUE

1re Civ., 15 octobre 2020, n° 20-14.271, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Lutte contre les maladies et les dépendances – Lutte contre les maladies mentales – Modalités de soins psychiatriques – Admission en soins psychiatriques à la demande d'un tiers ou en cas de péril imminent – Procédure – Appel du ministère public – Absence du ministère public à l'audience – Lecture des réquisitions par le premier président – Possibilité

Il résulte de l'article R. 3211-21 du code de la santé publique que le premier président, saisi de l'appel d'une décision du juge des libertés et de la détention rendue en matière de soins psychiatriques sans consentement, peut statuer hors la présence du ministère public, partie principale en sa qualité d'appelant, en donnant connaissance oralement de ses réquisitions écrites.

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Poitiers, 6 mars 2020), et les pièces de la procédure, Mme Q... a été admise en soins psychiatriques sans consentement le 25 février 2020, sur décision du directeur de l'établissement prise au motif d'un péril imminent, en application de l'article L. 3212-1, II, 2°, du code de la santé publique.

2. Le 28 février, ce dernier a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande aux fins de prolongation de la mesure sur le fondement de l'article L. 3211-12-1 du même code.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en leur première branche, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

4. Mme Q... fait grief à l'ordonnance de rejeter les irrégularités de procédure soulevées, de déclarer régulière la procédure suivie en application des dispositions de l'article L. 3212-1, II, 2°, du code de la santé publique et d'ordonner la poursuite de son hospitalisation complète, alors :

« 2°/ que le ministère public est tenu d'assister à l'audience des débats lorsqu'il est partie principale, ce qui est notamment le cas lorsqu'il interjette appel ; qu'il résulte des mentions de l'ordonnance attaquée que le ministère public - en la personne du procureur de la République de La Rochelle ou du procureur général de Poitiers - n'a pas comparu à l'audience du 6 mars 2020 ; qu'en statuant hors de sa présence, le délégué du premier président a méconnu les exigences de l'article 431 du code de procédure civile.

3°/ que, lorsqu'il est partie jointe, le ministère public peut faire connaître son avis à la juridiction, soit en lui adressant des conclusions écrites qui sont mises à la disposition des parties, soit oralement à l'audience ; qu'en statuant au visa des réquisitions écrites du procureur général en date du 5 mars 2020, lequel n'était pas représenté à l'audience, sans constater que lesdites réquisitions avaient été mises à la disposition de Mme Q... afin qu'elle puisse y répondre utilement, le délégué du premier président a violé les articles 16 et 431 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article R. 3211-7 du code de la santé publique, la procédure judiciaire pour connaître des mesures de soins psychiatriques sans consentement est régie par le code de procédure civile sous réserve des dispositions de la section III du chapitre I du titre I du livre deuxième consacré à la lutte contre les maladies mentales.

6. Selon l'article R. 3211-21 du même code, la comparution des parties devant le premier président, statuant en appel d'une décision du juge des libertés et de la détention, est facultative, celles-ci pouvant demander à être entendues ou faire parvenir leurs observations par écrit, auquel cas il en est donné connaissance aux parties présentes à l'audience. Lorsqu'il n'est pas partie principale, le ministère public fait connaître son avis dans les conditions définies par le deuxième alinéa de l'article 431 du code de procédure civile.

7. Le premier président pouvait dès lors statuer hors la présence du ministère public, partie principale en sa qualité d'appelant, en donnant connaissance oralement à l'audience de ses réquisitions écrites.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen, pris en ses troisième et quatrième branches

Enoncé du moyen

9. Mme Q... fait le même grief à l'ordonnance, alors :

« 3°/ que dans le cas d'une hospitalisation complète pour péril imminent, le directeur de l'établissement d'accueil informe dans un délai de vingt-quatre heures, sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l'objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l'intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l'existence de relations avec la personne malade antérieures à l'admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celle-ci ; qu'en retenant, pour écarter toute irrégularité sur ce point, que le docteur F... indique que toutes les démarches entreprises pour contacter des personnes justifiant de relations antérieures à l'admission leur donnant qualité pour agir sont restées vaines et que la consultation du répertoire de contacts du téléphone portable de Mme Q..., outre le fait qu'elle pourrait être considérée comme une atteinte à la vie privée, n'est pas de nature à donner la garantie que les contacts s'y trouvant soient des personnes ayant qualité pour agir dans son intérêt, le délégué du premier président n'a pas caractérisé des difficultés particulières empêchant le directeur de l'hôpital Marius Lacroix d'informer les proches de Mme Q... de son admission en hospitalisation complète en violation de l'article L. 3212-1 II 2°du code de la santé publique ;

4°/ que dans le cas d'une hospitalisation complète pour péril imminent, le directeur de l'établissement d'accueil informe dans un délai de vingt-quatre heures, sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l'objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l'intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l'existence de relations avec la personne malade antérieures à l'admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celle-ci ; qu'il appartient au directeur d'établissement de justifier qu'il a correctement exécuté cette obligation d'information et non au patient de démontrer que tel n'est pas le cas ; qu'en retenant, pour écarter toute irrégularité sur ce point, que Mme Q... ne contredit pas l'indication du docteur F... selon laquelle toutes les démarches entreprises pour contacter des personnes justifiant de relations antérieures à l'admission leur donnant qualité pour agir sont restées vaines, le délégué du premier président a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1353 du code civil, ensemble l'article L. 3212-1, II, 2°, du code de la santé publique. »

Réponse de la Cour

10. Selon l'article L. 3212-1, II, 2°, du code de la santé publique, lorsqu'il prononce une décision d'admission pour péril imminent, le directeur de l'établissement informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille du patient et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l'intéressé, ou, à défaut, toute personne justifiant de l'existence de relations avec la personne malade antérieures à l'admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celle-ci.

11. L'ordonnance relève, d'une part, que Mme Q... a affirmé, lors de son audition, qu'elle n'avait plus aucune famille et qu'elle ne bénéficiait d'aucune mesure de protection juridique, d'autre part, que, dans son certificat établi le 26 février 2020, le médecin a indiqué, sans être contredit, que toutes les démarches entreprises pour contacter des personnes justifiant de relations antérieures à l'admission et leur donnant qualité pour agir étaient demeurées vaines, enfin, que la consultation du répertoire de contacts du téléphone portable de Mme Q..., outre qu'elle pouvait être considérée comme une atteinte à sa vie privée, n'était pas de nature à donner la garantie que les contacts s'y trouvant correspondaient à des personnes habilitées à agir dans l'intérêt de celle-ci.

12. En l'état de ces énonciations, le premier président a, sans inverser la charge de la preuve, caractérisé les difficultés particulières rencontrées pour informer un proche de Mme Q... de la mesure d'hospitalisation prise à son égard.

13. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

14. Mme Q... fait le même grief à l'ordonnance, alors « que l'autorité administrative qui prend une mesure de placement ou de maintien en hospitalisation sans consentement d'une personne atteinte de troubles mentaux doit, d'une manière appropriée à son état, l'informer le plus rapidement possible de cette décision, de sa situation juridique et de ses droits ; qu'en retenant, pour écarter toute irrégularité sur ce point, que, le délai de moins de quarante-huit heures entre la décision d'hospitalisation sous contrainte prise le 25 février 2020 et sa notification à Mme Q... le 27 février 2020, apparaît un délai raisonnable au regard des constatations cliniques sur l'état d'agitation de la patiente à son admission, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le certificat médical des vingt-quatre heures démontrait qu'elle n'était toujours pas en état de recevoir cette signification plus tôt, le délégué du premier président a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3211-3 du code de la santé publique. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3211-3, alinéa 3, du code de la santé publique :

15. Selon ce texte, toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques sans consentement est informée le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission, ainsi que des raisons qui la motivent.

16. Pour dire la procédure régulière, l'ordonnance retient que la décision d'hospitalisation sous contrainte prise le 25 février 2020 a été notifiée à Mme Q... le 27 février et que le délai de moins de quarante-huit heures, au regard des constatations cliniques sur l'état d'agitation de la patiente à son admission, apparaît un délai raisonnable ne caractérisant pas une irrégularité sanctionnable.

17. En statuant ainsi, sans rechercher, comme il y était invité, si le certificat médical des vingt-quatre heures établissait que Mme Q... se trouvait alors dans un état tel qu'elle ne pouvait être informée de la décision d'admission, le premier président a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

18. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

19. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que les délais légaux pour se prononcer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle déclare le procureur de la République de la Rochelle recevable en son appel, l'ordonnance rendue le 6 mars 2020, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Poitiers ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Feydeau-Thieffry - Avocat(s) : SCP Claire Leduc et Solange Vigand ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Article 431 du code de procédure civile ; article R. 3211-21 du code de la santé publique.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 16 décembre 2015, pourvoi n° 15-12.400, Bull. 2015, I, n° 331 (cassation sans renvoi) ; 1re Civ., 24 mai 2018, pourvoi n° 17-21.057, Bull. 2018, I, n° 98 (cassation sans renvoi).

1re Civ., 15 octobre 2020, n° 20-15.691, (P)

Cassation sans renvoi

Lutte contre les maladies et les dépendances – Lutte contre les maladies mentales – Modalités de soins psychiatriques – Droits des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques – Demande de mainlevée de la mesure – Procédure devant le juge des libertés et de la détention – Défense au fond – Définition – Irrégularité d'un certificat médical – Irrégularité ayant eu pour effet de porter atteinte aux droits du patient

Le patient qui invoque le caractère tardif d'un certificat médical mensuel établi en application de l'article L. 3213-3 du code de la santé publique doit, pour obtenir la mainlevée de la mesure de soins le concernant, prouver que cette irrégularité a eu pour effet de porter atteinte à ses droits, conformément à l'article L. 3216-1 du même code.

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 26 février 2020), et les pièces de la procédure, M. B... a présenté des troubles psychiatriques qui ont motivé des soins sans consentement, tantôt sous le régime d'une hospitalisation complète, tantôt en soins ambulatoires, sous la forme d'un programme de soins. Une ordonnance du premier président de la cour d'appel du 28 décembre 2018, qui avait rejeté les conclusions de nullité aux fins de mainlevée de la mesure de réadmission en hospitalisation complète décidée par le préfet le 7 décembre 2018 et constaté que l'appel était devenu sans objet, a été cassée sans renvoi (1re Civ., 21 novembre 2019, pourvoi n° 19-17.941).

Par un arrêté du 27 janvier 2020, le préfet a maintenu pour six mois le programme de soins décidé le 25 octobre 2019.

2. Le 31 janvier 2020, en application de l'article L. 3211-12-1 du code de la santé publique, M. B... a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande de mainlevée de la décision de réintégration en hospitalisation complète décidée le 7 décembre 2018. Devant le premier président, il a également demandé la mainlevée de la mesure de soins en cours.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui sont irrecevables.

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. B... fait grief à l'ordonnance de rejeter les moyens de procédure soulevés aux fins de mainlevée de la mesure de soins, alors « que selon l'article L. 3211-3 du code de la santé publique, dans le mois qui suit l'admission en soins psychiatriques décidée en application du présent chapitre ou résultant de la décision mentionnée à l'article 706-135 du code de procédure pénale et ensuite au moins tous les mois, la personne malade est examinée par un psychiatre de l'établissement d'accueil qui établit un certificat médical circonstancié confirmant ou infirmant, s'il y a lieu, les observations contenues dans les précédents certificats et précisant les caractéristiques de l'évolution des troubles ayant justifié les soins ou leur disparition ; ce certificat précise si la forme de la prise en charge du malade décidée en application de l'article L. 3211-2-1 du présent code demeure adaptée et, le cas échéant, en propose une nouvelle ; lorsqu'il ne peut être procédé à l'examen du patient, le psychiatre de l'établissement établit un avis médical sur la base du dossier médical du patient ; la computation légale des délais de procédure, ne sont pas applicables à celle du délai prévu à l'article L. 3213-3 du code de la santé publique, qui ordonne un examen médical mensuel du patient admis en soins psychiatriques sans consentement sur décision du représentant de l'Etat, cette obligation étant de nature administrative non contentieuse ; que l'article L. 3213-3 du code de la santé publique fixe une périodicité d'ordre public dont le non-respect cause nécessairement grief à l'intéressé et doit entraîner la levée de la mesure, sans que le juge puisse rechercher s'il y a ou non eu un grief causé aux droits de l'intéressé ; qu'en retenant pour écarter les moyens de procédure soulevés qu'il n'est pas établi que les irrégularités soulevées ont véritablement fait grief à l'intéressé en l'ayant empêché de faire valoir utilement ses droits, le premier président de la cour d'appel a méconnu les dispositions des articles L. 3213-3 et R. 3211-7 du code de la santé publique. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article L. 3213-3 du code de la santé publique, dans le mois qui suit l'admission en soins psychiatriques sans consentement sur décision du représentant de l'Etat et ensuite tous les mois, la personne malade est examinée par un psychiatre de l'établissement d'accueil qui établit un certificat médical circonstancié confirmant ou infirmant, s'il y a lieu, les observations contenues dans les précédents certificats et précisant les caractéristiques de l'évolution des troubles ayant justifié les soins ou leur disparition.

6. Selon l'article L. 3216-1 du même code, l'irrégularité affectant une décision administrative de soins sans consentement n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.

7. Après avoir constaté que les certificats médicaux des 29 août et 28 novembre 2018 étaient tardifs au sens de l'article L. 3213-3 du code de la santé publique, l'ordonnance relève qu'ils n'ont été pris qu'avec quelques jours de retard et n'ont fait que prévoir la poursuite de la mesure de programme de soins en cours, sans aggraver la contrainte exercée sur le patient, lequel n'a fait l'objet d'une hospitalisation complète qu'à compter du 7 décembre 2018, sur le fondement d'autres éléments que ces certificats.

8. En l'état de ces constatations et appréciations, le premier président, qui a souverainement apprécié l'absence d'atteinte aux droits de M. B... résultant de la tardiveté des certificats médicaux, en a exactement déduit que l'irrégularité ne devait pas entraîner la mainlevée de la mesure.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

10. M. B... fait grief à l'ordonnance de rejeter sa demande de mainlevée de la mesure de soins en cours, alors « qu'en se déterminant ainsi, sans constater qu'il résultait des certificats médicaux et de la décision du préfet que les troubles mentaux compromettaient la sûreté des personnes ou portaient gravement atteinte à l'ordre public, le premier président n'a pas donné de base légale à sa décision en violation de l'article L. 3213-1. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3213-1 du code de la santé publique :

11. Selon ce texte, le représentant de l'État dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil, l'admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public.

12. Pour rejeter la demande de mainlevée du programme de soins en cours, l'ordonnance retient, d'abord, que les pièces médicales, notamment l'avis motivé en date du 21 février 2020 émanant du docteur R..., mettent en évidence que le maintien de la mesure est nécessaire pour contenir les symptômes de M. B... et pour limiter une rupture de traitement et du suivi, ensuite, que le patient souffre de schizophrénie et présente toujours des éléments délirants enkystés à thème mégalomaniaque et persécutif, enfin, que son fonctionnement social reste plus ou moins adapté. Il en déduit que le programme de soins, qui n'apparaît pas apporter une atteinte disproportionnée aux droits de l'intéressé au regard des objectifs poursuivis, reste nécessaire et doit être maintenu.

13. En se déterminant ainsi, sans constater qu'il résultait des certificats médicaux et de la décision du préfet que les troubles mentaux compromettaient la sûreté des personnes ou portaient gravement atteinte à l'ordre public, le premier président n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

14. Tel que suggéré par le mémoire ampliatif, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

15. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 26 février 2020, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Feydeau-Thieffry - Avocat(s) : SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia ; SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Articles L. 3213-3 et L. 3216-1 du code de la santé publique.

1re Civ., 7 octobre 2020, n° 19-17.041, (P)

Rejet

Protection des personnes en matière de santé – Réparation des conséquences des risques sanitaires – Risques sanitaires résultant du fonctionnement du système de santé – Indemnisation des victimes – Indemnisation par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) – Préjudice économique – Revenus résultant de la réorganisation de l'existence postérieurement au décès (non)

Les nouvelles ressources de l'époux, liées au salaire perçu par sa seconde épouse, suite à son remariage après le décès de sa première épouse, n'ont pas à être prises en compte pour évaluer les préjudices économiques consécutifs au décès de la première épouse, celles-ci résultant de la réorganisation de son existence et n'étant pas la conséquence directe du décès.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 4 février 2019), C... P... est décédée, le [...], à la suite de la réalisation d'une coronarographie.

2. Après une saisine de la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, d'un avis de celle-ci imputant le décès de C... P... à la survenue d'un accident médical grave non fautif indemnisable au titre de la solidarité nationale, et d'un refus de l'offre d'indemnisation amiable adressée par l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM), M. P..., époux de C... P..., agissant en son nom personnel et en qualité de représentant légal de leur fille mineure F..., a assigné celui-ci en indemnisation. Mme O... P..., fille de M. P... et de C... P..., est intervenue volontairement à l'instance.

3. L'indemnisation des préjudices consécutifs au décès de C... P... a été mise à la charge de l'ONIAM sur le fondement de l'article L. 1142-1, II, du code de la santé publique.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. L'ONIAM fait grief à l'arrêt de fixer à certaines sommes les préjudices économiques respectifs de M. P... et Mme O... P..., alors « que les revenus du nouveau conjoint du conjoint survivant de la victime directe d'un accident médical non fautif, d'une affection iatrogènes ou d'une infection nosocomiale dont l'indemnisation a eu lieu au titre de la solidarité nationale doivent être pris en compte pour le calcul du préjudice économique de celui-ci ainsi que de leurs enfants ; qu'en refusant de tenir compte des nouvelles ressources dont pouvait bénéficier M. P... à la suite de son remariage pour calculer son préjudice économique ainsi que ceux de ses filles résultant du décès de sa première épouse et pris en charge par l'ONIAM, la cour d'appel a violé l'article L. 1142-1, II, du code de la santé publique ensemble le principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime. »

Réponse de la Cour

5. L'arrêt retient à bon droit que si, après le décès de sa première épouse, M. P... s'est remarié et bénéficie de nouvelles ressources liées au salaire perçue par sa seconde épouse, celles-ci résultent de la réorganisation de son existence et ne sont pas la conséquence directe du décès, de sorte qu'elles n'ont pas à être prises en compte pour évaluer les préjudices économiques consécutifs au décès de C... P....

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur la seconde branche du moyen, ci-après annexé

7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui est irrecevable.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : M. Mornet - Avocat(s) : SCP Sevaux et Mathonnet ; SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Article L. 1142-1, II, du code de la santé publique ; principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 2 novembre 1994, pourvoi n° 93-12.509, Bull. 1994, II, n° 217 (rejet).

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